Section 2: Approche disciplinaire: mise en perspective des démarches

Les sciences de la communication

Les sciences de la communication se sont constituées à partir de différentes disciplines telles que la linguistique, la sémiologie, la psychologie et la psychologie sociale. Leur champ n'est donc pas strictement défini, pas plus que leur objet. Ne trouve-t-on pas des définitions aussi éloignées que celles proposées par Shannon dans le cadre de la théorie mathématique de l'information (Shannon, 1948), par Bateson (1977) " tout événement qui déclenche une réaction de la part d'un organisme " ou encore par les tenants d'une conception culturaliste pour lesquels les formes et les modes de communication seraient les fondements de toute culture.

La sémiotique

On ne s'étonnera pas que les sciences de la communication, à travers leur diversité, soient évoquées fréquemment lors de l'analyse des NTI et de leurs applications pédagogiques. Tout d'abord, l'argument est trivial, parce qu'enseigner est aussi communiquer. Ensuite parceque la sémiotique a par définition vocation à s'intéresser aux différents langages: le langage verbal, certes, mais aussi les langages cinématographique ou photographique, les représentations scriptovisuelles, les graphiques, les schémas et les dessins, etc. En cherchant à comprendre le fonctionnement de diverses représentations matérielles, la sémiotique s'articule et à la psychologie cognitive et à la didactique. La première s'intéresse aux représentations mentales et à la façon dont est codifiée l'information en mémoire. Une meilleure compréhension des rapports entre les représentations matérielles et mentales devrait permettre de préciser la conception qui voudrait que l'homme soit un animal symbolique et donc que son système cognitif soit principalement un système de sémiotisation conçu pour produire du sens et des différences (Groupe naissances et à la validité de celle-ci, ne peut plus ignorer ni les mécanismes à l'oeuvre dans les représentations figurées (imagerie scientifique, schémas, etc.) ni la façon dont celles-ci sont lues, comprises et utilisées par les apprenants (De Corte, 1993; Baillé et Maury, 1993).

* Baillé & Maury (Ed.) (1993) - Les représentations graphiques dans l'enseignement et la formation. Les sciences de l'éducation pour l'ère nouvelle, 1-3.

* De Corte, E. (Ed.) (1993) - Comprehension of graphics in Texts. Learning and Instruction, Vol. 3, nۣ.

* Groupe m, (1992) - Traité du signe visuel. Pour une rhétorique de l'image. Paris: Seuil, La couleur des idées.

La pragmatique du discours

La pragmatique étudie principalement les effets du langage et les situations d'énonciation. Toute communication comporte et un contenu et un aspect relationnel. Celui-ci s'exprime essentiellement par les formes analogiques de la communication: intonation vocale, mimiques, regards, attitudes posturales, déplacements dans l'espace et indices proxémiques, rituels divers, etc. (Palo Alto, Gofman, 1974). De plus, la structure des échanges verbaux - dialogique ou conversationnels - implique une régulation qui répond à des règles implicites (Grice, 1979) et à de nombreuses procédures de " désambiguïsation " (Anscombre & Ducrot, 1983). Enfin, parmi les conditions qui permettent d'assurer la réussite d'un acte de communication, il faut encore compter la construction d'un contexte ou d'une culture de référence commune aux interlocuteurs, d'une représentation de l'autre, des rôles de chacun des interlocuteurs, etc. (Recanati, 1980, Flahaut, 1979). Tels sont les apports qui permettent la modélisation des situations de communication pédagogique - médiatisée ou non -, autrement dit des interactions verbales entre les différents acteurs du processus de formation/apprentissage (enseignants/apprenants, apprenants/apprenants, tuteurs/ apprenants, etc.). Comme pour les sciences de l'éducation, il existe dans ce champ disciplinaire une relation symétrique entre les modèles théoriques et le développement de systèmes. Certains auteurs comparent différents médias selon le coût nécessaire pour lever l'ambiguïté d'une assertion ou pour changer d'interlocuteur. Inversement, les systèmes de CMC (Computer Mediated Communication) permettent d'étudier plus systématiquement certains de ces facteurs, tels que le rôle du contact visuel, l'impact du synchronisme de la communication, etc.

* Anscombre, J.C. & Ducrot, O. (1983) - L'argumentation dans la langue, Liège: Mardaga.

* Flahaut, Fr. (1979) - Le fonctionnement de la parole. Communications, 30, pp.73-79.

* Goffman, E. (1974) - Les rites d'interaction, Paris: Minuit.

* Grice, P.H. (1979) - Logique et conversation, Communications, N° 30, 57 - 72

* Recanati, F. (1980) - Les niveaux de l'analyse pragmatique. Documents du Centre international de sémiotique et de linguistique de l'Université d'Urbino, 94.

* Sperber, D. & Wilson, D. (1989) - La pertinence. Paris:Minuit.

La linguistique computationnelle

A mi-chemin entre NTI et sciences de la communication, on peut enfin citer les travaux sur la linguistique computationnelle. Ceux-ci ont permis, d'une part, d'opérationnaliser certains concepts linguistiques et, d'autre part, de concevoir des interfaces plus robustes. La contribution de la linguistique dans la conception des interfaces ne se limite pas aux techniques de traitement du langage naturel. Elle permet aussi de décrire d'autres formes d'interactions en terme d'actes de langage (Austin, 1962): par exemple, la visualisation sur une interface graphique des actes gestuels d'un interlocuteur.

* Austin, J.L. (1962) - La philosophie analytique. Les cahiers de Royaumont, nۤ, Paris: Minuit.

* Bateson G. (1977) - Vers une écologie de l'esprit, Vol. I. Paris, Seuil.

* Shannon, C. and Weaver, W. (1976) - La théorie mathématique de l'information. Paris: Retz.

La sémiotique
La pragmatique du discours
La linguistique computationnelle

La recherche en Suisse sur les NTI appliquees a la formation - 14 DEC 1995

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