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chapitre 4 La modélisation des processus cognitifs

4-5.4 La modélisation de relations constitutives en politique


David Sylvan et Stephen Majeski (Sylvan et Majeski 94, Majesky et Sylvan 93) modélisent la constitution de décisions par un groupe de décideurs partageant une certain "culture" de décision commune. Ils postulent que la politique de sécurité des Etats-Unis est, depuis la deuxième guerre mondiale, le fruit du travail d'un petit groupe de décideurs relativement autonome et largement cohésif. Ils ont en commun une culture sur la diplomatie et la guerre qui est caractérisée par une philosophie de "problem solving", d'argumentation et de "gestion d'empire" (cf. Majeski et Sylvan 93: 3). Cette "culture de résolution de problèmes" se caractérise par trois aspects: la construction de recommendations (pour une politique), le choix entre recommendations (pour une politique) et la réouverture d'un débat (en faveur d'une autre politique).

Les auteurs accordent une grande importance aux relations constitutives, c'est-à-dire "how phenomena are put together so as to comprise other phenomena" (Majeski et Sylvan 93: 0). Leur objet d'analyse n'est pas le processus cognitif, mais les "théories sur le monde" exprimées verbalement par les décideurs. La catégorie analytique centrale est la "recommendation" qui possède la forme d'une énumération de problèmes de décision et de possibles solutions. Certaines recommendations concernent la politique courante, d'autres font référence à d'autres recommendations (c'est-à-dire l'adoption potentielle d'autres politiques). Les recommendations font partie d'une ligne de politique (angl. "policy line"). Ces lignes sont constituées ou abandonnées pendant des phases de décision (angl. "policy making phases") qui peuvent durer entre quelques heures et plusieurs mois. Souvent, des lignes de politiques alternatives peuvent subsister, il s'agit d'évocations parmi les alternatives virtuelles de l'espace de politiques (angl. "policy space"). Elles sont accompagnées de recommendations qui militent pour l'abandon de la politique couramment adoptée.

La technique de modélisation utilisée s'inspire d'une "herméneutique" de production de texte par transformation de texte. Autrement dit, la logique de modélisation est la suivante: on essaie de reconstruire les grammaires avec lesquelles les décideurs construisent le monde, c'est-à-dire comment ils définissent des phénomènes à l'aide d'objets et de relations, comment ils les traitent en y associant d'autres constructions symboliques et en en construisant de nouvelles.

Les opérations de prise de décision sont des opérations sur des textes (tels que enlèvements, copies, insertions, combinaisons). Une première volée de simulations prend comme input des descriptions de situations empiriques pour en créer des recommendations de politiques. La qualité de simulation est très bonne: Dans 81 cas sur 86 modélisés les recommendations produites par le système correspondent aux recommendations empiriques. Une deuxième volée très récente travaille avec des situations contre-factuelles et donnera sans doute des bons résultats prédictifs. Ce type de modélisation a permis aux auteurs de formuler une théorie pertinente sur la nature de la prise de décision dans le milieu des décideurs de la politique de sécurité et de formuler avec précision une étude de la politique des Etats-Unis au Vietnam. Cette étude est intéressante sur le plan méthodologique pour deux raisons: Le modèle possède une très bonne fiabilité avec les données empiriques et il ne possède aucune prétention sur les processus cognitifs de décision, tout en sauvegardant la dimension de contenus interprétés, produits et communiqués par des agents humains.


THESE présentée par Daniel Schneider - 19 OCT 94
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