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chapitre 4 La modélisation des processus cognitifs

4-5.5 La modélisation du décideur individuel et collectif


Notre modélisation de l'application d'une loi par une instance de décision administrative (chapitre 5 "La modélisation d'une décision administrative par le génie cognitif" [p. 165]), ainsi que d'autres modélisations comme PIE ou JESSE, montrent qu'il est possible et utile d'avoir recours aux techniques IA pour construire des modèles du décideur politique. Toutes ces modélisations montrent qu'il faut choisir le bon niveau d'abstraction (la profondeur et la "granularité" de modélisation) et qu'il convient d'utiliser des techniques IA adaptées à chaque type de décision, quitte à utiliser des techniques hybrides.

La modélisation des décisions qui font référence à des règles (dans le monde réel) comme la mise en oeuvre d'une loi est certainement plus simple que la modélisation de la "grande politique". Cette dernière ne suit pas forcément des règles précises et ce qui est paradoxalement plus difficile: elle fait référence à la "pensée commune". Toute modélisation (IA ou non) est beaucoup plus simple lorsqu'il s'agit d'un domaine structuré où "interprétation", "croyances", "bon sens" etc. jouent un rôle moins important. De plus, la "grande politique" se caractérise aussi par sa fonction intégratrice des sous-systèmes politiques et sociaux avec leurs "langages" très spécialisés. Un gouvernement par exemple doit raisonner à l'intérieur (et sous contrainte) de l'économie, du droit, de l'idéologie et d'une logique de rapports de forces politiques (parlement, groupes de pression, électorat) etc. Comme le montre le modèle JESSE, il est possible de modéliser la politique d'un gouvernement à un certain niveau d'abstraction, mais il sera sans doute impossible de faire des modèles globaux au niveau de l'analyse de la psychologie de l'information.

La valeur prédictive de la plupart des modèles est assez faible sur une période plus longue. Cela ne tient, à notre avis, pas seulement au niveau actuel des techniques de modélisation. Ce reproche peut être adressé à l'ensemble des sciences sociales. Peu de changements politiques, économiques ou sociaux majeurs ont été prédits par des théories jusqu'à présent. Il y a tout simplement trop de variables à gérer et on ne sait pas bien comment elles sont connectées lorsque le système étudié est sous pression*1 ou lorsqu'il change d'état. En termes systémiques, il est possible de décrire un système en équilibre relatif, mais impossible de dire ce qui se passe après un déséquilibre car le système se réorganise et ceci selon des principes incontrôlables.

Un premier pas pour améliorer la qualité prédictive des modèles du décideur est d'y inclure son environnement de décision. En jouant sur les paramètres de l'environnement et en l'insérant dans un modèle de système d'acteurs, on peut tester un modèle de façon plus systématique. En même temps, le modéliseur doit expliciter ses a-priori en ce qui concerne la nature de l' "input" que le modèle est capable de digérer. Cela sera le sujet du chapitre chapitre 6 "Le décideur, son organisation et son environnement" [p. 223].


THESE présentée par Daniel Schneider - 19 OCT 94

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