chapitre 5 La modélisation d'une décision administrative par le génie cognitif
Règle:
SI <faits juridiques> ALORS <conséquence juridique>
Ce principe est très simple. Toutefois, les notions de "fait juridique" ou de "conséquence juridique" ont une signification très large. Par exemple, un fait juridique peut concerner d'autres règles, des décisions d'institutions, des faits au sens propre du terme, etc. Une conséquence juridique peut avoir des effets sur d'autre règles, sur le comportement de personnes, etc. Dans le cadre d'un raisonnement juridique, appliquer une règle juridique signifie la transposition d'une décision en quelque sorte inhérente vers un cas concret. Le processus de déduction va donc de l'abstrait vers le concret et du général vers le particulier.
L'essentiel de ce raisonnement déductif
peut être exprimé avec un syllogisme simple comme dans la figure 5-1: il contient 2 prémisses et une conclusion. La première clause est appelée "prémisse majeure". Elle contient la règle juridique, c'est-à-dire un ensemble de faits juridiques et un ensemble de conclusions (dispositif juridique). La seconde clause sert à mettre en correspondance des faits concrets et des faits juridiques. Dans le cas de ce syllogisme simple, on peut dire que le raisonnement juridique consiste à trouver une règle qui peut être appliquée à des faits.
En réalité, le raisonnement juridique est beaucoup plus complexe. Il nécessite l'enchaînement de syllogismes juridiques. Les conditions de la plupart des règles exigent explicitement ou implicitement l'application d'autres règles. Donc, outre le problème de la mise en correspondance de faits juridiques et de faits réels, il faut trouver une chaîne de raisonnement juridique. Il existe plusieurs méthodes pour enchaîner l'application de règles juridiques: les deux les plus fréquantes correspondent aux chaînages avant et arrières déjà discutés dans chapitre 4 "La modélisation des processus cognitifs".
La première méthode (le chaînage avant) consiste à identifier les faits juridiques élémentaires qui découlent directement de la description d'un cas et ensuite de voir ce qu'ils impliquent. On part de la description des cas pour aboutir à une "qualification" juridique de ces faits empiriques. Cette procédure est efficace si l'on soupçonne déjà le type de solution et si l'on possède une description complète du cas qui permet de déduire tous les faits juridiques élémentaires nécessaires à l'aboutissement du raisonnement. Le danger de cette méthode réside à faire un grand nombre de conclusions inutiles avant d'arriver à la conclusion finale qu'il nous faut.
La deuxième méthode consiste à utiliser une procédure de chaînage arrière. On tente d'abord d'identifier la ou les règles les plus générales dans le code juridique. Ensuite, on cherche d'autres règles qui permettent de prouver les conditions de ces règles. On continue récursivement ce processus jusqu'à ce qu'on aboutisse aux faits empiriques. Cette méthode est efficace si le nombre de solutions (conclusions juridiques) n'est pas trop élevé et/ou si les règles possèdent une organisation hiérarchique comme c'est fréquemment le cas en droit.
Il va de soi que l'on peut combiner ces deux méthodes. Dans les modèles Lex discutés dans ce chapitre, nous utiliserons essentiellement une forme statique de chaînage arrière avec quelques éléments de chaînage avant pour diriger la recherche.
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