A chaque instant, notre organisme reçoit
de son environnement une multitude de stimulations appelées "signaux
sensoriels". Un signal sensoriel en entrée de nos systèmes
sensoriels fait l'objet d'une détection par des récepteurs
spécialisés, puis d'un stockage dans des registres de l'information
sensorielle (RIS). Notre capacité d'attention joue un rôle
important dans le processus d'extraction de l'information. Par exemple,
parmi toutes les conversations qui se tiennent autour de nous dans une
foule ou une fête, nous sommes capable d'isoler les informations
qui se rapportent dans une seule conversation, et de naviguer d'une conversation
à une autre sans trop d'interférences.
La mémoire sensorielle est automatique.
De plus, il en existe autant qu'il existe de sens, autrement dit: il existe
autant de mémoires sensorielles que de modalités sensorielles.
Les mémoires sensorielles visuelles
et auditives ont particulièrement fait l'objet de nombreuses études
expérimentales. Neisser nomme ces mémoires respectivement:
mémoire iconique et mémoire échoïque.
LA MEMOIRE ICONIQUE:
Le premier registre sensoriel étudié
fut le registre visuel. Déjà en 1889, Wundt formulait l'hypothèse
de l'existence de registres de ce type, mais c'est à Sperling que
nous devons l'astuce d'avoir découvert le moyen de mesurer la mémoire
sensorielle visuelle. L'expérience de Sperling consiste à
présenter un tableau de 12 lettres pendant une durée de 50
milisecondes. Afin de contrôler que le sujet regarde bien là
où l'information va être présentée, on lui demande
de fixer un point qui apparait au milieu de l'écran juste avant
l'affichage du tableau. Immédiatement après la disparition
du tableau, le sujet doit rappeler les lettres dont il se souvient (rappel
globale). Dans ces conditions, la capacité moyenne de la mémoire
immédiate des sujets est de quatre à cinq lettres.
Pour tester l'existence d'un registre sensoriel
visuel dans lequel seraient stockées plus de lettres que les sujets
ne peuvent en rappeler, Sperling introduisit une condition dans laquelle
on présente les mêmes tableaux de lettres pendant la même
durée, mais où on demande le rappel des lettres appartenant
à une seule ligne du tableau. La ligne à rappeler est désignée
par un signal sonore après la disparition du tableau. Les sujets
ont en moyenne trois lettres par ligne à rappeler. Puisqu'il y a
trois lignes par tableau, les sujets sont donc capables de rappeler en
moyenne neuf lettres. Si on ramène ces neufs lettres aux quatre
environ de la première condition, on constate qu'on stocke en réalité
plus d'information qu'on ne peut en rappeler verbalement avant son effacement
de la mémoire.
Dans la procédure de rappel partiel
de Sperling, le sujet ignore quelle ligne il devra rappeler. Il doit donc
conserver en mémoire l'ensemble du tableau présenté
jusqu'au signal indiquant la ligne à rappeler. Les résultats
trouvés montrent que le nombre de mots rappelés décroît
rapidement lorsque le délai du signal de rappel augmente. La différence
entre les nombres moyens de mots rappelés dans les conditions de
rappel global et de rappel partiel diminue rapidement jusqu'au délai
de 300 ms, et est tout à fait nulle lorsque le délai est
d'une seconde. Autrement dit, au-delà de 300 ms, l'information visuelle
a quitté le registre sensoriel et a transité en mémoire
à court terme, alors que le reste de l'information a été
perdue.
LA MEMOIRE ECHOÏQUE:
En ce qui concerne la mémoire auditive,
Darwin, Turvey et Crowder (1972) proposent une expérience analogue
à celle de Sperling dans le domaine visuel, mais transposée
dans le domaine sonore.
Trois sources sonores différentes sont
présentées au moyen d'un casque stéréophonique.
Ces sources sonores sont mixées de telle sorte qu'une des sources
semblent provenir du coté gauche de la tête du sujet, une
autre du côté droit, et la dernière du milieu (dessus)
de la tête. Chaque source émet une liste de trois items qui
peuvent être des lettres ou des chiffres. Dans la tâche de
rappel global, les sujets doivent rappeler le plus d'items possibles parmi
les neufs donnés à entendre. Dans la tâche de rappel
partiel, un signal visuel indique aux sujets la source sonore à
traiter. Comme dans l'expérience de Sperling, la comparaison des
deux conditions montre que les sujets rapportent en moyenne plus
d'items dans la tâche de rappel partiel que dans la tâche de
rappel global. Ceci nous permet de conclure à l'existence d'un registre
auditif de l'information sensorielle.
Les résultats tropuvés ont montré
que la performance dans la tâche de rappel partiel ne diminue significativement
qu'après un délai de quatre secondes. Un résultat
de deux secondes a toutefois été trouvé dans un paradigme
différent. De manière plus générale, on considère
que des séquences sonores peuvent être conservées en
mémoire échoïque pendant des durées allant de
250 ms à deux secondes
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