Quand un homme et une
femme tombent amoureux l'un de l'autre et ont des relations sexuelles,
il s'établit, entre eux, une relation symbiotique ou fusionnelle.
A ce lien fusionnel s'ajoute un lien narcissique. Les deux amoureux croient
reconnaître dans l'autre, comme dans un miroir, leur double narcissique
de sexe opposé, l'autre idéal de leurs rêves amoureux
et de leurs fantasmes sexuels. Les rapports sexuels sont des relations
d'objet, de complémentarité, mais aussi des relations d'identification
narcissiques projectives. L'homme et la femme réduisent
leur partenaire à n'être que le miroir complaisant qui leur
renvoie l'image de la femme ou de l'homme idéal de leurs fantasmes.
Chacun projette sur l'autre l'objet imaginaire de son désir et l'identifie
à cet objet, si bien que la relation sexuelle ne s'établit
pas entre deux sujets, mais entre deux objets de désir qui sont
eux-mêmes recouverts du fantasme sexuel de l'autre.
La relation sexuelle est une
relation narcissique en miroir dans laquelle chacun croit reconnaître
en l'autre objet imaginaire de son désir et dans laquelle il confond
l'autre réel avec l'image qu'il se fait de lui. Au bout d'un certain
temps, les deux partenaires se rendent compte que l'image qu'ils se font
l'un de l'autre ne correspond pas vraiment à la réalité,
qu'il y a
illusion d'optique.
Si l'un des partenaires se
lasse de jouer ce jeu de séducteur passif dans lequel chacun doit
s'effacer, en tant que sujet, derrière le masque que l'autre lui
applique sur le visage, le charme se rompt, il y a désillusion et
désidéalisation, l'un et l'autre apparaissent dans leur nudité
de sujet, avec leurs qualités et leurs défauts, la différence
entre l'autre idéal et l'autre réel devient évidente
et ne peut plus être niée, c'est l'épreuve de vérité
pour le couple. Le lien amoureux se distend et peut
se rompre, s'il ne se métamorphose pas en lien intersubjectif.
Dans cette relation, devenue asymétrique et indirecte, chacun
reconnaît en l'autre, au-delà de son moi apparent, son être
d'existant qu'il ne peut posséder. L'autre, en tant que sujet
de son existence, s'est lié et se liera à d'autres sujets,
il gardera toujours sa singularité et sa liberté.
La communication intersubjective
n'est jamais complète, une part importante de la subjectivité
de chacun demeure inconnaissable pour soi et pour autrui. Mon être
et celui d'autrui ne se réduisent pas à l'image qu'il se
fait de moi et que je me suis fais de lui.
La relation
intersubjective réunit deux êtres qui s'aiment sans se confondre.
La relation est réversible, l'homme et la femme sont à la
fois désirants et sujets désirés. Pour être
reconnus comme tels par l'autre, ils acceptent de s'identifier à
l'objet phallique du désir comme tels par l'autre, sans s'y aliéner
complètement. |