trois maîtres  du design dans le domaine de la chaussure:
Andre' Perugia
Roger Vivier
 FABRICATION D'UNE CHAUSSURE
 
 
FABRICATION D'UNE CHAUSSURE  
La fabrication d'une chaussure comporte plus d'une centaine d'opérations. La première étape, et la plus importante, est la réalisation de la forme. C'est une réplique du pied, en bois ou en plastique, qui indique la courbe de la voûte plantaire et la manière dont le poids du corps se répartit sur le pied, deux critères essentiels pour assurer le bon niveau de confort ou d'inconfort.  
Q'il s'agisse de la chaussure de production artisanale ou industrielle, la forme est différente pour chaque modèle. La réalisation de la forme demande savoir-faire et sensibilité à la mode. Après avoir pris pas mois de 35 mesures d'une  "empreinte de pied" définissant la répartition du poids du corps, le 
formier évalue la symétrie des orteils, calibre le tour de cou-de.pied et la saillie des orteils, calcule la hauteur du gros orteil et la cambrure du cou-de-pied. Enfin, il évalue le mouvement du pied à l'intérieur de la chaussure.  
Pour le formier, la difficulté consiste à tenir compte de tous ces chiffres sans compromettre la beauté architectonique de la chaussure. Pour une chaussure à talons, il choisit le taille du décolleté en fonction de la dimension de celui-là. Puis il détermine la hauteur du quartier: ni trop haut, pour ne pas frotter les tendons, ni trop bas, pour bien tenir le pied. Le plus important pour le comfort est l'estimation de la cambrure, partie qui comprend la saillie et le cou-de-pied, et qui reçoit tout le poids du corps quand le pied est en mouvement. 
Ensuite, le patronnier découpe l'empeigne suivant la forme, biseaute les bords pour assurer un bon assemblage, et coud ensemble les différents éléments. Puis il fabrique le bout, ajoute le contrefort et imprègne le cuir pour qu'il s'adapte aux contours de la forme. Un maître artisanal soignera le placement de l'empeigne sur la forme, et la tendra fermement avant de la fixer avec des clous. L'empeigne est mise à sécher sur la forme deux semaines, avant la fixation de la semelle et du talon. Enfin vient le  bichonnage: l'artisan taille la trépointe, rogne les talons, polit la semelle et ajoute la première de propreté. Cirée, passée à la peau de chamois, la chaussure est prête à chausser. 
 
 
Ferragamo, dont le nom évoque tout le génie italien, a fabriqué ses premières chaussures à l'âge de neuf ans. Ses parents, pauvres paysans du village de Bonito, ne peuvent offrir de souliers à ses soeurs pour leur première communion. Refusant de les voir porter des sabots à l'église, Salvatore emprunta du matériel au cordonnier du village, et fabriqua lui-même les chaussures. Ayant appris le métier de bottier à Neaples, il ouvrit une boutique à 14 ans dans la maison de ses parents, où il employait six assistants. Il était impossible de trouver dans tout Neaples des chaussures plus inspirées. 
L'ambition le conduit aux Etat-Unis à 16 ans, puis à Hollywood, où Cecil B. De Mille et David Dietrich, Mary Pickford et Greta Garbo lui commandent des chaussures originales pleines d'esprit. Il aime improviser à partir de matériaux inusités, "un cgâle espagnol, un brocart chinois, un coupon ancien". 
 
Il réalise des chaussures en plumes de colibri ou en écorce, sculpte un bout en bec de perroquet, façonne un talon en tire-bouchon et même en pyramide inversée, lors de la vogue égyptienne qui suit la découverte de la tombe de Toutankamon. Mais sa réputation de "bottier des stars" ne le satisfait qu'à moitié. Il ne comprend pas pourquoi des chaussures belles à voir font si mal aux pieds, et va étudier l'anatomie à l'Université de Californie, ou` il apprend que le poids du corps repose sur la voûte plantaire. Après quelques expériences, il réalise un support de voûte en acier qu'il insère dans tous ses modèles. Pour la première fois, des chaussures féminines sont à la fois belles et confortables. 
Il rentre en Italie en 1927, et fonde l'une des plus importantes dynasties de la mode italienne. Installé à Florence, il engage des formiers chevronnés ainsi que des montatori qui positionnent le dessus de la chaussure à la main. 
 
 
 
 L'expertise technique est au coeur de ses préoccupations, et lui vaut une place de choix dans le monde de la mode. La semelle compensée est certainement son invention la plus connue. Pendant la guerre il ne cessera de créer des plate-formes, toutes plus inspirées les unes que les autres. Dans les années 40 et 50, ses chaussures à talon-cages en laiton, à la mule en daim et à la semelle compensées envahissent les magazines de mode. A sa mort en 1960, il laisse 350 modèles brevetés et la réputation d'avoir révolutionné la chaussure moderne. "Je suis heureux d'avoir donné des lettres de noblesse à l'humble métier de cordonnier", écrit dans son autobiographie celui qui a donné un cachet supplémentaire au "Made in Italy". 
Pour visiter le site de Salvatore Ferragamo 
 
 
 
 
 
 
 
Andre' Perugia
Avant Manolo Blahnik ou Robert Clergerie, André Perugia est le premier créateur de chaussures à atteindre la célébrité. Né a Nice en 1893 d'un père cordonnier, Perugia se montre vite prodigieusement doué. Il ouvre une boutique à l'âge de 16 ans et se fait rapidement un nom, imaginant de nouveaux talons en forme de tiges pour des chaussures qui surpasseront bientôt les modèles de son père en art, en audace et en prix. Cependant, l'argent n'a jamais été une motivation pour lui.   
"La femme la plus riche du monde ne pourrait pas me payer suffisament pour lui faire une chaussure laide", disait-il souvent. De cette quête de beauté, Perugia fera l'ambition première de sa vie. Il fabrique sur mesure des escarpins et des sandales en peau de serpent et diamants, en daim violet, en chevreau doré ou lézard incrusté de perles. Les femmes du monde qui affluent chaque hiver sur  la Côte D'Azur sont éblouies par les créations de cet homme superbe, plein de vivacité et de charme. Mais c'est sa rencontre avec le grand couturier Paul Poiret qui lui assure le succès. A la fin de la Première Guerre mondiale, Poiret lui propose de créer des modèles pour ses collections. Perugia, qui a ouvert entre-temps une boutique Faubourg St-Honoré, accepte. Parmi ses clientes figurent des étoiles des Folies Bergères et des actrices de  cinéma. Elles attendent de leurs chaussures qu'elles rappellent leur glamour sur scène. Perugia ne les déçoit pas. Ses modèles sur mesure sont presque d'authentiques portraits de ses clientes. Toujours curieux, il crée pendant 50 ans des chaussures d'une stupéfiante originalité, s'associant successivement à I. Miller et à Charles Jourdan. Il parle à ses chaussures, et sa réputation d'excentrique s'ajoute à celle de génie. Dans son livre D'Eve à Rita Hayworth, il explique que les pieds d'une femme sont le révélateur secret de sa personalité. Bien sûr, si ces pieds sont chaussés de sandales Perugia, l'observateur en conclura que pour cette femme le séduction n'a pas de prix.
 
 
 
 
              Roger Vivier    
 
 
 
   Roger Vivier est le Fabergé de la chaussure. Depuis 60 ans, il réinvente avec génie notre vision du chaussant. Légères et décoratives, ses créations ont tout le charme du XVIII siècle mais sont très contemporaines, au point même de faire appel aux principes modernes de l'aéronautique et de l'ingénierie. Vivier a étudié la sculpture à l'Ecole des Beaux-Arts de Paris et ses compositions présentent un souci de forme et de texture caractéristiques d'un sculpteur. En 1937, il ouvre son propre atelier et commence à travailler pour des marques internationales comme I.Miller, Delman, Bally ou Rayne. Il entre chez Dior en 1953 et les dix années de leur collaboration sont une époque dorée pour la mode de la chaussure. Chez Vivier, c'est souvent le talon qui attire l'oeil. La chaussure prend alors le nom de la forme imitée: virgule, bobine, boule, aiguille, pyramide ou escargot. Pour Marlène Dietrich, Vivier dessine un étroit talon haut dont la pointe traverse une boule couvert de strass. Quant aux "virgules", elles sont aujourd'hui encore moulées par une société d'ingénierie aéronautique, dans un alliage d'aluminium ultraléger conçu pour les turbines d'avion. Les chaussures de Vivier doivent tout à leur ligne, qu'il conçoit d'abord à l'aide de maquettes en papier. Les ornaments viennent après et il n'est pas rare qu'un talon s'orne de plumes de martin-pêcheur ou d'une broderie de perles. Pour le couronnement de la reine Elizabeth en 1953 ,l'une de ses plus prestigieuses commandes, Vivier réalisa des talons en chevreau doré semés de grenats. Au fil des années, il a créé des modèles sur mesure pour des personnalités aussi célèbres que Josephine Baker,   Jeanne Moreau, Catherine Deneuve, et les Beatles. 
"Mes chaussure sont des sculptures" dit-il, et il est vrai qu'elles figurent dans les musées du monde entier. "Elles sont fondamentalement françaises, une alchimie d'élégance parisienne".