La grammaire génératrice de Thorndyke (présentée déjà
dans le chapitre 2) s'est inspiré de la grammaire de Rummelhart
(75), et elle est un peu dépassé de nos jours.
Elle est également un peu trop
simple pour être appliquée à une grande variétée de récits.
Toutefois elle permet d'introduire l'instrument
méthodologique de grammaire et de discuter ainsi déjà quelques points
intéressants.
Un autre caractère intéressant vient du fait qu'elle à
été présentée avec
un texte politique.
Je me propose de discuter cette grammaire à travers l'analyse du même
récit politique "Une histoire de vente d'immeubles" (cf. le
récit Ia dans l'appendice) afin
d'initier le lecteur d'une manière détaillée à ce type d'instrument
d'analyse.
Dans le processus d'analyse (comme la théorie le dit pour
le processus psychologique) une grammaire génératrice est plutôt
utilisée d'une manière de "haut en bas".
L'analyste
essaye en règle générale de suivre les grandes lignes d'un récit.
Lorsqu'une
histoire est rencontrée le schéma d'analyse est utilisé pour
faire des prédictions sur ce qu'il va arriver.
Dans ce cas il est
possible de traduire un événnement narratif en un élément terminal
de la grammaire, en occurence "event" ou "state".
Bien sûr, il existe des risques d'erreurs:
On essaye d'appliquer une fausse règle
au texte, ou le texte nous fait croire à un faux élément
terminal.
Dans ce cas là il faut rebrousser chemin
("backtracker") et essayer d'autre règles.
Ici je vais présenter une solution juste.
Pour commencer l'analyse de
l'histoire de vente d'immeubles 1, on "prend" comme d'habitude la
règle de base de la grammaire:
"STORY -> SETTING + THEME + PLOT + RESOLUTION".
Comme toute histoire devrait d'abord définir
les lieux et les personnages, etc.
on s'occupe d'abord de l'element "SETTING".
Selon la règle 2
"SETTING" définit d'abord les
personnages, puis le lieu, puis le temps.
Cette règle est quelque peu
mal formulée chez Thorndyke.
L'ordre qu'elle exige est en effet
irréaliste.
Je la remplace par SETTING -> CHARACTERS, TIME,
LOCATION, laissant l'ordre des éléments ouvert.
Dans l'histoire analysée, "SETTING" correspond aux phases 1-3.
Elles introduisent d'abord le lieu (la
Suisse) et le décrivent brièvement.
Ensuite les
personnages principaux (les gens de la montagne et les gens de
ville) sont introduites et grosssièrement caractérisés.
On poursuit alors l'analyse en se préoccupant du thème.
Figure: La grammaire de Thorndyke: L'analyse du récit 1a
Le thème symbolisé pas "THEME"
définit le but principal de l'intrigue, c'est-à-dire
celui du protagoniste.
Le but "GOAL" est présente dans le cas normal après une suite
d'événements.
Dans notre cas les phrases 4-7 relatent les événements historiques qui
ont fait apparaitre la nécessité de sauvegarder le patrimoine
suisse.
Ce but de sauvegarder de la phrase 8 constitue le but du récit entier.
Les événements qui le provoquent (4-5) comprennent
le développment du tourisme, et son effet sur les montagnards (6),
puis finalement son effet sur les gens des villes (7).
On arrive alors à l'intrigue principale décrite par le "PLOT". Dans le cas de notre histoire très simple l'intrigue se résume aux phrases 10-11. On notera que même dans les contes de fées, récits simples également, "PLOT" est sousdifferencié en un certain nombre d'"EPISODES" parfois imbriqués hiérarchiquement. Ceci dit que l'intrigue de notre récit est vraiment simple. Lors de l'analyse de "PLOT" dans notre histoire on rencontre quelques problèmes de codage. En effet il manque des éléments prévus par la grammaire. Cela n'est pas forcement fatal à la compréhension du récit. Un récepteur normal connait bien les mécanismes instrumentaux de la politique. Il n'est pas toujours nécessaire de mentionner des sousbuts qui sont instrumentaux dans un plan. Si maintenant nous nous concentrons sur les sousdivisions de plot on trouve un premier "EPISODE". Il consiste en phrase 9, du passage d'une loi (action) et en 10 du mécontement des montagnards. Le résultat de cet épisode est un succès mixte. On a crée la loi, mais en craint le conflit qui en résulte. Le deuxième "EPISODE" a pour but implicite d'appaiser les ésprits en faisant en (11) des concessions. Le résultat immédiat n'est pas tres explicite, mais correspond à (11c). Enfin notre histoire se termine par la "RESOLUTION" (12) qui décrit l'état final des acteurs. Comme pour beaucoup d'histoires politiques Suisses, il n'y a ni gagnant ni perdant explicite. Mais les gens de la ville ont toutefois réussi à partiellement atteindre leut but.
On voit bien que la séquence but-action-résultat définit en
grande partie la structure d'une histoire.
Dans la grammaire de
Thorndyke il y a d'abord le triplet "THEME" (avec le but) + "PLOT" +
"RESOLUTION".
Ensuite "PLOT" consiste en une succession d'épisodes que l'on peut
décomposer en "SUBGOAL" + "ATTEMPT" + "OUTCOME".
De ces trois éléments l'
"ATTEMPT", la tentative, peut elle-même
contenir en lui-même presque tout un récit, ce
qui s'exprime au niveau de la grammaire par le fait qu'elle peut être
reécrite en plusieurs épisodes.
On le verra plus tard qu'un récit peut aussi être compris comme
structure symbolique qui trace des efforts de resolution de problème
complexes par des acteurs.
Ceci se reflète dans le él'ements thème, résolution, sousbut,
tentative, résultat.
Nous allons brièvement discuter le résultat de l'analyse
à la fin de ce chapitre.