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29. Exemple d'analyse de la décision - EDA

29.7 Un exemple (Création de la Lex VonMoos /Furgler)

Un exemple: En Suisse, en 1960, plusieurs groupes sociaux et politiques auraient aimé instaurer un système pour contrôler, diminuer ou interdire l'acquisition d'immeubles par des étrangers

Par ailleurs, beaucoup de gens étaient opposés à toute limitation de la liberté du commerce. L'affaire a été portée devant le parlement fédéral et il a été proposé d'instituer une législation réglant la matière.

Dans la discussion très animée qui s'est ensuivie, un grand nombre des dimensions du problème ainsi que d'éventuelles solutions ont été discutées (voir page suivante).

Parmi les participants à la discussion au parlement, plusieurs façons de représenter le problème sont apparues. Toutefois proposants et opposants ont structuré leur argumentation selon certaines lignes principales.

Les avocats d'une solution législative ont eu tendance à rendre le problème de l'acquisition des immeubles très important et croyaient au succès éventuel d'une législation en la matière. Dans leur argumentation, des effets secondaires négatifs ont été exclus par l'attribution ou d'une valeur négative très petite ou d'une valeur neutre ou encore d'une probabilité très basse.

Les adversaires ont soit nié le problème (c'est-à-dire l'utilité de l'acte), soit attribué des valeurs très négatives aux effet secondaires.

Cette discussion sommaire montre que le choix n'est qu'une composante parmi d'autres dans un processus de décision. La perception et la présentation du problème sont tout aussi importantes que les choix, si ce n'est plus importantes.

On voit également très bien qu'un problème est mis en rapport avec une vision du monde. Donc parler du choix, sans parler de la vision du monde qui est derrière n'a pas beaucoup de sens, car on choisit (explicitement) seulement parmi les options qu'on se met soi-même à sa disposition ou qui sont imposées par d'autres participants au processus de décision. .

A. Résumé de la discussion au parlément

	dimensions:	résultat:	valeur:	probabilité: 

argumentation des adhérents:

	résultats principaux:

	"Vente de la patrie"	arrêtée	+++	élevée 
	indépendance nationale	sauvée	+++	élevée 
	protection de la nature	un peu	+	élevée
	protection des sites	un peu	++	élevée
	spéculation	un peu	+	élevée

	effets secondaires:

	constitutionnalité	non violée	+	élevée 
	procédure de consultation	rapide	0	1 
	liberté du commerce	faible restriction	0	1 
	droit international	faible incompatibilité	--	basse 
	commerce international	faible restriction	-	1 

argumentation des opposants:

	"Vente de la patrie"	arrêtée	+	moyenne 
	constitutionnalité	violée	---	1 
	procédure de consultation	restrictions	-	1 
	liberté du commerce	restrictions	---	1 
	droit international	incompatible	---	élevée 

Problèmes avec une table synthétique:

B. Réduction de la complexité dans la chronologie

(1) Le Conseil fédéral, après une brève présentation de l'historique des événements, fait part de sa perception du problème. Le Conseil fédéral justifie l'idée d'une restriction de l'acquisition d'immeubles par des étrangers avec de simples arguments binaires: notre économie sera affaiblie si rien n'est fait (problème principal). Des avertissements à des vendeurs suisses ont été ignorés (donc des instruments para-légaux ne fonctionnent pas). Des restrictions limitées sur des opérations immobilières étrangères sont justifiées si elles protègent le bien public (donc quelques effets secondaires doivent être acceptés). En somme, le problème est réduit au simple problème sans incertitude suivant: la valeur d'un acte légal est supérieure à la valeur d'une non-action.

(2) Une fois que cette réduction est acceptée comme valable (ce qui s'est produit), la discussion peut porter dans une deuxième étape sur les moyens légaux à employer. L'arbre de décision donne une partie de l'argumentation: Les stratégies S1 à S3 sont exclues soit par manque d'efficacité (les résultats ont une valeur totale basse), soit par une valeur négative forte. La stratégie S4, c'est-à-dire un acte légal instaurant un régime d'approbation, est jugée préférable sous réserve de sa constitutionnalité et de sa conformité au droit international.

(3) Dans une troisième étape, la constitutionnalité et la conformité au droit international seront discutées. Comme il n'existe pas de tribunal constitutionnel, la constitutionnalité est une affaire politique. Pour contourner le problème du droit international, le parlement décidera d'associer les sujets (assujettis au régime) aux personnes ayant un domicile à l'étranger. Les étrangers habitant la Suisse seront associés aux Suisses. Cette solution a été déclarée la seule possible tout en ayant des effets secondaires négatifs qui ont d'ailleurs été corrigés dans une certaine mesure au niveau des ordonnances d'application de la loi.

Cet exemple montre bien que dès qu'un problème atteint une certaine complexité, il est traité en plusieurs étapes, chacune réduisant la complexité des choix à faire. Pour chacune de ces étapes, différentes règles de décision ont été utilisées. Ces règles s'utilisent selon la façon de présenter le problème, comme nous allons le voir maintenant.

C. Voila le résumé

stratégie:

résultat:

valeur globale

probabilité:

S1: interdiction de revente

anti-spéculation seulement

basse

haute

S2: restriction sur des prêts

S2a: gentlemen's agreement

ne concerne peu de transactions

basse

basse

S2b: restriction légale

idem

négative

donc pas examinée

S3: droit de préemption

S3a: achat et garde

nationalisation

négative

idem

S3b: achat et vente ensuite

cher

négative

idem

S4: régime d'approbation

efficace, mais ralentit affaires

positive

(sous réserve)

haute