Résumé.
De nombreuses institutions s'intéressent actuellement au
développement
de formations "en ligne": systèmes informatiques visant au
pilotage
de formations (sur site ou à distance), production de ressources de
formation,
pour un accès libre ou une mise à disposition en direction de
publics
ciblés...
On peut se demander dans quelle mesure le recours à des Technologies
Nouvelles
constitue une réponse adéquate à un ensemble de
questions qui,
fondamentalement, ne sont pas de nature technique:
- en quoi l'usage de ces technologies permet de mieux adapter
l'enseignement aux
besoins du public ciblé,
- quelles procédures viennent étayer l'activité des
usagers
dans leurs processus d'appropriation des connaissances,
- quelles méthodes et quels outils permettent d'évaluer les
compétences
acquises.
Compte tenu des investissements en jeu, il est nécessaire d'aborder
ces questions
dans des partenariats nationaux et européens. Il est alors
nécessaire
d'élaborer des consensus sur les méthodes, les contenus, les
aspects
techniques, les usages...
Ces questions seront abordées dans la présentation de
différents
projets :
- un projet "Université en Ligne - Premier Cycle Sur
Mesure" soutenu
par le Ministère de l'Education Nationale de la Recherche et de la
Technologie,
et développé par 11 Universités françaises
(regroupées
dans le RUCA),
- un projet de líInstitut Polytechnique de Turin qui développe des
tests automatiques
pour le contrôle des connaissances de ses étudiants,
- un projet européen Léonardo pour l'Accréditation des
Compétences
en Sciences Physiques (Université de Provence à Marseille,
Institut
Polytechnique de Turin et Université de Barcelone).
L'objectif est d'ouvrir les problématiques de chacun de ces projets,
d'établir
entre eux des synergies, de renforcer les échanges et les approches
communes,
en utilisant les TIC comme de support de réflexion et de
production.
Jean-Paul
COSTE. |
Alberto
TAGLIAFERO |
1. Problématique.
2. Université en Ligne : projet PCSM.
3. Evaluation des connaissances.
4. Evaluation et auto-évaluation des
compétences.
5. Perspectives.
Líorganisation des études dans
l'Enseignement Supérieur
voit la coexistence de différentes modalités díorganisation :
cours
magistraux, travaux dirigés, travaux pratiques, mais aussi des
enseignements
du type "projet d'étude" (où les étudiants
choisissent
eux-mêmes un thème de travail quíils développeront avec
une plus
grande autonomie et selon des méthodes plus variées) et des
"stages"
se déroulant en dehors de líInstitution de formation (qui permettent
aux étudiants
de se former au travers d'une première expérience
professionnelle)...
Un contexte de projet personnel, de stage, ou d'expérience à
réaliser,
repose sur l'idée d'une tâche à accomplir : en
surmontant les
obstacles inhérents à cette tâche, les étudiants
peuvent
acquérir des connaissances et des compétences nouvelles dans
un ensemble
de domaines. Les travaux dirigés ou les cours magistraux jouent sur
d'autres
registres. Les étudiants peuvent y trouver un réel plaisir,
comprendre
ce quíils níavaient pas compris jusquíalors, ou comprendre pourquoi ils
níavaient
pas compris...
Quelle que soit la modalité de travail se posent les mêmes
questions
: dans quelles conditions est-on capable de comprendre une théorie
ou une
situation nouvelle, díen mesurer les obstacles, de les surmonter,
díacquérir
une meilleure connaissance et de nouvelles compétences... et que
signifie
cette notion de compétence ?
A l'évidence, ces processus sont complexes, en particulier ceux par
lesquels
s'acquièrent des compétences, ceux par lesquels des
connaissances acquièrent
du sens. Il síagit à la fois de processus individuels impliquant un
travail
du sujet sur ses propres représentations, et de processus collectifs
par lequel
ces connaissances entrent en communication avec toute une communauté
: elles
acquièrent du sens pour cette communauté par échanges
et confrontations.
Il serait donc absurde díocculter líun ou líautre de ces deux aspects,
cíest-à-dire
líaspect individuel et líaspect de socialisation.
Ces remarques préliminaires permettent de situer le niveau de notre
intervention.
S'il est utile de concevoir et de mettre en oeuvre des outils
díautoformation et
díautoévaluation, la question de la formation níest pas
réductible
à une question technique (et ne recevra donc pas de solution
purement technique)
: il est nécessaire de concevoir des outils et des méthodes,
mais aussi
les conditions díusage de ces outils.
Dans cet esprit, nous allons présenter
trois projets
:
- Le premier projet "Université en Ligne. Premier Cycle Sur
Mesure"
(désigné par le sigle PCSM) a été conduit par
un partenariat
de 11 Universités Françaises regroupées dans le
"Réseau
Universitaires des Centres d'AutoFormation" (RUCA).
- Le second projet a été mis en oeuvre par l'Institut
Polytechnique
de TURIN pour l'évaluation de ses Etudiants.
- Le troisième projet vise la réalisation d'un automate pour
l'évaluation
(ou l'accréditation) des compétences en Sciences Physiques.
Il est
coordonné par l'Université de Provence - Marseille, avec pour
partenaires
l'Institut Polytechnique de Turin et l'Université de Barcelone, dans
le cadre
d'un projet européen Léonardo.
Nous verrons que les problématiques de ces projets convergent dans une philosophie commune, ce qui permettra d'établir des synergies, de renforcer les échanges et les approches communes, où les TIC interviendront comme de support de réflexion, de production et de médiation.
Ce projet, élaboré par le RUCA il y a trois ans environ, a reçu dès le départ le soutien des chargés de missions aux Nouvelles Technologies (Madame Maryse Quéré, puis Monsieur Laurent Petit) du Ministère de l'Education Nationale de la Recherche et de la Technologie. Les financements obtenus ont contribué à l'investissement de chacune des Universités partenaires, et ont finalement permis le succès de cette opération. Actuellement, treize modules d'enseignement (en Mathématique, Physique, Chimie, Biologie) de 1° année d'enseignement supérieur ont été produits sous la forme de ressources multimédia. Ces ressources seront utilisées et expérimentées cette année non seulement dans les onze Universités co-productrices mais aussi dans une dizaine d'autres Universités après signature d'une convention d'expérimentation. D'autres sont en cours de préparation qui complèteront l'offre au niveau du 1° cycle scientifique de l'enseignement supérieur.
Ce projet repose sur l'idée simple qu'il est parfois insuffisant qu'un enseignant enseigne... aussi brillant soit-il, si son domaine d'intervention se limite à l'exposé de contenus. Dans la réalité des situations, il s'avère parfois indispensable de proposer d'autres modalités de transfert des connaissances, où sont davantage pris en considération le cursus antérieur des étudiants, leurs désirs ou leurs besoins spécifiques, leurs rythmes d'acquisition... A ce prix peut-on espérer renforcer l'adhésion des étudiants au dispositif de formation et améliorer la transition de l'enseignement secondaire vers l'enseignement supérieur par une meilleure intégration des objectifs.
Il est alors indispensable d'avoir à sa disposition un ensemble de ressources de formation utilisables dans des contextes variés : formation initiale, formation continue, à distance... et de définir des méthodes et des conditions institutionnelles s'appuyant sur un usage de ces ressources. On peut noter aussi que la présentation d'expériences réelles ou sous forme de vidéo numérisées ou de simulations présentent un intérêt certain dans le cadre d'un exposé magistral.
Dans toutes les Universités membres du RUCA, des dispositifs d'AutoFormation ont été mis en place dans lesquels les étudiants peuvent venir travailler de façon autonome (sous forme de libre-service), ou bien lors de séances encadrées par des tuteurs ou par des enseignants (séances incluses dans l'emploi du temps).
Les enseignants définissent alors des stratégies de formation qui síappuient sur l'usage des ressources multimédia mises à leur disposition. Ils définissent des activités à réaliser par leurs étudiants et animent des séances de travail. Dans ce contexte, leur rôle consiste davantage à aider les étudiants dans les aspects méthodologiques (en les aidant dans la reformulation de leurs questions, dans l'acquisition d'une vision synthétique du problème, etc...), plutôt que dans la résolution d'un problème à leur place...
En réalité, ces pratiques communes et l'échange sur ces pratiques à l'intérieur du RUCA ont permis l'élaboration de consensus, dans les différentes phases du projet (définition des objectifs, du cahier des charges, des choix techniques, des délais et coûts de production, des partenariats de co-production, des contenus, des méthodes, des objectifs de diffusion...) et la structure du RUCA (son chef de projet, son bureau, ses responsables de commissions dans chacune des disciplines) a permis un fonctionnement ouvert et collaboratif.
Nous allons préciser les termes de ces
consensus
sous les aspects suivants :
a- choix de structure et ergonomie générale
b- définition des catégories de contenus et
d'activités et ergonomie
cognitive
c- partenariats de co-production et production des contenus.
La structure et la forme adoptée pour les développements répondent à des objectifs précis quant à l'usage des ressources. Par exemple, la volonté de pouvoir disposer de ressources utilisables sous tout système d'exploitation, en centre de ressources, en Intranet ou Internet, ou sur CDRom ont conduit au choix d'un système développé en html et JavaScript. Les formats choisis pour les vidéos numérisées ou les animations (QuickTime) ainsi que les simulations (JAVA) répondent à cette même exigence.
Le choix d'html répond aussi à une autre logique : une structure de liens hypertextuels (en forme de réseau) matérialise les relations entre différents éléments de contenus : ces éléments peuvent être de nature homogène (par exemple, relations entre éléments théoriques traités dans différents chapîtres) ou de nature hétérogène (tel élément théorique peut être relié à telle application ou à telle auto-évaluation, telle simulation peut donner lieu à telle activité ou être explicitée par tel contenu théorique).
Dans ces conditions, la navigation entre différents éléments de contenus s'apparente au processus de pensée lui-même, par lequel les informations prennent du sens. D'une certaine façon, cette structure est la représentation métaphorique de ce processus.
L'ensemble des modules a été réalisé sur ce même modèle et avec une ergonomie commune, ce qui peut aider les usagers dans leur recherche d'information et dans l'élaboration de leur stratégie personnelle.
Un autre consensus a été défini relatif aux catégories de contenus et aux types d'activités cognitives à développer. Ces catégories (dénommées apprendre, simuler, observer, s'exercer, s'évaluer) répondent à l'objectif d'avoir à sa disposition un ensemble complet de contenus permettant au tout moment de répondre à une demande spécifique de l'usager et en même temps de satisfaire un ensemble d'objectifs de formation. La rubrique "observer" par exemple ne remplacera jamais la réalisation d'une expérience mais elle permet, au moins, de visualiser telle expérience, d'en extraire les éléments signifiants, de relier ces éléments avec telle simulation sur le même thème, simulation qui à son tour peut constituer une p remière étape d'un processus de modélisation ou représenter une démarche de représentation du problème ou le processus même de modélisation.
Cette démarche reste ouverte aussi bien du point de vue de l'étudiant que de l'enseignant. Chaque enseignant peut utiliser ces ressources, ajouter lui-même tel complément de contenu ou utiliser les ressources existantes dans telle activité nouvelle qui n'aurait pas été prévue par les auteurs. Chaque enseignant peut ajouter des guides d'études à destination de ses propres étudiants. Ces guides sont réalisables très simplement sous la forme de liens hypertextuels qui pointent vers des contenus ou des activités spécifiques, et qui constituent le fil directeur évitant qu'un étudiant ne se perde dans une navigation ou des digressions sans fin.
La fonctionnalité des liens hypertextuels autorise enfin une grande variété d'accès à l'information, sous forme de menus déroulants, d'index, de thèmes... Les thèmes, en particulier constituent une lecture transversale des contenus. Tel concept (prenons par exemple celui de "conservation") qui se trouve développé à différents niveaux et sous différents chapitres acquiert un statut spécifique s'il est présenté comme un thème et si cette présentation permet de relier les différents éléments qui lui donnent corps au travers des différentes catégories de contenus et d'activités. Cette démarche contribue à l'élaboration par l'usager d'une vision synthétique et d'une représentation structurée des contenus.
Dans chacune des disciplines, la démarche de production a été précédée par un travail en commission qui a permis de définir un consensus sur les contenus qui devaient être développés. A titre d'exemple, un module spécifique d'outils mathématiques a été réalisé pour répondre aux exigences des physiciens et des chimistes, les contenus de chacun des modules ont été discutés à l'intérieur de chaque commission de discipline. Une règle simple a été adoptée : une Université responsable d'un module devait nécessairement travailler de façon inter-universitaire...
Ces choix, qui ont été validés, ont fait la preuve d'une certaine efficacité et ont fait aussi apparaître quelques difficultés d'ordre technique : il est nécessaire d'avoir à sa disposition une structure minimale de production et une structure d'échange qui permet de trouver des solutions collectives aux problèmes généraux, de répondre à des demandes spécifiques ou dans certains cas, bien identifiés, d'avoir recours à des procédures de sous-traitance.
Avec le recul, se dégage un aspect incontournable : un projet de co-production doit être sous-tendu par des consensus forts de la part de l'ensemble des partenaires, l'ensemble des problèmes doivent être abordés de façon ouverte, chacun doit accepter les contraintes définies de façon collective ainsi qu'un retour critique sur ses propres réalisations... A ce titre, un projet d'"observatoire des usages" a été mis en place par le RUCA, qui permettra l'expression de ce retour c ritique aussi bien de la part des étudiants eux-mêmes que de la part des enseignants qui participent à une première expérimentation des outils et des méthodes pédagogiques.
Le projet du Politecnico de Turin a été motivé par l'exigence d'évaluer plus efficacement que d'ordinnaire le niveau de connaissances acquis par les étudiants et en même temps de réaliser un outil qui puisse donner une base objective à l'évaluation même. En effet quand on a affaire à des grands nombres d'étudiants les examens deviennent une sorte de jugement de Dieu où l'émotivité et le hasard jouent un rôle plus ou moins important. En outre une école (quel qu'en soit son niveau) a toujours le problème de définir la qualité et la quantité des connaissances qu'elle se propose de délivrer à ses élèves et de vérifier ce qu'ils acquièrent réellement. Cela signifie qu'il est nécessaire d'individualiser des standards vérifiables d'enseignement.
De plus, il y a une demande croissante de
formation à
domicile ou à distance ou de formation permanente pour des gens qui
sont déjà
sortis du circuit scolaire et, compte tenu de la compétition entre
différentes
structures formatives (même au niveau Européen), il est
possible de
s'adresser à des écoles éloignées de son propre
lieu
de résidence. Cette situation pose des problèmes à
l'égard
des modalités didactiques, de la vérification et
l'accréditation
formelle des résultats.
L'idée centrale du projet est très simple: il s'agit de
réaliser
un stock le plus étendu possible de questions auxquelles les
étudiants
devraient savoir répondre et qui puissent leur être
proposées.
Les questions doivent couvrir le mieux possible toute l'étendue
d'une discipline
et si leur origine est une pluralité d'enseignants experts, elles
constituent
en fait le standard vérifiable mentionné plus haut. La base
de données
qui contient les questions est partitionnée suivant les
différents
secteurs de la discipline dont on veut vérifier les connaissances
acquises.
Indépendamment de leur contenu disciplinaire les questions sont
ultérieurement
groupées en trois catégories: questions pour vérifier
la possession
de certaines notions (questions du type A); questions dont la
réponse requiert
des capacités déductive et logiques (questions du type B);
questions
qui demandent d'effectuer des calculs pour arriver à un
résultat quantitatif
(questions du type C).
Une fois que la base de données est établie, on y ajoute un algoritme qui permet de choisir les questions au hasard pour les présenter au candidat au test. En réalité le choix n'est pas entiérement au hasard, puisqu'on pose des contraintes: a) les questions doivent se distribuer uniformément sur toute la matière; b) la moitié des questions posées en total doit être du type A, un tiers du type B et le reste (1/6) du type C.
Il y a plusieures modalités de saisie des réponses, mais, pour le moment, la plus simple a été choisie, c'est à dire que les questions sont toutes a réponse multiple dont seulement une est correcte. Le test standard utilizé jusqu'à présent est composé de 30 questions et a une durée maximum d'une heure; chaque étudiant travaille à un ordinateur et reçoit un test individuel indépendant de celui des autres.
On a expérimenté cette méthode pendant l'année courante sur les étudiants d'un cours de physique de la deuxième année de la "laurea" (titre obtenu après 5 ans d'études) des ingénieurs du Politecnico de Turin et sur ceux de deux cours successifs de diplome (3 ans d'études, niveau équivallent au DEUG français). Dans le premier cas il s'agissait de volontaires pendant une session d'examen, dans le second la totalité des étudiants a étée impliquée pendant cinq sessions. On a en premier lieu vérifié que le résultat de chaque test individuel est à peu près le même, soit qu'on le mesure par le nombre de réponses exactes soit par le pourcentage des points obtenus par respect au total à disposition (1 point pour les question du type A, 2 pour le B, 3 pour le C): cela signifie que le mécanisme de choix des questions est raisonablement équilibré. Les résultats individuels obtenus ont été contrôlés, dans un bon nombre de cas, par un exposé direct : l'évaluation donnée par l'examinateur a été en bonne correspondance avec celle fournie par l'automate. On a aussi vérifié que les étudiant ont en général préféré la méthode automatisée à celle traditionnelle: quel que soit le résultat du test, chaque étudiant conserve le droit à un examen direct par son enseignant, mais presque personne ne l'a spontanément choisi.
Il est important souligner que le test automatique ne s'est nullement montré plus facile a passer que l'examen traditionel. Le graphique ci dessous en donne une idée: il représente la distribution cumulative des notes proposées par l'ordinateur dans le cas des étudiants de diplome. La note maximum est 30, le seuil pour satisfaire au test est 18; comme on peut voir, la distribution est assez régulière et la note plus fréquente est 17. Le graphique inclut le cas de ceux qui se sont soumis au test plus d'une fois avant de le passer.
Distribution cumulative des notes en Physique (Diplome, toutes sessions de 1999)
Naturellement les résultats qui sont disponible immédiatement après la conclusion du test permettent aisément de faire des élaborations statistiques, de se faire une idée d'ensemble des connaissance acquises par tout un groupe d'étudiants, de comparer des groupes qui ont étudié sur des textes différents ou bien suivant des méthodes différentes, etc. On obtient de même le profil de chaque étudiant qui permet de percevoir à coup d'oeil si le sujet est plus faible dans le champ des notions, dans la capacité déductive ou dans celle pratique de calcul, et tout cela séparement pour les différentes partie de la discipline testée. Ci dessous on a un example de profil d'un étudiant visualisé sous forme de graphique tridimentionnel.
Le nombre d'étudiants assujettis a ce
genre de
test va croître à quelques centaines dès novembre 1999,
ce qui
permettra d'améliorer toutes les statistiques et de mieux calibrer
l'évaluation
individuelle. Entre temps l'algoritme de choix des questions sera
modifié
pour permettre des parcours logiquement enchaînés : la
première
question est proposée au hasard, la deuxième dépend de
la réponse
qui a été choisie. La chaîne des questions peut en
principe avoir
n'importe quelle longueur. Ce procédé simule
évidemment l'allure
d'un examen oral. Jusqu'à présent, un seul niveau
d'enchaînement
a été réalisé et avec un effectif
limité, mais
ces épreuves deviendront systématiques dès janvier
2000.
Il est à mentionner que l'outil qui a été décrit a été pensé pour le WEB. Pour le moment les épreuves ont été effectuées dans l'enceinte de Turin et avec la ville d'Alessandria. En janvier 2000 on gérera depuis Turin des tests en Sardaigne et à Athénes.
Cette expérience en vraie grandeur permet de préfigurer le fonctionnement de l'outil d'accréditation des compétences réalisé en partenariat dans le cadre du projet Européen Léonardo.
Nous allons revenir maintenant sur une question, évoquée en début de cette présentation, qui concerne la notion de compétence scientifique, voire de "compétence transversale". Dans l'enseignement supérieur, tout au moins, on peut constater que les stratégies de formation se préoccupent en général assez peu de cet aspect. On peut le comprendre assez bien par le fait que les connaissances scientifiques sont très bien structurées et peuvent, de ce fait, apparaître comme suffisantes pour définir des objectifs de formation ainsi que l'évaluation des étudiants, occultant ainsi la notion de compétence. Dans les contextes professionnels par contre, ou en formation professionnelle, la situation est moins claire et une réflexion sur les compétences liées au poste de travail a pu se développer plus largement.
Livrons nous ensemble à l'exercice suivant
: que
dirions nous de nos propres compétences ?
Que nous les avons acquises, tout au long de notre vie, en intégrant
une diversité
de savoirs, de savoir-faire, une pluralité de champs de
connaissances théoriques
et pratiques. Que nous les avons acquises dans une variété de
contextes,
de pratiques et de processus, en exerçant un regard critique sur nos
propres
connaissances confrontées à des situations souvent
imprévues...
La compétence se construit ainsi : par des rapports, par une
expérience
et par une expérimentation sur le monde réel qui lui
confèrent
une dimension modélisatrice.
La validation des compétences ne peut donc pas se traiter sur un
mode simplement
cumulatif : encore faut-il considérer les processus qui sont
à l'oeuvre
aussi bien dans l'acquisition de nouvelles compétences et
connaissances, que
pour la résolution de situations complexes.
Le modèle de la compréhension que nous avons formalisé
concerne
les Sciences Physiques : il s'agit par exemple d'élaborer et de
mettre en
oeuvre un ensemble de liens signifiants entre concepts, modèles,
théories,
entre domaines de connaissances, savoirs techniques et situations modélisées
par ces connaissances. Mais ce modèle déb
orde largement ce champ díapplication
: considérant la compétence de façon transversale, on
peut identifier
des processus (de pensée et d'action) à forte
stabililté, indépendants
(ou presque) du champ d'application et constituant, en quelque sorte, des
"invariants
de traitement". Ce modèle reste cependant ouvert et peut
s'élargir
selon des dimensions qui pourraient intervenir dans d'autres domaines que
ceux que
nous avons pris en considération.
Schématiquement, nous considèrons la compétence comme
une fonction
qui opère une transformation : du problème posé, en
une stratégie
pour sa résolution... et nous avons établi un consensus sur
la définition
de cinq grandes catégories de compétences transversales
:
IDENTIFIER-REPERER (une propriété,
un élément...
)
REDUIRE-EXTRAIRE (réduire la complexité, en extraire une
propriété...
)
ENONCER (une propriété, une connaissance... )
APPLIQUER (une loi, un modèle)
AJUSTER (une loi, un modèle à une réalité)
RELIER-DIFFERENCIER (domaines de connaissances, situations )
INDUIRE-PREDIRE (une propriété, un résultat )
CHOISIR une METHODE (avec justification logique
des choix
)
ARTICULER des ARGUMENTS (justifier, déduire, établir,
démontrer
)
RESOUDRE (par application d'une méthode de
résolution)
CALCULER (obtention d'une expression numérique, avec unités)
MESURER (évaluer des ordres de grandeurs )
TRANSFORMER (exemple: loi <=> valeurs <=> graphe)
INTERPRETER (une expérience ou un
résultat
ou une théorie...)
REFUTER (avec des arguments concernant le sens)
RECOMPOSER-SYNTHETISER (un ensemble d'expériences, résultats,
théories...)
TRANSFERER (de domaine, de situation de modèle... )
Sous cette définition fonctionnelle, une
compétence
se spécifie par des arguments : ces arguments sont les descripteurs
des connaissances
et des outils conceptuels en jeu, les descripteurs de la situation ou du
problème
et de leur niveau de complexité...
Cette description implique, on le voit, de concevoir des activités
d'évaluation
articulant plusieurs compétences et, pour chacune des situations
à
résoudre, un codage précis (en termes de compétences,
connaissances,
outils conceptuels, contextes et niveaux). Elle implique aussi une
interface-usager
autorisant une grande variété de modalités de
réponses
(pour permettre à l'usager de construire lui même sa
réponse
et pas simplement de répondre à des "questions à
choix
multiples"). Et enfin elle implique un système capable de
traiter ces
réponses.
Le résultat du traitement sera restitué sous la forme d'une cartographie individuelle de l'usager, par laquelle il pourra se situer soit en référence à un groupe témoin, soit en référence aux exigences définies par le responsable de la formation ou de l'évaluation. Dans ces conditions, l'auto-évaluation fait partie intégrante du processus de formation dans la mesure où l'information que produit le système constitue une aide méthodologique au travail personnel.
En conséquence, nous avons choisi de réaliser un système qui puisse fonctionner aussi bien sur un mode díautoévaluation (en relation avec des contenus et des activités de formation), que sur un mode de contrôle et díaccréditation des connaissances et des compétences.
Le système que nous sommes en train de
réaliser
dans ce projet répond à ce cahier des charges. Il est
totalement ouvert
et les langages utilisés pour son développement (html, Java)
ainsi
que la Base de Données (qui gère les contenus, les
critères
et les résultats d'évaluation) ont été choisis
pour en
faire un produit utilisable sous tout système díexploitation (MacOs,
Windows,
Unix ou Linux) et pour permettre une diffusion et une utilisation sur
Internet, en
Intranet ou sur CDRom.
Ce système distingue le niveau auteur (créateur de contenus)
et le
niveau utilisateur (étudiant ou enseignant). Il permettra aux
étudiants
de naviguer librement dans un ensemble des contenus, et aux enseignants de
créer
des parcours d'évaluation, par extraction depuis la Base de
Données.
Les projets qui ont été présentés mettent en jeu des partenaires différents appartenant à la communauté scientifique européenne qui ont, dans chaque cas, formulé un ensemble de questions et d'hypothèses qui, pour n'être pas nouvelles, n'en demeurent pas moins d'actualité. Ces questions font apparaître des convergences de points de vue aussi bien quant à l'analyse des situations de formation que pour ce qui concerne les choix et les éléments de solution proposées.
Sur le plan technique, les systèmes évoqués ont pour points communs de mettre en oeuvre des solutions compatibles (html, Java) qui autorisent des communications entre les différentes réalisations.
Sur le plan conceptuel, les hypothèses communes concernent la place de l'usager étudiant en position centrale dans le dispositif, en tant qu'acteur de sa propre formation : dans ce cadre, l'autoévaluation est une exigence incontournable car elle permet de structurer l'activité et les échanges, de visibiliser les objectifs et le contrat de formation.
Sur le plan des démarches pédagogiques proprement dites, une place spécifique est dédiée à la mise en scène des rapports entre des expériences réelles, leur simulation et leur modélisation. L'analyse en termes de compétences s'inscrit dans cette démarche générale.
D'autres questions peuvent encore être évoquées : celles relatives à l'analyse des processus cognitifs tout au long d'un apprentissage ; celles relatives aux conditions structurelles permettant d'induire une transformation des pratiques de formation ; celles, enfin, relative à l'extension des partenariats actuels.
Les partenariats doivent se fonder que sur un travail préalable visant à définir précisément les objectifs, les choix, les moyens partagés, les tâches respectives et les droits de chacun. Le domaine du transfert des connaissances et des compétences nous semble particulièrement sensible et n'échappe pas à la nécessité de fonder des consensus sur l'idée générale d'un partage des ressources et des savoirs : sous ces conditions peut-on espérer le développement de nouvelles ressources et de dispositifs de formation qui sauront mieux s'adapter aux publics concernés, encourager la formation tout au long de la vie et mieux reconnaître la valeur des compétences acquises. C'est l'objectif d'un enseignement "sur mesure" et c'est tout l'intérêt des "bilans de connaissances et de compétences".
"Modèle d'Accréditation
des Compétences. Application aux Sciences
Physiques." |