Introduction
Concepts
Pratique
Bibliographie

 
Pour un esprit "scientifique" toute connaissance est une réponse à une question     (Bachelard)

Même si on se veut humaniste ou pragmatique plutôt que scientifique, la connaissance est le maître mot qui devrait accompagner le travail de chaque personne qui se veut un futur psychologue ou un accompagnateur de personnes dans le besoin. (Comme nous sommes tous dans le besoin, la connaissance vaut pour chacun d'entre nous, pour répondre à nos propres questions, avant de vouloir répondre à celles des autres.)

L'être dans sa complexité n'est pas abordable par la seule perception intuitive, même si celle-ci est le point de départ de toute hypothèse. Cette intuition doit se décentrer, faire le détour par la confrontation à des modèles si l'on veut être assez honnête pour ne pas prétendre que ce que l'on a ressenti est la vérité. L'intuition est le moment de l'histoire où l'expérience parle, trouve sa résonance dans l'observation de signes rappelant ce que l'on a déjà vu, entendu. Mais l'intuition est dépendante de la personne qui ressent, elle n'est pas une manne du ciel infaillible et irréfutable. L'intuition comme lecture des signes est une "sémiotique du savoir" qui grandit avec l'âge et justement dans la confrontation de l'expérience propre avec la rencontre du réel manifesté dans l'objet qui n'est pas Soi.

Si voir est plus que percevoir, c'est que l'humain a la capacité d'aller au delà de sa perception première afin que le reflet de ce qu'il voit ne l'éblouisse pas mais soit aussi fait d'ombres qui permettront aux yeux de la connaissance de distinguer formes et contours pour arriver à déceler une image différenciée de la réalité.

Ainsi sur les traces de Socrate nous pourrons dire encore longtemps:
"Je sais ce que je ne sais pas"

La méthode expérimentale est un mode de connaissanceassuré par des vérifications empiriques et non par la seule réflexion philosophique aboutissant à un système cohérent mais non démontrable. Mais cette méthode scientifique n'en reste pas moins l'œuvre de la pensée :
 
"Un fait n'est rien par lui-même, il ne vaut que par l'idée qui s'y rattache
ou par la preuve qu'il fournit"
Claude Bernard

Alors le chercheur se doit de confronter sa pensée, manifestée au travers d'une expérience empirique, à d'autres penseurs, à d'autres modèles afin de pouvoir la conforter ou, le cas échéant, la réformer. Ce faisant, il participe au développement de la connaissance en acceptant de la partager et, en retour, de recevoir les critiques lui permettant de savoir si son modèle d'une "modeste petite universalité" est valable en delà et au deçà de son laboratoire, ou si toute chose pouvant être inégale par ailleurs, il s'agit d'une universalité ayant pour adresse la fixité géographique d'un noble laboratoire.
Il est ici important, par honnêteté intellectuelle, de remercier Karl Popper qui a si bien montré pourquoi il était important de ne pas confondre la croyance et la science. Au nom de Dieu les gens se déchirent dans l'attente d'une vérité que seul le mort enfin dé-couvrira. La croyance est en ce sens une "chose" intime et indémontrable.
 
Il faut la chanter avec les mots de Brassens, 
"mourir pour des idées d'accord mais de mort lente, mais de mort lente".

La science, elle est une "chose" publique, un bien collectif qui doit être soumis à la vérification, à la réfutation même si cela paraît étrange.

Je préfère en tant qu'homme une erreur de première espèce; à savoir ne pas prendre un médicament qui pourrait être bon, (il y en a d'autres qui sont là), qu'une erreur de deuxième espèce: prendre un médicament qui est déclaré "bon" alors qu'il m'envoie dans l'au-delà me faisant enfin comprendre l'erreur "bêta".

Pour confronter son modèle de connaissance avec d'autres, le chercheur doit arriver à produire des faits qui sont une image la plus fidèle possible de ce qu'il a vu, observé, découvert. Il doit donc construire une "mise en scène" microscopique du macrocosme environnemental afin que d'autres puissent reconstruire cette même mise en scène. Le chercheur doit penser à la reproductibilité de sa découverte et ne pas tomber dans l'excès de travaux si lourds et si coûteux que seuls de grands laboratoires seraient à même de les reproduire. De plus, et c'est ici l'essentiel, le modèle doit être, (tel une maquette de jeux pour enfants), reproductible dans les mêmes relations, avec un plan précis et détaillé des différentes phases, sans qu'il soit nécessaire d'avoir le mode d'emploi du mode d'emploi ou alors sans devoir pleurer des larmes de rage, comme après l'achat d'un superbe meuble à monter soi-même, dont le mode d'emploi est si minimaliste, que la poésie dadaïste à côté ressemble au code du droit pénal.

Pour réaliser ce projet, le chercheur (il serait parfois juste de dire le trouveur, car si il est bon de chercher, une vie est triste si on ne trouve rien) devra connaître toutes les conditions d'apparition du phénomène qu'il veut reproduire. Connaître ces conditions c'est en fait être capable de prédiction et c'est ici que la méthode devient expérimentale. Après avoir fait une réflexion sur un état de fait observé dans son environnement, le chercheur est "capable" d'établir une relation entre deux ou plusieurs faits. Son travail consistera ensuite à reconstruire une partie du réel afin de focaliser sur l'aspect qui lui paraît essentiel dans ce qu'il dé-couvre. Il cherchera à délimiter son expérience à un aspect du phénomène, afin de montrer qu'une relation existe entre des facteurs qui interviennent dans une relation de temps et d'espace et ont une ou des conséquences sur ce qu'il a observé.
Le chercheur est en premier lieu un observateur de son environnement, un être intéressé par les relations, les liens, cherchant à comprendre non pourquoi, mais comment deux phénomènes pris ensemble donne un "troisième objet".

Pour cela le chercheur doit devenir un talentueux et patient observateur qui apprend à regarder, à voir afin de connaître le plus de paramètres possibles ayant conduit à ce qu'il pense être une causalité. Mais son problème c'est l'immense complexité de l'existence et non son incroyable légèreté. Quand il observe la réalité, il est en relation avec d'innombrables sources d'influences! Humain il est limité par ses propres possibilités. À moins d'être mégalomane, le chercheur sait qu'il y a une multitude d'interférences qu'il ne voit, ni ne contrôle. Il ne peut saisir que ce que sa connaissance voit à un moment de l'histoire dans un endroit de l'histoire ; tel Stalker dans Tarkowsky, il ne peut lancer sa perception que quelques mètres devant lui.

Une fois son idée esquissée l'observateur redevient le systématicien de la construction, il veut construire un modèle du réel observé et dont il pense avoir une représentation plausible. Il va alors essayer de mettre en scène tous les éléments et événements qu'il croit nécessaires pour rendre visible ce qui à première vue était caché ou invisible. Il va opérationnaliser sa pensée en construisant un micro-modèle ne se composant que de ce qui est indispensable à la réalisation de ce projet afin d'éviter toute interaction incontrôlée et parasite ne lui permettant plus de montrer que si A alors B.
Pour ce faire, il ne va pas faire violence à la réalité en provoquant des états qui ne sont pas observables, mais il va aider la réalisation de son projet en condensant le temps et les phénomènes observés dans un espace réduit et délimité. Cette construction permettra de contrôler le plus possible de variables tout en gardant le plus constant possible ce qui doit l'être.

En ce sens le chercheur est un expérimentateur puriste qui veut pouvoir écrire que sa dulcinée est tombée sous son charme parce qu'il a utilisé "ce champignon miraculeux", et non parce qu'il lui a fait un cocktail si aléatoire de psychotropes, que la majestueuse toile qu'il croyait avoir tissée ressemble à celle d'Euphrosyne après son café du matin … ... ... ...