Sigmund FREUD(1865-1939)
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La SeXuALiTé  InFaNtiLe:

La sexualité infantile vise la recherche de plaisir, mais implique une orientation 
différente des objets et des buts sexuels.
En effet elle ne s’origine pas sur un désir ou un besoin de procréation.
Au-delà de la revendication d’une sexualité infantile déterminante,
Freud définit plus fondamentalement encore l’importance de l’enfance 
dans l’évolution ultérieure de la personnalité. C’est donc bien grâce à Freud 
qu’aujourd’hui personne n’ignore à quel point le vécu infantile détermine l’adulte.

La théorie des stades de la libido de Freud provient de la cure analytique.
Elle est à ce titre empirique. Ce sont des adultes qui sont à l’origine du concept 
de la sexualité infantile. Au cours de ses analyses, Freud remarque une constante 
dans le discours des patients. La question sexuelle.
Les patients (adultes) attirent son attention sur des événements réels ou fantasmatiques, 
de nature sexuelle, qu’ils auraient vécu pendant leur enfance.

L’EnFaNt n’a pas l’activité sexuelle de l’adulte mais il a ses propres sources pulsionnelles,
objet et but sexuels. L’organisation sexuelle de l’EnFaNt est dite prégénitale.

On distinguera, dans la perspective psychanalytique classique, 
les stades orals, anals et phalliques entrant successivement dans le processus
de l’organisation prégénitale. Suit une période de latence, 
qui s’installe à la résolution du complexe d’Oedipe (vers 5 ans)
pour durer jusqu'à la puberté. 
L’individu accède alors à la génitalité. 


 

le Stade Oral:

Le stade oral, dans la théorie psychanalytique classique, s’étend de la naissance
jusqu'à la fin de la première année. En satisfaisant le besoin physiologique de s’alimenter, 
l’EnFaNt trouve un gain de plaisir outre celui provoqué par l’absorption
de la nourriture: l’excitation de la zone buccale.
Au début, les deux activités sont intimement liées, la faim (besoin) et le plaisir (désir)
sont assimilés, du fait qu’ils procèdent de la même activité. Puis, assez rapidement, 
le désir se détache du besoin, la recherche de plaisir devient indépendante de la nutrition.

La zone érogène est la région buccale. La succion se détache donc de la tétée et le bébé se livre 
alors à ce que Freud nomme la succion voluptueuse.

L’objet sexuel n’est autre que l’EnFaNt lui-même, c’est à dire une partie de son corps propre. 
C’est pourquoi la théorie psychanalytique parle d’activité auto-érotique.

Complétant l’excitabilité de la zone érogène et le plaisir qui en émane, les mécanismes 
d’absorption sont également investis en ce qu’ils participent activement, et principalement,
à la relation avec l’extérieur. Freud en vient donc tout naturellement à qualifier
le stade oral de cannibalique. L’observation des bébés suffit à nous renseigner,
il n’est que de les voir systématiquement porter les objets à leur bouche. 
C’est pour eux une manière d’entrer en contact, de reconnaître, de percevoir mais
c’est également et surtout une manière de s’approprier l’objet. 
L’adjectif cannibalique renvoie à cette volonté d’appropriation.
Le nourrisson désire introjecter le monde extérieur, à commencer par le sein maternel 
jusqu’au jouet qu’il porte à ses lèvres. 


 
  
Le Stade Anal :

Progressivement une nouvelle source pulsionnelle se manifeste pour devenir
prédominante lors de la deuxième et la troisième année.
L’activité sexuelle de l’EnFaNt est alors liée au contrôle sphinctérien. 
Le plaisir s’étaye une fois encore sur une fonction physiologique : la fonction excrétoire. 
Les sensations agréables sont en partie liées à la défécation.
Si Freud parle d’érotisme anal, c’est justement parce que dans l’historique de l’individu,
l’apprentissage de la propreté joue un rôle beaucoup plus important
que la seule acquisition du contrôle sphinctérien et urétral.

C’est lors de l’éducation à la propreté que se constitue le primat de la fonction
excrétoire comme activité génératrice de plaisir.

L’érogénéité des sphincters est intimement liée à leur contrôle et ce fait 
est d’importance dans la compréhension du stade.

Cette période s’articule sur l’ambivalence des mécanismes de rétention et d’expulsion.
Le plaisir de la défécation n’est pas l’unique gain retirable du contrôle des sphincters.
L’EnFaNt a également la possibilité de retenir ses selles. 
Cette maîtrise lui permet d’exercer un pouvoir sur son environnement.
En disposant de son gré de ses matières fécales l’EnFaNt dispose du monde.
L’analité comporte donc deux versants : DONNER (expulser, faire sortir)
ou CONSERVER (retenir, garder). 
C’est ici ce que Freud fait intervenir l’ambivalence des pôles actifs (conserver)
et passifs (expulser).

L’ambivalence procède également de l’objet sexuel qui est ici encore, d’une certaine manière,
une partie du corps propre. Les fèces sont un produit de l’EnFaNt, c’est à dire un objet interne, 
un objet-Moi, qui par l’expulsion, devient un objet externe, un objet non-Moi.
Outre l’érotisation, il s’agit pour l’EnFaNt d’une production, c’est à dire d’une création,
en quelque sorte sa première création, quelque chose qui vienne réellement de lui.
Ce sentiment de produire peut expliquer l’investissement libidinal.

La spécificité de cette période et son importance tant pour les parents que pour l’EnFaNt
expliquent que ce dernier s’attache à ses excréments. D’une part, comme on l’a montré, 
parce-qu’il s’agit de sa création, d’autre part, parce que vis à vis des adultes,
ils deviennent une monnaie d’échange, une récompense: un cadeau.
C’est pourquoi l’EnFaNt  peut mal vivre la dépossession de ses matières fécales,
s’étonner que l’on jette son cadeau. Le rôle des parents est ici fondamental pour assurer la cohérence. 
D’autant plus que ses excréments sont une partie de lui-même, la blessure alors éprouvée, 
si sa production est insuffisamment considérée, et tout de suite rejetée, peut être en partie narcissique.
Dans le caractère anal nous trouvons cette peur d’être dépossédé ou volé de son bien le plus précieux.

Un autre aspect fondamental et structurant du stade anal réside dans sa corrélation 
avec le pouvoir naissant de l’EnFaNt, sur lui-même mais aussi sur le monde. 
La souveraineté de l’EnFaNt est associée à sa capacité -nouvelle- d’opposition.
La rétention volontaire peut alors être interprétée comme le premier non de l’EnFaNt.
D’ailleurs, entre un et trois ans, c’est à dire dans l’organisation anale, 
l’EnFaNt va s’employer à s’opposer par tous les moyens mis à sa disposition.

L’EnFaNt ne nourrit aucun dégoût, aucune aversion ou répulsion.
Bien au contraire, il prend plaisir à voir ses excréments, et à l’occasion ceux des autres.
Autant l’adulte se cache, autant l’EnFaNt s’expose. C’est là encore une des conséquences
de l’apprentissage de la propreté. Si l’adulte s’enferme dans les toilettes,
l’EnFaNt ne connaît pas la nécessité de s’isoler. C’est même une expérience qu’il partage. 
Il n’y a aucune perversion, puisque l’EnFaNt n’a pas encore de pudeur, 
de valeurs morales qui s’opposent à la pulsion scopique et à l’exposition de sa nudité.

Si Freud qualifie le stade oral de cannibalique, il qualifie le stade anal de sadique. 
On parle alors du stade sadique-anal. C’est en effet, lors de cette même époque 
que l’on constate l’émergence des pulsions sadiques. 
Elles se manifestent visiblement dans les tendances destructrices du jeune EnFaNt. 
Nous avons souligné la volonté d’opposition du petit homme, qui dit « non » symboliquement dans  l’apprentissage de la propreté, et qui dit « non » en cassant, déchirant, jetant tous les objets
qui lui passent par les mains. 
Dans la perspective psychanalytique, le fait de déchiqueter, mettre en morceau, etc...
manifeste les pulsions sadiques de l’EnFaNt. 
L’évolution libidinale voit, dans une maturation affective de la personnalité, 
les tendances sadiques se sublimer dans diverses activités ou structures caractérielles. 

Le Stade Phallique:

Le stade phallique succède au stade anal. Marqué par le complexe de castration, 
il s'achève avec la résolution du complexe d'Oedipe. 
La période de latence lui succède, pour durer jusqu'à la puberté.

Le stade phallique commence dans la troisième année de vie, pour se terminer 
dans la cinquième ou la sixième année. Il tire son nom de la suprématie du phallus.
Les organes génitaux deviennent la zone sexuelle prédominante. 
L'EnFaNt arrive progressivement vers la sexualité adulte.
Selon la théorie, la première caractéristique du stade consiste dans la curiosité sexuelle
manifestée par l'EnFaNt. Le stade phallique correspond, en effet, à l'époque où l'EnFaNt se pose 
des questions qui portent principalement sur l'origine de la vie et la différence des sexes.
L'EnFaNt se demande d'où il vient, comment il a été fabriqué, comment il est né... etc. 
A défaut de réponses, l'EnFaNt va élaborer un certain nombre de théories relatives
aux origines de la vie (naissance anale, fécondation orale par le baiser...).
L'EnFaNt a donc nécessairement une représentation imaginaire de l'origine de la vie en général, 
et de sa vie en particulier.
Les conceptions infantiles relatives à la naissance, à la fécondation et à la sexualité constituent 
une caractéristique majeure du stade phallique.
La différence des sexes est un autre élément clé de ce stade. 
Selon Freud, jusque vers 3-4 ans, l'EnFaNt ne réalise pas la différence des sexes.
Or selon la psychanalyse, la reconnaissance des sexes constitue un passage éprouvant pour l'EnFaNt,
car c'est pour lui renoncer à la toute-puissance: il ne peut être à la fois garçon et fille.
En admettant la différence des sexes, l'EnFaNt est obligé d'admettre:

-toutes les différences
-les limites de son propre pouvoir
-l'établissement et l'acceptation de sa propre identité sexuelle.

Le petit garçon, à travers la découverte de la différence des sexes, constate que la fille est dépourvue de pénis. Faisant suite à cette constatation, le complexe de castration repose sur deux présupposés:

- le petit garçon a subi antérieurement des menaces de castration effective
-la survalorisation du pénis

Le petit garçon craint de perdre son pénis et la fille souffre de ne pas en avoir un.
Pour la fille, en effet, le complexe de castration ne s'élabore pas de la même manière. 
Selon la psychanalyse, chez la petite fille, l'angoisse est remplacée par l'envie du pénis.

Le complexe de castration peut donc s'entendre comme le renoncement à la toute-puissance
chez le petit garçon comme chez la petite fille. Il faut pour l'EnFaNt abandonner le ET
(`être à la fois garçon ET fille) pour accepter le OU (n'être qu'un garçon OU une fille).
La différence des sexes et le complexe de castration qui lui est relatif jouent
un rôle fondamental dans la construction et l'acceptation de l'identité sexuelle 
(renoncement à être du sexe opposé). Ce passage est extrêmement important,
et dans les choix affectifs futurs, et dans la gestion de sa sexualité d'adulte.
 
 

Le complexe d'Oedipe...
Dans le mythe, Oedipe est abandonné par ses parents qui craignent de voir se réaliser
la terrible prophétie délivrée par la Pythie. Selon la prédiction, Oedipe, 
devenu adulte, tuera son père et épousera sa mère.
Ses géniteurs jugent donc préférable de l'abandonner, afin de se protéger. 
Elevé par les souverains de Corinthe, et dans l'ignorance de son véritable état,
Oedipe, jeune homme, étant à son tour informé de la terrible prophétie, 
fuit ses parents adoptifs, qu'il pense être ses géniteurs.
En chemin, une altercation l'oppose à son véritable père.
Oedipe le tue, sans savoir naturellement qu'il s'agit de son propre père
et il réalise ainsi, à son insu, le premier terme de la sinistre prophétie. 
Nullement affecté, il continue sa route. Ses pas le guident vers Thèbes, 
où Jocaste (sa mère) devenue veuve le prend pour époux. 
Le deuxième terme de la prophétie est ainsi validé puisque, sans le savoir,
Oedipe épouse sa mère.

Le mythe pose le conflit originel, qui oppose l'EnFaNt à l'un de ses parents pour pouvoir mieux être aimé de l'autre. Dans cette perspective, le complexe d'Oedipe peut se résumer en deux points:

-Le désir de l'EnFaNt pour le parent de sexe opposé
-conjugué à l'hostilité de l'EnFaNt pour le parent du même sexe

L'Oedipe représente le conflit, basé sur un désir interdit, qui oppose, à un moment donné, EnFaNt et parents.

Les premiers objets d'amour de l'EnFaNt sont évidemment ses parents.
Entre sa troisième et sa cinquième année, l'EnFaNt désire aimer ses parents (et être aimé d'eux) 
comme ses parents s'aiment entre eux. D'autre part, l'Oedipe est consécutif à l'établissement formel
de l'identité sexuelle. Il se situe à la charnière du stade phallique. Ainsi l'EnFaNt, 
dans un même temps où il revendique son identité sexuelle, "sexualise" sa relation aux parents,
en désirant, dans l'Oedipe classique, le parent du sexe opposé au sien. 
L'autre parent devient l'élément gênant et une rivalité avec le parent du même sexe s'instaure.

L'issue du conflit oedipien est capitale pour la structure générale de la personnalité de l'EnFaNt. Plus spécifiquement, de la résolution de la situation oedipienne dépend la capacité
de construire des relations affectives, une fois devenu adulte, affranchies de cette situation
conflictuelle originelle. Car l'Oedipe met finalement en jeu un désir interdit, 
auquel l'EnFaNt va devoir renoncer. L'EnFaNt ne peut pas aimer ses parents
comme ses parents s'aiment entre eux. Ce qui signifie, bien-sûr, 
qu'il ne peut pas avoir de relations sexuelles avec ses parents mais bien plus,
pour vivre la relation qui les réunit l'un et l'autre, l'EnFaNt devra trouver d'autres objets d'amour.

Selon Freud, L'Oedipe élabore d'ailleurs le Surmoi. 
C'est, à travers l'intégration de l'interdit de l'Inceste, que l'EnFaNt assimile tous les autres interdits.
Le conflit oedipien ne trouve pas un terme brutal ou définitif à l'issue du stade phallique,
mais sa résolution partielle conduit à la formation du Surmoi.
 
 
 

 


 

La Période de Latence :

La période de latence s’étend de la cinquième ou sixième année de vie jusqu’à la puberté. 
Elle se caractérise par une rémission des pulsions sexuelles. 
La pudeur constitue un trait caractéristique de cette période. Alors qu’auparavant, 
l’EnFaNt ne ressentait aucune gêne devant la nudité, voire était un peu voyeur et exhibitionniste,
il devient souvent très pudique.

Ce n’est qu’à partir de la période de latence que les valeurs morales, 
en usage dans son environnement, sont intériorisées par l’EnFaNt.
Il devient raisonnable (au sens de l’adulte).

Ce retrait des désirs sexuels permet à l’EnFaNt de se tourner vers d’autres centres d’intérêt. 
Sa curiosité intellectuelle s’amplifie, ses goûts et ses activités se diversifient. 
Sur le plan affectif également un changement s’opère. La résolution partielle du conflit
oedipien permet une ouverture du champ relationnel. L’EnFaNt est apte à s’investir dans d’autres relations,
à se détacher partiellement de ses parents, pour aimer d’autres personnes. 
Les amitiés EnFaNtines et adolescentes en constituent une bonne illustration.

Puberté et adolescence :(en complément) 

La pré adolescence et l’adolescence constituent une étape cruciale. 
Aux changements corporels s’associent des transformations psychologiques. 
La problématique sexuelle est réactivée par les manifestations pubertaires.
Sur le plan théorique, tous les stades précédents sont réactualisés, 
et l’organisation prégénitale est, d’une certaine manière, de nouveau traversée par l’adolescent.

L’adolescence constitue une période élastique (la durée est variable d’un sujet à l’autre), 
à l’issue de laquelle s’ouvre le stade génital proprement dit. Même si les organisations
ne sont jamais complètement abandonnées, chez l’adulte équilibré, les pulsions génitales sont 
prédominantes.
La relation objectale accède à l’ambivalence et ne s’instaure ni sur un mode fusionnel,
ni sur un mode clivé.