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chapitre 2 Modèles de l'individu et de l'acteur social

2-1.2 La mémoire dans les sciences cognitives


Les sciences cognitives symboliques forment un ensemble de disciplines qui s'intéressent à la connaissance (savoir) et à ses usages. En tant que généralisation de la psychologie du traitement de l'information, elles définissent le raisonnement humain comme un système composé de processeurs actifs de symboles liés à un environnement par des transmetteurs (angl. "transducers"). L'esprit humain se définit avant tout comme structure cognitive. Il contient de l'information et il la traite. Pour réagir face à un environnement, un système cognitif doit représenter de l'information sur le monde, ce que nous appellerons une structure épistémique. Ensuite, pour agir, il a besoin d'une structure heuristique, c'est-à-dire d'un savoir abstrait et d'un savoir concret pour la résolution de problèmes. Nous verrons plus loin que la valeur de ces deux distinctions est surtout analytique. Il n'est en effet pas toujours possible de faire la différence entre un savoir épistémique et un savoir heuristique.

Le traitement de l'information repose sur la mémoire. En s'exprimant poétiquement, on pourrait dire que la pensée et la mémoire se comporte l'une envers l'autre, "... wie Wellenbewegungen zum Wasser. Das eine is das Medium, das andere der darin stattfindende Process*1" (Doerner 76:28). Au niveau le plus général, beaucoup de modèles contemporains divisent la mémoire en mémoire sensorielle, en mémoire à court terme et en mémoire à long terme. La mémoire sensorielle dispose d'une capacité énorme (imaginez par exemple ce qui est contenu dans un regard autour de vous), mais elle ne garde pas l'information longtemps. La mémoire à court terme contient l'information manipulée consciemment durant une activité de résolution de problème. Elle peut contenir à peu près sept "morceaux" (angl. chunks) d'information en même temps et en utiliser deux directement. Ces morceaux sont connectés avec la mémoire à long terme, où réside tout le reste de l'information. Notons encore qu'aujourd'hui un grand nombre de chercheurs s'accordent pour dire que la mémoire à court terme ne correspond pas à une réalité physique à part dans le cerveau, mais qu'il s'agit en fait de la partie de la mémoire à long terme qui est activée à un moment donné.

Beaucoup de chercheurs doutent de la validité d'un schéma aussi simple, qui a été développé dans la tradition de la recherche sur la résolution de problèmes-puzzle. Par exemple, dans un tel modèle on n'arrive pas à intégrer la capacité étonnante des humains à saisir très rapidement une image perçue. D'une façon générale, on peut dire qu'il prouve sa valeur en ce qui concerne les activités conscientes de résolution de problème. La question fondamentale consiste à savoir comment est organisé le savoir (épistémique ou heuristique), qu'il réside dans une mémoire à long terme ou non. Avant de traiter cette question de façon approfondie, nous introduisons d'autres concepts fondamentaux des sciences cognitives: la représentation, la planification et la résolution de problèmes.


THESE présentée par Daniel Schneider - 19 OCT 94

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