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chapitre 9 Conclusion

9-2.1 L'utilité des modèles IA en science politique


Les modélisations analytiques, computationnelles, mathématiques et autres ont toujours trouvé leur terrain de prédilection dans le domaine des relations internationales. Cela tient à la fois à la nature de l'objet de la recherche qui se prête souvent mal aux analyses statistiques et au "background" de certains chercheurs. En relations internationales, l'élément "cognitif" ou le "sens" est important et ne peut pas être traité uniquement avec des modèles mathématiques ou statistiques. Comme le constate Hudson (91:1), les chercheurs qui utilisent l'IA en relations internationales ont souvent un "background" en méthodes quantitatives et ils ne sont pas satisfaits des résultats obtenus.

Hudson (91:2-4) explicite le "problème" à l'aide d'une typologie des difficultés touchant aux sujets de recherche empruntée à Weinberg (75). Il existe trois situations de recherche dont une se prête particulièrement bien aux modélisations inspirées par l'IA:

  1. La simplicité organisée (angl.: "organized simplicity) possède les propriétés d'un mécanisme: elle est bien structurée, relativement peu complexe et contient une population faible. Les méthodes analytiques et mathématiques fonctionnent bien pour expliquer et prédire des phénomènes. Les théories de choix tombent dans ce domaine.

  2. La complexité organisée possède les propriétés d'un système. Ce type de sujet ne peut pas être modélisé par des méthodes analytiques et sa structuration est trop complexe pour un traitement statistique. Typiquement, les systèmes expert et les modélisations cognitives font partie des outils appropriés pour travailler dans ce domaine

  3. La complexité non-organisée possède les propriétés d'un "environnement". Elle contient beaucoup d'informations et d'objets, peu de structure organisée et se prête bien aux méthodes statistiques ou encore, dans certains cas,à la modélisation mathématique de systèmes.

Toute discipline doit toujours "inventer" ses problèmes en évitant à la fois ce qui est simple et inintéssant et ce qui est trop difficile. L'espoir en ce qui concerne les recherches en IA et en science politique est de trouver des modèles plus riches qui tiennent à la fois compte de la richesse de la réflexion humaine (les décideurs), des événements historiques (la mémoire des cas) et de l'environnement complexe (les contraintes et stimuli externes). En relations internationales, la liberté des décideurs est relativement importante. Par conséquent, les facteurs cognitifs sont importants. En outre, les régularités statistiques sont faibles, d'où l'intérêt prononcé pour des méthodes qualitatives d'analyse de données. Le décideur impliqué dans les politiques publiques internes possède sans doute un degré moindre de liberté d'action, mais les éléments "perception de problème", "résolution de problèmes", "choix", etc. existent bel et bien. L'absence relative de l'IA dans ce domaine s'explique, à notre avis, surtout par la "sociologie" de ce secteur.

"Wissen" is nicht "Erkenntnis" (le savoir n'est pas connaissance): la modélisation peut produire du savoir, quelque chose qui se construit et se reconstruit socialement. Le savoir peut être exprimé à l'aide de phrases précises. "Erkenntnis" (connaissance) est lié à l'individu et doit se constituer dans un sens herméneutique. Ce problème bien connu de la littérature philosophique crée le paradoxe suivant: lorsqu'on met l'être humain, son intentionnalité et ses processus de raisonnement au centre d'un travail de recherche, nos méthodes font défaut. Les méthodes quantitatives et analytiques puissantes et rigoureuses ne fonctionnent plus (cf. Hudson 91:2). En d'autres termes, l'écart entre savoir (scientifique) et connaissance du sujet est très ou trop important*1. La modélisation computationnelle inspirée des méthodes de l'intelligence artificielle donne l'espoir de pouvoir réduire cet écart. L'IA est utilisée depuis environ vingt ans en relations internationales et il existe une dizaine de chercheurs qui publient régulièrement dans ce domaine. Il s'agit d'un nombre très faible qui s'explique d'abord par la difficulté relative des méthodes, mais également par le fait que toute recherche manipulant un grand ensemble de "connaissances" nécessite un investissement en ressources humaines difficile à obtenir en sciences sociales


THESE présentée par Daniel Schneider - 19 OCT 94

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