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Remarque : ceci est un travail de maturité = baccalauréat.
Il n'a pas de caution scientifique, médicale ou autre, et, bien que cette élève ait fait un travail qui a été accepté dans le contexte scolaire, il ne peut prétendre être une source fiable d'informations !

Travail de maturité 2006-2007 Collège Calvin

Quel rôle joue l’oubli? Avis de neuropsychologues et contribution de la recherche genevoise notamment Pr. Van der Linden»

Romina Langianese Groupe 402

maître acccompagnant F. Lombard

TABLE DES MATIERES

  • Partie I: Introduction,
  • La mémoire qu’est-ce que c’est?
  • Partie II: Approches
  • - Psychologique
  • - Neurobiologique
  • - Neurochimique
  • 3. Partie III: L’oubli
  • - Psychologique
  • - Neurobiologique
  • - Neurochimique
  • 4. Analyse d’extraits d’interviews et
  • Bilan/Conclusion
  • 5. Remerciements
  • 6. Annexes

Résumé

L’oubli n’est pas souvent cité explicitement. En effet, il est dans la plupart du temps associé à la mémoire mais n’est pas figure de grand questionnement. De plus, l’oubli au premier abord est « mal vu » par l’opinion publique qui pensent qu’il est néfaste et qu’il faut absolument améliorer sa mémoire et retenir le maximum d’informations possibles c’est pourquoi il m’a semblé bon de définir le rôle de l’oubli car cette question reste encore à nos jours assez « énigmatique » malgré son rôle primordial.

J’ai questionné des neurologues genevoises et un chercheur genevois (par le biais de Daniel Binyet) afin de comprendre le rôle de l’oubli. Les résultats ont montré que l’oubli fait partie intégrante du processus de mémorisation et que sa fonction est vitale.

La conscience de l’importance de l’oubli va permettre un élan de recherches scientifiques dans ce domaine (qui a déjà commencé) et va permettre aux amnésiques ou autres patients souffrants de mémorisation à les aider.


Introduction

Le but de ce travail de maturité est d’étudier le rôle de l’oubli. Le terme «oubli» n’a pas la même définition selon les domaines (neuropsychologique, neurobiologique, et neurochimique). Donc je vais vous exposer ces trois approches théoriques et tenter de trouver une réponse au rôle de l’oubli qui est difficile et fait l’objet de beaucoup de conflits de jugements.

Afin de mieux comprendre le rôle de l’oubli, j’ai interrogé deux neuropsychologues et ai obtenu une retranscription d’une interview faîte par Daniel Binyet à un chercheur scientifique (notamment professeur à l’université) à Genève. En outre, une conférence a été donnée le 17 mars 2006 portant sur la problématique: «les faux souvenirs sont-ils vrais?» qui fut très intéressante même si ce domaine ne touchait pas directement mon sujet.

A travers ces interviews, il est intéressant de voir comment les différentes opinions divergent à ce sujet et de voir comme la science a fait progresser le domaine médical. En guise de complément à ma recherche, j’y ajoute aussi des informations trouvées dans les livres, ou quelques fois sur internet ou des revues hebdomadaires qui sont très utiles pour s’informer des nouvelles avancées scientifiques dans le domaine de la mémoire et de l’oubli. Les interviews que j’ai faites, ont été réalisées à Genève, afin d’obtenir des informations sur le rôle et la contribution de la recherche dans cette ville.

Lorsque j’ai choisi ce sujet, ce qui m’a le plus intrigué, c’est que l’oubli n’est pas souvent cité explicitement et positivement. En effet, il y a beaucoup d’informations qui circulent au sujet de la mémoire, comment l’améliorer etc. mais peu de personnes parlent à proprement dit du rôle de l’oubli. C’est pourquoi, mon maître accompagnant m’a proposé ce sujet qui m’a tout de suite plu par son originalité.

Ce travail de maturité a pour but d’éclaircir ce sujet et non pas de donner une réponse exacte, car les opinions divergent et la technologie ne cesse de progresser. Peut-être serez-vous partisans d’une théorie qui vous aura le plus convaincu.

La mémoire qu’est-ce que c’est?

Ce terme «mémoire» est employé dans énormément de domaines tels que l’informatique, la rédaction (littéraire, juridique, scolaire) ou dans différentes sciences (psychologique, humaines, neurobiologique et chimique). Selon un article parut dans l’encyclopédie «Wikipédia» (13), la mémoire est d’une manière générale le stockage de l’information. C’est aussi le souvenir d’une information.

Je vais m’intéresser à trois approches de la mémoires: psychologique, neurobiologique et neurochimique.

Ces théories ont une idée commune. En effet, elles sont d’accord sur le fait que la mémoire soit l’une des facultés les plus importantes de notre pensée, c’est elle qui permet d’améliorer notre comportement à l’aide d’expériences que nous avons vécues. C’est elle qui maintient l’unité de notre personnalité en lui gardant un passé. C’est elle qui nous permet de stocker les mots et les règles de langues que nous parlons, les habitudes de la société où nous vivons, les détails et les lieux que nous parcourons, les traits de visage visages de nos proches.

Mémoire en tant que processus psychologique

Le livre de Béatrice Desgranges et de Francis Eustache (9), nous dit que depuis que Socrate a suggéré, pour la première fois, que les hommes possédaient des pré connaissances, des connaissance innées sur le monde, la philosophie occidentale a débattu plusieurs des questions suivantes: comment apprenons-nous de nouvelles informations sur le monde et comment ces informations sont-elles stockées en mémoire? Quels aspects de la connaissance sont innés et dans quelle mesure l’expérience peut-elle influencer cette organisation innée? Initialement, les philosophes utilisent principalement trois méthodes non expérimentales pour étudier la mémoire et les autres processus mentaux: l’introspection consciente, l’analyse logique et la rhétorique. Cependant, ces méthodes ne permettaient pas d’aboutir à un point de vue consensuel. Vers le milieu du 19ème siècle, les chercheurs adoptèrent la méthode expérimentale qui avait si bien réussi pour résoudre des problèmes de physique et de chimie. L’étude philosophique des processus mentaux laissa alors progressivement la place à des études empiriques sur l’esprit, et la psychologie devint une discipline indépendante, distincte de la philosophie.

Il est dit aussi (9) que les études de psychologie expérimentale ont d’abord porté sur la perception. Ensuite, les chercheurs se lancèrent progressivement dans des travaux plus complexes sur l’esprit et tentèrent de soumettre les phénomènes mentaux à l’analyse expérimentale et quantitative. Le pionnier dans ce domaine fut le psychologue allemand Hermann Ebbinghaus qui, dans les années 1880, introduisit l’étude de la mémoire en laboratoire. Il découvrit ainsi deux caractéristiques principales du stockage mnésique. Premièrement, il montra que les souvenirs ont différentes durées de vie. Certains souvenirs, de courte durée, persistent pendant plusieurs jours jusqu’à quelques mois (le stockage de ces souvenirs sont la mémoire à court terme en neurobiologie). Deuxièmement, il montra que la répétition rend les souvenirs plus durables; c’est la pratique qui permet l’amélioration. Quelques années plus tard, les psychologues allemands Georg Müller et Alfons Pilzecker suggéraient que cette mémoire qui dure des jours et des semaines se consolide avec le temps.

Le philosophe américain William James interpréta ensuite ces résultats en proposant une distinction qualitative pertinente entre la mémoire à court terme et la mémoire à long terme. Il montra que la mémoire à court terme dure quelques secondes ou quelques minutes.

A peu près à la même époque, le psychiatre russe Sergei Korsakoff publia la première description d’un trouble de la mémoire qui porte depuis son nom, le syndrome de Korsakoff. Même avant cette maladie, on reconnaissait que les troubles de mémoire pouvaient nettement éclairer la structure et l’organisation de la mémoire normale.

Au milieu du 19ème siècle, on changea la manière d’étudier la mémoire. En effet, les animaux sont pris pour des expériences et non plus les êtres humains. L es psychologue devaient seulement se focaliser sur ce qui était observable. Ils pouvaient identifier des stimuli et mesurer des réponses comportementales. Malgré sa rigueur scientifique, le champ d’étude béhavioriste était restreint et ses méthodes limitées. Ils ignoraient les arguments avancés par la psychologie de la forme, la neurologie, la psychanalyse. Malgré cela, le béhaviorisme fut le courant psychologique dominant dans l’étude de l’apprentissage et de la mémoire au début du 20ème siècle. Cependant il y eut des exceptions notables à cette règle, comme des chercheurs qui privilégient les processus mentaux. Selon un article paru dans Wikipedia, la psychologie cognitive étudie les grandes fonctions psychologiques de l'être humain que sont la mémoire, le langage, l'intelligence, le raisonnement, la résolution de problèmes, la perception ou l'attention.

Plus généralement la cognition se définit comme l'ensemble des activités mentales et des processus qui se rapportent à la connaissance et à la fonction qui la réalise.

La psychologie cognitive part du principe que l'on peut inférer des représentations, des structures et des processus mentaux à partir de l'étude du comportement. Contre le béhaviorisme elle défend que la psychologie est bien l'étude du mental et non du comportement. À la différence des autres courants mentalistes, elle ne pense pas que l'introspection soit une voie d'accès particulièrement fiable pour explorer le mental.

De nombreux psychologues étudièrent la mémoire. Parmi eux, un psychanalyste se démarqua grandement et dont sa théorie mérite est importante d’être citée: Freud Sigmund (1). (1856-1939), médecin autrichien, neurologue et fondateur de la psychanalyse. Freud a découvert l'existence de certains mécanismes psychiques : notamment le refoulement, décrit comme un mécanisme psychologique inconscient par lequel le souvenir d'événements pénibles ou menaçants est maintenu hors du champ de la conscience, et la résistance, définie comme l'opposition inconsciente à la prise de conscience des expériences refoulées afin d'éviter l'angoisse qui en résulterait. Ainsi, en utilisant les libres associations de sa patiente pour la guider dans l'interprétation des rêves et des lapsus, Freud avait reconstitué le fonctionnement des processus inconscients.

La psychologie a été d’une grande importance pour la recherche scientifique. Les premières réussites dans le domaine neurologique furent trouvés par des psychologues ou psychanalyse comme nous avons pu le voir précédemment. Selon un article paru dans Wikipedia (12), nous constatons, dans l’esprit actuel, une façon de réécrire l'histoire en mettant en avant tout ce qui favorise l'éclairage scientifique. C'est ainsi que peut naître la confusion entre la neurologie et la psychologie.

Pour conclure, la mémoire et la réminiscence des souvenirs sont importantes psychologiquement donc, car le souvenir permet de combler le vide et la solitude dans une vie. En outre, nous ne pouvons pas parler de médecine sans l’aspect psychologique. L’éthique fait partie du domaine psychologique et médical. Quand on soigne, on se questionne et il y a certaines contrainteset règles à respecter (dont justement l’aspect moral).

Mémoire neurobiologique (18)

Dans le livre de Jean-Jacques Feldmeyer (4), il est dit que la mémoire est avant tout une fonction biologique vital, la principale fonction du système nerveux, dévolue au cerveau.

Où se logent les souvenirs?

Aucune zone cérébrale n’est spécifiquement dédié à un type particulier de mémoire, mais des réseaux interconnectés de neurones relient diverses régions pour construire «la» mémoire. Cependant, on sait aujourd’hui que certains types de mémoire font intervenir telles zones du cerveau. «La formation d’un souvenir peut se schématiser comme la succession dans le temps de trois processus neurocognitifs: l’encodage, le stockage et la récupération de l’information. Ces quatre processus sollicitent différentes régions du cerveau. Le moindre dysfonctionnement de l’une d’elles est susceptible d’induire un trouble mnésique. C’est la raison pour laquelle notre mémoire est fragile.» (11)

Parmi les différents types de mémoire, on schématise la mémoire explicite (mémoire) et la mémoire implicite (apprentissage). La mémoire explicite se divise en mémoire sémantique et mémoire épisodique (évènements).

Lors d’une mémorisation, plus on a de codes (donc de stimuli) pour une information donnée, et mieux elle est mémorisée, activant ainsi plus de zones dans le cerveau.

Mémoire neurochimique

Notre cerveau comporte environ 1 million de milliards de synapse, ces connexions chimiques assurant la communication entre deux neurones. Qu’est-ce qu’un neurone? «Le neurone est une cellule nerveuse proprement. Il a pour rôle, par l'intermédiaire de ses prolongements cellulaires (les dendrites et l'axone), de recueillir et de conduire l'information nerveuse et, au sein des centres nerveux, de traiter cette information.» (11)

Dans le livre cerveau et pensée (4), des scientifiques nous disent que tous les neurones sont doués de mémoire, mais aucun en particulier n’est le siège des souvenirs. La formation des souvenirs résulte de modifications de connexions des réseaux. Les neurones au passage du nouveau circuit modifient temporairement leurs connexions synaptiques, un peu comme un aiguillage de chemin de fer. L’hypothèse de Hebb se résume ainsi: un souvenir se crée lorsque l’action simultanée de deux neurones renforce la synapse, c’est à dire le point par lequel ils communiquent. Lorsqu’un neurone dit présynaptique en active un autre postsynaptique de façon répétée, des changements métaboliques surviennent et l’efficacité de la transmission des signaux du neurone présynaptique vers le neurone postsynaptique augmente.

Les neurones sont des généralistes et non des spécialistes. Il n’y a pas de différence entre un neurone de la sensibilité du pouce ou celle de l’index. C’est la position des neurones qui définit leur fonction. Le cerveau n’arrête pas de créer ou supprimer d’immenses quantités de contacts synaptiques.

Les cellules communiquent entre elles par compétition et non spécialisation. En effet, il n’y pas de catégorie de cellules qui s’occupent de tel endroit car elles ont toutes le même rôle. Il y a compétition entre les informations qui surviennent: le neurone privilégie celles qui arrivent dans des conditions précises, celles qui sont «signifiantes». La coïncidence temporelle joue un rôle déterminant: ce qui arrive toujours en même temps signale une chose intéressante. Le neurone n’a pas à choisir, il est influencé. La connotation affective détermine si oui ou non l’information est importante et doit être stockée.

Selon un article paru dans Wikipedia, la synapse (du grec. syn = ensemble; haptein = toucher, saisir; c'est-à-dire connexion) désigne une zone de contact fonctionnelle qui s'établit entre deux neurones, ou entre un neurone et une autre cellule (cellules musculaires, récepteurs sensoriels...). Elle assure la conversion d'un potentiel d'action déclenché dans le neurone présynaptique en un signal dans la cellule postsynaptique. On distingue habituellement deux types de synapses: - la synapse chimique, très majoritaire, qui utilise des neurotransmetteurs pour transmettre l'information (celle dont nous traitons); et (la synapse électrique).

La synapse chimique a une extraordinaire plasticité. Cette plasticité est connue sous le nom de potentialisation à long terme, ou LTP. Les synapses utilisent le glutamate comme neuromédiateur:«le neuromédiateur ou neurotransmetteur sont des molécules libérées par les terminaisons nerveuses des neurones, jouant le rôle de messagers chimiques permettant la transmission de l’influx nerveux entre ces cellules et une réponse biologique au niveau de l’organe cible de ce message» (11)

On trouve les synapses dans l’hippocampe et dans la plupart des structures corticales et sous-corticales du cerveau. Selon les dossiers de la Recherche (11) les synapses puissent être modifiées, il faut qu’elles soient activées, ce qui signifie que l’influx nerveux qui arrive au niveau du neurone présynaptique se propage au neurone postsynaptique. C’est le récepteur AMPA du glutamate qui permet la propagation de cet influx nerveux. Si le neurone postsynaptique est suffisamment activé, un second récepteur jusque là inactif, le récepteur NMDA, subit une modification qui fait que sa stimulation par le glutamate entraîne l’entrée du calcium dans la cellule. En découle l’activation de nombreuses protéines, en particulier des kinases (enzymes qui catalysent une réaction de phosphorylation durant laquelle un groupement phosphate est fixé sur une protéine donnée) dont la calmoduline kinase II (CAMKII) et les MAP kinases. Au moins deux types de mécanismes sont alors déclenchés: la phosphorylation des récepteurs du glutamate (tant NMDA que AMPA), et l’activation de la machinerie génique. Ces modifications aboutissent à un très grand remodelage des circuits neuronaux: changements de la forme et de la taille des synapses, insertion de récepteurs du glutamate et transformation de synapses silencieuses en synapses actives, et croissance de nouvelles synapses.

Il y a deux sortes de synapses qui interagissent pour la mémoire: la synapse glutamatergique dont j’ai expliqué le fonctionnement précédemment et la synapse cholinergique. L'acétylcholine agit sur les cellules cibles par l'intermédiaire de deux groupes distincts de récepteurs : muscariniques et nicotiniques. Tandis que le neurotransmetteur du glutamate est l’AMPA. Le fonctionnement reste le même excepté les substances chimiques qui interagissent.

L’oubli psychologique

Il y a l’oubli conscient et l’oubli inconscient dit refoulement: «Le refoulement, décrit comme un mécanisme psychologique inconscient par lequel le souvenir d'événements pénibles ou menaçants est maintenu hors du champ de la conscience, et la résistance, définie comme l'opposition inconsciente à la prise de conscience des expériences refoulées afin d'éviter l'angoisse qui en résulterait.» (14) Cette notion de refoulement vient bien sûr de Freud. Les théories freudiennes disent que l’oubli serait d’origine affective.

En outre, on oublie parce qu’on est trop absorbé par le présent et qu’on ne se donne pas la peine d’évoquer le passé. L’oubli est involontaire par exemple: si on nous demande de penser à tout sauf à une pomme, on ne pensera qu’à une pomme.

L’oubli neurobiologique

L’oubli fait partie intégrante du mécanisme de la mémoire. Il est même indispensable à l’équilibre mental et au processus mnésique. Selon les scientifiques, on ne saurait pas vivre le présent sans mettre de côté le passé, du moins temporairement.

L’oubli serait dû à une erreur lors du codage ou du stockage et de ce fait ne serait plus accessible (fragilité du processus mnésique). Par exemple: Dans l’hippocampe, l’information circule en boucle, si la boucle est rompue, l’encodage des souvenirs à long terme n’est plus possible (11). Sans compter l’oubli dû à un choc ou accident qui toucherait le cerveau et provoquerait une attaque cérébrale ou autre.

En outre, l’oubli est dû au vieillissement, selon encarta (14), le vieillissement serait le résultat de l’accumulation de lésions génétiques qui touche les cellules de la mémoire, de petites erreurs dans l’énorme machine qui sert à la transmission de l’information génétique, ce qui réduirait, voire empêcherait, le fonctionnement cellulaire

Une autre théorie repose sur l’effet Hayflick, du nom du microbiologiste américain Leonard Hayflick. Ce dernier a découvert que certaines cellules humaines dans une culture de tissus ne peuvent effectuer qu’un nombre limité de divisions avant de mourir, ce qui peut signifier que le vieillissement est programmé génétiquement au sein des cellules.

Il est dit aussi que parmi les aspects cellulaires du vieillissement bien répertoriés, on retient particulièrement l’accumulation des radicaux libres. Ces substances sont des produits (des « déchets ») du fonctionnement cellulaire, qui sont normalement neutralisés au fur et à mesure par la cellule. Leur accumulation avec le temps ou la diminution des capacités de neutralisation serait responsable de certaines maladies et du vieillissement. Dans la mesure où les radicaux libres peuvent, notamment, altérer l’ADN qui constitue les gènes, on voit que les différentes théories ne s’excluent pas forcément, mais qu’elles peuvent se compléter. Toutes ces erreurs provoqueraient donc une moins bonne aptitude face au processus cognitif.

L’oubli neurochimique

L’oubli est dû à la plasticité synaptique. Il y a de nouvelles synapses fabriquées, d’autres qui se dédoublent grâce à la stimulation. Tout cela induit donc des modifications anatomiques.

Simultanément les neurones et leurs connexions sont vulnérables et vieillissent avec le temps (une des hypothèse): les souvenirs s’estompent. Heureusement les souvenirs ne s’oublient pas en bloc. Grâce aux connections horizontales et verticales des réseaux, le rappel peut se faire par plusieurs voies d’accès.

La maladie d’Alzheimer par exemple, commence par attaquer les neurones du système limbique, particulièrement ceux de l’hippocampe.

L’oubli se produit lorsque la mémoire à long terme fait le ménage de ses informations lorsqu’elle juge que la connexion entre les neurones codant une information n’est pas assez forte.

Analyses d’extraits d’interview

Je vais vous parler du rôle de l’oubli à travers différents points de vue, en quoi est-il important et dans quelles mesures et la contribution de la recherche genevoise à ce sujet.

En premier lieu, selon la neuropsychologue Jussana Ammann, l’oubli est un symptôme. Lorsque les patients parlent de problèmes de mémoire, en général, ils vont les caractériser par un oubli. Elle dit aussi que l’on peut faire une association entre un problème de mémoire (un oubli) et un problème intentionnel. En effet, pour que l’information soit enregistrée, il faut qu’il y ait une capacité intentionnelle qui soit bien présente. On va faire le tri des informations à traiter donc, l’oubli est utile sinon on serait submergé d’informations. Actuellement, on est stimulé partout, que ce soit sur le plan visuel, auditif (Internet, journaux, radios, conversations). On ne peut pas tout enregistrer donc on va faire le tri des informations qui nous intéressent et des informations qui nous semblent pertinentes pour notre survie. Selon elle, avant l’oubli, il y a d’abord le tri des informations que l’on va traiter. Ensuite, ces informations sélectionnées vont être traitées. Et parmi ces informations traitées, on va de nouveau faire le tri des informations qui vont être mémorisées et celle qui ne vont pas l’être. De nouveau, tout dépend de beaucoup de facteurs dépendant de chaque personne: les informations qui sont importantes ou des informations répétées (ex: date de naissance car on vous la demande souvent, par contre, si on vous demande le premier jour d’école de votre scolarité, vous n’allez pas vous en souvenir car c’est très rare que l’on vous demande cette information). Un autre exemple: Un patient ayant une démence d’Alzheimer va se rappeler de sa date d’anniversaire dans les stades précoces (car il a tellement répété cette information dans sa vie qu’elle est ancrée en mémoire) par contre, les autres informations il va les oublier.»

Selon madame Morand, l’oubli viendrait d’un défaut de récupération de l’information. Cette information est quelque part dans le cerveau mais le processus de récupération est mauvais. Cet oubli peut provenir d’un problème de stockage qui est mal fait. L’oubli de l’information ne peut pas provenir d’un problème de stockage car à ce moment-là, on ne parlerait pas d’oubli car c’est comme si l’information n’a pas été perçu correctement, donc la trace ne sait pas formé et à ce moment-là l’oubli serait une perte par rapport à une trace qui a été inexistante. Exemple: C’est comme si on avait pas vu une partie du film: elle ne peut pas être oubliée vu qu’elle n’a pas été perçue.

Lorsqu’on a un trouble de mémoire, madame Morand dit qu’il peut y avoir des problèmes à chacune de ses étapes. Chez les personnes qui sont atteints de la maladie d’Alzheimer, c’est souvent à l’encodage qu’il y a des problèmes. Les problèmes de stockage peuvent arriver dans une multitude de cas. Les personnes qui ont des difficultés dans les fonctions exécutives (stratégie, organisation, planification) vont avoir des problèmes pour aller chercher/rechercher de façon correcte l’information.»

Les problèmes de récupération ne touchent pas plus les personnes âgées que les personnes adultes. En effet, dans le vieillissement normal, ces fonctions sont légèrement dégradées mais la récupération n’est pas plus dégradée que les deux autres termes (encodage et stockage). Par exemple, chez la personne alcoolique, il y a un défaut des fonctions exécutives et donc elle va avoir de la peine à se rappeler de souvenirs encodés (pas forcément très bien encodés car cela dépend du degré d’hébriété). Il y a des difficultés dans les trois stades chez les personnes dépressives et surtout dans le processus de récupération. Donc, il n’y a pas que les personnes âgées qui sont touchés.»

Nous pouvons voir que madame Morand pense que l’oubli est une fonction tandis que madame Ammann pense qu’il s’agit plutôt d’un symptôme.

Deuxièmement, madame Amman insiste sur la théorie du tri qui expliquerait donc que l’on oublie: «Avant l’oubli, il y a d’abord le tri des informations que l’on va traiter. Ensuite, ces informations sélectionnées vont être traitées. Et parmi ces informations traitées, on va de nouveau faire le tri des informations qui vont être mémorisé et celle qui ne vont pas l’être.» En outre, Madame Ammann met en avant l’aspect émotionnel, l’exemple du miroir revient fréquemment: on se réveille un matin pour se brosser les dents et le miroir tout à coup tombe, même si cet évènement n’est pas répété, on va s’en souvenir car il a provoqué une forte émotion de peur ou de surprise. Donc la théorie du tri est

en fonction de ce que nous avons décidé d’apprendre ou de facteurs émotionnels.

Tandis que madame Morand, insiste sur les défauts qui surviennent à l’encodage, au stockage ou à la récupération et non pas sur le tri de l’information dont elle n’a pas parlé explicitement.

Il y a ambiguïté entre la définition de Madame Morand et de Madame Ammann. Madame Morand dit qu’un souvenir qui a été ravivé alors que vous n’avez pas fait exprès de le faire n’est pas vraiment implicite. Lorsque vous vous souvenez d’un souvenir, il est clair que c’est un souvenir qui a été mémorisé auparavant. Alors que quand on parle de quelque chose d’implicite, on a pas forcément le souvenir de l’avoir vécu ou mémorisé: «Imaginons que je vous montre des formes/traits successivement. Au début ça ne ressemble à rien puis les traits s’organisent et finalement vous découvrez à la fin que c’est une rose. On procède à cette activité chez un amnésique (c'est-à-dire une personne qui a perdu sa mémoire explicite). Il lui reste néanmoins la mémoire implicite. Après un bout de temps, on remontre l’exercice, le patient n’a aucun souvenir d’avoir déjà vu l’image de la rose néanmoins il va découvrir cette rose bien plus tôt que la dernière fois. Ca signifie qu’il a une trace implicite.» Tandis que madame Ammann dit qu’il y a la mémoire implicite et la mémoire explicite. La mémoire explicite s’occupe des informations que nous allons chercher en mémoire de manière intentionnelle. Les informations qui surgissent automatiquement font partie de la mémoire implicite. Ce ne sont pas des informations que nous avons été recherché dans notre mémoire mais peut-être qu’il y a eu automatiquement des associations. On active un souvenir qui va en activer d’autres associés, sans qu’il y ait une intention réelle. Donc il y a la une définition tout à fait différente.

Lorsque j’ai demandé pourquoi nos souvenirs sont déformés par notre psychisme. Madame Ammann m’a répondu qu’ils sont déformés tout à fait. «A chaque fois que vous allez récupérer une information en mémoire, il y aura des petits éléments qui vont être modifiés au fur et à mesure que l’on raconte l’évènement.» Donc l’évènement subira des petites déformations parce que c’est de l’ordre de l’être humain car on n’a jamais la précision nécessaire. Tandis que madame Morand donne plutôt une explication plus psychanalytique en disant que le rêve aurait la fonction selon Freud de digérer ce qu’on fait durant la journée, de réorganiser les évènements. Certaines choses pour des raisons morales ou insupportables à notre conscience, vont soit être refoulés, soit être déplacés et reviendraient sous d’autres formes de manière à ce que ce soit plus passable pour la moral. Donc, dans ce sens-là, les souvenirs peuvent être déformés.

Madame Morand ne croit pas que l’on puisse s’approprier le souvenir d’une personne:«Non, par contre ce qui peut arriver c’est des constructions de souvenirs. Par exemple: si on regarde un album photo, à force de le voir, on va avoir l’impression de se souvenir de fausses situations». Tandis que Madame Ammann pense qu’il est possible de s’approprier un souvenir même si c’est assez rare: « Disons que ce que vous avez raconté est assez rare car le protagoniste de l’histoire est un élément important dont on ne peut pas oublier facilement».

Cependant, nous pouvons voir des les mêmes points de vus. Par exemple, les deux neuropsychologues sont d’accord sur le fait que le vocabulaire, les connaissances etc. font partie de la mémoire sémantique et les évènements de la mémoire épisodique.

En outre, elles pensent que nous oublions pendant notre enfance car notre cerveau n’est pas assez mature pour se souvenir des évènements.

Leurs opinions convergent et se rallient, mais le point de vue le plus important est que l’oubli est important et que la mémoire ne va pas s’en l’oubli, c’est un cercle!

Aujourd’hui la recherche genevoise s’occupe de plusieurs domaines, mais en particulier le lien entre mémoire et émotion. Monsieur Van der Linden dit que ces expériences sont pour montrer en quoi l’émotion contribue à améliorer le fonctionnement de la mémoire: «On a aussi travaillé sur les relations qui existent entre le fait de récupérer un événement passé et la capacité d’imaginer un événement futur, on a montré que c’était les mêmes mécanismes. Donc, on a montré que, par exemple, essayer de se souvenir de ce qui nous est arrivé un jour et s’imaginer un événement futur comme notre anniversaire correspond au même mécanisme. Nous avons aussi tenté d’explorer si un patient amnésique à la suite d’une lésion qui touche l’hippocampe, donc le patient ne peut plus se souvenir des épisodes qu’il a personnellement vécus, peut néanmoins apprendre des nouvelles choses comme du vocabulaire, ou de nouvelles connaissances alors qu’il n’est pas capable de se souvenir d’anciens épisodes. C’est ce qu’on appelle la dissociation entre mémoire sémantique et mémoire épisodique. Nous avons aussi travaillé sur ce qu’on appelle la mémoire de travail ou la mémoire à court terme, c'est-à-dire, la capacité de retenir de petites quantités d’informations. Nous avons regardé quelles régions du cerveau sont sollicitées pour la mémoire de travail.»

Actuellement, selon Van der Linden, d’autres chercheurs à Genève travaillent sur la nature de ce qu’on appelle les confabulations, c'est-à-dire, des patients qui, à la suite d’une lésion cérébrale, ne savent plus où ils sont. Les chercheurs essayent de voir quels mécanismes gouvernent ce phénomène.

Bilan/conclusion

La plupart des gens pensent que la mémorisation est beaucoup plus importante que l’oubli et qu’il faut à tout prix vaincre cet oubli pour tout savoir et pouvoir tout retenir: exercices pour faire progresser sa mémoire, mots-croisés etc. En dépit de cette opinion commune, l’oubli est «plus important» que la mémoire. Comme l’a saisi Alexander Chase dans un paradoxe lapidaire: «La mémoire c’est ce qu’on oublie» ou Thomas Fuller:«On oublie bien plus qu’on se rappelle» (6).

Il est important psychologiquement d’oublier, car les souvenirs peuvent être douloureux et lourds à porter si on s’en souvenait quotidiennement. Prenons l’exemple d’une femme traumatisée par une agression, elle ne pourrait pas vivre dans le moment présent et profiter de bons moments car son passé la poursuit. Elle doit donc avoir recours à un corps médical (psychiatres et psychologues) pour évacuer ce poids. Car l’oubli d’un évènement riche en émotions ne peut pas s’effacer de lui-même et automatiquement de notre tête, sinon ce serait trop facile d’être heureux: nous sélectionnerions automatiquement que les bons moments! Grâce à des séances, le patient se confie et tous les refoulements s’évacuent ce qui fait que le patient «relativise». Par conséquent, l’oubli est indispensable pour s’ancrer dans le présent après un épisode traumatisant. Dans les dossiers de la recherche (11), Bernard Croisile rapporte que pour les psychiatres, l’oubli est nécessaire à notre survie psychique. Mais le refoulement psychanalytique actif de certains épisodes déplaisants n’a pas encore fait sa preuve biologique.

En outre, l’oubli est une manière confortable d’échapper au devoir en tout genre en rejetant la faute sur la fragilité mnésique de notre cerveau: c’est un oubli volontaire. Et lorsqu’on choisit volontairement d’oublier, on élimine plutôt le négatif, pour se protéger de ce qui gêne ou fait souffrir. On choisit délibérément d’oublier, et inversement on retient les souvenirs en le rappelant volontairement à la mémoire. Par exemple: Il est pratique d’oublier ses courses que l’on a pas envie de faire, des messages délicats à transmettre, ou des rendez-vous que l’on redoute. En général, on oublie pour «se tirer d’affaires»!

Du point de vue neurobiologique, l’oubli est indispensable. Il est positif ou négatif selon les contextes. Il est indispensable pour concentrer son attention sur une tâche ou une personne par exemple. L’oubli fait partie intégrante d’un mécanisme, il est indispensable à l’équilibre mental, puisqu’on ne pourrait pas se concentrer sur une tâche sans que celle précédente nous encombre le cerveau et nous met dans l’impossibilité d’accéder à la mémorisation d’autres nouveautés. Dans les dossiers de la recherche (11), Bernard Croisile rapporte que pour les neurologues, notre cerveau n’est pas programmé pour tout retenir. «Il est sans doute programmé pour oublier… parfois». Mais les mécanismes cérébraux ne sont pas encore mis en évidence. Cependant, tout s’accorde à dire que l’oubli est, paradoxalement, une caractéristique indispensable de notre mémoire! Il nous aide à retenir seulement les faits principaux en faisant abstraction d’éléments mineurs parasites: nous pouvons ainsi plus facilement construire des concepts et généraliser des connaissances ou les mettre à jour. Il est en effet essentiel de remplacer d’anciennes informations par de nouvelles plus adaptées à l’évolution des connaissances. Ou, à l’inverse, de ne pas perdre les connaissances de base en négligeant les faits mineurs.

L’handicap social de personnes atteintes de mémoire absolue est de lourde conséquence. Le journaliste Veniamin (11), étudié par le neuropsychiatre russe Alexandre Luria, présentait une hypermnésie totale à la longue très incommodante: la profusion de détails qu’il ne cessait d’enregistrer était un obstacle à sa réflexion, à la formation de concepts, au raisonnement. Les individus ayant une mémoire absolue doivent faire des efforts pour oublier et non pas pour apprendre.

Pour conclure, les opinions divergent grandement comme nous avons pu le voir avec deux avis de neuropsychologues. Les découvertes au sujet de l’oubli et de la mémoire sont en perpétuel mouvement et les résultats ne cessent de progresser à Genève. Malgré un manque de réponses «fixes», nous savons que le rôle de l’oubli est fort important et forme un ensemble cohérent avec la mémoire et complet: l’un ne va pas s’en l’autre.

*REMERCIEMENTS*

Je tiens à remercier toutes les personnes qui m’ont aidé à faire ce travail, et sans lesquelles je ne serais sûrement pas arrivée à de tels résultats!

Tout d’abord, je tiens à remercier mon professeur, qui m’a suivi pendant tous ces mois, Monsieur Lombard.

Ensuite, je tiens à remercier les personnes qui ont eu la gentillesse, de m’accorder les interviews, c'est-à-dire: Madame Morand, Madame Jussara Ammann, le Professeur Van der Linden à travers l’interview de Daniel Binyet que je remercie de m’avoir donner son interview.

Un grand merci, s’adresse à toutes ces personnes, qui ont contribué à ce travail de maturité, et grâce auxquelles, il a pu se réaliser comme je le souhaitais.

Annexe 1: Retranscription (15)

Interview faite par Daniel Binyet, le 6 décembre à l’université Uni-Mail, à Monsieur Martial Van der Linden qui est neuropsychologue et professeur de psychologie clinique de l’adulte à l’Université de Genève.

* Ces dernières années, il y a eu beaucoup d’avancées dans la recherche sur la mémoire, quelle contribution l'université de Genève a apporté dans ces avancées ? Quelle a été la contribution de votre équipe ?

Nous avons travaillez sur plusieurs domaines. Particulièrement, le lien entre mémoire et émotion. C’est montrer en quoi l’émotion contribue à améliorer le fonctionnement de la mémoire. On a aussi travaillez sur les relations qui existent entre le fait de récupérer un événement passé et la capacité d’imaginer un événement future, on a montré que c’était les mêmes mécanismes. Donc, on a montrer que, par exemple, essayer de se souvenir de ce qui nous est arrivé un jour et s’imaginer un événement futur comme notre anniversaire correspond au même mécanisme. Nous avons aussi tenté d’explorer si un patient amnésique à la suite d’une lésion qui touche l’hippocampe, donc le patient ne peut plus se souvenir des épisodes qu’il a personnellement vécus, peut néanmoins apprendre des nouvelles choses comme du vocabulaire, ou de nouvelles connaissances alors qu’il n’est pas capable de se souvenir d’anciens épisodes. C’est ce qu’on appelle la dissociation entre mémoire sémantique et mémoire épisodique. Nous avons aussi travaillez sur ce qu’on appelle la mémoire de travaille ou la mémoire à court terme, c'est-à-dire, la capacité de retenir de petites quantités d’informations. Nous avons regardé quelles régions du cerveau sont sollicitées pour la mémoire de travail.

*Sur quel sujet les chercheurs genevois travaillent-ils le plus actuellement ?

Actuellement, d’autres chercheurs à Genève travaillent sur la nature de ce qu’on appelle les confabulations, c'est-à-dire, des patients qui, à la suite d’une lésion cérébrale, ne savent plus où ils sont. Par exemple, s’ils sont à l’hôpital et on leur demande où ils sont, ils vont répondre qu’ils sont à l’hôtel ou en vacances… Les chercheurs essayent de voir quels mécanismes gouverne ce phénomène.

-Qu’est ce qu’il faudrait faire pour mieux mémoriser en général ? Pour un travail scolaire ?

Premièrement, la mémoire n’est pas un muscle. La mémoire c’est, avant tout, mettre en place une bonne stratégie d’organisation de l’information. Plus vous comprenez bien une matière, plus vous la mémorisez. Comprendre c’est organiser. Il faut organiser en partie distincte, essayer de lier chaque élément de la matière à des éléments qu’on connaît déjà. Essayer de récupérer une information c’est essayer de trouver un fil. Plus la matière est bien organisée dans notre mémoire, plus on aura moyen de la récupérer l’une après l’autre. Deuxièmement, il vaut mieux étudier de manière espacée, dans le temps, que de manière ramassée.

-A l’école, souvent on apprends pour un examen, puis on oublie quelque temps plus tard. Comment cela se fait il ? Comment faudrait-t-il apprendre pour bien mémoriser à long terme ?

C’est qu’on a mal mis en mémoire, car si on a bien mis en mémoire, ça reste. Si, par exemple, on ne se souvient plus trois semaines plus tard des réponses d’un examen, c’est qu’on a mal encodé l’information. On est resté à un niveau superficiel. De plus, si on est motivé, intéressé par la branche qu’on étudie, on met en place un encodage plus profond, plus élaboré. Tandis que quand on n’est pas motivé, on reste à un niveau superficiel, on ne fait que de la répétition par cœur. Quand on ne fait que d’apprendre par cœur, on aura peut être une bonne note à l’examen, mais trois semaines pus tard on ne se souviendra plus des réponses. Tandis que quand on essaie de comprendre, on organise, on crée des fils qu’on va retirer lors de l’examen.

- Qu’est ce que vous pensez que les enseignants devraient savoir sur la mémoire pour mieux enseigner à leurs élèves ?

Ils doivent savoir que la mémoire n’est pas un muscle, que mémoriser n’est pas autre chose que comprendre, qu’il vaut mieux faire de l’apprentissage espacé dans le temps plutôt que d’apprendre de façon massée. Il y aurait plein de choses à enseigner aux enseignants. Parce que beaucoup de gens on la conception fausse que la mémoire est un muscle et qu’il faut l’entraîner, mais faire beaucoup de mots croisés va peut être faire qu’on soit fort en mots croisés, mais ce n’est pas pour ça qu’on sera meilleur dans d’autres domaines. Mémoriser c’est organiser l’information pour mettre des fils en mémoire qui vont nous permettre d’accéder à la bonne information. Plus on organise notre matériel à mettre en mémoire, plus on fait des liens, plus on va retirer des choses.

Quelle hygiène de vie et alimentation devrait on avoir pour dégrader notre mémoire le moins possible ?

Une alimentation normale convient très bien. Quand on nous dit qu’il faut manger du poisson, ou des conseil dans ce genre là, c’est de la rigolade. Il faut bien dormir, car le sommeil joue un rôle important dans la mémoire. Evidemment, quand on mémorise, il ne faut pas avoir bu ou fumer. Car fumer, à la fois du tabac ou du cannabis, a des effets négatifs sur la mémoire. De plus la consommation répétée d’alcool a des effets très néfastes sur la mémoire.

Annexe 2 (16)

Interview faîte à Madame Jussara Ammann le 7 décembre à la clinique de Carouge (1B Clos de la Fonderie, 1227 Carouge)

Présentation: «Je suis neuropsychologue, j’ai fait une formation de psychologue à l’université qui implique quatre ans de licence ensuite j’ai fait une spécialisation en neuropsychologie. Il s’agit d’un stage de pratique en milieu hospitalier dans le domaine de la neurologie. Il y a des différences entre un neurologue et un neuropsychologue: un neuropsychologue n’est pas un médecin d’une part et d’autre part, il travaille sur les fonctions cognitives (comme la mémoire, la concentration, le langage et les conséquences des lésions cérébrales sur le fonctionnement intellectuelle de la personne). Tandis que le neurologue s’occupe plutôt de tout ce qui est moteur, ou sensitif, tout ce qui est plus de l’ordre du médical: les réflexes par exemple et d’autres examens (scanners cérébraux etc.). Les neuropsychologues vont s’occuper des conséquences fonctionnelles sur le système intellectuel de la personne. Donc ici, je vois des patients qui ont de 15 à 80 ans dans le cadre de suspicion cérébrale avérée (ce sont déjà des lésions cérébrales mis en évidence par exemple suite à un accident de voiture donc à un traumatisme crânien ou cérébral ou suite à un accident vasculaire cérébrale) qui montrent une hémorragie par exemple. On va procéder à des examens et on va faire un bilan neurologique pour évaluer quelles sont les conséquences de ces lésions-là sur le fonctionnement de la personne.»

Faîtes- vous le bilan neurologique par rapport au comportement du patient?

«On va plutôt analyser le comportement suite à une lésion cérébrale c'est-à-dire qu’il y a certaines régions du cerveau qui sont responsables de la gestion des émotions et du contrôle du comportement émotionnel. Certaines fois lorsque ces régions-là sont atteintes par des lésions, il peut y avoir un trouble du comportement. Je suis spécialisée plutôt dans les troubles du comportement dus à une lésion cérébrale et non dus à un problème plus psychique ou psychiatrique.»

Est- ce que l’amygdale joue-t-elle un grand rôle dans le contrôle du comportement émotionnel?

«Tout à fait, s’il y a des lésions de l’amygdale, ça peut provoquer des problèmes au niveau de la gestion d’émotions.»

Comment définissez-vous la mémoire?

« La mémoire dépend de tout un circuit anatomique du cerveau. Ce n’est pas seulement une région bien précise, c est tout une région qui est responsable de la mémoire. Par exemple: si tous les jours vous vous brossez les dents et qu’un jour le miroir tombe par terre et que vous avez eu peur, vous allez mémoriser ce jour-là. Tandis que les autres jours, s’il n’y avait pas d’émotions liées, s’il s’agit d’évènements routiniers ou répétitifs sans qu’il y ait un aspect émotionnel, il est beaucoup plus difficile de mémoriser.»

Comment définissez- vous les oublis?

«L’oubli est un symptôme. Lorsque les patients parlent de problèmes de mémoire, en général, ils vont les caractériser par un oubli. Je m’occupe plutôt des oublis dus à des lésions cérébrales. On peut faire une association entre un problème de mémoire (un oubli) et un problème intentionnel. En effet, pour que l’information soit enregistrée, il faut qu’il y ait une capacité intentionnelle qui soit bien présente. On va faire le tri des informations à traiter donc, l’oubli est utile sinon on serait submergé d’informations. Actuellement, on est stimulé partout, que ce soit sur le plan visuel, auditif (Internet, journaux, radios, conversations). On ne peut pas tout enregistrer donc on va faire le tri des informations qui nous intéressent et des informations qui nous semblent pertinentes pour notre survie. Par exemple: si on entend à la radio que dans 5 minutes un tremblement de terre va se produire, nous serons beaucoup plus attentifs alors que si on nous dit qu’il y a un tremblement de terre parmi d’autres catastrophes dans le monde ça nous touchera moins.

Avant l’oubli, il y a d’abord le tri des informations que l’on va traiter. Ensuite, ces informations sélectionnées vont être traitées. Et parmi ces informations traitées, on va de nouveau faire le tri des informations qui vont être mémorisées et celle qui ne vont pas l’être. De nouveau, tout dépend de beaucoup de facteurs dépendant de chaque personne: les informations qui sont importantes ou des informations répétées (ex: date de naissance car on vous la demande souvent, par contre, si on vous demande le premier jour d’école de votre scolarité, vous n’allez pas vous en souvenir car c’est très rare que l’on vous demande cette information). Un autre exemple: Un patient ayant une démence d’Alzheimer va se rappeler de sa date d’anniversaire dans les stades précoces (car il a tellement répété cette information dans sa vie qu’elle est ancrée en mémoire) par contre, les autres informations il va les oublier.»

Il n’arrive plus à enregistrer de nouvelles informations?

«Oui, c’est ce qu’on appelle le gradient temporel. Plus l’information est ancienne, et plus ça va être ancré et stocké dans la mémoire tandis que les nouvelles vont être oubliées au fur et à mesure.»

Faut-il une certaine répétition?

«Soit il faut une certaine répétition soit il faut lier un aspect émotionnel. Par exemple: l’histoire du miroir, même si elle n’est pas répétée, on va s’en souvenir car elle a provoqué une certaine émotion. La répétition est nécessaire pour nous tous et chez un patient qui a la maladie d’Alzheimer, la répétition ne suffit plus.»

Est-ce qu’un fait répété plusieurs fois est définitivement stocké ou est-il susceptible d’être oublier?

«C’est très difficile de dire ce qui est définit ou pas. La mémoire est très flexible et en perpétuel mouvement. C’est un mot qui est difficilement utilisable dans ce contexte-là. On peut dire que votre date de naissance est une information définitive parce que elle fait partie de votre vécu et partie des informations que vous avez tellement répétées, qu’on peut dire que c’est définitif.»

Comment se fait-il qu’un souvenir que l’on pensait avoir oublié, resurgisse tout à coup?

«Il y a la mémoire implicite et la mémoire explicite. La mémoire explicite s’occupe des informations que nous allons chercher en mémoire de manière intentionnelle. Les informations qui surgissent automatiquement font partie de la mémoire implicite. Ce ne sont pas des informations que nous avons été recherché dans notre mémoire mais peut-être qu’il y a eu automatiquement des associations. On active un souvenir qui va en activer d’autres associés, sans qu’il y ait une intention réelle.»

La mémoire est-elle plus importante que l’oubli?

«C’est complètement associé. Pour pouvoir oublier, on doit avoir enregistré quelque chose. Sans la mémoire, il n’y a pas d’oubli. On ne peut pas parler de la mémoire sans parler d’oubli.»

Pourquoi l’oubli est-il indispensable au processus mnésique?

«Parce qu’on n’a pas un nombre illimité d’informations qu’on peut mémoriser. Notre mémoire a des limites même si la capacité de stockage est immense donc il est important d’oublier. Je ne vais pas rentrer dans l’ordre de l’inconscient, ou des fantasmes ou de tout ce qui est de l’ordre freudien et psychanalytique qui dit que le refoulement est une sorte d’oubli qui a été nécessaire pour la survie de la personne. C’est une approche qui assez différente et qui n’est pas du tout la mienne. Donc, je ne pourrais pas vous parler de cet aspect-là. J’utilise plutôt l’approche cognitive et c’est vrai que l’oubli est indispensable et fait partie de l’être humain.»

Etes- vous d’accord avec le processus de dégradation?

«Je distingue le vieillissement normale et le vieillissement pathologique. Dans le vieillissement normale, les connections neuronales sont moins riches que chez un sujet jeune. Donc, la personne âgée a moins la capacité de mémoriser les informations et surtout moins de capacité à les organiser. En effet, la mémoire dépend des caractères à organiser les informations. C’est comme si on avait pleins d’affaires à classer dans différents tiroirs pour qu’il soit plus facile de les récupérer. Tandis que lorsque on enregistre les informations sans les organiser, elles sont peut-être là mais on n’arrive pas à les rechercher. Dans le vieillissement normal, la vitesse de traitement de l’information est beaucoup plus ralentie et plus faible donc ce qui fait qu’il y a moins de capacité à organiser les informations, et à les traiter de manière à mieux les récupérer.

Je n’utiliserais pas le terme de dégradation, je dirais qu’il y a moins de connections neuronales qui se font dans le vieillissement normal. Dans le vieillissement pathologique, il y a vraiment une atrophie du cerveau qui fait qu’il y a moins de neurones actifs ou fonctionnels.»

L’oubli est-il une imperfection ou une nécessité?

«Tout dépend de la mesure dans laquelle on oublie. L’oubli est nécessaire car on a des limites au niveau du stockage. Nous n’avons pas une mémoire illimité donc il est nécessaire qu’on oublie. Par contre, si c’est dans l’excès et si c’est des informations importantes et qu’on les oublie malgré la répétition et malgré un travail sur ces informations-là, l’oubli dans ce cas est néfaste. Il y a un côté salutaire du moment où le niveau d’atteinte n’est pas important tandis que du moment où c’est excessif, c’est plutôt néfaste et négatif.»

Donc il est assez rare de se rappeler de tout plutôt que d’oublier un peu trop?

«C’est de nouveau la théorie du tri. Peut-être que certaines personnes vont développer leur capacité mnésique dans un domaine bien spécifique par exemple: grande capacité de mémoriser tous les numéros de l’annuaire ou un passionné de football qui mémorise toutes les dates des matchs, le nom des joueurs etc. C’est ce qu’on appelle des domaines d’expertise. Certaines personnes vont développer des domaines d’expertise dans une sphère bien particulière et vont avoir une quantité d’informations qui vont être stockées qui est supérieur à la moyenne dans ce domaine-là. Et dans d’autres domaines, il n’y aura pas de capacité mnésique surdéveloppée.»

Donc la capacité mnésique dépend de notre envie d’apprendre dans un domaine?

«Tout à fait, c’est de nouveau la théorie du tri en fonction de ce que nous avons décidé d’apprendre ou de facteurs émotionnels.»

L’oubli de son vocabulaire est-il similaire à l’oubli d’un événement de sa vie?

« Tout dépens de la stratégie d’encodage de l’information. Si, par exemple, vous allez apprendre une liste de vocabulaire d’allemand et si vous répétez ces mots sans faire d’associations avec d’autres éléments de votre vie et de manière à ce qu’il n’y ait aucune sollicitation des différentes modalités (oral, écrit, etc.), vous avez un canal très restreint, ça veut dire que vous avez moins de chance de mémoriser cette information. Plus vous avez d’associations à d’autres informations et à d’autres modalités sensorielles, plus l’information va être beaucoup mieux ancrée en mémoire.

Dans les évènements de la vie quotidienne, il peut y avoir aussi des stockages similaires. Pour reprendre l’histoire du miroir: il y a une association d’aspect émotionnel qui fait que l’information va être ancré en mémoire de manière beaucoup plus solide.

Par contre, on divise la mémoire épisodique qui est la mémoire d’évènements de notre vie à la mémoire sémantique qui est la mémoire du vocabulaire. Dans la mémoire sémantique, l’information n’est pas liée à un contexte spatiotemporel c'est-à-dire qu’on ne se rappelle plus de l’évènement. C’est une mémoire beaucoup plus automatique. Tandis que la mémoire épisodique est la mémoire des évènements, toujours associés à un contexte spatiotemporel. On va avoir une image d’un évènement particulier, dans un endroit particulier, les personnes étaient impliquées, etc. Donc on sépare la mémoire sémantique de la mémoire épisodique.»

Est-ce que les souvenirs sont déformés par notre psychisme et pourquoi?

«Ils sont déformés tout à fait. A chaque fois que vous allez récupérer une information en mémoire, il y aura des petits éléments qui vont être modifiés au fur et à mesure que l’on raconte l’évènement. Donc l’évènement subira des petites déformations parce que c’est de l’ordre de l’être humain car on n’a jamais la précision nécessaire.»

C’est parce qu’on oublie le souvenir petit à petit ou parce que nous le modifions inconsciemment?

« On oublie certains évènements précis. C’est difficile de savoir si c’est de l’ordre du conscient ou de l’inconscient. Je pense que c’est plutôt inconscient.»

Est-ce possible que des personnes s’approprient un souvenir qu’on leur a raconté?

«Difficile à expliquer, c’est comme si dans un premier temps, vous vous rappelez que la personne vous a raconté un souvenir et puis petit à petit vous oubliez que le protagoniste de l’histoire est votre ami par exemple. Donc vous allez modifier le personnage principal.

C’est courant dans les rêves. On peut avoir des rêves qui sont tellement riches en détails sensoriels que l’on va avoir une image, comme si on avait un film et que l’on arrive plus à savoir si on l’a vraiment vécu ou si c’était qu’un rêve. Donc on peut faire un parallèle avec l’épisode que vous avez rapporté: une personne vous a raconté une histoire et au fur et à mesure en la racontant ou en réactivant le souvenir dans votre mémoire, vous allez petit à petit modifier l’imagecomme si durant le film c’était un autre acteur.

Disons que ce que vous avez raconté est assez rare car le protagoniste de l’histoire est un élément important dont on ne peut pas oublier facilement.»

Est- ce possible de croire qu’un évènement est un souvenir alors que c’était un rêve?

«Cela est plus fréquent. Si vous rêvez d’une histoire très rare par exemple: vous êtes sur un volcan et vous vous faîtes engloutir par les laves, par principe de réalité vous allez savoir que c’est un rêve. Mais si vous rêvez d’un détail de la vie quotidienne par exemple, vous allez peut-être pensez que cet évènement s’est réellement produit. Tout dépend de la probabilité que ce soit réel ou pas. Si c’un un rêve qui est très bien construit où il y a toute une histoire avec une intrigue là, effectivement c’est rare que l’on confonde la réalité et le rêve mais si c’est un petit flash qui a duré quelques secondes et que c’est juste une image parfois on peut se demander si c’est un rêve ou la réalité. Ca dépend des éléments du rêve qui sont plus ou moins réalistes. Ca peut arriver que l’on confonde les deux.»

Il faudrait que l’on s’en souvienne le matin lorsqu’on vient de se réveiller pour confondre rêve et réalité?

«Non, pas forcément. Le rêve peut être enregistré en mémoire de manière inconsciente donc on ne se rappelle pas d’avoir rêvé. On peut avoir la réactivation d’un souvenir beaucoup plus tard qui peut être activé par d’autres souvenirs associés à cette image-là.»

Pourquoi on ne se rappelle pas forcément de notre enfance?

«Parce qu’il y a une maturation cérébrale qui est nécessaire et qui se développe durant les premières années de l’enfance. C’est très rare qu’on ait la capacité de mémoriser les informations qui seront stockés jusqu’à la fin de nos jours. On se rappelle du vocabulaire que l’on a appris avant l’âge de trois ans par exemple, par contre on ne se rappelle pas des évènements.»

Parce qu’on était trop concentré et occupé à apprendre à marcher par exemple?

«Voilà. Et le cerveau n’était pas encore suffisamment mature pour qu’on puisse mémoriser les évènements tandis que les informations plus d’ordre sémantique. On utilise la mémoire implicite et inconsciente lorsque par exemple, un enfant apprend à ouvrir un agenda.»

Est-ce possible d’oublier totalement un mauvais souvenir?

«Ca dépend. Je vais vous décrire deux cas. Le premier cas est de l’ordre de l’oubli par protection c'est-à-dire qu’un souvenir très douloureux et difficile à accepter émotionnellement va être omis de la mémoire. A mon avis il a été stocké. Dans les cas des viols, l’encodage et le codage ont été faits mais pas la récupération comme si vous n’avez jamais accès à un fichier de votre ordinateur donc vous n’avez pas conscience que vous l’avez. C’est un oubli de protection car vous savez que si vous le réactivez, vous allez avoir de la peine à gérer ce souvenir sur le plan émotionnel.

Il y a l’autre souvenir qui occasionne des amnésies circonstancielles ou des amnésies post traumatiques. Par exemple: Si vous avez un accident de voiture et que votre cerveau est tellement altéré et atteint par l’accident lui-même, il y aura toute une période de votre vie qui va être effacé donc là ce n’est même pas par protection émotionnelle mais par incapacité du cerveau à mémoriser les informations pendant cette période-là. C’est un problème organique. Les personnes qui se souviennent de l’accident vont avoir des flash blacks très souvent après de l’accident et vont développer (parfois) ce qu’on appelle un syndrome de stress post traumatique tandis que les personnes qui ont une amnésie de l’accident (c’est assez rare) c’est comme si leur cerveau «dormait» pendant ce temps. Le cerveau n’a pas pu encoder donc il n’y a pas de récupération possible.»

Croyez-vous à la théorie freudienne?

«Je pense qu’il y a plutôt une terminologie différente. Freud va utiliser le concept du refoulement et les neuropsychologues vont utiliser d’autres concepts différents plus ou moins proches.»

Un souvenir peut-il s’arrêter à mi-chemin?

«Il y a des évènements de nos vie qu’on a pas stocké, c’est la théorie du tri. Typiquement, les événements qui provoquent des souvenirs très difficile en général, on va les mémoriser car cette information est chargée émotionnellement mais on va laisser «de côté» la récupération.»

La récupération d’un bon souvenir se fait-il automatiquement?

«Je ne dirais pas automatiquement mais plus facilement. Il y a certaines personnes qui font le tri d’informations uniquement négatives. Par exemple: Vous pouvez dire qu’il a fait froid toute l’année parce qu’aujourd’hui il fait froid alors qu’il y a eu de belles journées durant l’année mais vous allez vous souvenir uniquement des mauvais jours. Ca dépend de notre état d’esprit, de la manière dont nous traitons les informations et les trions associée à des émotions.»

Dans quelle mesure la recherche genevoise a-t-elle contribué?

« Des études sont constamment en cours sur la mémoire. Actuellement on travaille beaucoup sur l’aspect émotionnel. Je travaille en clinique et à l’hôpital cantonal depuis 4 ans. Je ne travaille plus en neurologie. Je sais qu’il y a toujours des travaux qui sont faits sur la mémoire. Mais c’est vrai qu’on utilise plutôt des termes techniques tels que: encodage, stockage, récupération, déficit de récupération qui se manifeste par un oubli, donc on n’utilise pas le mot oubli mais ça correspond à ce symptôme-là.»

Annexe 3 (17)

Interview faite à Madame Delphine Morand le 14 décembre 2006 à l’hôpital de Bel- Idée

Comment définissez vous la mémoire?

«La mémoire permet à la personne de construire son identité. Elle se développe au cours de l’enfance donc elle est immature au début (en tout cas dans les trois premières année), c’est pour cela que l’on a peut de souvenirs de nos premières années. Il y a une phase très prolifique de la mémoire, là où on apprend le mieux de toute notre vie, jusqu’à apparemment une dizaine ou douzaine d’années puis, la mémoire va en décroissance.»

Pourriez-vous m’expliquer les activités dans le domaine de la neuropsychologie?

«J’ai travaillé d’abord en neurologie, puis dans des cliniques et l’hôpital Bon Séjour en rééducation. Je travaille dans le domaine de la neurologie et de la rééducation des fonctions cognitives tels que la mémoire, le langage, la perception, l’attention qui est très lié avec le processus mnésique. Si on n’a pas l’attention, la mémoire est nettement défaillante. Tous ces registres sont donc abordés en neuropsychologie et sont potentiellement rééducable. Cela fait six ans que je suis à la clinique de Belle Idée. Et ici, en psychiatrie, le rôle de la neuropsychologie est «triple». En premier lieu, nous faisons un bilan (diagnostique) de la plupart des fonctions pour évaluer les patients qui présentent des difficultés cognitives pour voir où il en est. Nous essayons de voir si les troubles que nous constatons sont dus à sa maladie psychique ou est-ce qu’elle pourrait provenir d’une maladie organique et donc d’une dégénérescence (maladie d’Alzheimer, Parkinson) ou d’une tumeur (cas rare). Est-ce que les troubles sont dus à une chute (alcooliques qui perdent l’équilibre à des niveaux d’ébriété importants donc un traumatisme crânien peut se manifester).

En deuxième lieu, notre fonction serait d’évaluer le niveau de la personne en vue d’une réinsertion sociale ou professionnelle. Nous évaluons son niveau intellectuel, ses compétences de mémoire/ de concentration, de planification pour voir où on peut l’orienter et savoir ce qu’il est potentiellement incapable de faire.

Le troisième aspect dont j’ai moins l’habitude de faire ici par rapport à mes autres postes, c’est la rééducation. Chez les schizophrènes, les dépressifs, ou les anxieux, ils ont des troubles de mémoire qui sont «entraînable» et que nous pouvons prendre en charge. Ce cas est assez rare.»

Comment définissez-vous l’oubli?

«Il faut prendre la mémorisation en terme de trois étapes: réception de l’information (engrangement), le stockage qui suppose des organisations dans le cerveau avec les autres informations que vous connaissez ultérieurement. En effet, lorsque vous voyez quelque chose, de façon inconsciente, elle est comparée à ce que vous connaissez déjà dans le monde alors vous le stocker plus ou moins facilement si c’est un domaine connu où on peut faire des liens ou si c’est un domaine qui est neuf. Et la troisième étape est la récupération pour voir à tout moment une information qui a été stockée en mémoire. Cette mémoire est soit volontaire soit involontaire. Par exemple: Les personnes qui ont des traumatismes de guerre ou des violences importantes qui se font de manière involontaire et qui les hante nuit et jour.

Dans ces trois phases-là, pour moi l’oubli viendrait d’un défaut de récupération que l’information est quelque part dans le cerveau mais le processus de récupération est mauvais. Cet oubli peut provenir d’un problème de stockage qui est mal fait.»

Pourrait-on oublier au niveau de l’encodage?

«A ce moment-là je ne parlerais pas d’oubli car c’est comme si l’information n’a pas été perçu correctement, donc la trace ne sait pas formé et à ce moment-là l’oubli, pour moi, serait une perte par rapport à une trace qui a été inexistante. Exemple: C’est comme si on avait pas vu une partie du film: elle ne peut pas être oubliée vu qu’elle n’a pas été perçue.

Lorsqu’on a un trouble de mémoire, il peut y avoir des problèmes à chacune de ses étapes. Chez les personnes qui sont atteints de la maladie d’Alzheimer, c’est souvent à l’encodage qu’il y a des problèmes. Les problèmes de stockage peuvent arriver dans une multitude de cas. Les personnes qui ont des difficultés dans les fonctions exécutives (stratégie, organisation, planification) vont avoir des problèmes pour aller chercher/rechercher de façon correcte l’information.»

Les problèmes de récupération touchent-ils plus les personnes âgées que les adultes ou enfants?

«Dans le vieillissement normal, ces fonctions sont légèrement dégradées mais je ne pense pas que la récupération soit plus dégradée que la récupération. Je ne suis pas une spécialiste de la personne âgée. Par exemple, chez la personne alcoolique, il y a un défaut des fonctions exécutives et donc elle va avoir de la peine à se rappeler de souvenirs encodés (pas forcément très bien encodés car cela dépend du degré d’ébriété). Il y a des difficultés dans les trois stades chez les personnes dépressives et surtout dans le processus de récupération. Donc, il n’y a pas que les personnes âgées qui sont touchés.»

Comment l’alcool peut provoquer des troubles de mémoire de cette sorte?

«Il y a un aspect anesthésiant de manière générale je dirai. Ce qui faut savoir, c’est qu’à un certain point, il peut y avoir des maladies suites à la prise d’alcool chronique qui fait défaut non seulement à la récupération mais aussi à un défaut de l’encodage nommé syndrome de Korsakoff qui se caractérise par la destruction des corps mamillaires et de l’eu thalamus qui est une zone sous corticale. En général, on dit que l’hippocampe est un lieu de stockage et est plutôt la fin du processus. Il y a tout un circuit de Papez qui est impliqué dans la mémorisation et quand une de ces structures est détruite, le processus de mémorisation est affaiblit.»

La mémoire est-elle plus importante que l’oubli en neuropsychologie?

Non, car pour qu’il y ait oubli, il doit y avoir mémorisation. Pour qu’il y ait oubli, il faut qu’il y ait une information qui a été perçue et enregistrée. La mémorisation est en premier lieu, et après il y a oui ou non destruction de cette information. Exemple: En psychanalyse (processus de refoulement), l’information est toujours stockée quelque part sauf qu’elle n’est plus présente à la conscience. En neuropsychologie, il y a aussi ce qu’on appelle la mémoire explicite ou consciente parce que dans les tests on dit à la personne qu’on va faire un test de mémoire et il y a aussi la mémoire implicite. Par exemple, on regarde si un mouvement (mémoire procédural ou des gestes) est effectué de plus en plus rapidement ou on fait des tâches qui n’ont pas l’air de tâches de mémoire. Et finalement, lorsqu’on demande une énième tâche qui a l’air d’être totalement séparée et en faite on se rend compte que des éléments qui ont été demandés ou produits à la première tâche se retrouvent à la 2ème et de façon plus fréquente qu’au niveau du hasard.

On parle souvent d’oublis de la mémoire explicite ou dans la mémoire dite épisodique, plus que pour la mémoire implicite ou procédurale. Je pense que la mémoire est plus une globalité tandis que l’oubli est un processus.»

Comment se fait-il qu’un souvenir que l’on pensait avoir oublié, revienne? Est-ce qu’on pourrait parler de mémoire implicite?

«Oui si on veut. C’est un souvenir qui a été ravivé alors que vous n’avez pas fait exprès de le faire mais ce n’est pas vraiment implicite. Lorsque vous vous souvenez d’un souvenir, il est clair que c’est un souvenir qui a été mémorisé auparavant. Alors que quand on parle de quelque chose d’implicite, on a pas forcément le souvenir de l’avoir vécu ou mémorisé.»

Pourriez-vous me donner des exemples pour la mémoire implicite?

«Imaginons que je vous montre des formes/traits successivement. Au début ça ne ressemble à rien puis les traits s’organisent et finalement vous découvrez à la fin que c’est une rose. On procède à cette activité chez un amnésique (c'est-à-dire une personne qui a perdu sa mémoire explicite). Il lui reste néanmoins la mémoire implicite. Après un bout de temps, on remontre l’exercice, le patient n’a aucun souvenir d’avoir déjà vu l’image de la rose néanmoins il va découvrir cette rose bien plus tôt que la dernière fois. Ca signifie qu’il a une trace implicite.»

Est-ce possible de procéder à cette exercice si notre mémoire explicite n’est pas atteinte?

«La mémoire implicite est une mémoire que l’on teste très peu à part chez les amnésiques car on essaie de leur inculquer des données très ponctuelles (leur adresse par exemple). Par exemple, donnez-moi pendant deux minutes toute une catégorie d’animaux, puis toute une catégorie de fruits. Puis, je vous donne ABR ou TIG. Vous aurez tendance à répondre plus vite que quelqu’un qui n’a pas accompli la première tâche. Et pourtant, vous ne savez pas que vous avez fait une tâche de mémoire. On peut tester le faite que vous avez une mémoire de ce qui s’est passé il y a quelques instants alors que vous n’avez pas conscience que nous sommes en train de le faire.»

Et comment expliquer les «déjà-vu»?

«A mon avis, j’aurais tendance à dire que la situation est tellement proche par certains éléments d’une situation vécue et dont vous ne faites pas le lien et donc vous avez l’impression d’avoir déjà-vu tel évènement. Une mauvaise connection se fait et fait croire au cerveau que vous avez déjà-vu ou déjà connu alors que ce n’est pas le cas sans que vous soyez conscient que votre cerveau vous trompe.

Les flash-back sont une reviviscence des souvenirs du passé. On a conscience d’avoir vécu tel souvenir, nous n’avons aucun doute de l’avoir vécu. Au contraire, le déjà-vu est une impression qu’on a déjà vécu cette situation alors que c’est la première fois. On n’a pas un souvenir réel, et c’est assez flou d’ailleurs on ne pourrait pas dire ce qui se passe après.»

Pourquoi l’oubli est-il indispensable dans le processus de mémoire?

«Je ne sais pas si l’oubli est si indispensable que cela. L’oubli est très fonctionnel. En effet, votre cerveau serait en surcharge s’il retenait exactement chaque minute de votre vie. Il y a un processus sélectif qui fait que les informations non-pertinences sont si ce n’est oublié, mis en repos ou masqués. Exemple: On voit quelqu'un dans la rue que vous avez remarqué. Un mois plus tard, vous ne vous souvenez plus de cet l’épisode. Par contre, si vous revoyez cette personne, vous allez la reconnaître. Cette information-là n’est pas forcément pertinente pour votre vie, mais à laisser de façon ou d’une autre une trace.

Mais, nous n’avons pas les mêmes capacités de mémoire qui sont pour chacun plus ou moins limitées. Chacun de nous à des capacités différentes dans de divers domaines comme pour la mémoire. Nous n’avons pas tous la même capacité d’attention, et donc de mémorisation.

Pour en revenir l’oubli, je pense qu’il est là pour ne pas qu’on soit débordé. D’ailleurs, il y a des gens hyper mnésiques qui sont envahis en tout temps par des reviviscences de souvenirs inutiles et donc ils sont constamment éveiller par leur cerveau. Ce n’est pas agréable. Donc il est important d’oublier ce qui n’est pas important pour garder le fil de notre vie.

L’oubli a donc une fonction indispensable, mais je serais prudente en me demandant si c’est un oubli complet ou est-ce que l’information est masquée.»

Par quels moyens procédez-vous pour qu’une personne ayant subit un traumatisme psychologique puisse oublier?

«C’est de la psychothérapie. Je ne traite pas des gens qui ont eu des stress post traumatiques. Je sais qu’il y a eu une vague il y a peu de temps du debriefing qui consiste à demander à une personne de lui raconter ce qui s’est passé. Le but étant de faire évacuer le choc et d’atténuer la mémoire ou l’évènement envahissant.

Actuellement, on a arrêté le debriefing. Chaque personne ne répond pas de la même manière à un choc. Certains vont le digérer parce qu’ils ont des ressources et des phénomènes de résilience et d’autres vont avoir des flash back et des reviviscences constantes. Les personnes ayant digérés ce choc, ne doivent surtout pas faire de debriefing. Au contraire, on alimenterait la reviviscence des souvenirs alors que le patient à tranquillement, sans savoir comment ni pourquoi, est en train de faire le chemin inverse: il métabolise et digère. Donc on ne devrait ne rien faire. Par contre, si au bout d’un mois, la personne a des symptômes de flash back, des impressions de revivre l’évènement, à ce moment-là, on fait une désensibilisation. On va demander au patient de raconter l’évènement choquant tout en étant extrêmement prudent. On évalue le degré d’anxiété, on lui fait raconter l’histoire jusqu’à un certain niveau d’anxiété. Lorsque le niveau d’anxiété est trop élevé, on introduit un élément apaisant, calme, appelé refuge ou lieu de sécurité. Puis on revient à parler de l’évènement marquant. Le but n’est certainement pas de faire oublier car c’est impossible. Cet évènement fait partie de la vie mais ce tiroir dans lequel l’évènement est rangé ne doit pas s’ouvrir tout seul mais par notre propre volonté. Il faut réussir à replacer l’évènement dans une constellation de souvenirs de façon la plus normale pour éviter d es irruptions.»

Quant est-il pour le traumatisme psychologique?

«Les amnésies psychogènes sont tellement difficiles à vivre, que la seule façon de tenir bon c’est de les mettre à part. Je ne sais pas s’il est forcément bon d’aller chercher ce souvenir. Si tel souvenir a été évacué, ça veut dire que l’on est plus fonctionnel ainsi. Maintenant, si ça engendre des problèmes de souffrances, des conversions en problèmes psychosomatiques, on pourra utiliser l’hypnose qui n’est pas un abaissement de la conscience mais est à un autre niveau de conscience qui permet d’abaisser les barrières pour avoir accès à un évènement.»

L’oubli est-il une imperfection ou une nécessité?

«Chez une personne normale, c’est une nécessité et une fonction. Il y a d’autre part l’oubli pathologique. Toutes les causes d’oublis organiques font que l’oubli devient trop encombrant pour qu’une vie se fasse. Dans l’amnésie psychogène, dans la mesure où la personne se porte bien avec ce trou de mémoire dans sa vie, cet oubli est protecteur. Si le problème se déplace peut-être faut-il travailler sur ce qu’il s’est passé.»

L’oubli de son vocabulaire est-il similaire à un évènement de sa vie?

«La mémoire épisodique s’inscrit dans un espace spatiotemporel, tandis que la mémoire du vocabulaire, des connaissances de culture générale font partie de la mémoire sémantique. Celle-ci s’organise dans un autre type de réseaux qui va être assez solide et difficilement atteints tant par des troubles organiques que des troubles psychologiques ou d’événements post traumatiques. Mis à part la maladie de l’Alzheimer où la mémoire sémantique est très atteinte, je dirai qu’en général, la mémoire sémantique est la mémoire la moins touchée dans les types de mémoire.»

Comment se fait-il que cette mémoire sémantique soit «plus solide»?

«Probablement que les réseaux rattachés entre eux sont largement ancrés et ont tellement été répétés et utilisés que la mémoire sémantique est difficile à atteindre.»

Est- ce que les souvenirs peuvent être déformés par notre psychisme et pourquoi?

«Le rêve aurait la fonction selon Freud de digérer ce qu’on fait durant la journée, de réorganiser les évènements. Certaines choses pour des raisons morales ou insupportables à notre conscience, vont soit être refoulés, soit être déplacés et reviendraient sous d’autres formes de manière à ce que ce soit plus passable pour la moral. Donc, dans ce sens-là, les souvenirs peuvent être déformés. Une personne atteinte de la maladie de Korsakoff par exemple, le malade oublie au fur et à mesure. Il fait des fausses reconnaissances et des confabulations donc ont fait l’hypothèse que lorsqu’il y a des trous mnésiques, inconsciemment, il va essayé de les combler en racontant une histoire qui n’est pas la réalité mais qui fait un lien et donc qui mène à des erreurs.»

Est-ce possible de s’approprier un souvenir?

«Non, par contre ce qui peut arriver c’est des constructions de souvenirs. Par exemple: si on regarde un album photo, à force de le voir, on va avoir l’impression de se souvenir de «fausses situations».

Il peut arriver que quelqu’un vous raconte un évènement relevant, un peu choquant et que vous rêvez de l’histoire qu’il vous a racontée, vous allez vous souvenir de votre propre rêve qui est le souvenir de quelqu’un d’autre. A part un télépathe, je ne vois pas comment on pourrait s’approprier le souvenir de quelqu’un d’autre.»

Est-ce qu’on peut penser qu’un rêve est un souvenir?

«Je pense qu’il peut y avoir des niveaux de conscience lorsqu’on rêve. Lorsqu’on est dans un sommeil semi réveillé, on a l’impression que c’est un souvenir après coup. Nous avons cette impression parce que les mécanismes de conscience sont abaissés donc il y a confusion entre rêve et réalité.»

Pourquoi ne se rappelle-t-on pas de notre enfance?

«Parce que les circuits de la mémoire ne sont pas matures à ce moment-là notamment l’hippocampe. Ces structures vont grandir en même temps que grandi le cerveau. Avant, les connections ne sont pas optimums. On suppose que c’est lié à un manque de maturation pour ce qui est de la mémoire explicite. On peut par contre trouver des phénomènes de mémoire implicite par exemple: mémoire du goût de sa mère lorsque nous sommes dans son ventre et lorsque nous naissons, nous nous en souvenons implicitement.»

Est-ce on ne se souvient pas de notre enfance parce que nous étions trop occupés à apprendre des tas de nouvelles choses?

«Je ne pense pas car on apprend toujours à chaque âge. On pourrait imaginer qu’il y ait tellement de choses à apprendre en même temps que du coup, il y a une sorte de télescopage: la mémoire motrice implicite (importante pour les coordinations, la marche, la motricité) occupe plus de place que la mémoire des évènements.»

Est-ce possible d’oublier totalement un mauvais souvenir?

«Non, au contraire, si je vous dit ne pensez surtout pas au lapin rose, plus vous allez y penser. On ne peut pas volontairement oublier.»

Est-ce possible d’oublier inconsciemment?

«Oui, c’est tous ces processus de refoulement dont on a parlé pour l’amnésie psychogène. Ce n’est pas vous qui choisissez d’oublier, c’est une mesure de protection qu’a eu votre psyché parce que c’est insoutenable de l’avoir en mémoire, donc on met de côté, on scotomise.»

Croyez-vous à la théorie freudienne?

«Je serais plutôt partisane de mêler neuroscience et théorie psycho dynamique. Il y a des choses qui ne sont pas compatibles.»

Bibliographie

Livres

1. BROUILLET Denis et SYSSAU Arielle, Mémoire et oubli Apports de la psychologie cognitive au vieillissement, Presses Universitaires de Grenoble

2. CHAPOUTHIER Georges, Mémoire et cerveau biologie de l’apprentissage, Paris, Jean Paul Bertrand, 1988

3. DR STORA Frank et COHEN Véronique, Ne perdez plus la mémoire ce qu’il faut savoir pour ne rien oublier, Paris, Les guides santé Hachette, 1989

4. FELDMEYER Jean-Jacques, Cerveau et pensée La conquête des neurosciences, Paris, Georg éditeurs, 2002

5. LAPP Danielle, Bien connaître et utiliser sa mémoire en toutes circonstances, Paris, Dunod, 1992

6. LAPP Danielle, Comment améliorer sa mémoire à tout âge, Paris, Dunod, mai 1990

7. LIEURY Alain, Des méthodes pour la mémoire, Paris, Dunod, 1992

8. SCHACTER Daniel L. traduit de la 1ère édition américaine par DESGRANGES Béatrice et EUSTACHE Francis, A la recherche de la mémoire: le passé, l’esprit et le cerveau, Paris, Bruxelles, DeBoeck Université, 1999

9. SQUIRE et KANDEL traduit de la 1ère édition américaine par DESGRANGES Béatrice et EUSTACHE Francis, La mémoire, Paris, DeBoeck Université, janvier 2002

10. TOURBE Caroline, «Des puces pour recouvrer la mémoire», in Science&Vie, octobre 2006, n°1069, pages 80 à 83

11. «La mémoire: Comment notre cerveau apprend, se souvient et oublie», Les dossiers de la Recherche, février-avril 2006, n°22

Sites internet

12. DAVID LA FLAMME, ECOLE MONTCALME, «Les mécanismes moléculaires de la mémoire», in l’art de neuromoduler, http://www.csrs.qc.ca/MitchellMontcalm/proj/NEUROMOD/3.htm, 1er décembre 2006

13. WIKIPEDIA, «mémoire», in Wikipedia encyclopédie libre, http://fr.wikipedia.org/wiki/M%C3%A9moire, 1er décembre 2006

Cd-rom

14. ENCARTA, mémoire, encyclopédie standard 2002, Microsoft, 2002

Annexes

15. Annexe 1: Interview faîte par Daniel Binyet au professeur Martial Van der Linden, neuropsychologue et professeur de psychologie clinique de l’adulte à l’Université de Genève

16. Annexe 2: Interview faîte à Madame Jussara Ammann, psychologue diplômée en neuropsychologie

17. Annexe 3: Interview faîte à Madame Delphine Morand, neurologue

18. Annexe 4: mémoire neurobiologique


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