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Table des matières

Collège Calvin 30 septembre 2002 Professeur responsable : François Lombard

Travail de Maturité

Les OGM une solution au problème de la faim dans le monde ? ? ?

Erminia Nally-Meyrat Groupe 406


1. Introduction

En 1865, lorsque Grégor Mendel étudiait la transmission de certains caractères sur les petits pois et énonçait ainsi les premières lois de l'hérédité, il était bien loin de se douter que 137 ans plus tard, l'homme serait capable d'intervenir sur les gènes, responsables de ces caractères.

L'importance et la rapidité de toutes les découvertes traitant de la Génétique engendrent parallèlement beaucoup de questions.

Aujourd'hui, il est impossible de compter le nombre d'articles titrant en majuscule : " Mystère de la Génétique ", " OGM ", " ADN "...

Pourtant face à cette surabondance d'informations, il n'est pas toujours aisé de comprendre tous les enjeux du débat. Mais qu'en est-il des OGM ?

En 1983, des scientifiques mettent au point le premier tabac génétiquement modifié en Belgique.

Très vite naît l'espoir que cette nouvelle génération de plantes détient un formidable potentiel : réduction des coûts de production, augmentation de la résistance des plantes aux maladies, augmentation de la productivité.

C'est ainsi que durant les années suivantes, plusieurs autres espèces de plantes génétiquement modifiées voient le jour et sont commercialisées dès 1994.

Si les pro OGM, voient dans ces plantes une merveilleuse performance scientifique et veulent profiter au maximum de cette nouvelle technologie, très vite un courant anti OGM s'installe. Les hommes qui l'animent, voient ici les prémisses d'un abus sur la propriété des gènes, un danger écologique et une perte des goûts du terroir.

Une énorme polémique est engagée entre ces deux tendances, une polémique qui met en jeu également le rôle de " la " science au sein de nos sociétés.

Les firmes biotechnologiques qui sont à la tête du développement des OGM, restent convaincues et continuent leurs recherches.

Elles avancent un argument de poids en affirmant même que les OGM pourraient être une solution au problème de la faim dans le monde. Leurs détracteurs répliquent qu'au contraire cette nouvelle technologie va contribuer à accroître encore davantage les inégalités entre pays riches et pays pauvres et donc la faim dans le monde.

A l'heure où l'Europe rejette massivement ces plantes modifiées alors que leur production ne cesse de croître aux Etats-Unis et au Canada, il me semble judicieux de m'interroger sur cette question qui paraît simple mais qui en soulève tant d'autres : Les OGM peuvent-ils être une solution à la faim dans le monde ?

Face à ce grand mal qu'est la famine, qui ne souhaiterait pas détenir la solution miracle permettant enfin à toutes les populations du globe de manger à leur faim ?

Mais les firmes multinationales productrices de semences génétiquement modifiées, en proposant leurs produits aux pays en voie de développement, ne cherchent-elles pas aussi à défendre leurs propres intérêts ?

Existe-t-il des alternatives aux OGM ?

Nous voyons que la question est tout autant économique et politique, qu'écologique et humanitaire et qu'il s'agit de se forger sa propre opinion en pesant les avantages et les désavantages ainsi que les différents intérêts des partis impliqués : firmes biotechnologiques, producteurs, agriculteurs, consommateurs, gouvernements et agences internationales de l'ONU : FAO, PNUD.

Je tenterai d'y répondre ainsi :

* en posant la question : qu'est-ce qu'un OGM ?

* en répertoriant les différants types disponibles sur le marché et en soulignant leur potentiel et les enjeux qui y sont liés

* en me penchant sur les arguments des différents antagonistes pour arriver à mes propres conclusions.

Les notes en bas de page renvoient aux ouvrages de la bibliographie portant le numéro indiqué.


2. Qu'est-ce qu'un OGM ?

Les OGM, organismes génétiquement modifiés, sont des organismes ayant subi une transgenèse c'est-à-dire un transfert de gène (via diverses techniques) leur permettant ainsi d'exprimer des caractères qui étaient jusqu'alors propre à un autre organisme.

Il s'agit donc d'organismes auxquels on a modifié le patrimoine génétique1.

Par exemple pour le maïs Bt, il s'agit d'un maïs auquel on a rajouté le gène d'une bactérie du sol Bacillius thuringiensis, codant pour la production d'une toxine qui tue le principal ravageur du maïs: la pyrale.

Pour transférer le gène de la bactérie dans le maïs il y a deux moyens possibles :

- Par un vecteur biologique, c'est-à-dire en utilisant une bactérie Agrobactérium tumefaciens qui a la particularité de transférer une partie de son ADN dans le génome de la plante dans laquelle elle est introduite.

- Par un vecteur mécanique, c'est-à-dire avec un canon à particule. On bombarde les cellules végétales avec des microbilles enrobées du gène que l'on veut intégrer. En traversant les cellules les microbilles déposent les séquences d'ADN dont elles sont chargées. Evidemment cette technique engendre pas mal de pertes et de ratés c'est pourquoi, pour s'assurer que le transfert de gène a bien eu lieu, on attache au gène que l'on introduit un antibiotique. Les cellules végétales sont alors mises en culture dans un milieu hostile pour les cellules ne possédant pas cet antibiotique il ne reste alors que les cellules génétiquement modifiées.


3. Les différents types d' OGM

Il existe trois types d'OGM :

* Les OGM portant un gène de résistance à un insecte (OGM pesticide),

* Les OGM portant un gène de résistance à un herbicide spécifique (OGM herbicide),

* Les OGM représentant un produit amélioré au point de vue nutritif.

3.1 Les OGM pesticides

Il y a deux sortes d' OGM pesticides :

Ceux qui résistent aux parasites possèdent un gène issu d'une bactérie du sol nommée Bacillius thuringiensis ou Bt. Ce gène amène la plante à produire une protéine néfaste pour les insectes nuisibles à la plante cultivée.

Dans le cas du maïs, la plante est protégée contre les larves de papillon (la pyrale d'Europe Ostrinia nubilalis, Diatraea grandiosella (Dyar) répandue au sud-ouest des Etats-Unis, Diatraea crambidoides (Grote) au sud des Etats-Unis, et Helicoverpa zea (Boddie).

Et ceux qui résistent aux virus comme le PLRV ( virus responsable de la maladie de l'enroulement de la feuille de pommes de terre ) ou au virus PVY ( maladie virale destructrice et transmise par le pucerons ) ou au virus dévastateur de la patate douce et du manioc.

Exemple d'OGM pesticides :

Le coton Bollgard , le maïs Yield Gard, la pomme de terre New Leaf Plus, produits par Monsanto ; le maïs T125 produit par Agrevo ; le maïs Bt11 produit par Novartis.

Actuellement, dans les pays en développement des études sont entreprises afin d'introduire dans la patate douce et le manioc (culture de base en Afrique ) un gène de résistance au virus qui dévastent régulièrement ces cultures dans le but d'assurer une meilleure sécurité alimentaire aux petits cultivateurs des pays du Sud.

Les OGM pesticides améliorent la quantité et la qualité de la production. Les agriculteurs peuvent diminuer la quantité d'insecticide qu'ils appliquent aux cultures et améliorer leur bénéfice.

Mais il y a le risque que certains insectes développent une résistance au gène Bt et deviennent ainsi de " super " insectes nécessitant alors deux fois plus de pesticide pour être éliminés.

Un autre risque est que certaines espèces d'insectes essentielles à l'écosystème disparaissent parce que l'insecticide est sécrété de façon continue par ce type de plantes modifiées.

3.2 Les OGM herbicides

Ces OGM possèdent un gène de résistance à un herbicide donné, produit par la même firme que celle qui produit les semences modifiées.

Exemple d'OGM herbicides :

Le Maïs, le Coton, le Colza et le Soja Roundup Ready, produits par Monsanto sont résistants à l'herbicide total Roundup également produit par Monsanto.

Ces OGM permettent aux agriculteurs de semer plus tôt, et d'utiliser des variétés à haut rendement et à maturation tardive, donc d'effectuer de plus gros bénéfices.

Ils peuvent également arroser leurs cultures d'herbicide (dans le cas des éléments cités ci-dessus du Roundup produit également par Monsanto) dès que les premières pousses apparaissent puisqu'elles sont indifférentes à ce produit ce qui n'est pas le cas avec une plante non modifiée. Un seul herbicide suffit puisque le Roundup contrôle 145 espèces de mauvaises herbes, en inhibant l'EPSP synthase qui est une enzyme intervenant au sein des cellules végétales (et plus spécialement des chloroplastes), dans la synthèse des acides aminés aromatiques essentiels à la synthèse intracellulaire des protéines, lesquelles sont indispensables a la croissance des plantes, ce qui représente moins de dépenses pour l'agriculteur.

Mais il y a le risque que les plantes sauvages développent une résistance à l'herbicide et qu'il faille, par conséquent utiliser des produits plus puissants. Un autre risque est que les agriculteurs vaporisent plus d'herbicides puisque leurs cultures y sont insensibles. Cette trop large diffusion d'herbicide pourraient détruire certaines mauvaises herbes consommées dans certains pays en développement. La perte de ces espèces diminue la biodiversité.

Enfin, l'herbicide étant produit par la même firme que les semences, l'agriculteur se trouve la dépendant de son fournisseur.

3.3 Les OGM représentant un produit amélioré au point de vue nutritif

Ces OGM possèdent un gène ajouté qui code pour la production d'un élément nutritif supplémentaire ou qui stimule la production d'une substance nutritive déjà présente dans la plante mais en trop petite quantité.

Exemple :

Le riz Golden, auquel on a ajouté un gène de jonquille plus un gène bactérien permettant ainsi à la graine de produire du beta-carotène qui est l'élément principal de la vitamine A. L'objectif est de combler une carence dont 100 à 140 millions d'enfants souffrent et qui entraîne chaque année la cécité de 500 000 d'entre eux dont la moitié meurt dans l'année.

Ces OGM rendent les cultures de base plus nutritives et assurent un meilleur revenu aux cultivateurs. En assurant une meilleure sécurité alimentaire des pays en développement, ces OGM ont le plus grand potentiel humanitaire.

Mais les semences sont très coûteuses et l'apport nutritif est moindre.

Les recherches sur ce type d'OGM n'en sont encore qu'à leurs débuts et sont à l'étude en ce moment.


4. Tableau récapitulatif

Type d'OGM Technique Potentiel

OGM pesticides

Insertion d'un gène de résistance à un parasite ou à un virus dans la plante.

Ex : gène Bt, gène de résistance au virus dévastateur de la patate douce, gène de résistance au virus PLRV, au virus PVY

POUR :

  • Amélioration de la qualité et de la productivité.
  • Réduction de la quantité d'insecticide appliquée aux cultures.
  • Augmentation des bénéfices pour les agriculteurs, pour les semenciers

CONTRE :

  • Développement d'une résistance au gène Bt chez certains insectes.
  • Disparition de certaines espèce d'insectes essentiels à l'écosystème.

OGM herbicides

Possèdent un gène de résistance à un herbicide spécifique produit par la même firme que les semences modifiées

POUR :

  • Permet d'arroser les champs d'herbicide plus tôt
  • Meilleur contrôle des mauvaises herbes avec un seul produit
  • Moins de dépenses pour les agriculteurs.
  • Meilleur rendement. Bénéfices plus conséquents.
  • Technique adaptée aux technique de conservation des sols.

CONTRE :

  • Développement d'une résistance à l'herbicide chez les mauvaises herbes
  • Renforce la dépendance de l'agriculteur à la firme
  • Quantité d'herbicide vaporisé plus conséquente
  • Destruction de certaine plantes essentielles à la survie dans certains pays
  • Perte de la biodiversité

OGM représentant un produit amélioré au point de vue nutritif.

Ajout dans du riz d'un gène codant pour la production de beta-carotène (élément principal de la vitamine A)

POUR :

  • Assurer aux cultivateur du Tiers-Monde une meilleure sécurité alimentaire
  • Rendre plus nutritives les cultures de base des pays en développement
  • Assurer un meilleur revenu aux cultivateurs

CONTRE :

  • Technique non appropriée au Tiers-Monde
  • Semences trop coûteuses

5. Reprise des arguments des différentes parties

Lorsqu'on pose la question : les OGM sont-ils une solution à la faim dans le monde ?, tout de suite, deux tendances s'opposent : d'un côté, les optimistes favorables aux OGM, qui voient en eux la solution à ce grand problème et de l'autre, les pessimistes face aux OGM, qui pensent exactement le contraire. Chaque tendance avance des arguments de poids tout à fait valables avec des exemples à l'appui. Il faut prendre chaque aspect relevé très au sérieux car il est susceptible de soulever de nouvelles problématiques et d'appeler des solutions fort différentes. C'est pour cette raison que je me suis efforcée de regrouper chacun des arguments et prises de position des différentes parties impliquées, suivant le genre de problématique qu'ils touchaient. Ceci permet de mettre en évidence les différences significatives et les oppositions qui existent entre ceux qui pensent que les OGM résoudront les problème de famine et ceux qui affirment le contraire ou en tout cas ont un avis très réservé à ce sujet.

5.1 Le point de vue des industries biotechnologiques

L'argument de poids des firmes productrices de semences génétiquement modifiées est que, à long terme, la population croissant, ses besoins vont augmenter alors que la surface disponible à la culture restera la même, voire diminuera. Pour ces firmes agro-alimentaires, les OGM sont la solution incontournable à notre survie puisqu'ils permettent de produire plus sur une même surface que des semences non modifiées.2

Ce raisonnement s'applique aujourd'hui aux pays en voie de développement. Si ces derniers connaissent la famine, c'est qu'ils rencontrent des problèmes de production et de rendement. Il n'y a pas assez de nourriture pour que tout le monde mange à sa faim. Grâce aux biotechnologies, il est possible d'augmenter le rendement avec des plantes plus résistantes qui ne peuvent être dévastées par des ravageurs. Avec un rendement supérieur, l'agriculteur pourra réaliser des bénéfices qu'il réinvestira. L'augmentation de son pouvoir d'achat sera bénéfique pour l'activité économique locale comme l'explique Florence Wambugu (chercheuse africaine dans les biotechnologies) lorsqu'elle nous dit : " Si nous arrivons à augmenter la productivité dans les zones rurales, le prix de la nourriture diminuera, ce qui laissera plus d'argent disponible pour les investissements, pour le bénéfice de l'économie. "3

Les OGM permettront aussi la culture sur des sols jusqu'alors incultivables à cause de la sécheresse, l'appauvrissement du sol ou la contamination par le sel, l'aluminium ou le fer comme le souligne Channapatna Prakash (agronome originaire de l'Inde)4.

Le programme des Nations Unies pour le développement, PNUD, avance les réflexions suivantes : " Les cultures transgéniques pourraient réduire significativement la malnutrition qui touche encore plus de 800 millions de personnes dans le monde et pourraient être plus particulièrement créatrice de valeurs pour les agriculteurs pauvres des exploitations marginales dans l'Afrique Sub-saharienne. "5

Ces nouvelles technologies auraient pour avantage de sortir les régions les plus pauvres de leur situation critique en leur permettant d'auto-assurer leur subsistance grâce à l'amélioration, par modification génétique, de leurs cultures de base.

5.2 Le point de vue des opposants aux OGM

Mais nombre d'organismes non gouvernementaux, ONG, en particulier les groupes écologistes, des organisations de femmes, de paysans, de nombreux chercheurs et une portion de plus en plus significative de la population s'opposent à ces arguments.

Pour eux, la véritable cause de la faim dans le monde réside dans la mauvaise distribution des richesses et des ressources nutritives. Comment expliquer que de riches pays d'Afrique connaissent de grosses famines alors qu'ils continuent d'exporter leurs productions agricoles vers les pays industrialisés ? Il paraît encore étrange que des pays avec un sol riche, soient souvent les plus pauvres. De plus, l'Europe et les Etats-Unis sont des surproducteurs. Chaque année, une partie de la production alimentaire doit être brûlée et un tiers de la production de céréales donné aux animaux, afin que le marché offre/demande ne périclite pas et que les prix ne s'effondrent pas.

Le problème des pays en développement vient avant tout du fait que les terres cultivables sont utilisées en majorité pour de grandes monocultures destinées à l'exportation. Ce n'est donc pas la capacité à produire qui manque mais le fait d'un choix politique qui ne favorise pas les cultures vivrières, constate M. Chahinian professeur de S.E.S. (Sciences économiques et sociales)6. Les ONG vont même jusqu'à déclarer que les OGM ne feront qu'accroître l'écart entre le Nord et le Sud puisqu'ils ne s'occupent pas du réel problème7.

On invoque également le principe de précaution face aux risques potentiels pour la santé des humains et de l'environnement que comportent les OGM.

Florence Wambugu (chercheuse africaine) n'adhère pas du tout à ce point de vue. Depuis dix ans, elle effectue des recherches sur la patate douce, aliment de base en Afrique. " Même lorsqu'il ne reste plus rien à manger, il y en a toujours un peu dans la cour. Ma mère en cultivait. Je l'ai connue. " se souvient-elle de son enfance. Avec le soutien financier de Monsanto (une des plus grosse firme biotechnologique), elle a réussi a introduire dans cette dernière, le gène de résistance à un virus responsable du rendement très faible des patates douces dans les zones tropicales. Grâce à cette espèce modifiée, elle souhaite que cet aliment de subsistance soit préservé et assure une sécurité alimentaire pour les Africains.

Elle reste convaincue que les OGM résoudront les problèmes de famine.

Pour elle, les ONG qui s'y opposent, ne font que prendre la position adoptée par l'Europe qui rejette massivement les plantes génétiquement modifiées8.

5.3 Des différences significatives

Mais la situation de ces deux continents est très différente : L'Europe a de quoi se nourrir et est même dans une situation de surproduction. Son souci est avant tout d'étudier les risques des OGM sur la santé des Européens.

Alors qu'en Afrique, la famine règne et il y a urgence à y remédier. Il vaut mieux, d'après Florence Wambugu, oser les OGM et réussir à nourrir tout le monde, que d'attendre d'être sûr que les OGM ne comportent aucun risque et soient bel et bien la bonne solution.

L'Afrique ne peu pas se permettre d'attendre car le " besoin et la faim sont bien réels " sur ce continent.

Le PNUD (programme des Nations Unies pour le développement) quant à lui, adopte une position plus modérée. Les OGM ne sont pas la seule et unique solution mais constituent un élément de réponse dans des cas précis. Le PNUD souligne également que les biotechnologies ne pourront pas remplacer d'autres solutions telles qu'une meilleure distribution et une meilleure répartition des ressources disponibles actuellement9.

En admettant qu'il y a un problème de production, n'oublions pas que les OGM ont été créés et pensés avant tout pour les pays industrialisés. Ils ne sont donc pas suffisamment adaptés aux pays en voie de développement. La FAO (organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture), relève que " les OGM ne répondent pas encore aux besoins particuliers des pays en développement. "10 En effet, les OGM actuellement en circulation, concernent une gamme encore trop restreinte de plantes par rapport à la diversité des besoins du Sud.

Si les pays en développement les adoptent, ils n'auront pas le choix d'une large variété d'espèces et se verront obligés d'entreprendre une monoculture dont l'atout est l'exportation avec les avantages et les inconvénients que cela comporte. La monoculture réservée à l'exportation se pratique au dépend d'une culture vivrière très largement assumée par les femmes et dont la disparition met en jeu la sécurité alimentaire de millions de personnes dans les pays en développement.

Les OGM sont produits par de grosses firmes multinationales qui n'ont pas les mêmes intérêts que les agriculteurs du Tiers-Monde. L'intérêt de ces firmes est avant tout de faire des bénéfices et du profit. Cette logique ne va pas dans le sens d'une aide aux pays du Tiers-Monde mais table d'avantage sur le bénéfice à court terme des monocultures.

5.4 Breveter le vivant... De quel droit ?

C'est pourquoi, de nombreux de groupes se méfient du côté " sauveur de l'humanité " que ces énormes compagnies veulent donner. En effet ces dernières ne cessent de déposer des brevets sur les plantes modifiées qu'elles mettent au point. Ceci est en soi normal puisqu'il s'agit d'un nouveau produit mais le risque est qu'il y ait des abus. C'est ce à quoi Vandana Shiva (la passionaria anti OGM, et prix Nobel Alternatif en 93)11, s'oppose fermement. Elle accuse ces firmes de s'emparer du patrimoine génétique de l'Inde en déposant des brevets sur certaines espèces de riz et de soja, alors que ces dernières ont toujours été à la disposition des agriculteurs asiatiques qui les ont améliorées au cours des ans par croisements.

Ainsi la firme américaine Rice Tec revendique un brevet sur le riz basmati et le soja, qui est originaire de l'est de l'Asie, est breveté par Calgene, une sous-firme de Monsanto.

Le dérapage se fait très vite dans ce cas là. La firme biotechnologique a un grand pouvoir financier. Il est très facile pour elle de convaincre le gouvernement de lui accorder des brevets. Une fois qu'elle les a obtenus, les paysans ne sont plus libres de planter leur semences. Ils doivent payer des redevances aux multinationales. C'est pourquoi, " il est plus qu'important que les gouvernements (ne laissent) pas le prestige des sciences moléculaires ou la perspective d'importants bénéfices pour le secteur privé, détourner les investissements de la recherche dans d'autres domaines traditionnels, comme la gestion des eaux et du sol ou l'écologie et les recherches dans le secteur public ", souligne la FAO12.

Greenpeace déclarait dans son discours " En finir avec le développement brutal " de Johannesburg en 2002 : " La difficulté vient du fait que ces brevets ne s'appliquent pas ici à des inventions mais bien à l'identification des propriétés spécifiques de certaines plantes ou de certaines variétés qui ont été découvertes ou mises au point, souvent de manière empirique, par des paysans ou des peuples indigènes connaissant particulièrement bien la biodiversité des milieux dans lesquels ils vivent. " Greenpeace cite aussi Jean-Pierre Berlan, chercheur de l'Institut national de Recherche agricole en France : " Le vivant se reproduit et se multiplie dans le champ du paysan. Cette faculté fondamentale du vivant est à tout le monde, comme la lumière du soleil et l'air que nous respirons. Elle est fondatrice de notre existence individuelle et collective. "

Monsanto rétorque que la multinationale travaille en partenariat avec les différents pays en voie de développement et que des études " en champs " sont effectuées. Récemment, la firme a même mis à disposition ses résultats du décryptage du génome du riz au ministère japonais de l'agriculture qui pilote le programme international de séquençage du génome du riz13. Il en est de même pour les recherches effectuées par Florence Wambugu sur la patate douce. Si les premiers essais " en champs " sont positifs, la patate douce améliorée, appartiendra aux Kenyans et ne représentera pour Monsanto aucune valeur si ce n'est celle d'une image très positive pour ces relations publiques14.

Pour les ONG, défavorables aux OGM, il s'agit d'un leurre puisqu'en entretenant ainsi de bons rapports avec les gouvernements des pays en voie de développement, les firmes biotechnologiques ne cherchent en fait, qu'à s'ouvrir de nouveaux marchés dans le Sud. En effet, les pays en développement sont essentiellement agricoles. Ce secteur occupe un grand pourcentage de la population et représente une part énorme de leur marché. Les multinationales convoitent d'autant plus les pays du Sud que l'Europe rejette massivement les OGM.

5.5 La stratégie " Terminator "

Les ONG dénoncent aussi le fait que les firmes mettent au point des technologies qui empêchent les plantes modifiées de se reproduire. La technique la plus connue est celle que l'on nomme " Terminator ". La logique est la suivante : programmer sélectivement l'ADN des plantes afin qu'elles tuent leur propre embryons. Les semences sont ainsi rendues stériles afin que les agriculteurs ne puissent pas les replanter d'année en année et qu'ils soient obligés de retourner chez les vendeurs de semences tous les ans.

Une autre technique appelée GURT ( genetic use restriction technologies ), consiste à activer les gènes ajoutés, par adjonction d'un produit spécifique. La première année, les graines modifiées poussent selon les promesses données mais si les agriculteurs veulent les replanter l'année suivante, ils doivent se procurer le produit servant à les activer, auprès de la firme productrice.

Ces deux procédés ont la même finalité. L'agriculteur est lié à la multinationale. Il est totalement dépendant de la firme et perd tout, si cette dernière fait faillite. La firme biotechnologique conserve ainsi son monopole.

Ces deux procédés ont fait beaucoup de bruit car elles dépossèdent les paysans de leur droit premier de replanter d'année en année leurs propres semences. Ils ne peuvent jamais s'approprier cette technologie et devenir autonomes souligne le PNUD. Ils n'ont plus la marge de manœuvre dont ils disposaient avec les semences traditionnelles. Vandana Shiva déclare que " la première des sécurités alimentaires est d'avoir des semences pour l'année suivante "15. De plus, les semences génétiquement modifiées, prometteuses de gros bénéfices, coûtent cher (en moyenne, 25 pour cent de plus que les semences traditionnelles). Les paysans, appâtés par leur potentiel, s'endettent pour s'en procurer. Si la récolte ne rapporte pas autant que promis, ils se retrouvent pris dans la spirale infernale de l'endettement dont ils se sortiront très difficilement16.

Enfin, n'oublions pas que les multinationales s'approprient des plantes cultivées depuis toujours en déposant des brevets sur ces dernières après les avoir modifiées.

Elles dépossèdent ainsi les paysans pauvres de leur seule ressource de survie. En effet, la récupération et le partage des semences est essentiel à la survie de la plupart d'entre eux. L'assurance de disposer de semences pour l'année suivante leur laisse une sorte de marge de manœuvre.

Avec les biotechnologies ils sont forcés de payer chaque année des redevances aux multinationales. Ils ne sont donc jamais sûrs de gagner suffisamment pour avoir des semences l'année suivante.

Enfin, les OGM entraînent une perte du savoir traditionnel et par la même occasion l'oubli des techniques alternatives permettant d'augmenter la production.

Tous les exemples ne sont pas si noirs.

En Chine Chen Penglan (cultivatrice de coton) a effectué, dès sa première récolte de coton OGM, un bénéfice de 500 yuan par quinzième d'hectares cultivés ce qui représente plus du triple de ce qu'aurait rapporté la même surface de blé ou de maïs. Elle souligne : " Et en plus, avec ce coton là, plus besoin d'être dans les champs en permanence pour pulvériser des produits. Il pousse tout seul ! "17

Certains petits agriculteurs, ayant planté des plants de banane tissulaire ont réalisé d'énormes bénéfices qui leur ont permis d'agrandir leur exploitation et d'avoir une vie meilleure.

Florence Wambugu souligne que si les agriculteurs africains réalisent des bénéfices, leur qualité de vie en sera améliorée. De plus ils investiront leur argent dans d'autres domaines ce qui sera bénéfique pour l'économie locale.

Les personnes critiques face aux OGM, voient les choses dans le sens opposé. Pour eux, si les paysans se mettent à cultiver des plantes génétiquement modifiées, ils achèteront leurs semences, les produits chimiques tels que les herbicides et les pesticides, à des firmes étrangères, ce qui signifie une perte pour l'économie locale.

Ces deux visions sont radicalement opposées : la première part de l'idée que les OGM augmentent les bénéfices ; elle tire des conclusions en se situant après des premières récoltes réussies. La deuxième part du point de vue que les OGM dont la garantie de réussite ne peut pas être absolue, créeront des bénéfices certains pour les firmes biotechnologiques mais seulement éventuels pour les petits agriculteurs.

5.6 Quels bénéfices ?

Les OGM détiennent malgré tout un formidable potentiel : Les OGM pesticides permettent aux agriculteurs des pays en voie de développement de ne plus avoir toutes leurs récoltes perdues à cause d'un parasite ou d'un virus. De plus, la plante contenant en elle le pesticide, il y a beaucoup moins de pesticides répandus dans l'air, l'eau et le sol, ce qui est bénéfique pour l'environnement.

Moins de pesticides à acheter, jusqu'à 80% en moins selon Monsanto, et moins de dégâts causés par les ravageurs entraînent une augmentation du taux de production et engendre plus de bénéfices. C'est un des arguments qu'utilisent les industries agro-alimentaires mais qui ne se vérifie que dans les grandes exploitations. Pour les petites exploitations par contre, le recours à des OGM pesticides, accroît les coûts de 50 à 230 dollars par hectares.

De plus, dans certains cas, les gènes de résistance n'ont pas bien fonctionné. " Le gène Bt introduit dans le coton n'a pas supporté la chaleur du sud des Etats-Unis en 1997 ." mentionne M. Chahinian.

Qui croire ?

Il en est de même avec les OGM herbicides ( résistants à un herbicide ). Ceux-ci permettent de vaporiser plus tôt de l'herbicide, car les jeunes pousses génétiquement modifiées y sont insensibles. Mais les agriculteurs ont tendance à vaporiser l'herbicide d'autant plus largement que les plantes cultivées n'en souffrent pas. Ce type d'OGM renforce la dépendance de l'agriculteur face à son fournisseur, car il doit non seulement acheter ses semences chaque année, mais encore, il est forcé d'acheter l'herbicide auquel ses semences résistent auprès de la même firme.

Qui fait alors le plus de bénéfices ?

Pour certains les OGM ont un grand avantage par rapport aux autres nouvelles technologies. Il n'y a pas besoin de connaissances particulières pour pouvoir en profiter puisque la technologie est dans la graine comme le relève Florence Wambugu et Channapatna Prakash. Ils n'engendrent donc pas les problèmes qui se sont présentés lors de la Révolution Verte où les technologies apportées n'étaient pas adaptées et les agriculteurs ne les maîtrisaient pas.

Pour d'autres, il s'agit d'une nouvelle technologie comme tant d'autres. Elle mettra longtemps avant d'être bien maîtrisée, exactement comme celles de la Révolution Verte. Cette nouvelle technologie pourrait même déstabiliser la production locale et détruire l'écosystème. Car il ne faut pas se contenter d'apporter une nouvelle technologie et laisser les paysans se débrouiller avec mais bien suivre le parcours de ces plantes modifiées et s'assurer que tout fonctionne comme promis. Ce dont les firmes agro-alimentaires ne semblent pas du tout se soucier.

D'après les firmes biotechnologiques, les OGM permettront un taux de production plus élevé dans les pays en développement. Le prix des fruits et légumes diminuera dans ces pays car l'offre augmentera alors que la demande sera la même. L'accès aux denrées alimentaires sera facilité pour les consommateurs qui auront de quoi se payer à manger. Mais côté producteurs, ils vendront moins cher leurs récoltes et réaliseront moins de bénéfices par unité de production. Cette réalité laisse songeur...

Les écologistes (Enquête sur Monsanto) affirment que les OGM empêchent la biodiversité car ils ne concernent que certaines espèces de plantes, entraînant ainsi les paysans des pays en développement à pratiquer une monoculture. Ceci a pour conséquence que certaines variétés de riz, par exemple, ne soient plus cultivées et donc disparaissent. " A mesure que le marché mondial supplante les marchés locaux, les monocultures remplacent la diversité. Traditionnellement, 10'000 variétés de blé étaient cultivées en Chine. Elles n'étaient plus que 1'000 dans les années 1970. Seulement 20% de la diversité du maïs au Mexique survit aujourd'hui. "18 La FAO souligne également que chaque année, 1'000 espèces animales et végétales disparaissent, principalement en raison de l'industrialisation de l'agriculture.

Un autre risque de perte de la biodiversité est que des OGM propagent leurs nouveaux gènes par pollinisation vers des cultures traditionnelles. Si ceux-ci portent le gène " terminator " en eux il y a le risque qu'ils stérilisent les plantes sauvages de la même espèce ou alors tout simplement qu'ils rendent un champs d'agriculture biologique, OGM.

L'homme, en intervenant directement sur les gènes, empêche la sélection naturelle et donc l'évolution. Il ne faut pas que l'homme se croie maître de la nature.


6. Avis personnel sur la question

La première difficulté à laquelle j'ai été confrontée lorsque j'ai commencé à creuser le sujet, est la masse d'arguments contradictoires mise en avant par les partis favorables ou opposés aux OGM.

J'ai donc essayé de lire les points de vue de chaque article avec un esprit neuf et ouvert, comme si je n'avais encore rien lu d'autre sur le sujet. Cet exercice m'a permis de ne pas rejeter les opinions qui n'étaient peut-être pas les miennes au départ et de les présenter dans le chapitre qui précède.

Après toute cette étude, je suis forcée d'admettre que les OGM représentent quelque chose d'exceptionnel, de presque magique pour moi. Je veux dire que d'un point de vue scientifique, cette recherche est très stimulante et qu'ils sont une merveilleuse réussite. Lorsque je réalise qu'au début du XXème siècle, les scientifiques ignoraient tout de l'ADN et qu'aujourd'hui, après l'avoir décrypté, ils sont capables d'isoler un gène et de l'implanter dans un autre organisme pour améliorer ce dernier, je suis complètement séduite. Je comprend le côté prometteur de ces recherches qui ne visaient au début, qu'à améliorer un produit pour le rendre plus performant. Mais jusqu'où peut nous entraîner une telle découverte ? A qui appartient-elle ? Je me rends compte que les questions posées par les OGM sont souvent extérieurs aux scientifiques qui les ont créés et qu'il n'est pas possible d'adopter une position radicale en faveur ou en défaveur des OGM.

Réfléchir aux applications des OGM est indispensable. Je me suis rendue compte que de nombreux paramètres venaient nuancer mes idées et que face aux OGM, les différents continents n'étaient pas égaux.

Les Européens rejettent les OGM. Ils peuvent se le permettre puisqu'ils produisent et importent suffisamment pour ne manquer de rien. Leur problème n'est pas la sous-nutrition mais la crainte de la " malbouffe ". Ils ont une longue culture alimentaire derrière eux et bien des " bons produits " qui ont fait leur preuve sur le sol européen. Vaut-il la peine de les remplacer par des aliments modifiés ? Je pense que pour l'Europe, le risque de perdre ses goûts du terroir, de modifier de manière incontrôlable l'environnement et par là, la santé des Européens est beaucoup plus important que l'amélioration de la production agricole.

Mais le problème est tout autre dans le Tiers Monde. La famine là-bas n'est pas une idée, c'est une réalité. Les Etats ne peuvent pas se permettre de se fermer aux nouvelles technologies porteuses d'un potentiel qui pourrait leur garantir de trouver une solution au problème de sous-nutrition de leur population. Si les paysans, cultivateurs d' OGM, voient leur travail facilité grâce à la résistance de leurs semences, s'ils n'ont plus à craindre la perte de leur récolte à cause de la maladie ou des parasites, s'ils obtiennent une production plus importante pour un même effort, alors, je comprends que l'on accorde du crédit aux biotechnologies

Mais les OGM, dont les recherches et la découverte s'est faite dans les pays industrialisés, dans une économie de marché en pleine expansion, basée sur la monoculture, n'ont pas été pensés au sein des pays en voie de développement pour répondre à la problématique de la sous-nutrition de la population. Il y a donc forcément un décalage entre l'origine des recherches sur les OGM et leur application dans le Tiers-Monde. Ils ne peuvent représenter qu'une solution partielle pour les pays pauvres, puisqu'ils vont de pair avec le développement des monocultures qui sont vouées à l'exportation. Dans ce cas, les OGM ne solutionnent en rien les problèmes des cultures de subsistances.

Faut-il avoir suffisamment à manger ou suffisamment d'argent pour s'acheter à manger ?

Avec le développement d'un système de monoculture, ce sont d'abord les propriétaires des terres qui verront leur pouvoir d'achat augmenter et en second lieu, celui des ouvriers agricoles. Leurs revenus leur permettront alors peut-être d'acheter des denrées importées. Or il ne faut pas oublier que les OGM ont comme qualité de demander moins de travaux d'entretien donc moins de main d'œuvre. Les OGM "herbicides" suppriment le désherbage à la main qui jusqu'alors était effectué par les femmes ce qui leur garantissait une source de revenus.

Par contre, en renonçant aux monocultures, en découpant les terres en faveur des cultures de bases choisies pour leur résistance naturelle, leur acclimatation de longue date et leur pouvoir nutritif, on peut voir la possibilité, pour chaque paysan, d'être autonome dans son alimentation. Je pense que certains OGM pourraient s'insérer dans cette politique agricole. Par exemple, les OGM possédant une résistance à un virus, connu pour dévaster les récoltes dans les pays tropicaux, ou les OGM résistants à un parasite qui détruit les récoltes, ou encore les OGM qui permettent de rendre plus nutritifs les aliments de base des pays en développement. Il est évident que ces trois type d' OGM doivent être repensés dans le cadre des pays du Tiers-Monde. Les OGM " herbicides " par contre, sont à proscrire puisqu'ils n'apportent qu'un avantage pour des exploitations à grande échelle.

Pour beaucoup d' ONG, la principale cause de la famine est la mauvaise distribution des richesses. Si des personnes continuent de mourir de faim, ce n'est pas par manque de ressources alimentaires de leur pays, mais parce que la population n'a pas les moyens d'y accéder.

J'adhère à l'idée qu'il y a une très mauvaise répartition des richesses dans le monde.

Mais je pense aussi que si les cultures vivrières pouvaient être améliorées grâce aux scientifiques, par des modifications génétiques, dans le but de garantir le minimum vital aux plus pauvres, je ne rejetterais pas cette option, en bloque pour autant que les recherches soient menées à partir de la réalité des pays du Tiers-Monde.

Le problème est que les OGM ont été conçus dans les pays industrialisés et qu'ils sont produits par de grosses multinationales qui ont pour motivation de faire toujours plus de bénéfice19. Je crains que les intentions de ces industries biotechnologiques ne soient pas désintéressées et qu'elles ne cherchent pas plutôt à s'ouvrir de nouveaux marchés au Sud.

Dans une situation idéale, il faudrait que les firmes entreprennent des études sur les cultures de base des pays en développement sans déposer de brevets sur les nouvelles espèces ainsi créées et sans que la nouvelle génération de semences soit stérile. Après avoir amélioré l'aliment de base, il faudrait que les firmes agro-alimentaires puissent offrir aux pays pauvres le fruit de leurs recherches en leur expliquant par exemple : " Voici un nouveau manioc résistant au virus dévastateurs. Si vous achetez nos graines génétiquement modifiées, nous vous assurons, bien que rien ne puisse être sûr à 100%, tel rendement annuel, sans risque de perte de récolte." Mais la recherche coûte très cher donc les firmes agro-alimentaires ne mettent pas leurs résultats à disposition des producteurs. Elles déposent des brevets, rendent les semences stériles et les vendent plus chers que les semences traditionnelles pour rembourser les années de travail nécessaires à la création de ces nouveaux produits. Il est triste de le dire, mais c'est l'appât du gain qui les pousse à entreprendre de tels exploits scientifiques et leur puissance économique est telle, qu'elles ne peuvent qu'assommer les petits agriculteurs avec les prix qu'elles pratiquent en les condamnant à emprunter pour se procurer leur semences. Le résultat est finalement inverse à celui attendu : le paysan, bien que peut-être indépendant pour assurer sa survie, se voit totalement lié à la firme qui lui fournit les semences et s'enlise dans la spirale infernale de la dette. On se rend alors bien compte de l'énorme décalage entre les possibilités des producteurs des pays riches et celles des pays pauvres. Imaginons une récolte où des semences modifiées ne répondraient pas aux attentes promises, l'agriculteur du nord devra renoncer aux bénéfices attendus comme quelqu'un qui a fait un mauvais investissement. L'agriculteur du sud par contre, qui doit presque toujours s'endetter pour acheter des semences modifiées ne peut pas se permettre de ne pas avoir les rendements promis qui ne sont en réalité jamais garantis à 100%. Il n'a alors aucun moyen de se retourner contre son fournisseur. Le combat est perdu d'avance. Comme il s'est endetté pour acheter les semences modifiées et que celles-ci n'ont pas rapporté autant que promis, il se voit obligé de réemprunter de l'argent afin de rembourser ses dettes.

La seconde grande question que je me suis posée en me documentant pour ce travail de recherche est que nous ne connaissons pas encore l'impact que les OGM pourraient avoir sur l'environnement et sur la santé.

En Europe, les gouvernements se méfient et préfèrent ne pas prendre le risque d'autoriser la culture de produits transgéniques bien que des essais y soient pratiqués et que Berne vienne d'autoriser l'Ecole polytechnique fédérale de Zurich à réaliser un essai de culture de blé transgénique en plein champ20.

Au vu de toutes les questions que nous nous posons en Europe sur les conséquences néfastes des OGM sur l'environnement et sur la santé ( je pense particulièrement à la résistance aux antibiotiques), je trouve inconvenant qu'ils soient exportés dans le Tiers-Monde et présentés comme la solution au problème de la famine avant que nous ne soyons sûrs qu'ils n'engendrent pas d'effets néfastes à long terme, sur la santé. Mais nous réfléchissons le ventre plein rétorquerons ceux qui crient famine et ce qui s'est passé au Zimbabwe en août dernier me laisse songeuse :

Alors que la population d'Afrique australe souffrait de famine, les Etats-Unis ont envoyé 17'500 tonnes de maïs comme aide humanitaire. Les sacs sont restés bloqués en Afrique du Sud car le maïs était génétiquement modifié. Le Zimbabwe, opposé aux OGM, craignait que la population plante une partie de ce maïs et déséquilibre ainsi l'agriculture locale par une " invasion " de maïs transgénique21. Cet événement me fait réagir. J'ai envie de dire que même si les OGM n'offrent pas toutes les garanties d'avenir, nous en consommons tous quotidiennement à notre insu et que les américains s'en nourrissent en toute connaissance de cause. Nous sommes toujours en vie et j'aurais préféré partager cette nourriture avec la population du Zimbabwe plutôt que de la savoir le ventre vide.


7. Conclusion

Les OGM peuvent donc constituer un petit bout de la solution au problème de la faim dans le monde, mais ils ne sont en aucun cas LA solution à ce grand problème comme l'affirment les firmes biotechnologiques productrices d'organismes génétiquement modifiés. Il faut considérer leur utilité au cas par cas et en aucun cas oublier les techniques alternatives dont les agriculteurs disposent depuis des siècles pour résoudre les problèmes de l'agriculture et qui font aussi l'objet de recherches scientifiques. Par exemple, le Centre International de Recherche sur la Physiologie des insectes et l'Ecologie a reçu en 1995 le " Prix mondial de l'alimentation " pour son travail de mise au point du système " proie-prédateur " qui se régule et assure des récoltes de maïs abondantes et régulières sans pesticides ni engrais.

Si les OGM sont exploités dans les pays en développement il est indispensable de mettre sur pied une structure réglementant l'étendue de ces cultures, comme c'est le cas dans les pays industrialisés, mais qui fait souvent défaut dans les pays du Sud, ce qui étend encore plus le pouvoir des firmes multinationales.

Dans l'idéal, la solution pour que cette technologie soit utilisée à bon escient, serait que les firmes agroalimentaires mettent au second plan leurs intérêts au profit de ceux des agriculteurs du Tiers-Monde qui ont des besoins urgents. Ce qui est loin d'être le cas à l'heure actuelle et qui ne sera peut-être jamais réalisable. Pourtant, je me demande si les capitaux investis dans le développement et l'aide au pays pauvres ne pourraient pas servir à racheter des brevets aux firmes, afin que les paysans puissent disposer des semences modifiées sans risque de se retrouver pris dans une spirale de dettes.

Si l'on considère les OGM comme une part de solution il faut mettre en balance leurs avantages avec les risques qu'ils engendrent. Est-il plus important d'augmenter le rendement de production en prenant un risque sur l'avenir de l'environnement et de notre santé, ou l'inverse ?

Pour ma part, je termine ce travail de recherche avec un sentiment de réserve face à la manière dont les OGM sont développés. Les recherches de solutions alternatives aux nouvelles technologies sont à mettre en priorité car elles se soucient autant de préserver l'environnement que d'apporter une sécurité alimentaire au pays en développement.


8 BIBLIOGRAPHIE

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3.TARDIEU Vincent, OLLIVIER Stéphanie, OGM l'Europe se met à table, Science et Vie, Septembre 2001, n°1008, pp. 78-84

Novembre 2001, n° 1010, OGM le rêve chinois, pp.120-126

4.ANBARSAN Ethisajan, De la faim aux OGM : les paysans ripostent, Courrier de L'UNESCO, Janvier 2001, n°1, pp. 16-37

5.BENOIT-BROWAEYS Dorothée, TARDIEU Vincent, LUNEAU Gilles, OGM un leurre pour le agriculteurs des pays pauvres ?, Géo , Juin 2000, n°256, pp. 36-46

6.WAMBUGU Florence, PEARCE Fred, Une chercheuse africaine plaide pour les OGM, La Recherche, Décembre 2000, n°337, pp. 84-86

7.Les OGM, richesses et servitudes tdc, 1er au 15 Février 2002, n°829

8.HINTERBERGER Marc, Le café transgénique menace la vie de millions de personnes Le Courrier, jeudi 31 Janvier 2002,

9.LABARTHE Gilles, Terminator ou la lutte paysanne contre les semences de la mort, Le Courrier, jeudi 11 Avril 2002,

10.DUVANEL Laurent, Des gros bénéfices génétiquement modifiés, Dimanche.ch, 6 Janvier 2002

11.DUCRET Isabelle, Il faut se donner le temps de tester les alternatives aux OGM, Le Courrier, jeudi 30 Mai 2002

12.CARROY Chrystelle, L'Afrique du Sud est le laboratoire de Monsanto sur le continent noir, Le Courrier, vendredi 21 Juin 2002

13.HAEBERLI David, Le Zimbabwe a faim mais refuse les OGM, Le Temps, mercredi 7 Août 2002

14.HUANG Jikun, PRAY Carl, ROZELLE Scott, Enhancing the crops to feed the poor, Nature, 8 Août 2002, volume 418

15.ACKERMAN Jennifer, OGM : notre santé en danger ?, National Geographic France, Mai 2002, vol 6.5, n°32, pp.24-37

16.VOS Anton, MONNET Vincent, Les OGM entrent dans le code, Campus, Juillet-Août 2002, n° 59, pp. 10-18

17.Rapport sur le développement humain 2001 (PNUD)

18.Tribune de Genève, 14-15 Septembre 2002

VIDEO

19.C'est pas Sorcier, France 3, Septembre 2001, Les OGM

20.Entretient, la cinquième, 13 Avril 2000, Plantes et aliments transgéniques

21.Capital : les dossiers, M6, 9 Février 2000, Bien manger, à quel prix ?

22.A bon entendeur, TSR, 9 novembre 1999, OGM : état des lieux, secret des dieux

23.A bon entendeur, TSR, 19 septembre 2000, OGM : ces graines qui font du foin !

SITES INTERNET

24.www.ainfos.ca/01/jun/ainfos00096.html

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27.www.envirodev.org/archives/biodiv/nairobi/archive_forum/article5.htm

28.www.champdesarts.com/nature/nb/ogm2.htm

29.www.angelfire.com/punk/chatnoir/ogm.html-7k

30.jlbazin.free.fr/omc.htm

31.www.monsanto.fr

32.www.greenpeace.fr

33.http://www.fao.org/ag/fr/magazine/0111sp.htm

 

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