Communication immédiate vs médiatisée

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Tout acte d'enseignement/apprentissage constitue notamment  un acte de communication et, à ce titre, est justiciable d'une analyse de type communicationnel. Par ailleurs, toute forme de communication se fonde sur un système de représentation : même si notre expérience du langage ordinaire nous invite à croire le contraire, il n'y a de communication que médiatisée. Dans le contexte de ce texte nous ne prendrons cependant pas en compte le langage verbal en situation naturelle de communication qui constitue une sorte de degré zéro de la médiatisation.
La notion de médiatisation suggère d’emblée une référence implicite à deux autres concepts qui permettent d'en cerner et d'en comprendre les différentes interprétations. Il s'agit : Ces deux références peuvent expliquer que la dénomination de communication médiatisée se soit finalement imposée au détriment de celle de communication médiate ou médiatée  qui fut un temps à l’honneur. De plus la traduction littérale communication médiatisée par l'ordinateur (CMO) de la dénomination anglaise de la télématique Computer mediated communication (CMC) a sans dû peser dans la stabilisation de la terminologie actuelle.

Il nous faudra donc prendre en compte plusieurs expressions fort proches et ne pas les confondre. Si nous avons suggéré le terme de dispositif de communication et de formation médiatisées pour désigner tout média pédagogique, nous retiendrons encore d’une part, la notion de communication médiatisée et d’autre part, celle de médiatisation. La communication médiatisée, au sens général et aujourd'hui largement admis, désigne toute forme de communication qui use d’un média au sens du langage ordinaire. Plus particulièrement la CMO indique une forme de médiatisation particulière, celle du dispositif informatique. Enfin, d’un point de vue plus théorique, et en accord avec le modèle que nous avons présenté, la communication médiatisée désigne toute forme d’énonciation qui se déroule dans le cadre d’un dispositif et selon son économie propre tels que nous les avons décrits. La médiatisation enfin doit être entendue au sens de processus de scénarisation des contenus à travers, un artefact technique, un dispositif médiatique .

Dans ce sens, pour nous, la médiatisation s'oppose à la médiation, mais en constitue aussi l’indispensable complément. En effet, rappelons que si communiquer signifie transmettre un contenus, on ne peut faire abstraction de la dimension relationnelle propre à tout acte de communication . C’est que tout acte de discours, tout acte de langage, comme le rappelle fort bien J.P. Desgoutte, s’inscrit et se développe dans ce deux champs complémentaires, indissociables : « le champ référentiel, informatif ou constatif, et le champ relationnel, que l’on peut qualifier de performatif ou d’énonciatif. Ces deux champs correspondent aux deux fonctions canoniques du langage, la fonction de représentation ou de constat d’une part, la fonction pragmatique discursive, d’autre part. »

Aussi, à coté des opérations de médiatisation qui concernent la scénarisation de contenus et les opérations de transposition entre les différents registres sémiotiques, il faut encore tenir compte de la médiation de la relation qui s'instaure entre l'émetteur et le destinataire, l'enseignant, le tuteur et l'apprenant. Toutes les formes de téléprésence comme d'interactivité intentionnelle (voir-cidessous), les représentations de l'autre et ce que l'on nomme aujourd'hui dans les environnements virtuels les awareness tools – ces indices et ces outils qui attestent de la conscience que chaque participant possède de l’autre, de ce qu’il sait, de ce qu’il voit, de l’endroit où il se trouve, etc. – relèvent de la médiation. Nous le verrons, ni la médiation ni la médiatisation n’échappent aux contraintes et aux déterminations du dispositif technologique.

Retenons donc pour l'instant que les processus de médiatisation et de médiation – portant respectivement sur les contenus et la relation – sont constitutif de tout dispositif de communication et de formation médiatisées. Pourtant la composante relationnelle se voit souvent oubliée par les concepteurs pédagogiques trop préoccupés de leurs contenus. Or, elle est d’autant plus importante que les activités d’émission et de réception se voient disjointes, différées et/ou délocalisées et qu’en conséquence, les modalisateurs de l’énonciation et ses régulateurs – les composantes « analogiques », selon l’expression de l’école de Palo Alto, de la communication – disparaissent en grand partie.
 


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Daniel Peraya

Last Changed : 16-Nov-1998