L'HOMME ET LA FEMME: DEUX MODES D'EXPRESSION

INTRODUCTION

La plupart des malentendus entre hommes et femmes reposent sur la différence qu’instaure le langage affectif propre à chacun des sexes et que, par conséquent, une meilleure lecture de nos émotions réciproques devrait nous aider à mieux nous comprendre. Si les hommes et les femmes partagent tous deux les mêmes sentiments, s’ils sont également capables d’émotions, ils ne les expriment pas de la même façon. Connaître les modalités d’expression de chaque sexe est donc source d’une meilleure entente. Il est possible de favoriser l’entente, en conseillant mieux ceux qui estiment que les émotions constituent le socle de la communication humaine et, en particulier, de la rencontre avec l’autre sexe. L’expression des émotions favorise l’attachement affectif ou les liens sociaux et peut nous rendre plus égaux que toutes les déclarations de principe, plus ou moins factices. Puisque nous sommes sans doute destinés à être surpris toute notre vie par l’autre sexe, arrangeons-nous au mieux de la situation. Des rires aux larmes, aucune émotion n’est la propriété exclusive de l’un ou de l’autre sexe. Hommes et femmes se différencient moins par la nature de ce qu’ils éprouvent que pas le sens apparent, la signification cachée ou l’expression que prennent leurs sentiments. Les styles émotionnels sont liés à l’identité sexuée bien plus fortement que nous ne le pensions jusqu’à présent. 

 

L'INCOMPREHENSION

LES PHRASES A NE PAS DIRE
L'EMOTIVITE DES DEUX SEXES

 
 

L'INCOMPREHENSION

Les femmes expriment plus facilement ce qu’elles éprouvent et perçoivent davantage ce que l’autre ressent. Elles ne sont donc pas plus émotives, mais elles communiquent mieux leurs émotions que les hommes. Ceux-ci, par exemple, expriment plus brutalement leurs affects ; les femmes parlent davantage de ce qu’elles ressentent. Les hommes expriment insuffisamment leurs émotions, ils les « agissent » au lieu de les dire.
Face à ce qui est étranger, le risque est grand de se tromper et d’attribuer à l’autre des émotions et des sentiments qu’il n’a pas. Hommes et femmes peuvent s’aimer profondément et ne pas se comprendre émotionnellement. Comment expliquer que, après des milliers d’années de vie commune, nous soyons encore à ce point imperméables à ce que ressent l’autre sexe ? D’un sexe à l’autre, tout diffère. Les inégalités persistent au travail. L’attirance physique différencie aussi les deux sexes. Les hormones mâles et femelles qui commandent au désir sexuel seraient-elles passées pas là ?: 45% des femmes se disent attirées par les yeux de leur partenaire, 31%  des hommes par la poitrine.
Pourquoi un homme veut-il toujours avoir raison ? Et pourquoi se met-il si facilement en colère ? Et qu’ont donc les femmes à s’angoisser de la sorte ? Chaque sexe a sa manière de réagir aux émotions de l’autre. Les émotions positives (joie, rire, humour) se manifestent généralement de la même façon et suscitent des réactions identiques. Elles sont reconnues comme telles par les deux sexes, même s’il existe en ce domaine des complicités " sexuée ". 
En revanche, les émotions négatives ( colère, chagrin, culpabilité et, surtout, angoisse ) sont fréquemment source d’incompréhensions entre hommes et femmes. Les femmes se référant à un langage de rapport et d’intimité, et les hommes à un langage de statut et d’indépendance, la communication entre hommes et femmes peut alors se comparer à une communication interculturelle. C’est dire qu’elle sera exposée à des incompréhensions liées aux différents styles de conversation. Ces différences ne sont pas des différences de dialecte, mais des différences de genre.

 

LES PHRASES A NE PAS DIRE

Les sociolinguistes ont analysé minutieusement les " styles " langagiers et la pragmatique de la communication entre hommes et femmes. Une femme répétera sa demande tant qu’elle n’obtiendra pas la réponse souhaitée : elle pense que son mari fera ce qu’elle souhaite pour peu qu’elle parvienne à lui faire comprendre à quel point elle le souhaite. Mais le mari, si je puis dire, ne l’entend pas de cette oreille. Un homme estime qu’une demande sans réponse équivaut à un refus alors qu’une femme pense simplement qu’elle n’a pas été entendue. Se référant à son propre système de valeurs, il ne peut donc pas interpréter correctement l’insistance de sa compagne. Il y voit à tort une manifestation d’hostilité ou l’expression indirecte d’un ordre. Ce qui immédiatement lui hérisse le poil et l’amène à quelques formulations aussi malheureuses que maladroites : " tu veux toujours avoir raison " ou enfin " il faut toujours faire ce que tu veux ". Autre trait typique et autre source de malentendus : les hommes supportent mal les problèmes en attente. Les femmes affrontent les difficultés autrement. Elles en parlent et cherchent à être comprises. Hommes et femmes conversent différemment. Dans l’expression comme dans la compréhension des émotions, l’un des deux sexes est plus direct, certains diront moins subtil, que l’autre. Les rancœurs sont parfois durables, plus durables qu’on ne l’imagine. Elles constituent une source supplémentaire de malentendus, plus pervers cette fois, parce qu’apparemment " sans raison ".
Chaque sexe gagnerait à comprendre que ce que l’autre cherche n’est pas radicalement différent. Encore faut-il, pour que cette vérité soit comprise, que chacun s’ouvre à l’autre. Les intentions ou les projets peuvent être parfaitement identiques de part et d’autre mais leur expression émotionnelle totalement opposée. Les différences portent moins sur le fond que sur la forme. Mais combien la forme est importante ! Alors, que faire ? Toujours donner une phrase d’explication de plus. Consacrer une minute supplémentaire à se faire comprendre permet parfois d’éviter plusieurs heures d’affrontement.

 

L'EMOTIVITE DES DEUX SEXES

On entend généralement dire que les femmes sont plus émotives mais aussi plus expressives. Incontestablement, les femmes connaissent des variations d’émotions plus fortes. Elles expriment plus intensément leurs peines mais aussi leurs joies. Et c’est le résultat le plus intéressant. D’une manière plus générale, les scientifiques ont montré que les femmes adoptaient souvent un point de vue plus positif sur leurs proches et étaient plus portées à voir en chacun le meilleur. Il est vrai aussi que les femmes expriment plus fréquemment que les hommes les sentiments négatifs qu’elles peuvent éprouver. Elles sont en particulier davantage sujettes aux émotions dites intropunitives (peur, anxiété, tristesse, culpabilité, honte). A l’inverse, les sentiments négatifs tournés vers l’extérieur, ceux où le sujet attribue à ce qui n’est pas lui, homme ou événement, la cause de son émoi, sont davantage masculins. L’appartenance à l’un ou à l’autre sexe n’explique évidemment pas tout. D’autres facteurs peuvent interférer. La peur, voire la hantise du conflit renvoient ainsi parfois au souvenir malheureux d’une vie familiale où les problèmes étaient à l’origine de fréquentes disputes et de violentes tensions. On sait aujourd’hui que la testostérone, l’hormone mâle, émousse l’expression émotionnelle et inhibe les pleurs : un homme qui pourrait pleurer bouderait sans doute moins ! Mais c’est aussi le contexte culturel qui interdit au sexe masculin cette manifestation de sensiblerie mieux acceptée d’une femme. Globalement, l’homme se défend plus que la femme, grâce notamment au " mécanisme de projection " qui lui permet de reporter sur autrui les sentiments pénibles, les désirs secrets, les pulsions, surtout agressives, qu’il éprouve. Il intellectualise également davantage, se montrant extrêmement dépendant des interprétations rationnelles qui peuvent être données des événements. Ces défenses psychiques nous sont particulièrement précieuses dans la vie quotidienne, pourtant elles peuvent parfois constituer une gêne et empêcher d’être suffisamment naturel. Combien d’hommes hésitent ainsi avant de demander conseil ou de solliciter de l’aide. Cette même réserve les amène à négliger, voire à refuser, les problèmes affectifs que connaissent leurs proches. On a souvent entendu des hommes assener un énergique mais inutile " secoue- toi" à quelqu’un qui était à bout de forces, alors qu’un simple " parle-moi " aurait déjà eu, à lui seul, un effet bénéfique, surtout prononcé par celui dont on attend prioritairement un soutien.
Alain Braconnier
« Le sexe des émotions »
Editions Odile Jacob, 1996

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