Définition de la Violence Conjugale



 
 

Définition
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Spirale de la violence

 
 

Il convient d’abord de s’entendre sur le sens du mot violence. Etymologiquement, violence  signifie " projection d’une force vers " quelque chose (Gillioz , De Puy, & Ducret, 1997, p.32). Bien sûr, il existe des milliers de façons d’exercer une force en direction de quelqu’un ou de quelque chose ; cette définition pourrait s’appliquer à pratiquement toutes les actions humaines. Pour que le concept soit d’une quelconque utilité, il faut le définir de manière plus précise selon le sujet étudié.

Dans le cas de violence conjugale, nous retiendrons la définition de la violence de Robert Audi :        " Agression ou attaque énergique contre les personnes par des moyens physiques ou psychologiques " (Litke, 1992, p.173). On peut élargir la signification de ce concept en mettant l’accent sur l’intention de meurtrir, de terrifier et d’entreprendre la démolition de la personne. Cette violence n’est pas forcément éclatante. Elle peut être subtile. L’humiliation et la peur peuvent sournoisement déstabiliser et dépersonnaliser.

Le tortionnaire et la victime ne perçoivent pas la violence sous le même angle. La personne violente définit plus de violences que sa victime n’en a repérées. Cette dernière identifie les coups douloureux où elle reconnaît une intention de nuire, mais toutes les autres violences ne sont ni repérées ni identifiées comme étant des violences. Elle ne reconnaît pas toujours où des critiques injustes et humiliantes vont la conduire. Déterminer l’instant où la violence débute est quelque chose de très difficile, voire impossible, du fait de la complexité du problème. C’est le contexte social et culturel qui décide de l’illégitimité d’un acte.

Parler ici de la violence dans le couple ne signifie pas que celle-ci ne devrait pas exister. Elle fait partie de toute vie de couple même lorsqu’elle n’est pas spectaculaire. La question qui se pose est celle de savoir où en fixer la limite. Elle est aussi de savoir ce que nous en faisons, de chercher à comprendre ce qu’elle signifie, de quels messages elle est porteuse. Pouvoir parler de ses explosions est déjà reconnaître leur existence. Pouvoir évoquer les sentiments, les émotions qui sous-tendent les mots ou les coups, c’est donner un nom à nos frustrations, à nos insatisfactions, à nos désirs, c’est désamorcer la violence dans ce qu’elle a de plus destructeur et c’est mobiliser en nous une autre force pour dire nos aspirations et construire une relation meilleure.

La violence conjugale est donc un langage qu’il s’agit de décoder.
Que peut exprimer cette violence ?

   Concernant l'Europe, il n'existe que peu de recherches scientifiques sur la violence faite aux femmes. Une unique enquête fondée sur un échantillon représentatif a été menée en 1986 aux Pays-Bas auprès de 1016 femmes âgées de 20 à 60 ans. Il en ressort que 26,5 % des femmes ont subi de la violence physique au cours de leur vie dans le cadre d'une relation de couple. Pour les autres pays européens, on en est réduit à des estimations. En France, le Secrétariat aux droits des femmes a évalué à 2 millions le nombre de femmes maltraitées physiquement.

   En Suisse, nous ne disposions pas jusqu'en 1996 de données globales sur la violence subie par les femmes dans le cadre d'une relation de couple. Cette étude émane du Bureau genevois pour l'égalité des droits entre homme et femme et a été menée dans le cadre d'un vaste projet de recherche consacré à la famille par le Fonds national de la recherche scientifique. Première dans notre pays, seconde en Europe après celle menée par les Pays-Bas, cette enquête révèle que plus d'une femme sur cinq est victime de violence physique ou sexuelle de la part de son conjoint au cours de sa vie et 40,3 % des femmes subissent des violences psychologiques. Ces chiffres n'étonnent pas Lucienne Gillioz (1997), la responsable de l'étude qui a mené l'enquête, avec deux autres chercheuses féministes, auprès d'un échantillon de 1500 femmes de 20 à 60 ans vivant en couple (enquête quantitative par téléphone). Elles sondent aussi le contexte et le vécu de la violence grâce à une trentaine d'interviews approfondis (enquête qualitative sur la base d’un entretien semi-structuré se déroulant le plus souvent au domicile des femmes).

Depuis plusieurs années, les concepts de cycle et de spirale de la violence sont communément utilisés par les centres d’accueil pour appréhender la violence dans le couple. Le terme de cycle nous indique bien que la violence n’est pas présente de façon continue mais qu’elle alterne avec des moments d’accalmie. Ainsi la vie d’un homme violent prend la forme, en quelque sorte, de montagnes russes. Pour certains couples, les crises apparaissent deux à trois fois par semaine, pour d’autres tous les mois, dans d’autres cas tous les cinq ans… Cependant, l’important n’est pas la fréquence mais la régularité des violences. Ainsi le terme de spirale est particulièrement bien adapté pour rendre compte de cette régularité (Dutton, 1996).