La bière internationale et sociale

Créer la liste des pays où on boit de la bière - ils sont innombrables, ce n'est pas de la "petite bière". Cette "boisson légèrement alcoolisée, obtenue par fermentation du sucre de l'orge germée sous l'action de la levure de bière, et parfumée avec du houblon" (Larousse), nous accompagne depuis l'aube de l'humanité comme le pain. La découverte de la fermentation des céréales a engendré tous les deux et ce probablement en même temps.

Le mot Bière se trouve dans plusieurs langues. "Bière" en français, "bier" en néerlandais et en allemand, "beer" en anglais et "birra" en italien. Il n'est pas clairement établi si ce mot est dérivé de l'anglais "barley" (orge) ou du gallois "brace" (orge fermenté). Ou peut-être faut-il simplement remonter au mot latin qui veut dire boire, "bibere". Les termes espagnol "cerveza" et portugais "cerveja" seraient quant à eux dérivés des mots celtes "cera" (céréales) et "vise" (fort). Ou alors, appelait-on simplement la bière d'après le nom de la déesse romaine de l'agriculture, et de la fertilité, Cérès ? Les Suédois et les Danois parlent quant à eux de "öl" ce qui nous fait penser à nouveau au terme anglais "ale". Quant à savoir d'où les Slaves tiennent leur "Pivo"...

La bière voyage sur tous les continents et les noms des marques les plus connues sont entrés dans le langage courant international. Sans connaître un mot dans leur langue, on peut inviter à boire la bière un Chinois, un Cubain, un Australien.
C'est une boisson qui rend bavard, il n'est alors pas étonnant  qu'elle  soit capable de nouer les liens sociaux. Des pubs, des brasseries ou des birreiras associent surtout des hommes, des hommes qui parlent de tout et de rien. D'un côté c'est un phénomène négatif, nocif pour la santé et pour les liens familiaux, d'autre part, il crée une possibilité de communiquer avec les autres, de se décharger  un peu de ses soucis, d'exprimer ses intérêts, de parler politique.
Qui sait combien de partis, d'opinions, d'événements politiques naissent autour des verres de bière. Les grands mouvement ouvriers en Angleterre et en Allemagne; les sieges du Parti Polonais des Amis de la Bière (en1992) au Parlement  polonais sont  tous parfumés à la bière.
En République tchèque, Vaclav Havel entraîne Jacques Chirac dans une taverne typique en compagnie de leurs épouses. Ils partagent une chope de bière. Jacques Chirac bouscule volontiers le protocole et ne s'embarrasse pas des réserves du service d'ordre vite depassé lorsqu'il s'offre un bain de foule sur le pont Charles a Prague et pose pour une séance de photos improvisée avec deux ravissantes passantes.
"Je présume que la consommation de la bière dans les pubs a une excellente influence sur le comportement de la société tchèque. La bière, en étant moins alcoolisée que le vin, la vodka ou le whisky, permet des échanges à caractère politique plus tempérés".

                                                                         Vaclav Havel, Octobre 1995
 

Au Cameroun dès 1992, la douzaine de marques de bière sur le marché se réduisait à deux grandes catégories : les "bières de l'opposition" et celles de "la majorité présidentielle" . Moïse Tamfu, tenancier d'une buvette non loin du marché central, se rappelle bien cette époque : "La bière était devenue une arme politique. On n'avait pas besoin d'interroger un citoyen sur ses préférences politiques. Il suffisait de voir quelle marque de bière il était en train de boire" . Boire tel produit dans une localité peut même passer pour une provocation. Dans les réunions familiales et les cantines de quartier, on pouvait entendre des consignes du genre : "Ne buvons que le produit x" . Un ami qui vous offrait un pot précisait : "Pourvu que ce ne soit
pas telle bière" . Surréaliste pour qui ne connaît pas le manichéisme alors en vigueur dans la société civile camerounaise.
Aujourd'hui, on semble revenir à la réalité. De plus en plus, les consommateurs privilégient la qualité et le goût par rapport à toute considération partisane.

Si tu bois régulièrement de l'alcool, tu prends le risque d'en devenir psychiquement et/ou physiquement dépendant.