Tzara Tristan (Sami Rosenstock dit)
Poète roumain et français, né en 1896 à
Moinesti et mort à Paris en1963.
Fondateur avec Hugo Ball, Arp et Janco du Cabaret Voltaire à
Zürich en 1916, il rencontre Picabia en 1918 et relance Dada qui s’essouflait.
Arrivé à Paris en1919, il intègre le groupe de la
revue Littérature qui devient le principal organe du dadaïsme
parisien. Entre temps, Tzara a publié en 1916 son premier livre
La première aventure céleste de Mr. Antipyrine, et la même
année que son Manifeste Dada (1918), ses Vingt-cinq poèmes.
Après une série de manifestations, de protestations, d’expositions,
de spectacles insolents et purement Dada, cette anti-littérature
et ce nihilisme à tout prix lassent Breton qui organise le “Procès
Barrès”, le vendredi 21 mars 1921 à la salle des Sociétés
savantes: il entraînera la rupture entre les amis de Tzara et les
futurs surréalistes. La tumultueuse soirée du Coeur à
barbe (1923) marque la fin de Dada. Tzara n’en continue pas moins une oeuvre
personnelle des plus sulfureuses: il publie Sept manifestes dada (1924)
et fait jouer sa pièce Mouchoir de nuages (1924). Il se rapproche
des surréalistes en 1929 et s’en éloigne une nouvelle fois
en 1934 lorsqu’il adhère avec Crevel à la Maison de la Culture.
L’ Homme approximatif (1931), Où boivent les loups (1932), Personnages
d’insomnie (1934), Grains et issues (1935) constituent sa contribution
au Surréalisme. Contre la “poésie engagée”, mais pour
l’engagement politique et poétique, Tzara est un inclassable. De
la Résistance à son communiqué d’octobre 1956 à
l’A.F.P. pour marquer ses divergences politiques avec les intellectuels
communistes à propos de la Hongrie, en passant par la défense
de la culture espagnole en 1937 et sa lutte militante pour la libération
de Nazim Hikmet, Tzara démontre une nouvelle fois qu’il est tout
à fait possible de concilier la grande littérature avec la
dignité humaine.
Breton André
Poète français, né le 18 février 1896
à Tinchebray-sur (Orne), mort le 28 septembre 1966 à Paris.
Passionné par la lecture de Baudelaire, de Mallarmé
et de Huysmans, André Breton, âgé de seize ans, correspond
avec Paul Valéry. Après ses études de médecine,
il est affecté, en 1915, au service neuropsychiatrique de l’armée;
il s’initie aux travaux de Freud et découvre, dans la psychanalyse,
un instrument fécond de connaissance de notre vie mentale. C’est
au régiment qu’il fait la connaissance de Jacques Vaché,
dont l’humour noir et le suicide joueront, pour Breton, un rôle déterminant
dans la genèse du surréalisme.
Avec Louis Aragon et Philippe Soupault, il fonde en 1919 la revue
Littérature, qui deviendra progressivement dadaïste et où
paraît un premier texte “automatique”, Les Champs Magnétiques”.
Si l’année 1924 (rupture avec le mouvement dada) est capitale dans
la mesure où son Premier Manifeste du surréalisme expose
l’esprit et la méthode du mouvement littéraire le plus important
de ce demi-siècle, l’année 1928 marque la naissance d’un
genre littéraire nouveau avec Nadja, oeuvre à caractère
autobiographique et poétique. C’est dans ce genre que Breton donnera
ses chef-d’oeuvres.
Le combat surréaliste constitue son activité principale:
les prises de position comme l’oeuvre de Breton sont indissociables du
surréalisme dont il est le fondateur et le plus important théoricien.
Révolutionnaire, le surréalisme exige un complet bouleversement
social et la fin du prolétariat. Breton est ainsi amené à
se rapprocher du parti communiste, auquel il s’inscrit ainsi que d’autres
surréalistes. Cependant, il le quitte en 1935, pour des motifs qui
sont aussi bien esthétiques que politiques.
La langue de Breton prosateur est celle d’un classique dont le style,
qui parfois évoque Chateaubriand, éclate, lorsque “les mots
font l’amour” et que le poète s’abandonne aux images nées
d’associations d’une immédiateté et d’une violence neuves.
Quant à sa poésie, après les surprenantes métaphores
érotiques de Clair de Terre, il semble qu’elle ait trouvé
un aboutissement d’une perfection presque trop grande dans l’automatisme
maîtrisé et la superbe emphase de l’Ode à Charles Fourier.
Eluard Paul (Eugène Grindel dit)
Poète français né à Saint-Denis en 1895,
mort à Charenton-le -Pont en 1952.
Fils de bourgeois aisés, Paul Eluard (qui prit pour écrire
le nom de jeune fille de sa mère) poursuivit normalement ses études
jusqu’ en 1911, année où, frappé de tuberculose, il
entre dans un sanatorium en Suisse. Il y passe deux ans, y rencontre Hélène,
sa future épouse; la maladie ne l’empêchera pas de s’engager
en 1914.
Après la guerre, il se mêle aux activités dadaïstes,
rencontre Breton et Aragon. En 1921, il figure parmi les premiers surréalistes.
Cependant, jusqu’en 1924, marié, père de famille, il exerce
la métier d’agent immobilier. En 1924 il s’adonne vraiment à
la littérature. En 1926 paraît Capitale de la douleur, en
1929, l’Amour, la poésie en 1930, l’Immaculée Conception,
texte clé du surréalisme écrit en collaboration avec
Breton. En 1930, il adhère au parti communiste, dont il sera exclu
en 1933; sa femme Hélène le quitte pour Salvador Dali (qui
la nomme Gala). En 1938, il rompt avec le surréalisme.
Bien qu’il ait été un surréaliste de la première
heure, il ne semble pas qu’ Eluard ait pratiqué l’écriture
automatique. Recherche de l’équilibre, de l’objectivité,
quête d’une lucidité qu’il chante et demande à tous
les hommes sont les traits dominants de son oeuvre. Ses premiers poèmes
d’amour, notamment l’ Amour, la poésie, sont pourtant marqués
par des éclats sauvages qui semblent échapper à son
habituelle mesure. Mais son appartenance profonde à la poésie
traditionnelle, sensible bien avant sa rupture avec Breton, transparaît
nettement dans les poèmes patriotiques comme Au rendez-vous allemand
(1944), pour s’affirmer avec les Poèmes politiques (1948). L’engagement
a pris le pas sur le travail poétique, subordonné à
la propagande ou à un idéal de bonheur et de liberté
universels. Cette démarche a été regardée par
les uns comme une conquête, par les autres (notamment par les surréalistes)
comme une démission.
Arp Hans (ou Jean)
Sculpteur et poète français, Hans Arp est né
à Strasbourg en 1887 et mort à Bâle en 1966.
Elève de l’ Ecole des arts appliqués de Strasbourg
puis étudiant à l’ Ecole des beaux-arts de Weimar, il se
passionne pour la peinture et la poésie modernes. Pacifiste, il
gagne la Suisse où il rencontre en 1915 Sophie Taeuber qui deviendra
sa femme.
Hans Arp occupe une place importante dans l’histoire des mouvements
d’avant-garde de cette première moitié du XIXe siècle.
On le retrouve au sein de l’expressionnisme et du Blaue Reiter, puis à
Zürich où il fonde avec Tzara le mouvement Dada; après
son passage par le Surréalisme, il bifurquera vers l’art abstrait.
Ses premiers contacts avec le Surréalisme datent de 1925, année
où il vient s’installer définitivement à Meudon dans
la région parisienne. Ses objets “dus au hasard, rudimentaires,
irrationnels” furent sans doute à la base de son rapprochement avec
le groupe de Breton. Poète, graphiste (il travaille les reliefs,
les papiers déchirés, les collages), il trouvera sa pleine
expression dans la sculpture, et notamment la sculpture en ronde-bosse,
qui lui permettra de dépasser l’onirisme purement surréaliste
et de ne point tomber dans l’ornière du constructivisme triomphant.
Ernst Max
Peintre, sculpteur et poète d’origine allemande, naturalisé
français, né en 1891 à Brühl, Rhénanie
et mort à Paris en 1976.
Membre actif du groupe Dada, “Dadamax Ernst”, comme il se fait appelé,
fait la connaissance d’ Eluard et de Breton à Paris en 1921; il
assiste alors aux essais de sommeil hypnotique et d’écriture automatique.
Breton l’invite à exposer ses premiers collages, “ces jeux
de patience de la création”, réalisés à partir
de l’impression déterminante qu’eut sur l’artiste la vision des
reproductions de tableaux “métaphysiques” de Giorgio De Chirico.
Dès lors, Max Ernst, tout en gardant ses distances, ne cessera de
participer aux activités du groupe surréaliste, réalisant,
un an avant la publication du Manifeste du Surréalisme ce que l’on
considère comme la première peinture surréaliste:
Pietà ou la Révolution la nuit.
Il met au point la technique dite du frottage (dans laquelle il
voit 2une sorte d’équivalent de l’écriture automatique”),
qui transgresse d’une façon singulière la banalité
du quotidien. Des feuilles de papier frottés à la mine de
plomb au hasard sur des objets (lames de parquet, feuilles d’arbre, cannelures
de chaise) ouvrent un monde visionnaire peuplé de structures lunaires,
d’acropoles dévastées, d’assemblage de forêts inextricables…
Il associe également au collage et au frottage de nouvelles
techniques comme la décalcomanie ou le grattage.
Puis il se réfugie durant douze ans (1941-1953) aux Etats-Unis:
son oeuvre cède moins aux fantasmes de l’inconscient qu’à
une nouvelle iconographie qui ait le pouvoir de transcrire les rêves
et les angoisses.
Exclu du mouvement surréaliste en 1954 pour avoir daigné
accepter le Grand Prix de le Peinture de la Biennale de Venise, Max Ernst
a su dépasser la position limitée que le Surréalisme
voulait attribuer à la peinture pour revendiquer un rôle essentiel:
“arracher un lambeau au merveilleux et le restituer à la robe déchirée
du Réel” (La Femme 100 têtes).
Vaché Jacques
Né en 1895 à Lorient et mort en 1919 à Nantes.
Absent de la Poésie surréaliste de Jean-Louis Bedouin
mais présent dans L’ Aventure Dada de Georges Hugnet, Jacques Vaché
reste celui qui fut, selon Breton “le maître dans l’art d’attacher
très peu d’importance à toutes choses”. Son influence sur
celui qu’il appelait “le pohète” fut décisive. C’est au Centre
de neurologie de la rue du Bocage à Nantes que Vaché rencontre,
au début de 1916, un interne qui allait devenir le maître
à penser des surréalistes. Ce “jeune homme très élégant
aux cheveux roux” (Breton, Les pas perdus, 1924) intrigua immédiatement
Breton, qui fit paraître dans Littérature les lettres qu’il
lui adressait du front et qui furent ensuite publiées en 1919 sous
le titre de lettres de guerre. Sa mort mystérieuse dans une chambre
d’opiomanes consacre la dimension mythique de ce météore
qui fut adopté comme initiateur du groupe au même titre que
Rimbaud, Lautréamont et Jarry. Breton, qui était peut-être
le seul à avoir fréquenté ce modèle admirable
et lointain, écrira: “Par lui, tout était bravé, son
comportement et se propos étaient un objet de continuelle
référence. Ses lettres faisaient oracle et le propos de cet
oracle était d’être inépuisable (…) Il incarnait pour
nous la plus haute puissance de dégagement”. Les lettre de guerre
n’ont pas une grande valeur “littéraire”. Vaché repousse
toujours du pied l’oeuvre d’art. Leur désespérance, masquée
par ce que leur auteur appelle l’Umour témoigne d’un refus audacieux
radical et assume “l’inutilité théâtrale (et sans joie)
de tout”. Vaché provoqua chez Breton cette confession capitale:
“Sans lui, j’aurais peut-être été un poète;
il a déjoué en moi ce complot de forces obscures qui mène
à se croire quelque chose d’aussi absurde qu’une vocation” (Les
pas perdus).
Soupault Philippe
Est né en 1897 à Chaville.
C’est Apollinaire qui le présente en 1917 à Breton,
lequel à son tour lui permet de faire la connaissance d’Aragon.
Très tôt associé à la genèse du Surréalisme,
il est co-fondateur de la revue Littérature en mars 1919,
et publie dans le numéro d’octobre, “le premier ouvrage purement
surréaliste”, parce que répondant à al nécessité
de se livrer à “ l’automatisme psychique pur par lequel on se propose
d’exprimer soit verbalement, soit par écrit, soit de toute autre
manière, le fonctionnement réel de la pensée”, Les
Champs magnétiques,
écrits en collaboration avec André Breton, et qui
ne seront publiés, en volume, que l’année suivante “Au Sans
pareil”, à 300 exemplaires. Lassé par les querelles du mouvement
dadaïste, il le quitte en 1922 pour rejoindre, non sans certaines
réticences, les rangs du Surréalisme. De 1923 à 1925,
il publie plusieurs romans: Le bon apôtre (1923), Les frères
Durandeau (1924), Le bar de l’ Amour (1925), et Georgia (un recueil de
poèmes, 1926). Membre de la Centrale surréaliste et du bureau
de Recherches surréalistes, il participe au pamphlet contre Anatole
France (1924) et à la lettre adressée en 1925 à Paul
Claudel. Lorsque Aragon, Péret, Eluard, Breton et Unik ébranlés
par l’argumentation de Pierre Naville, décident de se rapprocher
des communistes Soupault prend ses distances. Il est exclu en novembre
1926. S’éloignant progressivement de la lettre et de l’esprit du
Surréalisme, il conservera cependant quelques contacts avec plusieurs
de ses membres.
Picabia Francis
Né en 1879 et mort en 1953 à Paris.
Proche du Surréalisme, si l’on admet que sa révolte
procède du même état d’esprit, Picabia n’appartint
pas plus au groupe de Breton qu’il ne fut Dada. Après un bref passage
par l’impressionnisme puis le cubisme, il inaugurera, dans le sillage d’
Apollinaire et de Duchamp, sa période “mécaniste”. Initiateur
de la revue 391 qui paraît de janvier à mars 1917 à
Barcelone, il tentera de la relancer en 1924 pour faire concurrence au
Surréalisme naissant et créer “ l’instantanéisme”.
Dans le numéro du 19 octobre, il note à propos du Surréalisme:
“C’est simplement Dada travesti en ballon réclame pour la maison
Breton et Cie.” Entretenant avec les surréalistes des relations
espacées mais courtoises, il participe à plusieurs de leurs
Expositions (New York,1936; Mexico, et Paris, 1947). Jamais reconnu par
les surréalistes comme un des leurs, ils n’en seront pas moins toujours
très attentifs à son évolution.