Le XIXème siècle


Contexte historique:

C'est au médecin allemand Johann Christian Reil que l'on doit la création du mot psychiatrie.
"Les sentiments et les idées disait-il, sont les moyens adéquats de corriger les troubles du cerveau et de lui rendre sa vitalité". A une époque où l'accent est mis sur l'esprit humain, il fut en accord avec son temps en proposant de guérir les maladies mentales par des moyens psychologiques.

Le 30 juin 1838 est votée une loi sur les aliénés. Cette sorte de charte visait trois objectifs:

1. Faire en sorte que chaque département ait son asile d'aliénés.
2. Fixer les modalités d'admission et de sortie.
3. Protéger les biens des aliénés durant leur internement.

Le fou est dorénavant considéré comme un malade, traité comme tel, dans le cadre d'une toute nouvelle spécialité médicale: la psychiatrie.

Malgré cette loi, en 1875, il y a encore beaucoup de départements qui n'ont pas d'établissement public ou privé. Les asiles existants sont par conséquent trop encombrés. Car suite à cette loi, le nombre d'internements à littéralement explosé au point qu'il conviendrait mieux  de parler de grand renfermement dans ce siècle plutôt qu'au XVIIIème.
De plus, dans les hôpitaux il n'y a pas assez de médecins pour s'occuper des malades: à raison de deux médecins par asile de 500 voire 1000 aliénés, on est bien loin du traitement moral individualisé que préconisaient les pères fondateurs de la psychiatrie.

Toutefois, bien que la pratique asilaire ne s'améliore que très peu, il n'en est pas de même pour la réflexion théorique sur les maladies mentales. Ainsi un grand nombre de travaux, allant de l'approfondissement d'anciennes maladies comme par exemple l'hystérie à la découverte de nouvelles, voient le jour.
 

Charcot:

Nommé en 1862 médecin de la Salpêtrière, il commence très vite à s'intéresser aux hystériques. Ne connaissant que très peu de choses à ce sujet, il se met à se renseigner et à lire l'histoire passionnante de cette maladie.
D'abord convaincu qu'il s'agit d'un problème neurologique, il reviendra sur cette idée en admettant que l'hystérie est en partie mentale. Par la suite, en montrant que les troubles sont modifiables par la suggestion hypnotique, il fut le précurseur de l'exploration de l'inconscient et ouvrit ainsi la voie que d'autres emprunteront, notamment Freud…

Si vous souhaitez en savoir plus sur Charcot, vous pouvez consulter ce site.
 

Quelques traitements typiques de cette époque:

Hydrothérapie :

Au XIXème siècle, les bains sont considérés comme un moyen puissant de guérison. Les asiles ne peuvent se permettre de fonctionner sans un service de bains. Il s’agit de “bains ordinaires et médicinaux, de douches ascendantes et d’étuves sèches et humides”. Mais une salle d’hydrothérapie est jugée complète lorsqu’elle comporte au moins “une piscine, une tribune, une douche mobile en lance avec jets divers, une douche verticale à clapet, en pluie et en colonne, chaude ou froide à volonté, une douche en cercle, solidement garantie par une enveloppe en bois, une douche ascendante et un bain de siège à eau courante”.
Leur application, leur fréquence et leur durée sont décidées par le médecin. Parfois, il recommandait des bains quotidiens de plus de dix heures !
On distinguait trois grandes formes d’hydrothérapie : l’eau pouvait avoir une action tonique, sédative ou révulsive. Elle guérissait de tout, à condition de savamment la diriger. Ainsi, on traitait la forme congestive de la folie par des douches révulsives sur le bassin et les membres inférieurs ; la forme dépressive demandait plutôt des douches toniques et courtes ; les formes convulsive et expansive, quant à elles, étaient efficacement soignées par des bains froids, des enveloppements dans des draps mouillés, ainsi que des compresses froides sur la tête.
Pour les autres affections visées par cette thérapeutique, citons la lypémanie, la mélancolie, la manie, les névroses, l’épilepsie, l’hypocondrie, le delirium tremens (aussi nommé folie ébrieuse), la frigidité (“soit native, soit consécutive à l’abus des plaisirs vénériens”), la nymphomanie, ou encore l’hystérie.
 
 

Hydrothérapies

Pourtant, on peut se demander si l’eau a un véritable effet thérapeutique ou si c’est son côté punitif qui a le don de calmer les fous ? Vers la fin du siècle, quelques aliénistes, comme Pinel, commencent à s’interroger sur la question. A l’aube d’une pensée plus scientifique, l’hydrothérapie est sur son déclin.
 

Le fauteuil rotatoire :
 
 
Selon Erasmus Darwin, la folie naîtrait des mouvements désordonnés des fibres nerveuses. Fort heureusement pour le patient, une rotation plus ou moins accélérée est susceptible de rétablir l’ordre.
Benjamin Rush présente une autre théorie : les maladies mentales sont dues à une accumulation de sang dans le cerveau ; la rotation aurait pour heureux effet de contrer l’action trop vive des organes de la circulation. Quelles que soient les idées de base, les aliénistes sont unanimes quant aux bienfaits des mouvements du fauteuil rotatoire, qu’ils nomment le “pirouettement”. Il s’agit d’attacher le malade sur une chaise et de faire tourner le tout grâce à une machinerie. Les effets physiques vont de la pâleur à l’évacuation des urines, en passant par des vertiges, des nausées et des vomissements. Mais les effets thérapeutiques font oublier ces quelques inconvénients : les patients sont rendus plus sensibles aux remèdes classiques,leur sommeil est doux et
Fauteuil rotatoire
paisible ; le fauteuil inspire “une crainte salutaire”, il suffit de menacer le patient de la machine rotatoire pour obtenir de lui tout ce que l’on veut. On comprend aisément ce qui a fait le succès de cette méthode auprès des thérapeutes…
Malgré cet engouement, le fauteuil rotatoire est vite abandonné.

 

   Le bain de surprise :
 
On trouve dès l’Antiquité ce moyen thérapeutique qui consiste à plonger subitement le patient dans l’eau. Cependant, au XIXème siècle, on fait la subtile distinction entre l’immersion et la submersion, selon que la tête est laissée hors de l’eau ou non. L’eau doit être froide et le bain donné par surprise, car la conjonction de ce saisissement physique et psychologique posséderait des propriétés thérapeutiques.
Des précautions sont prises par crainte de la noyade du malade : on restreint la durée de submersion “au temps nécessaire pour réciter le psaume du Miserere”.
On nous rapporte, par exemple, le récit d’une femme atteinte de folie, chez qui les lavements rafraîchissants et les inévitables saignées n’avaient produit aucun effet. Le médecin décida alors de la faire jeter dans la rivière toute proche, à titre thérapeutique. On ne nous dit pas, par contre, si ce geste a eu les effets escomptés…

 
 

Dispositif  pour le bain de surprise
Mais le sommet du raffinement, c’est cet appareil mis au point pour précipiter l’aliéné dans un bassin de manière totalement imprévisible. Il est d’autant plus utile qu’on n’est pas toujours à proximité d’un lac, d’une mer ou d’une rivière susceptibles d’accueillir les patients.
Le problème, bien sûr, c’est que ce stratagème ne peut fonctionner qu’une fois et malgré les variations imaginées, cette thérapeutique ne sévira pas bien longtemps.

Ceinture compressive des ovaires :

C’est encore l’utérus qui est à l’honneur au XIXème siècle pour expliquer l’hystérie ! Deux moyens de guérison sont alors imaginés pour “faire cesser les plus violentes attaques d’hystérie”.
Le premier consiste, au moyen d’une sonde, à insuffler du chloroforme ou de l’eau de vie dans l’organe incriminé.
L’autre méthode consiste à faire porter à la patiente une ceinture compressive des ovaires pour neutraliser les crises. Cet appareil est particulièrement pratique, car les malades peuvent se l’appliquer elles-mêmes et le porter plusieurs jours de suite, sans rien changer à leurs habitudes de vie.


Ceinture compressive des ovaires