La société des abeilles et son mode de fonctionnement

L’abeille (Apis mellifica) vit en société. Une société est un ensemble d’individus de la même espèce, organisés pour survivre en coopération. Les individus qui constituent une société doivent pouvoir communiquer entre eux, surmonter leur agressivité et être dotés, dans le cas notamment de l’abeille, d’une mémoire afin, par exemple, de se souvenir du rang social qu’ils occupent.

La ruche est donc une société organisée, symbole du travail. Elle n’est donc point un simple rassemblement d’individus qui, en tant que tels, se comportent comme s’ils vivaient isolés. Des corrélations physiologiques, surtout sensorielles, existent entre les membres d’une même société. Lorsque les insectes sociaux accomplissent une tâche collective, ils coordonnent leurs actes de telle sorte que l’œuvre réalisée est cohérente et se répète identiquement dans toutes les sociétés appartenant à la même espèce. ¨ L’acte de l’un  d’eux déclenche une réponse adaptée d’un autre individu et ainsi de suite ¨.
La cohésion profonde des insectes de la ruche ne passe pas du tout, comme chez les mammifères, par la sexualité ou la reproduction, puisque l’énorme majorité des individus de la société est stérile. Curieusement, c’est la nourriture qui va créer entre les membres de la communauté des relations extraordinairement étroites, et rendre chaque individu dépendant de ses congénères. Une abeille isolée, sexuée ou ouvrière, est condamnée à mourir en quelques heures, même bien nourrie.

 L’abeille prise isolement est encore un individu ; elle est capable d’agir et de travailler en solitaire tout en supportant le poids social. Seule, elle se gorge de nectar, se charge de pollen, sait retrouver sa route et enseigner à ses congénères ses trouvailles. (danse des abeilles)

C’est parce qu’elles sont capables de communiquer entre elles que les abeilles parviennent à vivre en véritables sociétés organisées. La communication peut s’effectuer de diverses manières. Elle est chimique dans le cas ou la reine des abeilles produit une phéromone que les ouvrières se communiquent par régurgitation et qui empêche les ouvrières d’élever d’autres reines et qui inhibe la maturation des ovaires des ouvrières. La communication est visuelle dans le cas de la danse des abeilles étudiée par K. von Frisch. Cette danse permet de communiquer la localisation de la nourriture.
 

Rôle de chaque individu au sein de la société

Le rigoureux entretien qu’exige la vie quasi concentrationnaire sur les rayons est le fait de tâches permanentes accomplies à tour de rôle par les ouvrières. Aucune activité n’est l’exclusivité d’une caste particulière, comme dans d’autres sociétés très évoluées d’insectes (par exemple : les soldats, les ouvrières major et minor, chez les fourmis). Au cours de sa vie, chaque abeille aura ¨touché un peu à tout¨.
On distingue chez les abeilles des individus mâles et femelles. Mais, alors que les mâles sont tous semblables, les femelles se divisent en deux castes caractérisées par d’importantes différences anatomiques et physiologiques : l’une est représentée par la reine, l’autre par les ouvrières. On trouve habituellement dans une ruche de 40000 à 60000 ouvrières, quelques centaines de mâles ou faux-bourdons, et une reine unique.

Les ouvrières sont des femelles ordinairement stériles. Elles peuvent cependant, dans certaines circonstances, pondre des œufs, qui se développent normalement. Tentative vaine, car les œufs des ouvrières ne donnent naissance qu’à des mâles. L’anatomie des ouvrières leur interdisant tout accouplement, leurs œufs ne sont jamais fécondés. Dans le cas des abeilles, un œuf non fécondé donne toujours naissance à un mâle ; un œuf fécondé à une femelle. Une reine bien portante, au contraire, est capable, de s’assurer une progéniture des deux sexes en pondant à volonté des œufs fécondés ou non.Des œufs non fécondés naissent donc des mâles. Leur rôle à peu près unique est la fécondation des reines. Mais la reine ne s’accouple qu’une seule fois dans sa vie. En dehors de la période d’accouplement, les mâles contribuent à entretenir de la chaleur ou de la fraîcheur dans la ruche mais ils sont incapables de se nourrir seuls.

Nous venons de voir que le sexe des abeilles est déterminé au moment de la ponte des œufs et dépend de la fécondation. Un œuf fécondé ne peut produire qu’une femelle ; reste à savoir si ce sera une ouvrière ou une reine. Cette détermination de la caste intervient plus tard : dans les trois premiers jours de la vie larvaire ; elle dépend de la manière dont les ouvrières élèvent la larve. Il semble établi que la détermination de la caste est provoquée par des substances hormonales et des vitamines mêlées à la nourriture des larves.

Le rôle des ouvrières est l’entretien du logis, l’approvisionnement, les soins à la progéniture alors que celui de la reine est la procréation.
On a constaté que les ouvrières changent de travail au fur à mesure qu’elles avancent en âge et elles le font sans apprentissage, passant d’une activité à l’autre  et disposant, au moment voulu, des instruments et des connaissances nécessaires. Ainsi, au cours de sa vie, chaque abeille aura participé à tous les travaux de la ruche. Et même, dans cet ordre parfait, des fluctuations peuvent se produire si le besoin s’en fait sentir ; des ouvrières sont capables de changer de fonction et de s’adapter aux exigences du moment. Relevons que toute la vie des abeilles est déterminée par les glandes. Suivant que telle ou telle glande se développe, l’abeille entreprend une fonction donnée.
 
1.
Durant les trois premiers jours, elle joue le rôle de nettoyeuse, elle veille à la propreté des cellules.
2. Sa deuxième mission est celle de nourricière, elle distribue la gelée royale à toutes les larves qui donneront naissance aux jeunes abeilles et aux reines et ce jusqu’au environ du dixième jour suivant sa naissance.
3. De 11 à 20 jours, les abeilles vaquent aux travaux de nettoyage, débarrassent la ruche des détritus, des cadavres de leurs sœurs. Elles vont aussi à la rencontre des butineuses rentrantes, les décharger du nectar récolté, se le distribuer entre elles, le travailler et le disposer dans les alvéoles, s’occuper également du pollen ramené par leurs compagnes. Pendant cette troisième phase les ouvrières magasinières procèdent encore à l’operculation des cellules de miel de réserve et celles des nymphes.
4. Leur quatrième activité est d’être les bâtisseuses de rayons. Elles assemblent inlassablement l'une après l'autre, de fines lamelles de cire pour la construction des alvéoles.
5. Du 18 au 21ème jour, elles deviennent les gardiennes en prenant part à la défense de la ruche et montent la garde au trou de vol à l’affût des pillards comme des bourdons, guêpes ou abeilles de ruches voisines. Elles communiquent grâce à ses antennes avec les abeilles qui entrent dans la ruche. Celles qui ne font pas partie de la colonie sont repoussées. Les voleuses de miel sont chassées à coup de dard.
6. L’activité de butineuse  (ou pourvoyeuse) est la dernière et la plus longue tâche d’une ouvrière qui s’y consacre de son 21ème jour jusqu’à sa mort. Elle part récolter le pollen et le nectar des fleurs pour la production de miel.

 
On peut se demander comment une abeille, noyée dans la foule des autres, parvient à connaître la tâche qui lui incombe. Journellement, la population s’accroît  de quelque 2000 individus, et pourtant il y règne une entente et un ordre parfaits, les fonctions y sont remplies avec rigueur et précision, sans que le moindre frottement, la moindre rivalité se fassent sentir. Tout est réglé, minuté, prévu, comme si nous nous trouvions en présence d’une sorte de cerveau collectif. Tel est l’instinct, connaissance innée, héréditaire, qui se manifeste ici par un comportement plus ou moins commun à tous les individus d’une société, mais non immuable, susceptible au contraire de réflexion et d’adaptation. Les abeilles ne sont pas des automates.
Comme toute organisation, la société des abeilles repose sur deux principes : la différentiation ou distribution du travail entre ses différents membres, et la coordination ou direction de toutes les facultés individuelles.
Ainsi, dans une colonie d’abeilles, tous les individus sont tributaires les uns des autres, et sont incapables de subsister par eux-mêmes.
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