Savoir, technologies et maniement de l'interrogation

"Pour autant que les connaissances sont traduisibles en langage informatique, et pour autant que l'enseignant traditionnel est assimilable à une mémoire, la didactique peut être confiée à des machines reliant les mémoires classiques (bibliothèques, etc.) ainsi que les banques de données à des terminaux intelligents mis à la disposition des étudiants.

La pédagogie n'en souffrira pas nécessairement, car il faudra quand même apprendre quelque chose aux étudiants : non pas les contenus, mais l'usage des terminaux, c'est-à-dire de nouveaux langages d'une part, et de l'autre un maniement plus raffiné de ce jeu de langage qu'est l'interrogation : où adresser la question, c'est-à-dire quelle est la mémoire pertinente pour ce qu'on veut savoir ? Comment la formuler pour éviter les méprises ? etc. Dans cette perspective, une formation élémentaire à l'informatique et en particulier à la télématique devrait faire obligatoirement partie d'une propédeutique supérieure, au même titre que l'acquisition de la pratique courante d'une langue étrangère par exemple."

Lyotard, J.-F. (1979). La condition postmoderne. Rapport sur le savoir. Paris : Editions de Minuit (p.83-84).