GROUPE ILLE

Le constructivisme

Apprendre à parler, lire, écrire ne doit pas se limiter à un apprentissage technique de la langue et des codes écrits. mais doit être envisagé comme une démarche permettant à des adultes de mieux s'orienter dans leur vie sociale, familiale et professionnell. Il ne s'agit pas de reproduire un modèle d'apprentissage scolaire calqué sur celui de notre propre expérience de scolarité. Il est essentiel que le formateur s'interroge sur les mécanismes d'apprentissage. Comprendre pourquoi et comment un adulte apprend permet non seulement de mieux centrer, évaluer, réajuster les outils pédagogiques, mais aussi d'interpréter le plus objectiement possible ce qui se produit chez les personnes qui participent aux cours.Nou nous référons aux théories constructivistes selon lesquelles l'apprentissage est le résultat d'une adaptation nouvelle de ce que l'on savait à ce que l'on découvre:apprendre, c'est créer des interactions entre ce qui est ancien, ce qu'on connaît et ce qui est nouveau. C'est ré-élaborer des représentations antérieures sous la pression d'une situation conflictuelle proposée comme défi à l'apprenant.

Concepts clés

Avant d'aborder l'étude de cette approche, il nous paraît important d'apporter une clarification à propos de l'usage du terme "constructivisme". Ainsi, alors que celui-ci fait essentiellement référence, pour un public européen, aux travaux de Jean Piaget et à ceux de ses successeurs, il en est tout autrement outre Atlantique où le terme est le plus souvent utilisé pour caractériser des auteurs qui se situent dans le prolongement du cognitivisme classique basé sur le modèle du traitement de l'information. Tobias (1991 affirme à ce propos que "le constructivisme peut être vu comme une expansion naturelle et logique de la théorie cognitive" (Tobias, 1991, An Eclectic examination of some issues in the constructivist-ISD controversy, Educational technology, p 41).

1. Les principes qui régissent le développement cognitif

Contrairement aux béhavioristes pour lesquels l'individu est modelé par son environnement, Piaget considère que l'apprentissage est le résultat d'une interaction entre le sujet et son environnement. Le sujet confronté à des stimuli dans une situation donnée va activer un certain nombre de structures cognitives pour traiter ces stimuli. Par la prise en compte d'un certain nombre de structures caractérisant l'individu, le constructivisme se situe dans le prolongement du modèle gestaltiste mais il se démarque de celui-ci par l'importance qu'il accorde au processus de genèse de ces structures cognitives qu'il appelle des schèmes. A ce propos, Piaget décrira un schème comme "une gestalt qui a une histoire" signifiant en cela que, contrairement aux "bonnes formes", les schèmes sont des structures acquises.

Dans ses recherches en matière d'épistémologie génétique, Piaget a étudié les modalités de développement des schèmes opératoires c'est-à-dire des structures qui guident la pensée et le raisonnement. Ces travaux l'ont conduit à mettre en évidence différents stades dans le développement cognitif de l'individu dont les principaux sont : le stade sensori-moteur, le stade pré-opératoire, le stade des opérations concrètes et le stade des opérations formelles. Ainsi le développement de la connaissance chez l'enfant s'appuie sur des actions sensori-motrices qui sont ensuite intériorisées à travers l'accès à la fonction symbolique c'est-à-dire à la capacité de représenter des actions ou des objets concrets par des symboles. Piaget montre notamment que le passage du concret à sa représentation symbolique se construit progressivement à travers différents stades caractérisés d'abord par la mise en œuvre d'opérations concrètes puis par celle d'opérations abstraites faisant appel à des représentations formelles.

Pour Piaget l'apprentissage c'est-à-dire le développement des schèmes opératoires est le résultat d'un processus dynamique de recherche d'équilibre entre le sujet et son environnement:

2. Le conflit cognitif

La mise en œuvre du mécanisme d'accommodation implique:

  1. qu'il y ait d'abord tentative d'assimilation de manière à ce que les structures d'accueil adéquates soient mobilisées et que les éléments qui font l'objet de l'apprentissage soient reliés à ce que le sujet connaît déjà;
  2. que l'assimilation crée un déséquilibre qui conduise à un "conflit";
  3. que le conflit soit "régulé" par une "rééquilibration majorante" c'est-à-dire que le déséquilibre soit réellement dépassé de sorte qu'il conduise à une nouvelle forme d'équilibre correspondant à un progrès réel en terme de développement cognitif qui se mesure notamment par une progression au sein des stades (ou des sous-stades) de développement décrits par Piaget.

Piaget a basé le développement de son modèle sur une série de petites expériences dans lesquelles il confronte l'enfant à des situations susceptibles de créer chez lui un conflit. En régulant les démarches de l'enfant par des interventions adéquates (question, contre-exemples…), l'expérimentateur peut observer les démarches mises en œuvre pour dépasser le conflit cognitif qu'il a induit.


Une approche constructiviste de l'apprentissage

La conception piagétienne de l'apprentissage et du développement cognitif est habituellement qualifiée de constructiviste pour signifier que l'enfant se développe à travers l'interaction continue entre, d'une part la structure cognitive qui le caractérise et son action sur le milieu et, d'autre part les informations qu'il reçoit en retour de ce milieu (difficulté, erreurs, succès, résistances…).

A partir de cette conception de l'apprentissage, Bourgeois et Nizet (1999)(1) traitent la problématique des interactions sociales dans les situations de formation (d'apprentissages) d'adultes en situation naturelle de formation. Ils argumentent l'importance du conflit socio-cognitif dans des situations d'apprentissages. Ils nous disent que la "théorie du conflit socio-cognitif" s'appui sur le postulat piagétien et met en évidence l'importance du cadre relationnel dans lequel s'inscrit l'apprentissage :Lorsqu'un sujet interagit seul avec une information nouvelle, on parle d'un conflit cognitif strictement intraindividuel.
Au cas où le sujet interagisse socialement avec autrui qui a des points de vue divergents à ceux de lui, à propos de cette nouvelle information, on parlera non seulement du conflit cognitif intraindividuel, mais aussi du conflit cognitif inscrit dans une interaction sociale, en l'occurrence, d'un conflit socio-cognitif. Ces chercheurs soulignent aussi que le conflit socio-cognitif ne s'effectue plus simplement par un changement de réponses socialement manifestes assurant la réduction du conflit, mais au contraire par une coordination des points de vue ou des centrations initialement opposés (accommodation des structures de connaissances mobilisées.)(p. 158-159)

De plus, ils nous disent que l'introduction d'un tiers dominant dans l'interaction soutenant le point de vue de l'acteur dominé et le fait qu'un partenaire (comme le formateur) évite de définir trop explicitement le modèle alternatif de réponse au sein d'une interaction tout en introduisant des remises en question permettent une régulation socio-cognitive du conflit.

D'ailleurs, Bourgeois et Nizet (1999) soulignent que le rôle fondamental du formateur n'est plus comme dispensateur de connaissance mais comme médiateur, ou catalysateur, du processus d'apprentissage.Ainsi:
"le choix du type de tâches d'apprentissage et des procédures de travail proposées aux apprenants, la dynamique socio-affective qui se développe au sein du groupe, les représentations sociales des acteurs et de leurs interrelations,...le système de normes sociales et plus particulièrement la légitimité socialement accordée dans la situation de formation aux points de vue des apprenants, etc., sont autant de facteurs qui, d'une part, affectent le développement des interactions socio-cognitives au sein du groupe et sur lesquels, d'autre part, le formateur peut agir de façon déterminante." (p.199-200)


Activité 2

Cette activité est à réaliser tout au long de cette unité de valeur. Le produit de cette activité va vous préparer pour dans le cadre du séminaire intitulé Objectifs Pédagogiques organisé par votre le prof. reponsable du cours. Vous devez donc avoir réalisé l'activité avant de suivre le séminaire.

1.Télécharger le document que vous utiliserez durant la découverte de la séquence d'autoformation.
2. Lisez attentivement les consignes du document.
3. Dans un premier temps, il s'agit d'un travail individuel, par la suite il faut travailler en groupe de deux personne qui seront formés lors de séances en présentielle.

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(1) Bourgeois, E. et Nizet, J. (1999) Interactions sociales et apprentissage in Apprentissage et formation des adultes. Education et Formation : formation permanente éducation des adultes. PUF - France (p.155-200)