Ce genre d'échanges favoriserait une prise de conscience, pour des gens de différentes langues, par rapport à la perception des "langues étrangères".
S'excentrer un moment de sa langue pour essayer de rentrer dans un système linguistique reposant sur d'autres normes.
Quant au déroulement de la "visite", l'idée est de commencer par amener l'utilisateur dans la galerie.
Celle-ci serait composée d'autant de langues que d'utilisateurs auraient analysées.
Pour chaque langue il y aurait une salle. On commencerait par visiter un site dans la langue en question, puis on aurait une histoire animée des principales étapes et révolutions vécues par l'écriture de la langue.
A titre d'exemple, on pourrait, pour le chinois, montrer que traditionnellement il s'écrivait verticalement, de haut en bas, en partant de la droite et qu'au XIX e siècle, au contact avec l'Occident, une nouvelle disposition spatiale est née: de droite à gauche, horizontalement.
Cette salle constituerait ce qu'on pourrait appeler "la mémoire culturelle et historique de l'écriture d'une langue". Tous les faits notoires ayant contribué à un changement important dans l'écriture seraient exposés ici.
Pourquoi commencer par une viste dans la galerie? Simplement pour mettre l'utilisateur concrètement en présence d'une variété de langues ayant des exigences spatiales différentes.
Avant de montrer des choses, il est important que l'utilisateur ait la possibilité de laisser sa propre sensibilité se développer.
La galerie sera revisitée en dernière étape. Il sera alors intéressant de voir comment l'utilisateur a développé ses sensibilités premières par rapport à son parcours dans la salle d'activité.
La galerie a donné à l'utilisateur un certain nombre d'informations non analysées. Il s'agit dans la salle Support matériel de l'écriture de reprendre les étapes liées au support, d'exposer les changements et de chercher les solutions qui ont été trouvées pour assurer un minimum de viabilité.
La visite guidée se poursuit donc avec la salle Support matériel de l'écriture.
Le but est de s'interroger sur la validité de l'idée suivante: l'écriture est tributaire de son support. Les révolultions marquantes de l'histoire de chaque écriture sont liées, en partie, à un changement de support, soit pour écrire, soit sur quoi écrire.
Or, avec le support électronique, un nouvel outil est utilisé pour écrire et sur quoi écrire.
Selon les langues, le passage de l'écriture main-papier-crayon à l'écriture main-clavier-écran implique des changements relativement importants.
Pour le chinois, par exemple, on utilise un clavier à caractères latins. Il y a alors tout un jeu de correspondances à maîtriser; il existe pour cette raison plusieurs méthodes. L'une d'elle consiste à faire une transcription partielle en caractères latins du mot chinois désiré. En en tapant quelques lettres, le traitement de
texte cherche tous les caractères chinois correspondants et on séléctionne celui qui est le bon. Il s'inscrit alors sur une ligne.
Une autre méthode consiste à identifier chaque touche comme un des traits (le chinois est formé d'un certain nombres de traits caractéristiques) et à former son caractère par traits successifs.
Une troisième méthode consiste à attribuer une valeur numérique aux quatre angles que l'on trouve dans chaque caractère selon la spécificité de chacun d'eux. Il s'agit donc d'une correspondance avec les chiffres.
Si j'insiste sur ces différentes méthodes, c'est pour bien mettre en évidence qu'il a fallu trouver un système d'équivalences à partir du clavier latin pour écrire les 4000 caractères chinois usuels.
A l'origine, les outils de l'écriture chinoise étaient la soie ou le papier et le pinceau.
Une importante révolution de l'écriture eu donc lieu avec l'introduction du stylo à bille. Et un changement d'un autre type intervient avec l'écriture éléctronique.
Le côté calligraphique se retrouve mais il est géré par un traitement de texte et non plus par une main et un pinceau...
Cela pose la question d'une uniformisation de l'écriture. Cela pose aussi la question d'une gestion de l'écriture par des logiciels.
Dans la salle Limites de déformations de l'écriture, il s'agit de montrer la dimension de l'écriture dans la lecture.
Jusqu'où peut-on jouer avec les lettres, leurs formes et leur disposition spatiale?
En général, devant une écriture "endommagée", la reconnaissance des lettres se fait malgré tout et on arrive à en dégager le sens. Le processus d'identification est cependant beaucoup plus long. Lire, dans ces cas là, n'est plus un automatisme.
Il s'agit également d'être attentif à la transgression spatiale facilitée par la grande liberté qu'offrent les logiciels de texte et de dessin.
La salle consiste à illustrer ces deux types de déformations / transgressions.
Il serait intéressant de mettre l'accent sur l'inscription de l'écriture dans l'espace.
De montrer, par exemple, que le sens de déroulement d'une bannière est souvent opposé au sens de rédaction manuel.
Finalement, j'aimerais que l'utilisateur mette en relation écriture et imaginaires humains.
Les signes utilisés dans l'écriture représentent un mystère qui attire les penseurs depuis l'antiquité.
Deux choses sont à noter: d'une part, que les "alphabets" véhiculent avec eux toute une histoire que nous portons probablement quelque part en nous
et d'autre part, que depuis l'existence de signes servant à écrire, les gens y ont vu ou cherché une interprétaion symbolique.
Le but de la salle est d'amener l'utilsitateur à réflechir à ces questions en lui proposant un certains nombre "d'histoires", de "croyances".
bibliographie
Isaac TAYLOR, The Alphabet, an Account of the Origin and Developpment of Letters, Asian Educational Services, Madras, 1991.
Johanna DRUCKER, The alphabetic Labyrinth. The Letters in History and Imagination, Thames and Hudson Ltd, London, 1995.
LINDSAY, et NORMAN, Traitement de l'information et comportement humain, Editions Etudes Vivantes, Montréal, 1977; (chap.7).
André TRICOT, "Un point sur l'ergonomie des interfaces hypermédias", in Le travail Humain, vol. 58, n°1, 17-45.