Réalisation : Alexandre Blaettler, Luis Gonzalez, Michele Notari & Miriano Romualdi
Professeur : Pierre Dillenbourg - Assistant : Elia De Iaco
Question 1 |
La construction d'un modèle mental chez l'apprenant dépend en partie de la compatibilité entre le type d'hypermédia et les représentations cognitives de son utilisateur. En effet, selon Rouet (1999), pour que le couple utilisateur-système fonctionne correctement, il faut qu'il y ait une bonne compatibilité entre les formats de représentation et les modes de traitement utilisés. On parle alors de compatibilité cognitive. Il y a compatibilité cognitive lorsque le système informatique s'adapte aux tâches, aux besoins et aux caractéristiques de l'utilisateur. Les utilisateurs doivent pouvoir se faire une représentation cohérente du fonctionnement de l'hypertexte et des actions qu'il peut prétendre solliciter. La compatibilité cognitive n'existe que lorsque la fonctionnalité des outils proposés par ce système a été intégrée au sein d'un schéma procédural construit par l'individu.
Lorsqu'un utilisateur parcours un document de type hypertexte,
il utilise ses connaissances préalables sur le sujet. En effet,
pour se construire un modèle mental d'un contenu, l'utilisateur
s'appuie sur sa connaissance de la structure textuelle standardisées
ou culturellement partagée. Les problèmes liés à
la lecture des hypertextes sont souvent les mêmes que retrouve l’étudiant
qui n’arrive pas à retrouver des informations ponctuelles dans un
texte complexe ; personne ne nous enseigne les différentes types de
lecture. Pour que l'utilisateur parvienne à s'orienter plus facilement,
la structure rhétorique de l'hypertexte doit être proche
de celle des documents imprimés. Cette structure va faciliter la
construction d'une représentation exacte du mode de fonctionnement
du système. Pour être efficace, les fonctionnalités
du système hypertexte doivent donc contenir les éléments
habituels d'un document imprimé, c'est-à-dire une table des
matière, un index, etc. et doivent être bien visibles et
accessibles pour l'utilisateur.
Les systèmes de menus répondent à cette demande
et fournissent un accès rapide à l'information recherchée.
Dee-Lucas et Larkin (1995) ont montré qu'une table des matières
structurée améliore significativement la mémorisation
du contenu d'un document électronique dans une tâche de lecture
compréhension classique. De plus, cette structuration permet aussi
de faciliter la compréhension des relations entre les différentes
parties d'un document. Britt, Rouet & Perfetti (1996) ont montré
qu'une organisation structurée était une pré-condition
pour la mémorisation d'un contenu. Les outils tels que la recherche
par mots-clés ou une table de références croisées
s'intègrent ainsi progressivement au schéma procédural
construit par l'utilisateur. Un système devient fonctionnel dès
lors que l'utilisateur est capable de se construire une représentation
exacte de la façon dont le système fonctionne, ce qui s'acquière
également par la pratique.
La présentation d'un document imprimé est
linéaire, ce qui facilite la construction d'une image mentale de la
structure globale du document mais aussi la construction d'un modèle
mental du contenu du document. En revanche, la structure non-linéaire
d'un hypertexte présentent d'autres avantages, comme par exemple,
celui de permettre à l'utilisateur de naviguer à son gré
dans le document et de trouver ainsi plus directement l'information recherchée.
Cependant, la représentation globale de l'hypertexte est plus difficile
et risque d'imposer une charge cognitive trop forte à l'apprenant.
Cette surcharge cognitive risque alors de provoquer une incapacité
de construire un modèle mental à cause d'un trop grand nombre
d'éléments à retenir. La surcharge cognitive est décrite
par Conklin (1987) et Doland (1989) comme le degré de complexité
dans un environnement non-linéaire selon quatre variables, le nombre
de choix offert à l'utilisateur, l'ordre des actions de la tâche,
le suivi de ce qui a été fait, et la navigation.
De plus, le caractère implicite des liens semble générer
un sentiment d'incertitude incompatible avec une représentation
globale de l'hypertexte. Une meilleure information sur la destination
de ces liens réduirait cette incertitude et faciliterait ainsi
la lecture de l'hypertexte. Selon Rouet (1999), la familiarisation des
utilisateurs constitue également un déterminant important
de la performance.
Ce n'est pas seulement la cohérence entre structure textutelle
et le modèle mental de l'apprenant qui ont un impact sur la qualité
de l'apprentissage, mais aussi la cohérence entre le type de matière
à apprendre et la structure textuelle : par example, un hypertexte
est mieux adapté pour apprendre des concepts difficiles qu'un
texte linéaire (Britt, M. A., Rouet, 1996). L'apprentissage de
concepts de ce genre peuvent être mieux représentés
mentalement avec un hypertexte, et par conséquent, ils sont appris
plus efficacement.
Britt, M. A., Rouet, J.-F. et Perfetti, C. A. (1996). Using
hypertext to study and reason about historical evidence. In J.-F.
Rouet, J. J. Levonen, A. P. Dillon et R. J. Spiro (dir.), Hypertext
and cognition (pp. 43-72). Mahwah, NJ: Lawrence Erlbaum.
Dee-Lucas, D. et Larkin, J. H. (1995). Learning from electronic texts:
Effects of interactive over-views for information access. Cognition
and Instruction , 13(3), (pp. 431-468).
Kintsch, W. (1988). The role of knowledge in discourse comprehension: A
construction-integration model. Psychological Review, 95(2), (pp. 163-182).
Rouet, J.-F. (1999). Interactivité et compatibilité cognitive
dans les systèmes hypermédias In Revue des sciences
de l'éducation , Vol. XXV, n°1, (pp. 87-104).
Streitz, N. A. (1987). Cognitive compatibility as a central issue in human-computer
interaction: Theoretical framework and empirical findings. In G.
Salvendy (dir.), Cognitive engineering in the design of human-computer
interaction and expert systems (pp. 75-82). Amsterdam, NL: Elsevier
Science Publishers.
Sweller, J. , Chandler, P., Tierney, P. et Cooper, M. (1990). Cognitive
load as a factor in the structuring of technical material. Journal of experimental
psychology: General, 119, (pp. 176-192).
Question 2 |
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On analyse les problèmes en partant des modèles pédagogiques pour après les traiter d’une façon plus large sur un plan épistémologique qui englobe, soit la psychologie, en particulier cognitive, soit les théories centrées sur le rapport homme-machine (IHM).
Paradoxalement, si on considérait uniquement le rapport
de l’homme avec la machine, à la base des hypertextes,
assisté par ordinateur, on peux retrouver les modèles
de l’enseignement programmé de Thorndike, qui était
d’autre part en enseignement linéaire et qui ne prenait
pas en compte les pré-connaissances et les différences
individuelles des apprenants, et qui donc ne peux pas nous aider
à la création des hypertextes, puisqu’il les refuserait.
L’apprentissage modulaire a en grand partie
contribué à définir la structure de l’enseignement
avec des hypertextes et, Bruner et le courant de Guided Discovery
Learning a sans doute crée un premier cadre épistémologique
sur le plan pédagogique et psychologique nécessaire
à la technologie pour développer des hypertextes.
Un modèle qui peut être aussi utilisé
dans la construction d'un hypertexte est le "Project based learning".
Ce modèle se base sur l'apprentissage,
conçu par Celestin Freinet dans les années 20-30.
Le "project based learning" est un modèle d'apprentissage
et d'enseignement où on sollicite les apprenants pour résoudre
des problèmes ou d'autres devoirs concrets ; le travail des
élèves est soit autonome, soit par groupes.
Les apprenants doivent construire leurs connaissances
à travers les activités concrètes liées
à la résolution des problèmes du projet.
Différents modèles issus de la psychologie
cognitive ont contribué à déterminer les
succès des hypertextes ; par exemple tous les modèles
qui ont analysé la répétition de l’apprentissage
et l’élaboration des informations et les différents
styles d’apprentissage (visuel, auditif,….).
Selon la pédagogie de maîtrise,
les activités des étudiants consistent à
rechercher du matériel, prendre des décisions,
partager le travail au sein du groupe, gérer le temps, résoudre
des problèmes, présenter le produit final.
Il n’est donc pas difficile avec cette méthode
de créer des hypertextes sur un sujet à choix
et de le considérer comme un modèle pour la pédagogie
des hypertextes.
La modularité de Fodor est enfin sans doute
un des cadres basique pour la création des hypertextes.
L'environnement technologique d'apprentissage est différent
de l'enseignement traditionnel : les temps, le lieu, les intervenants,
les sources d'informations, les tâches de l'apprenant.
L'hypertexte est un système d'apprentissage
complexe qui comprend selon plusieurs auteurs (cit. Jacques.Rhéaume@ten.ulaval.ca)
plusieurs couches : la surface, l'interface, le contenu, la communication,
le logiciel ou la machine.
En effet, on peux essayer d'identifier des modèles
psycho-pédagogiques différents pour les différentes
couches et des modèles globaux nécessaires pour
homogénéiser et pour structurer l'hypertexte entier.
L'interface est la couche la plus proche de l'utilisateur,
elle est le lieu de contact, d'échange et de communication.
Je ne connais pas des modèles pédagogiques
spécifiques pour la création d'une interface, d'autre
part pourtant une analyse ergonomique pointue (analyse du travail
française) permet de se créer un modèle d'utilisateur
et éviter que l'interface engendre des problèmes.
La méthode ergonomique se développe
à travers de questionnaire et de tests utilisateurs et
des interviews soit dans la phase de conception du dispositif, soit
dans la phase d'évaluation du maquettage ou du prototypage.
On s'adapte de cette façon aux différents
styles d'apprentissage et/ou aux différents pre-réquis
ou connaissances des sujets pour arriver à le satisfaire
pleinement.
Je dirais qu'en France un nouvel champ de recherche
ergonomie et formation est en train de se développer
assez rapidement et va proprement dans cette direction.
La machine et le logiciel doivent aussi être
pris en compte et elle ne dérange même pas la relation
pédagogique (dans le sens de Philippe Merieu) avec l’hypertexte,
si l’apprenant a peur ou s'il est déjà préoccupé
devant la machine ou devant le logiciel qui peux gérer
l’hypertexte, son apprentissage sera plus difficile et moins efficace.
Au niveau communication et contenu,
on peut retrouver un modèle dans la pragmatique de Watzlawick
(Watzlawick et alii 1972).
La communication s'effectue en trois étapes.
L'étape syntaxique telle que décrite ensuite
par Shannon s'intéresse au codage, à la transmission,
aux canaux, à la capacité de traitement d'information
au bruit.
L'étape sémantique considère
le sens de la communication qui circule entre l'émetteur
et le récepteur par le passage obligé à
travers une langue commune ou en terme informatique à travers
une interface parlable et partagée.
Troisième étape de la communication
pragmatique, la relation médiatisée entre les pôles
de cette communication interactive.
La communication, c'est finalement un jeu de relations
un processus de changement de mouvement de perception. Un hypertexte
où la navigation est difficile ne pourra jamais trop aider
l’apprentissage, même si son contenu est parfaitement structuré
modularisé et adapté aux besoins de l’apprenant.
Le cadre épistémologique général
pour le développement des hypertextes pourrait être
identifié dans la théorie générale de
la Flexibilité.
Beaucoup de chercheurs comme Schwen ; Goodrum
et Dorsey se sont intéressés aux environnements
d'information et d'apprentissages enrichis et à leur rapport
avec le constructivisme, et avec les outils cognitifs et le cognitivisme.
L’une des conceptualisations la plus aboutie est
sans doute celle de Spiro et ses collègues (Sprior ; Feltovich,
Jacobson & Coulson 1991). Selon ces auteurs, pour construire
des connaissances approfondies et flexibles l’étudiant
doit se trouver exposé plusieurs fois aux mêmes situations
d’apprentissage (textes, illustrations, études de cas, problèmes
à résoudre) mais selon des perspectives différentes.
Donc l’hypertexte idéal doit présenter
l’information sous plusieurs formes en aidant par conséquence
l’apprenant à la mémorisation des informations.
La principale et la plus importante des caractéristiques
de l'hypertexte reste pourtant sa non-linéarité.
L'hypertexte, comme procédure informatique,
permet de relier un mot, un paragraphe, un icône ou une
image à autre mot, un autre paragraphe, une autre icône
ou une autre image, donne à l'utilisateur la possibilité
de choisir son cheminement à l'intérieur d'un document.
Les choix restent toutefois fonction de la structure de navigation et des
liens imposés par le concepteur. La planification globale d'un apprenant
face à un dispositif hypertexte peut devenir une réaction
à l'image du système et le détourner du matériel
pédagogique si les aides à la navigation ne sont pas considérées.
L’apprenant se construit donc son propre parcours
de lecture en fonction de ses préoccupations et de ses
intérêts, ce qui renforce probablement sa motivation.
Cette propriété fait de l'hypertexte un document "interactif"
dans lequel le lecteur tient une place prépondérante.
Personnellement je ne serait pas si optimiste
et je crois de partager soit les idées de la Flexibilité
Cognitive soit de ses détracteurs souvent aussi issu de
la Psychologie Cognitive (voir le texte de J.F Rouet ‘Technologie
de l'information et Cognition humaine : vers une Science des usages
?) par exemple, Edwards & Hardmann, 1989 ; Foss, 1989 ; Gordo et
alii, 1988.
En effet, peu de programmes d'Education Assistée
par Ordinateur (EAO) ont montré que les hypertextes
améliorent l’apprentissage. Le problème dans
la navigation, la désorientation, la noyade dans l’information,
le surcharge cognitive, le manque de repères, le risque
d’oublier des informations déterminantes sont seulement
un des risques qui ne permet pas aux hypertextes de s’imposer comme
outil d’apprentissage, mais plutôt qui les confinent à
rester des outils très adaptés aux jeux ludiques, à
l’Internet pour une utilisation non professionnelle. Ces problèmes
ont été analysés par Stanton et considérés
comme le résultat de choix de conception inadéquats et donc
pas inhérents à la nature de l'hypertexte. Le manque de considération
pour des démarches d'une part centrée sur l'utilisateur,
et l'ignorance des processus cognitifs sous-jacents à l'interaction
avec les hypertextes d'autre part, ne favorisent pas en effet une généralisation
de leur utilisation et une acceptation par le grand public. De plus, selon
Streitz (1987), on peut considérer l'activité de l'apprenant
avec la machine comme une forme de résolution de problème.
Or, les travaux de psychologie cognitive ont montré que la résolution
d'un problème est conditionné par la représentation
que le sujet se construit de l'espace-problème, c'est-à-dire
des concepts, paramètres et opérations impliqués dans
la résolution de ce problème (Rouet, 1999, p.89). La navigation
peut donc jouer un rôle prépondérant sur l'apprentissage.
Enfin, l'hypertexte favorise sans doute le travail
collaboratif : les élèves s'échangent leurs
informations, construisent ensemble un même hypertexte,
utilisent les informations laissées par leurs prédécesseurs,
le temps scolaire est géré de manière totalement
différente : les étudiants ne sont pas obligés
de s'en tenir au programme.
Dans un enseignement dont le principal support
est l'hypertexte, le professeur est davantage un animateur qu'une
personne qui sait en face d'autres personnes qui ne savent pas. A
l'inverse, les étudiants sont plus actifs, plus responsables
et plus engagés dans leurs études. Les modalités
du travail ne sont plus les mêmes : le travail est davantage
collaboratif, responsable et créatif, ici je vois le positivisme
parfois exagéré, mais toujours utile à la
société, d’un lointain philosophe du nom de Rousseau.
Question 3 |
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Les connaissances dans une pédagogie constructiviste sont formés à partir de représentations mentales existantes comparées et discutées (socio-constructivisme) avec de nouvelles représentations. Ce passage constant de différentes représentations mentales de l'apprenant qui est lié à de nouvelles informations données sous différentes formes peut être appelé processus d'apprentissage. Sans input de nouvelles informations (en sens large du terme) une construction et assimilation d'une nouvelle représentation n'est pas possible. L'hypertexte (vue comme source d'information) est bien adapté pour apprendre de nouveaux concepts de forme complexe, car il offre la possibilité de montrer différents aspects (opinions, représentations) dans un texte homogène . Il permet en ce sens à l'apprenant de créer et former sa représentation personnelle à partir de différents concepts dans un texte.
Il est important pour une pédagogie constructiviste que l'apprenant agisse de sa propre initiative pour chercher l'information. Une transmission directe d'information à partir de l'enseignant n'est pas nécessairement souhaitée pour cet apprentissage. Un élève motivé apprend évidemment plus facilement et on peux aussi affirmer la même chose pour un livre ; un outil didactique devrait pourtant s’adapter à plusieurs situations d’apprentissage. Il est par contre possible de créer une situation d'apprentissage où l'élève voit la nécessité d'avoir de l'information sur un certain sujet. En ce cas, l'information sous forme d'hypertexte est bien adaptée ; M. Britt et J. Rouet (1998) soulignent qu'un hypertexte en forme de réseau est plus efficace pour apprendre des concepts difficiles qu'un texte construit de façon linéaire. Un des problèmes majeurs des hypertextes est que la construction du modèle des connaissances faite par l’élève doit correspondre à celui des concepteurs pour que celui-ci puisse se retrouver dans cet hypertexte. Il y a donc ici une certaine contradiction, car en même temps, l’hypertexte utilisé dans le cadre d’un enseignement constructiviste peut permettre à l’élève de construire son savoir lui-même de manière personnalisée, et en même temps, ce savoir doit être structuré d’une façon proche des concepteurs de l’hypertexte pour qu’il ne se perde pas.
Par contre, on doit souligner que la navigation dans un hypertexte peut induire des novices en matière à se perdre. Ce fait pourrait être non productif pour l'apprenant ( R. Voisard et M. Notari: 2002(!!) ). On pourrait aussi présenter une situation d'apprentissage sous forme de projet à longue terme pour un groupe d'élèves (voir résumé sur " project based learning " Notari : pas publié!!). En ce cas, l'hypertexte peut avoir une place importante dans la phase initiale où les apprenants doivent acquérir des capacités et comprendre des concepts nouveaux liés au thème du projet.
Une autre forme d'apprendre avec des hypertextes, c'est de les construire. C'est à dire que, au lieu d'utiliser un produit, on essaye de retrouver toutes les possibilités de construire des liens entre des textes existants, ou bien, encore mieux, de construire des textes de façon que les futures lecteurs puissent apprendre sous forme d'hypertexte. Une conception d'un texte permet de formuler les représentations des élèves et surtout pour construire les liens forcent les apprenants à discuter entre eux, à formuler leurs représentations et comme ça, passer à de nouvelles représentations (c'est à dire une forme d'apprentissage soit disant constructiviste). Selon le modèle de Kintsch & van Dijk (1988), comprendre un texte, c'est construire une représentation de la situation évoquée par ce texte. Dans ce cas, cette construction n'est donc pas directe ; elle passe par plusieurs niveaux intermédiaires correspondant aux informations littérales du texte, dont les traits linguistiques et le nombre de propositions sémantiques (Rouet, 1999, p. 91).
M. Anne Britt, Jean-François Rouet, Charles A. Perfetti (1998). Using Hypertext to Study Reason about Historical Evidence , NJ : Lawrence Erlbaum Associates.
Michele P. Notari: Exposé sur 'project based learning':
http://tecfa.unige.ch/staf/staf-h/notari/staf11/perode3/project_based_learning.html
Romain Voisard et Michele P. Notari (2002): Different navigation strategies within a hypertext : Projet pour Staf 15: http://tecfa.unige.ch/staf/staf-h/notari/staf15/projet/article/intro_staf15.html
Question 4 |
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La plupart des études menées sur l'utilisation
des hypertextes soulignent les problèmes de navigation que les
utilisateurs rencontrent de manière récurrente. La
désorientation et plus grave encore, la perte dans le réseau,
sont les désavantages les plus cités. La navigation
est reconnue comme le problème de conception le plus important
dans les hypertextes.
L'analogie avec les études effectués sur la "conscience
situationnelle" (situational awareness) dans le monde réel est
une piste qui a été explorée sur la base des résultats
de Wickens (1990) suggérant qu'une navigation réussie est
le résultat de la correspondance entre la représentation
physique objective du monde et la position du voyageur dans celle-ci,
la vue subjective du voyageur et sa représentation mentale du monde.
Si cette correspondance est rompue il s'ensuit la désorientation
et la perte. Wickens suggère également que la compréhension
des relations entre ces éléments permettrait de comprendre
comment la navigation pourrait être supportée et améliorée
dans les systèmes électroniques.
La notion de cartes cognitives adoptée par Smyth (1987) explique
la manière dont un voyageur se représente l'information
spatiale dans le monde. Cette notion suggère qu'il existe
une représentation sémantique à long terme en mémoire
et que cette représentation serait également une carte en
réseau. La navigation efficace à travers un environnement
électronique serait donc dépendante de la formation d'une
carte cognitive correcte.
A la lumière de ce contexte, comment peut-on faciliter la navigation
dans un hypertexte? Les études de moyens d'aides à la navigation
à l'aide de cartes par exemple supportent plus l'idée que
l'utilisation d'une carte est néfaste à la performance, que
ce soit dans le monde réel ou dans un environnement électronique.
Malgré certains résultats qui supportent l'idée qu'une
aide à la navigation spatiale est efficace dans un hypertexte, on
se heurte aussi à une difficulté inhérente à la
représentation qu'un écran d'ordinateur permet, c.-à-d.
proposer une représentation en 2D du monde en 3D.
Il existe également une controverse entre les approches de
conception spatiale et conceptuelle de la navigation. La conception spatiale
est dominante dans la conception des environnement hypertextes, et si
on considère l'internet et l'intranet comme des variantes d'hypertextes
au sens large de la définition (il ne sont pas des hypertextes au
sens strict, entre autre à cause des liens exogènes qu'ils
intègrent), on observe la même tendance à faire appel
au possibilités techniques de manière systématique
et de concevoir ainsi des outils de navigation mal adaptés aux tâches
des utilisateurs. Ce problème méthodologique se situe
en amont de l'utilisation finale et souligne la nécessité
de faire appel à des approches de conception centrée sur
l'utilisateur (staf 12) pour mieux comprendre l'activité que l'hypertexte
doit supporter avant de décider si une aide spatiale à la
navigation est nécessaire.
L'importance de la conception en amont est aussi renforcée
par les études sur les styles et stratégies cognitives employées
par les utilisateurs d'hypertextes (traduites par des stratégies
de navigation), qui démontrent qu'elles peuvent être attribuées
en partie à l'image du système et donc au choix de conception
d'écrans et d'éléments d'aide à la navigation.
Stanton conclue également que la désorientation et la perte
dans un hypertexte peut être attribuée à une mauvaise
conception de l'interface et donne ainsi une lumière différente
sur les problèmes récurrents liés à l'utilisation
des hypertextes faisant appel à des structures spatiales : ce n'est
pas la nature de l'hypertexte mais sa construction (conception) qui pose
problème.
En effet, les concepteurs et les contraintes ou les libertés
logicielles imposées par les éditeurs d'outils hypertextes
ou par la technologie web, génère des pratiques sauvages
de conception et permet par exemple l'utilisation libre et arbitraire du
"lien" qui peut mener à une collection d'informations désorganisées
et non structurées. Il n'existe aucune garantie que les choix de
présentation et de placement des liens sur une page faites par les
concepteurs (ou éditeurs-enseignants dans le cadre du web), correspondent
à ceux des utilisateurs finaux. La construction d'une carte cognitive
est ainsi compromise à cause de flexibilité incessante qu'autorise
la technologie hypertextuelle aujourd'hui (je me permet d'inclure la technologie
web dans cette analyse en ayant conscience qu'elle induit une flexibilité
encore supérieure à celle d'outils dédié à
la création d'hypertextes). Pourtant, Sweller et al. (1990) ont montré
que l'insertion d'explications au sein même d'une figure complexe pouvait
faciliter l'apprentissage. Il est donc bel et bien possible d'organiser ce
type d'information pour faciliter la navigation des utilisateurs. De plus,
la métaphore spatiale peut être d'une grande utilité
pour structurer, mais aussi pour stimuler les échanges au sein d'un
lieu d'apprentissage. Toutefois, son usage doit respecter certaines règles.
Ainsi, pour jouer pleinement son rôle, la métaphore spatiale
doit s'appuyer sur un modèle naturel, c'est-à-dire sur une
structure dont les liens sont déjà assimilés ou mieux
font partie du "quotidien collectif" (Rouet, 1999).
Stanton propose d'appliquer les notions de réseau sémantique
pour organiser l'information et donner un cadre pour l'utilisation de liens,
et une approche par conception de noeuds définissable comme un
objet dont les attributs seraient des liens. Cette approche modulaire ou
orientée objet préconisée par Stanton est une réalité
qui prend forme aujourd'hui dans le domaine de la gestion et publication
de contenu web. En effet, les outils avancés commencent à intégrer,
encore que partiellement, ces notions d'objets manipulables facilement
dans une hiérarchie de catégories (ou menus).
Je prônerais pour le développement d'outils plus contraignants
dans les choix de conception offerts aux concepteurs. Ces contraintes
devraient bien sûr être développées sur la base
des résultats de recherches proposant des solutions aux problèmes
de navigation dans un hypertexte et non pas influencées par les
possibilités technologiques seules, qui ne font que d'entretenir
et d'augmenter la difficulté d'utilisation. Le problème initial
de l'utilisation d'une métaphore spatiale devient ainsi un choix
qui dépend du contexte et pas une réponse aux problèmes
rencontrés dans la navigation dans les hypertextes.
Jean-François Rouet (2001). Technologies de L'Information
et Cognition Humaine: vers une Science des Usages , Revue InCognito Informations,
à paraître courant 2002.
Stanton, N. A. (1995): Explorations into Hypertext: Spatial metaphors
considered Harmful . ETTI 31
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