Remarque : ceci est un travail d'élève au collège.
Il n'a pas de caution scientifique, médicale ou autre, et, bien que ces élèves aient fait un travail qui a été accepté dans le contexte scolaire, il ne peut prétendre être une source fiable d'informations !
  Introduction | Matériel et méthodes | resultats | Analyses et conclusions | Bibliographie |

2Ca

présentent

Travail de Biologie Moléculaire

2ème année

Collège Calvin novembre 1998

1. Introduction

Le génie génétique (ou manipulations génétiques, cela dépend de comment on perçoit cet aspect du progrès et nous ne souhaitons pas, par nos écrits, influencer notre éventuel lecteur) est un sujet très polémique ces temps-ci, surtout après les votations du 7 juin 1998. Nous pensons que tout le monde doit être un minimum informé, c'est pour cela que nous allons tenter de traiter quelques aspects du problème dans ce modeste rapport.

La première question que l'on s'est posée en vue de ce travail était : " Est-il dangereux de se faire soigner génétiquement ? " Mais, au fil des découvertes, nous avons appris que " se faire soigner génétiquement " était ce que l'on appelle plus précisément : une thérapie génique. Nous avons donc été contraints à nous poser des questions plus précises, auxquelles nous allons nous efforcer de répondre :

Nous avons essayé, par la suite, de répondre aux problèmes éthiques que la thérapie génique pouvait engendrer et avons exposé un avis personnel.

 

Fig.1 : Représentation approximative de l'ADN (acide désoxyribonucléique)

2. Matériel et Méthodes 

 

On peut, pour remplir ce chapitre quelque peu succinct dire en peu de mots que nous avons tout bonnement cherché sur l'Internet, qui nous a ouvert les portes de l'information, sous différentes formes :

- débats radiophoniques (Radio-France)

- articles parus dans des revues scientifiques

- sites Internet concernant notre sujet

- nous avons, grâce à Mr. Lombard, contacté Mr. Michel Strubin, biologiste

Les informations récoltées, nous les avons lues et en avons fait la synthèse

 

3. resultats

 

Première forme d'informations trouvée : site Internet (Cf. Bibliographie I)

QU'EST-CE QUE LA THÉRAPIE GÉNIQUE?

Dès 1978, date de l'isolement des premiers gènes humains, on a procédé à l'identification de plusieurs d'entre eux nous permettant ainsi de mieux les connaître et les comprendre. De surcroît, nous avons pu associer le mauvais fonctionnement de certains gènes à une maladie en particulier. Ces dernières sont généralement causées par le fait que le gène en question déclenche une production insuffisante de protéines, substances nécessaires au bon fonctionnement de l'organisme. C'est à ce moment que la thérapie génique intervient en corrigeant les défauts des gènes. Cela consiste principalement à injecter un gène sain dans la cellule pour remplacer le gène défectueux.

VECTEURS, RÔLES ET UTILITÉS

Dans la cellule, les gènes se retrouvant sur les chromosomes sont constitués de molécules d'ADN (acide désoxyribonucléique). Comment peut-on ainsi atteindre ces gènes? On utilise alors un vecteur, sorte de moyen de transport, qui conduira le gène sain à la cellule visée. Parmi ces vecteurs, le plus utilisé reste le rétrovirus, un virus modifié de telle sorte qu'il ne peut provoquer la maladie. On introduit le gène sain dans l'ADN du rétrovirus et, grâce à sa propriété de reproduction rapide, il transmet son bagage génétique aux chromosomes de la cellule. Donc, le gène anormal sera alors remplacé par le gène sain. Cependant, les rétrovirus présentent malheureusement plusieurs inconvénients. Par exemple, le fait qu'ils ne déposent pas toujours les gènes modifiés dans les cellules désirées peut produire des effets physiologiques dangereux.

THÉRAPIE GERMINALE OU SOMATIQUE

Il existe deux grandes formes de thérapie génique: germinale et somatique. La première modifie le code génétique des cellules sexuelles qui peut être transmis de générations en générations. Or, la deuxième modifie le code génétique des cellules non sexuelles. Le caractère ajouté n'est pas transmis à la descendance du patient. Aujourd'hui, seulement cette dernière forme de thérapie (somatique) est autorisée sur l'être humain.

DIFFÉRENTES APPLICATIONS

Dans les années quatre-vingt, on croyait que la thérapie génique ne servirait qu'à guérir des maladies héréditaires. Toutefois, on s'aperçoit qu'elle peut être utilisée dans plusieurs autres domaines, notamment pour certains cancers (63%) et pour le S.I.D.A. (7%). En effet, les maladies héréditaires ne représentent que vingt-sept pour cent de notre champ d'application. Presque toutes ces maladies peuvent être traitées par la thérapie génique car elles résultent du fonctionnement déficient d'un gène.
Comme en témoigne un reportage de l'émission Découverte, il est maintenant possible de traiter les maladies cardio-vasculaires par la thérapie génique.

LA GÈN-ÉTHIQUE

Les premières expérimentations de thérapie génique chez l'homme ont commencé en 1989 aux Etats-Unis. Depuis ce temps, on espère fortement que la thérapie génique nous permettra de prévenir au lieu de guérir. En effet, on pourrait dépister, dès le jeune âge, les gènes défectueux pour ainsi les modifier avant que la maladie ne se manifeste. Cela impliquerait un problème d'éthique puisque plusieurs maladies génétiques connues sont à ce jour incurables. Par exemple, il serait possible de faire une analyse génétique du fútus d'une mère enceinte et d'y détecter les maladies que l'enfant pourrait développer au cours de sa vie. Imaginez l'impact psychologique d'une telle annonce sur une personne sachant qu'il n'existe aucune cure aux maladies dépistées.

 

Deuxième forme d'informations trouvée : site Internet (Cf. Bibliographie II)

 

La thérapie génique, comment ça marche ?

Le principe : faire pénétrer dans la cellule une version correcte d'un gène dont on sait que le dysfonctionnement est responsable d'une maladie. C'est le gène-médicament. Pour y parvenir on utilise des vecteurs (virus, liposomes, voire chromosomes artificiels). En théorie, ça marche, mais en pratique, il y a encore bien des obstacles.

 

Les vecteurs

Un virus banal comme l'adénovirus, responsable du rhume, peut-être utilisé comme véhicule pour emmener le gène-médicament à l'intérieur de la cellule. Après l'avoir rendu inoffensif en retirant une partie de son génome, on y introduit le gène-médicament.
D'autres virus, par exemple les rétrovirus, responsables d'autres maladies, sont également souvent employés. Après leur avoir ôté leur pouvoir pathogène, on insère dans leur ADN le gène-médicament. Chacun a ses avantages et ses inconvénients. On va même jusqu'à combiner des virus rendus non pathogènes pour prendre le meilleur de chacun d'eux et obtenir le vecteur idéal. Aucune de ces techniques n'est réellement satisfaisante.

Aujourd'hui la recherche explore d'autres axes (amélioration des vecteurs non viraux, études d'autres virus ou construction de vecteurs viraux chimériques, développement de chromosomes artificiels).

Les vecteurs artificiels sont aussi utilisés. Il s'agit de microcapsules essentiellement composées de molécules graisseuses existant naturellement dans les cellules et utilisées jusqu'à présent en cosmétologie. Leur enveloppe ressemble aux membranes des cellules. Ils peuvent donc fusionner avec les membranes cellulaires et libérer le gène-médicament dont on les aura préalablement "chargés".

 

L'introduction dans la cellule

Il faut maintenant faire parvenir le gène-médicament dans les cellules déficientes de l'organisme. Portés par des vecteurs viraux ou chargé dans des liposomes, le gène-médicament peut-être inhalé par aérosol ou injecté.
Autre possibilité, le traitement in vitro. Dans ce cas, on prélève les cellules du malade que l'on met en culture et dans lesquelles on introduit le gène-médicament avant de les réinjecter au patient.

Les effets au coeur de la cellule

L'adénovirus (virus du rhume) fonctionne sur des cellules qui ne se divisent pas ou peu (les cellules musculaires ou les neurones par exemple). Le gène-médicament qu'il transporte ne s'intègre pas dans le génome de l'hôte. Son action est limitée dans le temps car il est souvent détruit par la cellule ou disparaît avec elle. Il suscite une action immunitaire importante. C'est un défaut majeur du système.

L'ADN du rétrovirus, porteur du gène-médicament, s'intègre au génome de la cellule hôte. Il infecte les cellules qui se divisent activement et c'est un outil de choix pour d'éventuelles thérapies géniques du cancer. C'est en effet une véritable greffe génétique qui permet que le gène médicament soit transmis de cellule en cellule au fur et à mesure des divisions. En revanche, le gène médicament s'exprime souvent trop faiblement lorsqu'il est porté par ce vecteur. De plus, ce dernier est difficile à diriger spécifiquement vers une cible donnée. Les liposomes posent encore d'autres questions. Ils sont en particulier moins efficaces que les virus pour apporter le gène-médicament à la cellule. En revanche, ils présentent théoriquement moins d'inconvénients. Quoiqu'il en soit, la vectorologie fait chaque jour des progrès.

 

Troisième forme d'informations trouvée : site Internet (cf. Bibliographie III)

 

Présentation de la technologie

Définitions

La thérapie génique désigne l'ensemble des procédés visant à introduire in vivo (on parle alors de thérapie génique) ou ex vivo (on parle dans ce cas de thérapie cellulaire) un gène correcteur dans une cellule malade.

Techniques mises en oeuvre

L'introduction d'un gène correcteur à l'intérieur d'une cellule malade nécessite tout d'abord son identification puis son séquençage à l'aide de techniques développées notamment dans le cadre des programmes de cartographie du génome humain (voir fiches "cartographie des génomes" et "séquençage automatisé de l'ADN". Plusieurs techniques sont utilisées pour traiter les cellules somatiques par thérapie génique. La plus courante dite "ex vivo" consiste à prélever des cellules porteuses de gènes défectueux afin d'y introduire le gène correcteur puis de réinjecter ces cellules dans l'organisme; on parle alors de thérapie cellulaire. On peut, par contre, traiter les cellules in situ, c'est-à-dire directement dans l'organisme. Par exemple, dans le cas de la mucoviscidose qui s'attaque aux poumons, plusieurs expériences visant à introduire des gènes correcteurs dans les cellules de l'épithélium tapissant les bronches ont déjà été effectuées. Le même type d'expérience a également été menée pour la dystrophie musculaire où le gène thérapeutique est alors injecté directement dans le tissu musculaire atteint; on parle alors de thérapie génique.

Diverses méthodes permettent d'introduire les gènes correcteurs dans les cellules renfermant un gène déficient. L'une d'elles, la plus ancienne et la plus couramment employée aujourd'hui, consiste à utiliser des virus modifiés comme transporteurs de gènes. Une autre solution, développée depuis déjà quelques années, propose d'utiliser des vecteurs synthétiques composés d'un mélange de lipides. C'est la voie poursuivie notamment par le Laboratoire de chimie génétique d'Illkirch, unité associée CNRS-Université de Strasbourg 1, dirigé par Jean-Paul Behr. Cette même équipe travaille également sur une solution intermédiaire entre le vecteur synthétique et le virus. Une troisième méthode fait appel à une bactérie, "Escherichia coli", pour introduire ces gènes correcteurs. Si cette bactérie avait permis jusqu'à présent de transférer du matériel génétique dans d'autres organismes comme d'autres bactéries, des levures, voire même des plantes, l'équipe de Patrice Courvalin (unité des agents antibactériens - Institut Pasteur) a démontré que cette bactérie qui vit habituellement dans l'intestin de l'homme peut devenir un vecteur intéressant pour introduire des gènes à l'intérieur de cellules de mammifères. Objectifs de la technologie

Contexte concurrentiel et économique

Si la thérapie génique semble représenter un enjeu économique considérable - cette technologie devrait en effet déboucher à terme sur de nouvelles perspectives thérapeutiques, utilisables dans un premier temps pour des maladies dues aux déficiences d'un seul gène cloné comme par exemple la mucoviscidose ou la myopathie de Duchenne, mais pouvant s'étendre par la suite, aux maladies infectieuses, cardio-vasculaires et neurovégétatives - les grands groupes pharmaceutiques n'ont pas pour autant décidé d'y investir massivement leurs propres capitaux. La lourdeur de leurs structures et leur culture, jusqu'à présent plutôt chimique, étant incompatibles avec la rapidité de réaction requise dans un secteur comme la thérapie génique qui ne cesse de muter, ces géants de la pharmacie ont donc adopté une stratégie consistant à progresser dans ce domaine en procédant à des rachats de petites entreprises spécialisées ou en passant des contrats de recherches avec elles, et en créant des structures spécifiques.

C'est ainsi que le groupe américain Pfizer s'est engagé dans ce domaine en signant un accord avec la société américaine Immusol. En juin 1994, il a passé également un accord avec Incyte Pharmaceuticals, une société américaine de séquençage du génome installée à Palo Alto (principaux investisseurs américains : Genentech, Schroder Ventures et Phoenic partners). De son côté, le groupe Bristol Myers Squibb (Etats-Unis) a signé un accord avec l'américaine Somatix qui lui concède des droits dans le domaine du cancer. Ce même groupe a également passé un accord avec l'entreprise américaine SEQ Limited (Principal investisseur : Johnston Associates Inc.) concernant le séquençage du génome. Quant au groupe Ely Lilly (Etats-Unis), il finance des recherches réalisées chez Myriad Genetics. Le groupe suisse Sandoz, encouragé par les resultats de l'entreprise américaine Genetic Therapy (GTI) avec laquelle il collabore, notamment en matière de cancer du sein, a investi récemment 300 millions de dollars, prenant ainsi 96,4% de cette entreprise qu'il ne détenait pas encore. Un autre groupe suisse, Ciba, s'est lui aussi lancé dans la bagarre par l'intermédiaire de Chiron (Suisse), une entreprise qu'il contrôle. Cette dernière a acquis en effet les 83% du capital de l'américain Viagene qui lui manquait. Les laboratoires suisses Roche et Novartis sont parmi les premiers investisseurs dans ce domaine. Pour sa part, le chimiste allemand Hoechst est aussi présent sur ce marché et a passé des accords notamment avec l'américain Cell Genegys. Le groupe Rhône-Poulenc-Rorer (France) mise également beaucoup sur la thérapie génique. Aussi a-t-il créé une structure autonome, Gencell, afin de regrouper l'ensemble de ses moyens dans ce domaine. Grâce à un budget annuel de 500 millions de francs, ce groupe progresse rapidement en construisant un réseau d'alliances qui se traduit parfois par des prises de participations. Reste que la thérapie génique représente aujourd'hui une technologie à haut risque, aucune recherche n'ayant réellement abouti encore à un succès. En outre, de nombreuses incertitudes subsistent, notamment quant à la fiabilité des vecteurs, aux réactions potentielles de l'organisme traité, à la durée d'efficacité des traitements mais surtout aux caractéristiques multifactorielles des maladies, d'où la nécessité de traiter une multitude de gènes. C'est pourquoi la thérapie génique, en dépit des énormes investissements qui y sont consacrés actuellement, représente un pari à très haut risque, d'autant plus qu'en raison des craintes qu'elle suscite - modifier l'intégrité génétique du vivant véhicule tout un ensemble d'idées - les autorités mettent en place progressivement des réglementations sans doute trop contraignantes de l'avis des industriels.

Fonctions remplies :

Traiter des maladies héréditaires ou acquises en utilisant pour médicaments des gènes dont on introduit in vivo ou ex vivo des copies fonctionnelles à l'intérieur des cellules somatiques comportant des gènes déficients.

Environnement technologique

Evolutions technologiques :

Dans un futur plus lointain, les chercheurs espèrent pouvoir traiter l'organisme tout entier à l'aide de la thérapie génique. Il faudra alors injecter les vecteurs des gènes correcteurs directement dans le sang des patients. Restera ensuite à ces vecteurs à trouver leurs cellules cibles afin d'introduire le gène thérapeutique.

 

Quatrième source d'informations trouvée : site Internet (cf. Bibliographie IV)

 

Thérapie génique :

Technique permettant de modifier les gènes de cellules cibles grâce à un rétrovirus transporteur. Une fois la modification implantée (elle ne se fait que pour un nombre limité de cellules), les cellules gagnent des propriétés intéressantes comme celle de produire une molécule donnée. La mutation étant limitée, elle n'est pas héréditaire. Il ne s'agit pas non plus d'une modification du phénotype (caractères "visibles"). Celle ci est impossible par ce moyen. La thérapie génique permet de combler une déficience de l'organisme en molécules (par exemple dans le cas du diabète elle donne la possibilité à certaines cellules de produire l'insuline qui fait défaut et que l'organisme ne saurait pas produire sinon), ou de lui apprendre à produire des molécules utiles (contre une maladie, par exemple). Elle peut permettre de soigner une maladie ou d'immuniser contre d'autres.

Mutation provoquée :

Il s'agit là de remplacer ou de modifier de façon définitive et héréditaire les gènes d'une personne. Cela ne peut se faire que juste avant ou juste après la conception, et pas une fois l'organisme développé. En modifiant par exemple une cellule-oeuf on peut modifier les caractères de celui qui en naîtra. La mutation est donc héréditaire puisqu'elle sera présente dans toutes les cellules de l'organisme à naître. On peut de plus envisager à peu près n'importe quelle mutation. La seule difficulté est de déterminer quels sont les gènes à modifier pour obtenir la mutation désirée. Pour la modification du phénotype, de nombreux gènes entrent en jeu - ce sont souvent les modifications les plus difficiles. Les mutations provoquées les plus courantes sont, de la plus commune à la plus rare en gros : la correction d'anomalies génétiques (en général un seul gène est déficient dans la majorité des maladies génétiques), l'immunisation à des maladies (peu de modifications à apporter aux gènes), de façon générale toutes les modifications demandant de ne changer qu'un gène, l'allongement de la durée de vie (vaste domaine de recherche permanente), modification du phénotype. [A adapter selon l'univers : parfois on peut imaginer qu'un laboratoire se soit spécialisé dans l'obtention de descendance blonde aux yeux bleu mais on imagine difficilement un laboratoire capable d'ajouter des bras...] Plus une mutation est rare, plus elle est chère, pour autant qu'elle existe. [A adapter : tout n'existe pas forcément, au contraire. Il reste difficile voir aléatoire de modifier les gènes. On peut provoquer des mutations non désirées, car il est très difficile de déterminer quels gènes entrent dans la modification d'un caractère. Sans doute une dizaine par exemple pour la couleur des yeux.]

Le clonage :

Le clonage est le développement d'un organisme complet à partir d'une cellule d'un organisme existant, et donc d'une copie conforme génétiquement. Il reste très peu utilisé pour les humains car ne présente objectivement pas un grand intérêt. Cependant, c'est une technique qui reste disponible pour ceux qui le souhaitent : pour "ressusciter" un être perdu [sans la conscience ni les souvenirs, donc pas vraiment l'être perdu finalement, et c'est presque toujours une grande déception], ou pour des allumés [qui se perpétuent par clonage - il existe ainsi des communautés de clones relativement stables, mais au comportement souvent inquiétant quand elles n'éclatent pas].

Conséquences éthiques :

Si la thérapie génique ne pose pas de problème éthique véritable (même si certains fanatiques la refusent farouchement), en revanche la mutation provoquée, parce qu'elle modifie le patrimoine génétique de l'espèce pose plus de problème. Egalement parce qu'il est du ressort des parents de décider, sans bien sur avoir l'avis des principaux intéressés. On peut imaginer qu'au départ seules les corrections d'anomalies étaient tolérées. Mais bien vite, on se pose la question de la limite : si on peut allonger la durée de vie de sa descendance, pourquoi s'en priver ? Même interdites, ces modifications ont sans doute été pratiquées clandestinement - par les plus riches au départ. Finalement, le plus raisonnable a été de tout autoriser a priori - la décision revenant aux parents, et pas à une quelconque autorité. Chaque cas est un cas particulier. Voilà comment on peut envisager l'historique légal de la mutation provoquée.
Certains états dictatoriaux sont même allés jusqu'à rendre certaines mutations obligatoires. Mais la plupart du temps, les mutations les plus utiles et les plus courantes sont proposées par des organismes d'état à ceux qui le désirent, pour des prix pas trop prohibitifs. De nombreux groupes, religieux notamment se sont élevés contre ce type de pratiques (y compris pour les plus extrémistes contre la thérapie génique), et les refusent systématiquement. Les grandes religions initialement opposées ont finalement cédé devant l'incompréhension de beaucoup de leurs fidèles soucieux des conditions de vie de leur descendance. La religion en tous les cas accepte relativement mal ces progrès [on a même vu des groupuscules entrer en guerre contre ces pratiques - de la même manière que les lobby anti-avortement aujourd'hui].

Conséquences sociales :

Notamment parce que la mutation provoquée peut apporter beaucoup à sa descendance, elle s'est rapidement développée, d'abord pour corriger des anomalies, puis des "tares" de plus en plus petites, puis allonger la durée de vie (par un facteur deux ou trois par exemple, en progression), etc. Apparition d'une classe de mutants exclus du fait de malformations - dues à des erreurs de manipulation ou une méconnaissance des gènes à modifier, ou même au désir de parents plus ou moins disjonctés (souhaitant à leurs enfants de pouvoir produire des stupéfiants directement dans leur organisme par exemple). On appelle parfois ces mutants les horreurs - nombreux sont ceux dont les malformations sont spectaculaires. Certains se fondent malgré leurs handicaps dans la société, mais ils sont rares. Seuls les plus aisés peuvent s'offrir les mutations les plus rares ou les plus demandées pour leur descendance. Il y a une inégalité profonde vis-à-vis de la mutation provoquée. Les plus riches familles ont souvent une durée de vie plus longue. Alors que les classes les plus défavorisées n'ont pratiquement pas profité des progrès de la génétique.

Conséquences économiques :

Les firmes capables de modifier le patrimoine génétique se sont beaucoup développées. Elles pratiquent bien souvent des tarifs extrêmement élevés, tant la mutation provoquée est une technique difficile et surtout demandée. La thérapie génique aussi les concerne, mais ce n'est pas en général sur ce terrain qu'elles gagnent le plus d'argent. Ces firmes maintiennent des groupes de recherche importants pour mieux maîtriser les mutations et savoir modifier de plus en plus de propriétés. Elles proposent de véritables catalogues de mutations. Les progrès sont lents en la matière - car pour bien juger des effets d'une mutation, c'est à l'échelle d'une vie humaine que tout se passe. Mais une fois découvert un moyen de modifier un caractère ou d'immuniser contre une maladie, le secret est jalousement gardé, car il fait la fortune de son laboratoire et de son découvreur.

 

Cinquième source d'information trouvée : revue scientifique La Recherche (cf. Bibliographie V)

 

Thérapie génique
et intégrisme scientifique

 

Avec la thérapie génique les scientifiques se sont payés de mots. Analyse d'un échec probable.


La science n'échappe pas à une certaine forme d'intégrisme. Le scientifique devient un intégriste lorsqu'il veut faire dire aux données scientifiques plus que ce que les méthodes ou les techniques utilisées ne permettent de montrer. On va au-delà des limites de la méthodologie ou de la compétence. L'intégrisme se manifeste souvent lorsqu'une nouvelle technique permet à la science de traduire plus rapidement en resultats ses idées et hypothèses. Ce fut le cas en 1973 lorsqu'est apparue la technique dite de " binding " (fixation d'un ligand radioactif sur un récepteur) qui a permis, grâce à une facilité d'exécution exemplaire, de révolutionner l'étude des récepteurs du cerveau et de développer des molécules faites sur mesure. L'industrie pharmaceutique a largement profité de cet apport technologique pour concevoir de nouveaux médicaments. Mais les intégristes ont aussi voulu faire dire à cette technique plus qu'elle n'était capable de révéler en proposant des sites de fixation in vitro dépourvus de contexte fonctionnel in vivo (I). Suite à une nouvelle révolution technologique, cette fois dans le domaine de la génétique, la thérapie génique nous annonce qu'elle va produire des médicaments capables de nous guérir de presque tous les maux (II). Je serais plutôt tenté de lui appliquer le mot du général de Gaulle sur l'autodétermination en Algérie tel que le rapporte Alain Peyrefitte: " Ce sera un piège à cons (1) ". Il y a tout d'abord un réel problème concernant l'appellation même. Le mot thérapie ne devrait être utilisé que lorsque l'efficacité thérapeutique d'un produit ou d'une technique est démontrée chez l'homme. Ce n'est évidemment pas le cas de la " thérapie génique ". Jusqu'ici on ne fait que des promesses aux patients en leur disant que cela va marcher. Tout ceci n'est pas très loin de certaines formes du discours politique. Mieux aurait valu parler simplement de " transfert de gène (2) ".
Il y a aussi un problème conceptuel, et même deux. Peut-être sera-t-il possible de changer un gène déficient dans les cellules sanguines. Mais d'abord l'idée même qu'une maladie génétique résulte de l'altération d'un seul gène apparaît aujourd'hui dépassée (3). Bloquer une seule issue dans une ville après un hold-up n'a pas de sens III). D'autre part si l'on entend par thérapie génique, comme c'est le plus souvent le cas, l'utilisation d'un virus vecteur dans lequel on a introduit le gène qui est déficient chez le patient et que l'on désire remplacer au moyen du virus, cette approche-là est déjà condamnée dans son principe même. Lorsqu'un virus nous atteint, il s'ensuit une série de réactions complexes de type allergique et immunologique qui tendent à rejeter ou à neutraliser l'intrus. Un virus induit la formation d'anticorps. Sous peine de voir apparaître de sérieuses complications, une telle préparation virale ne peut être injectée qu'une seule fois, ce qui en annule l'intérêt. On peut déjà prévoir que, malgré l'échec, un combat d'arrière-garde s'installera. De fait il s'est déjà installé. Les données cliniques récentes montrent déjà la non-faisabilité de cette " thérapie" génique dans la dystrophie musculaire et la mucoviscidose (4,5,6). On compte au total plus de 100 essais cliniques de " thérapie " génique en cours dans le monde, sans qu'apparaisse le moindre signe d'une amélioration clinique. On peut déjà parler aujourd'hui d'échec de cette soi-disant nouvelle approche thérapeutique, dans laquelle plus de 200 millions de dollars sont investis annuellement par le seul NIH américain. Les raisons de cet échec sont multiples et plus ou moins claires. Moins de 1% des cellules visées sont transfectées par le vecteur, le virus avec son transgène étant beaucoup trop faible. Quand le transgène est effectivement transféré à la cellule cible, le processus tend à s'atténuer au fil du temps, probablement suite à l'action des anticorps. Quoi qu'il en soit, l'échec n'est pas pour surprendre ceux dont la science du médicament est le métier et notamment les très nombreuses firmes pharmaceutiques qui, avec sagesse, se sont gardées de se lancer dans cette voie. Ceux qui persistent à y croire se bercent d'illusion (2,8). Les biologistes moléculaires n'ont pas l'expérience pharmacologique nécessaire pour faire de leur " produit " un médicament. En Europe continentale où il n'y a pas d'études de pharmacologie on estime qu'il faut dix à quinze ans de travail en laboratoire pour faire d'un scientifique un bon pharmacologue. Tout fils de Jean que l'on soit, Daniel ne peut développer les médicaments que Paul a été capable d'inventer. D'aucuns peuvent s'étonner que la plus grande entreprise française de médicaments se soit lancée à corps perdu dans l'aventure de la " thérapie " génique. Ce n'est pas étonnant si l'on sait que, dans le processus décisionnel, il est relativement aisé de convaincre un ancien élève de l'ENA, de HEC ou de Polytechnique. Connu sous le vocable " projet Bioavenir ", l'investissement permettra sans nul doute de récolter la manne de l'Etat. Pour un laboratoire universitaire, il n'y a rien de déshonorant à profiter des cadeaux faits à travers ce projet... On n'a pas le droit de jouer avec la santé des malades en leur faisant miroiter des promesses qui tiennent du mirage. Pourquoi répéter les erreurs du passé ? Avec la découverte de l'enképhaline (notre morphine endogène) les médicaments devaient être des peptides. Puis on a inventé le ciblage : mettre une " tête chercheuse " sur le médicament pour qu'il aille directement sur l'organe visé. Puis les bactéries devaient produire de nouvelles molécules... Aujourd'hui il y a la " thérapie génique ". On peut déjà prévoir que, malgré l'échec, un combat d'arrière-garde s'installera. De fait il s'est déjà installé, avec tous ceux qui rêvent encore d'obtenir un virus doté de toutes les qualités du vecteur parfait.
Il serait plus urgent de s'occuper du problème préoccupant de la pharmacologie clinique, en état de déliquescence avancé. Une théorie ne fait pas un médicament. Pour acquérir ce statut, une petite entité chimique doit passer dans une trentaine de laboratoires, l'équivalent de trois facultés universitaires travaillant de concert. Dans ce métier, l'humilité et la modestie resteront les qualités de base permettant de reconnaître l'inattendu.

 

P.L.

 

Sixième source d'informations trouvée site Internet : (cf. Bibiographie VI)

 

Compte rendu d'un Colloque :

La thérapie génique concerne tous les traitements qui touchent des défauts cellulaires génétiques. On parle de thérapie "ex vivo" lorsque l'on transplante des cellules modifiées génétiquement, et de thérapies "in vivo" lorsque l'on injecte directement du DNA.
Parfois l'on cherche à combler un défaut "monogénétique" comme dans la mucoviscidose (on parle de remplacement génique), parfois l'on cherche à combler un défaut plurigénétique comme dans le cancer, le sida ou le diabète (on parle d'augmentation génique).

En thérapie "Ex vivo" on utilise des cellules autologues ou des cellules xénogénétiques d'une autre espèce, infectées ou transfectées par le gène d'intérêt puis emballées dans des membranes semi-perméables permettant une immunoisolation du système immun de l'hôte mais une capacité de se nourrir et de diffuser à l'extérieur la protéine manquante.
Par exemple on prendra des cellules de phéochromocytome de rat sécrétant de la Dopamine et qui seront implantées dans le pallidum d'un cobaye "parkinsonnien". Il est étonnant de voir qu'après 3 mois si l'on analyse l'implant in situ, l'efficacité de la membrane semi-perméable est telle qu'il n'y a aucune réaction inflammatoire autour.
Une étude de phase a été faite à Lausanne dans la sclérose latérale amyotrophique (SLA) en cherchant à implanter un facteur trophique pour les motoneurones appelé CNTF produits en l'occurrence après transfection par des cellules de rein de hamster (BHK= baby hamster kidney), le tout entouré d'une membrane semi-perméable.
En cas de rupture de la membrane c'est le système immunitaire de l'hôte qui détruit l'implant, en cas d'inefficacité du système immunitaire de l'hôte un système de sécurité supplémentaire a été mis en place sous la forme d'un gène tueur de la cellule activable par l'acyclovir.

L'implant qui a la taille d'une aiguille à coudre, est prolongé par un fil inerte de silicone qui permet de le retirer à souhait; il est placé dans le cône médullaire, intradural, par une vulgaire ponction lombaire. Après 15 mois, les cellules à l'intérieur de la capsule semi-perméable sont toujours bien vivantes et sans réaction inflammatoires. Si j'ai bien compris, 4 patients ont eu droit à cet implant à Lausanne dans le contexte d'une SLA, en étude de phase 1.

Pas de grands resultats bien sûr pour le moment, mais ça pourrait marcher, et ça pourrait marcher pour délivrer de l'érythropoiétine à des hémoglobinopathies, à des insuffisances rénales ou à des beta-thalassémies. Pour le diabète aussi évidemment en implantant des îlots isolés dans des bulles...

La thérapie génique est à nos portes, et à Lausanne on y consacre apparemment pas mal de temps et d'intelligence.

Compte-rendu du Dr E. Bierens de Haan

 

 

Septième forme d'informations trouvée : table ronde radiodiffusée sur Radio-France (cf. Bibliographie VII)

 

 

Claudine JUNIEN

Vous avez tous bien saisi que toutes les découvertes qui ont été faites au cours des 10-20 dernières années ont apporté un bouleversement dans la connaissance de ce qu'on peut appeler le mystère de nos origines, puisqu'on touche au plus petit, à l'ADN, ou à des molécules qui nous composent et que, du fait de ces bouleversements, il en résulte des bouleversements aussi au niveau culturel, au niveau religieux, au niveau philosophique, au niveau social, mais aussi d'énormes bouleversements au niveau économique et au niveau financier.

Cette révolution, ce que nous voudrions vous dire autour de cette table ronde, c'est comment elle se traduit en termes d'applications et quels sont les espoirs que l'on peut mettre dans la recherche aujourd'hui et quel est, en fait, l'état des lieux aujourd'hui et vers où va-t-on et surtout comment les travaux qui sont menés à l'heure actuelle, les recherches qui sont menées à l'heure actuelle apportent effectivement dans certains cas un espoir patent, proche mais surtout comment il va falloir faire la part entre ce qui est du plausible et ce qui est du fantasme ?

Je pense que dans le cas de la thérapie génique, nous en avons un très bel exemple. Il y a quelques années, avec la découverte et le clonage des premiers gènes, il y a eu un engouement démesuré pour cette approche de la thérapie génique et des essais ont été faits de manière totalement prématurée, aboutissant obligatoirement à des resultats décourageants, ce qui fait que des essais de thérapie génique qui sont menés actuellement, mais avec un recul beaucoup plus important que celui qu'il avait au départ, ces essais de thérapie génique reçoivent, en quelque sorte, le retour du balancier et il va peut-être être difficile de remonter la pente et de faire voir que ces techniques ne sont pas des techniques totalement d'apprenti sorcier mais aussi des techniques qui devraient permettre d'aboutir à une thérapeutique.

Je crois qu'il faut bien faire la différence entre la thérapie génique appliquée à des maladies génétiques, c'est-à-dire des maladies pour lesquelles le gène muté est présent dans toutes les cellules de l'organisme et peut se traduire, selon les maladies, par une affection monosystémique, ou bien par une affection polysystémique. De l'autre côté, il y a les pathologies acquises, comme le cancer, qui touchent une tumeur à l'intérieur d'un organe.

Il faut bien voir que l'objectif n'est pas du tout le même dans les maladies génétiques et dans le cas des tumeurs. Dans le cas des maladies

génétiques, il faut réparer, réparer un gène dans un organe défectueux ou dans plusieurs organes défectueux, alors que dans le cas du cancer il faut se débarrasser de la tumeur, soit en l'aidant à se différencier et en la faisant mourir d'une façon ou d'une autre, mais une fois qu'on a nettoyé et qu'on a fait le ménage, le problème n'est pas du tout le même que dans le cas des maladies génétiques. Je crois qu'il faut bien avoir en tête, lorsque l'on voit les différents essais qui sont actuellement en cours et l'espoir d'aboutir à, effectivement, une thérapie génique pour les maladies génétiques.

Je crois qu'un autre aspect qui est aussi très important aujourd'hui est le problème de l'enseignement, de la formation et de la diffusion des connaissance en génétique. Nous assistons, en fait, à un fossé... Nous voyons qu'il existe un fossé considérable entre la compréhension d'un public qui ignore, pas tout mais une grande partie des bases de la génétique et le savoir hyperspécialisé de généticiens qui, très souvent, ont du mal à communiquer et à faire comprendre l'intérêt de leurs recherches. Donc, ce fossé culturel, c'est, je crois, la grande mission de tous ceux qui enseignent, à tous les niveaux, de ceux qui font de la communication et qui devront essayer de combler ce fossé et de permettre d'avancer dans la compréhension de tous pour qu'il y ait réellement un débat. Parce qu'on parle toujours de débat. Il faut qu'il y ait des débats, oui, c'est très bien qu'il y ait des débats mais encore faut-il que les gens sachent de quoi ils parlent et qu'ils soient face à face, à égalité, dans ce discours et dans ce débat.

Je voulais aussi parler d'un autre aspect, très rapidement, qui était celui des tests génétiques. Les tests génétiques, on en entend beaucoup parler, surtout à travers des effets un petit peu médiatiques assez récents, qu'est-ce que c'est que les tests génétiques ? Ce terme de tests génétiques englobe beaucoup de choses. Nous avons d'une part, effectivement, les tests génétiques qui permettent l'identification d'un individu pour, par exemple, les tests de paternité ou dans les affaires criminelles. Ces tests génétiques utilisent à peu près 25 marqueurs qui vont permettre, par recoupement, de savoir si l'individu qui est testé correspond bien à un membre d'une famille donnée ou bien peut être le coupable. Donc, dans le cas de ces tests génétiques, en utilisant cette multitude de marqueurs, on arrive, soit par une réponse de oui ou non, soit par des tests statistiques, à dire quelle est la probabilité que cet individu appartienne, par exemple, à cette famille, ou qu'il soit le coupable.

Dans le cas des maladies génétiques à proprement parler, pour être un petit peu réductionniste, quand on recherche dans une famille si un individu est porteur d'un gène, on va rechercher la mutation 3585 dans le gène, et uniquement cette mutation. On ne va pas s'amuser à regarder d'autres gènes et l'illusion qu'on va pouvoir faire des cartes génétiques qui vont permettre de regarder tous les gènes de tous les individus et toutes les mutations possibles est vraiment de l'ordre du fantasme, et il faut vraiment essayer de détruire cette opinion qui prête à confusion et qui fait inutilement peur.

Alors, effectivement, la dernière catégorie de tests génétiques, ce sont les tests génétiques dont on a un petit peu parlé ce matin, qui seraient des cartes génétiques qui permettraient de savoir quelles sont les susceptibilités individuelles d'un individu, à tel ou tel type de produit, à telle ou telle substance de l'environnement, à tel ou tel type de médicament. Ces tests génétiques seraient, en quelque sorte l'antibiogramme d'un individu qui lui permettrait de savoir avec quelle substance il risque de mal réagir. Alors, ces tests pourraient être faits sur une dizaine ou une vingtaine de marqueurs. Mais encore, là aussi, faudrait-il être certain qu'on a regardé les bons marqueurs et qu'il n'y a pas un autre gène, un autre enzyme pour lequel cet individu est également susceptible et risquerait quand même, malgré tout, de faire un accident.

Donc, on voit bien que ces tests génétiques, même lorsqu'ils sont ciblés, présentent un danger. C'est le danger de passer à côté d'un autre trait, d'un autre polymorphisme qui n'aurait pas pu être mis en évidence. C'est la raison pour laquelle, si on considère maintenant qu'on a environ 100 000 gènes dans notre génome et au moins probablement autant de facteurs environnementaux qui peuvent interagir avec ces gènes, l'idée de faire une carte génétique et de nous prédire notre destin médical est une idée qui est, malgré tout, absurde, sauf si on se focalise sur quelque chose de vraiment très précis.

Je voudrais donc peut-être ne pas continuer trop longtemps sur ces aspects-là et commencer à donner la parole aux autres personnes de la table ronde.

Simone GILGENKRANTZ qui est Professeur de Génétique Emérite à Nancy a connu les début du développement de la génétique et actuellement elle participe aussi de façon très concrète au développement de la génétique et surtout de sa communication à travers ses écrits dans Médecine/ Science et je crois qu'elle était très bien placée pour faire, en quelque sorte, le relais entre la génétique d'hier et la génétique d'aujourd'hui et la génétique de demain

 

Simone GILGENKRANTZ

C'est vrai que ce matin, quand les pays émergents ont parlé et ont évoqué leurs problèmes, ces problèmes-là n'étaient pas si éloignés de ce qu'il se passait en France en 1960-1970. Il faut bien se souvenir que la génétique est quelque chose de très récent, que pendant toute la première moitié du 20ème siècle, il ne s'est rien passé en génétique et même, au contraire, il y a eu une sorte de recul à cause de la prise de conscience du danger de l'eugénisme et de la constatation de ce que pouvait donner son avatar qui a été le nazisme.

Donc, c'est reparti tout doucement et, au début, les femmes ont payé un lourd tribu à la génétique parce que, dans une famille où il existait une maladie génétique, le médecin disait à une femme : "Mais il ne faut plus avoir d'enfant", et cette femme était à nouveau enceinte. Elle revenait et elle était très culpabilisée d'être à nouveau enceinte et de ne pas savoir si cet enfant allait de nouveau être malade. Par conséquent, à partir de ce moment-là, il y a eu quelque chose qui s'est passé, probablement parce que la découverte de l'ADN et la découverte du langage de l'ADN qui était donc une sorte de message faisait que les maladies génétiques n'étaient plus des malédictions mais devenaient simplement des erreurs, des fautes de typographie, et que les familles elles-mêmes sur lesquelles était posé un regard extrêmement défavorable, se sont rendues comptes qu'elles avaient des maladies un peu différentes des autres, mais tout de même des maladies, et qu'elles ont commencé à demander à être soignées, sinon guéries.

D'où le démarrage d'une association comme l'AFM qui a fait énormément aussi pour le changement de regard sur les maladies génétiques. Et le mot tare qui, en soi, n'est pas un mot infamant puisque maintenant on parle de fardeau génétique, mais ce mot tare avait une connotation effroyable à une certaine époque, et je pense que maintenant, elle est sortie de l'ensemble de la population, ce qui est quelque chose de très positif, mais une petite goutte d'eau par rapport à cette révolution qu'est la génétique actuellement.

Je voudrais simplement - et je pense que ce sera repris par d'autres intervenants - évoquer plusieurs aspects pratiques, de terrain, de la génétique. Tout d'abord, le Conseil Génétique. Par exemple, ces cousins germains qui veulent se marier et à qui on a dit : "Oh ! là là attention ! C'est extrêmement dangereux. Il faut voir un généticien parce qu'il peut arriver quelque chose". On en a parlé ce matin aussi avec les pays émergents. Cette habitude de se marier entre cousins, en soi, est quelque chose de fort respectable et je ne crois pas qu'on puisse le condamner. La liberté des êtres humains étant ce qu'elle est, chacun fait ce qu'il veut dans ce domaine. Mais il est vrai que du fait de notre fardeau génétique, c'est-à-dire du fait que nous portons tous de façon ignorée à l'état hétérozygote, c'est-à-dire sur un des deux gènes que nous avons reçus de nos parents, nous portons tous des mutations et si un couple s'unit, qui a reçu de son grand-père ou de son arrière grand-mère le même gène anormal, il a des risques. Alors là, on se prend à rêver aux chips, c'est-à-dire aux puces que l'on pourrait faire pour ces couples, et on pourrait regarder tout un ensemble de pathologies fréquentes et moins fréquentes qui permettraient de dire : "Vous, vous êtes à risque et on va pouvoir éventuellement faire un diagnostic prénatal".

Le Conseil Génétique, ce peut être aussi une personne qui a dans sa famille des retards mentaux. Et dans ce cas, il faudra mettre en branle toute une enquête génétique qui demande vraiment un travail long du généticien clinicien et une collaboration des familles puisque, vous savez que chaque personne est totalement libre d'accepter ou de refuser de participer à des renseignements qu'elle peut donner à des proches.

Je pourrais, bien sûr, multiplier les exemples de ce que peut être une consultation de génétique. Il y a aussi le diagnostic prénatal. Actuellement, vous savez que les femmes peuvent bénéficier d'un prélèvement de sang, quel que soit leur âge, puisque, avant, on faisait un diagnostic prénatal pour la trisomie 21 aux femmes de plus de 38 ans. Maintenant, on fait des prélèvements de sang qui ne font qu'un calcul de risque, et je crois qu'il est très important que soit bien compris ce risque potentiel des jeunes femmes car beaucoup de jeunes femmes de 30 ans qui attendent un enfant n'ont pas forcément d'inquiétude, et dans ce cas il serait tout à fait déplorable que le prélèvement de sang et l'idée de parler de trisomie 21 à une femme de 30 ans entraîne chez elle une inquiétude supplémentaire à sa grossesse.

Cette focalisation sur la trisomie 21 est quelque chose de notre époque qui est un petit peu regrettable parce que je crois que les grossesses sont surveillées mais que, à côté de cette trisomie 21, il peut y avoir une infinité de risques tout à fait différents et que, par ailleurs, des couples qui, pour le respect de la vie, ne veulent pas avoir cet examen sont parfaitement en droit de le faire. Et il serait regrettable que la société fasse pression en disant : "Il faut absolument faire ce prélèvement de sang". Il faut que ce soit les couples eux-mêmes qui décident pour savoir s'ils veulent, et s'ils veulent, même quelquefois simplement pour se préparer à la venue d'un enfant anormal. Cela coûte de l'argent, deux fois, mais je pense que notre pays n'a pas cette forme d'esprit qui dirait : "Si vous voulez des examens de diagnostic prénatal, alors vous devrez être obligée d'avorter..." On n'en est pas là et j'espère qu'on n'en sera jamais là.

Alors, à partir de ce diagnostic prénatal, j'aurais voulu dire un mot du diagnostic préimplantatoire pour avoir connu des jeunes femmes qui ayant, par exemple, étant vectrices de myopathie de Duchenne, avaient, pour la première grossesse, eu un garçon atteint, une interruption de grossesse, pour la deuxième grossesse, de la même façon, une deuxième interruption de grosse, troisième et, à la quatrième grossesse ce sont des femmes qui sont extrêmement souffrantes, déprimées, qui ne veulent plus entreprendre de grossesse et pour lesquelles, vraiment, le diagnostic préimplantatoire serait une excellente chose. Maintenant, comme l'aménager ? C'est affaire du Législateur.

Enfin, il y a aussi le diagnostic présymptomatique. Je pense qu'il en sera question car dans le diagnostic présymptomatique il y a des maladies que l'on peut soigner... tout au moins pour lesquelles on peut avoir une surveillance et, dans ce cas, bien sûr qu'il faut essayer au maximum de faire ces diagnostics présymptomatiques. Pour les maladies sans possibilité de soins actuellement comme cet exemple que l'on donne toujours mais qui fascine tous les médecins, c'est l'exemple de la chorée de Huntington, les personnes ont le droit de ne pas savoir et ont le droit d'être informées avant de demander cet examen, de ce qu'il implique pour leur vie future.

Maintenant, pour terminer, je voudrais parler de ce qu'on attend de cette révolution de la génétique avec des choses très simples. On parle des dents du bonheur, et c'est ce sourire avec les dents écartées. Je pense que tout le monde fait la part des choses. On se dit : "les dents du bonheur, c'est sympathique, c'est agréable". Mais si on commence à parler du chromosome du crime ou du gène du bonheur ou du gène de l'homosexualité, là on se fourvoie. On se fourvoie parce qu'il y a une frontière fragile entre la théorie ou la donnée scientifique, ponctuelle, précise et nuancée et puis cette espèce de croyance simpliste qui va quelquefois être généralisée dans les médias. Et cela je crois que c'est très important de le dire dans cette maison.

 

Hélène CARDIN

Mais c'est essentiellement généralisé au mois d'août, vous savez, quand on n'a pas grand chose à faire dans les rédactions. Je suis obligée de vous le dire.

 

Simone GILGENKRANTZ

Mais je ne récrimine pas, simplement c'est une tentation qui est une tentation de tous...

 

Hélène CARDIN

Mais c'est terrible. Cela intéresse beaucoup les rédacteurs en chef, je vous le jure. Le gène du crime, ça fait un tabac. Même le gène de l'homosexualité. .

 

Claudine JUNIEN

On va continuer, mais cette fois-ci pas sur le chromosome du crime, sur la consultation spécialisée "Allo-Gènes" qui est menée par Marie-Louise BRIARD, Directeur de Recherche à l'INSERM.Elle est à l'Hôpital Necker. Elle s'occupe de cette consultation très particulière qui joue un rôle très important dans l'information des familles, mais aussi des médecins, sur les maladies génétiques.

 

Marie-Louise BRIARD

Je dirai que ce n'est pas une consultation. Je vais y revenir. Avant de parler d'Allo-Gènes, si vous me permettez, je me suis demandée qu'est-ce que c'était cette révolution médicale apportée par la génétique. Le premier point qui m'a semblé important, c'est le nouveau regard qu'on donne à une maladie génétique. Il y a 10 ans, 15 ans, quand on portait le diagnostic d'une maladie génétique, on baissait les bras. Maintenant ce n'est plus tout à fait cela, et je crois que c'est déjà une révolution très importante. On ne baisse pas les bras. On commence à penser et à montrer des malades, et cela me semble quelque chose déjà de très important. Cela c'est la première révolution.

La deuxième révolution, c'est de faire mieux des diagnostics. Les cliniciens ont été toujours capables de faire des diagnostics, un certain nombre de diagnostics en examinant des enfants notamment... Je rappelle qu'au départ les généticiens-cliniciens c'étaient des pédiatres, et les méthodes actuelles ont permis de conforter leur impression clinique. On a trouvé des micro-délétions qui n'étaient pas visibles sur le caryotype, c'est-à-dire l'étude des chromosomes, mais, en étudiant avec des méthodes qui alliaient cytogénétique et génétique moléculaire, on a trouvé des anomalies mineures. Mais aussi on a appris - et cela c'est aussi une révolution et on en a dit deux mots tout à l'heure - qu'une maladie qu'on savait parfaitement décrire sur le plan clinique, ce n'était pas une maladie. C'étaient peut-être deux maladies en fonction de l'évolution un petit peu différente, mais c'étaient une dizaine, une douzaine, une quinzaine de maladies parce que c'étaient des gènes différents.

Je dirai que la révolution c'est bien cela, cette révolution, parce qu'on pense qu'on a les clefs. Mais, en fait, on n'a pas les clefs du tout. Si vous prenez 10 gènes, comment voulez-vous aller rechercher, quand vous voulez faire un diagnostic, quel est le bon gène qui est impliqué. Et quand on sait que les mutations des gènes sont très nombreuses dans un certain nombre de cas... Prenons une maladie - Claudine la connaît bien puisque c'est la neurofibromatose de Recklinghausen - le gros travail du gène est très grand et puis on trouve 10, 15, 20 % et maintenant je ne connais personne en France qui continue à rechercher des mutations. Et pourtant, nous, les généticiens, on en a besoin. C'est une maladie dominante qui se transmet de génération en génération et quand c'est le premier cas dans la famille, il faut savoir s'il y a un risque ou pas.

Donc, vous voyez, cela a apporté des choses mais aussi cela en a retiré, et parfois on est tout à fait gêné. Et puis, je crois qu'une des révolutions c'est la génétique médicale qui était, j'allais dire, un petit peu confinée à certains spécialistes, est en train de rentrer complètement dans la pratique quotidienne de la médecine. On pourrait dire que de la génétique médicale, on va passer à la médecine génétique. Mais là encore, je pense qu'il faut qu'on fasse tout à fait attention parce que la réalisation de tests génétiques dont on a parlé peuvent être dangereux.

Je vais citer un exemple. On recherche des marqueurs particuliers dans la spondylarthrite ankylosante. Le marqueur le plus fréquent, c'est le marqueur HLA-B27. On me téléphone à Allo-Gènes (je vais en reparler tout à l'heure) : "J'ai la maladie HLA-B27". Donc, vous voyez, d'un marqueur on est venu à une maladie. "Et pourquoi ma súur qui a la même maladie que moi est à 100 % et pourquoi moi qui ai le marqueur mais qui n'ai pas grand chose, je ne suis pas à 100 % ?"

Donc, vous voyez, là encore, il y a des messages à faire passer et à expliquer aux personnes, qu'il y a génétique et génétique, qu'il y a maladie, qu'il y a marqueur, et c'est un petit peu cela qu'Allo-Gènes a cherché à faire. Allo-Gènes c'est un centre d'information sur l'ensemble des maladies génétiques. Je dirai qu'on a différents appels. Pour un peu situer, on a à peu près 10 % de maladies chromosomiques si je compte aussi les micro-délétions. On a 45 % à peu près de maladies mendéliennes tout à fait authentiques. On a à peu près 15 % d'appels pour des maladies que je dirais avec des formes familiales. C'est le cancer du sein, cela peut être le diabète, si on retient quelques formes familiales. Et puis il y a la maladie à composante génétique. Et les gens qui nous appellent, qui sont aussi bien des médecins... nous avons de plus en plus d'appels de médecins, et j'y reviendrai tout à l'heure, que des personnes concernées par la maladie génétique ne se trompent pas puisque j'ai très peu d'appels qui ne concernent pas les maladies génétiques.

Notre but, à nous, c'est de passer l'information et d'essayer d'expliquer aux personnes ce que c'est qu'une maladie génétique, qu'est-ce que cela peut apporter, et c'est vrai qu'actuellement je peux vous dire que les appels c'est : "La thérapie génique, est-ce que c'est pour moi ?". Alors évidemment, il faut aller réexpliquer que ce n'est peut-être pas encore pour demain, peut-être pas pour après-demain, mais qu'il y a d'autres solutions. Et je crois qu'une des solutions qui est importante - et on n'en pas du tout parlé aujourd'hui - c'est le problème de la prise en charge. Je crois que la prise en charge des maladies génétiques... avant on baissait les bras pour les maladies génétiques, maintenant on pense... pensant à la thérapie génique, on commence à prendre en charge dans de meilleures conditions les personnes qui sont atteintes de maladies génétiques.

Voilà un petit peu ce que j'avais envie de vous dire et, pour reprendre une question qui a été tout à fait en dehors, vous parliez du gène de l'homosexualité. Moi je vais vous parler du gène de l'infidélité... C'était une grand-mère : "Mon gendre vient de quitter ma fille. Son père avait déjà quitté sa... Est-ce que mon petit-fils... Qu'est-ce qu'il craint ?" Voilà. De temps en temps on a des réponses. J'ai essayé de lui expliquer quand même que ça ne concernait pas beaucoup... peut-être que c'était l'éducation aussi qui jouait.

 

Hélène CARDIN

Est-ce que vous l'avez convaincue ou non ? Vous ne savez pas ?

 

Marie-Louise BRIARD

Je ne sais pas. Je lui ai écrit, elle ne m'a pas répondu. Mais peut-être que dans 10 ans je saurais si le petit-fils a été aussi infidèle...

 

Claudine JUNIEN

Je crois que pour relever cette question, on entend tellement souvent parler du gène de l'homosexualité, le gène de l'agressivité, le gène de l'infidélité, je dirai qu'à l'inverse quand on a entendu parler du gène de l'incontinence nocturne, c'est quelque chose qui est très surprenant parce que je pense... et j'en discutais avec un néphrologue qui me disait qu'il y en avait deux pages dans ses livres, comment traiter psychologiquement le problème de l'incontinence chez les enfants. Or, s'il y a un gène, on en arrive à être obligé de réfléchir un petit peu à la façon d'appréhender les choses. Alors je ne sais pas du tout ce qu'il en est pour l'homosexualité, l'agressivité ou d'autres phénomènes de ce type, tout simplement, je crois qu'il ne faut pas non plus, en rejetant le gène, rejeter toute base génétique quelle qu'elle soit. Il y a probablement des prédispositions génétiques, mais nous n'en sommes absolument pas là.

Je pense qu'on va maintenant aborder une autre partie qui est, puisque nous savons ce que nous allons faire en ce qui concerne le diagnostic, comment utiliser les outils diagnostiques dont nous disposons, mais il faut que, parallèlement à cette possibilité d'intervention qui est le diagnostic prénatal avec la possibilité d'avortement, ou bien le diagnostic présymptomatique avec la possibilité donc d'une prise en charge de ces patients, il faut aussi que parallèlement soit menée une recherche qui permette d'envisager une thérapeutique. Or, pour mener cette recherche et en particulier en ce qui concerne les maladies génétiques, il faut que nous connaissions mieux les mécanismes physiopathologiques de ces maladies. C'est quelque chose d'incontournable.

Il est possible, et on ne peut pas le nier, il est possible que certaines méthodes, certaines approches thérapeutiques voient le jour sans qu'on connaisse très bien les mécaniques physiopathologiques. C'est arrivé, et on ne peut souhaiter que cela arrive. Mais compte tenu de la complexité de ces maladies génétiques... Je citerai l'exemple de la myopathie de Duchenne. Le gène a été isolé en 87. C'était le seul gène connu responsable d'une myopathie, la myopathie de Duchenne et puis maintenant on sait qu'il y a au moins une dizaine de protéines qui interagissent avec cette protéine et qui sont, elles aussi, lorsqu'elles sont mutées, responsables d'autres myopathies. Donc, la complexité de ces pathologies, et des mécanismes physiopathiques fait qu'on doit continuer la recherche fondamentale et puis surtout mieux comprendre les mécanismes physiopathologiques.

Je pense que Jean-Louis MANDEL est bien placé pour illustrer cet aspect-là. Donc je donne la parole à Jean-Louis MANDEL qui est Professeur de génétique à Strasbourg et qui est responsable d'un groupe de recherche dans l'Unité 184 de l'INSERM à Strasbourg.

 

Jean-Louis MANDEL

Merci. Effectivement, je pense qu'on peut dire deux choses. Il y a maintenant un grand nombres de maladies génétiques, c'est-à-dire des maladies monogéniques dont on connaît le gène. Je crois qu'on en est à peu près à 650 en ce moment, et cela augmente probablement de 5 ou 10 chaque mois, et qu'est-ce qu'on fait de toute cette connaissance ?

Peut-être une petite chose quand même quant aux aspects diagnostiques. Effectivement, pour essayer d'apporter aux familles qui sont à risque pour ces maladies ou les familles qui sont touchées par ces maladies, le conseil génétique, les réponses à leurs interrogations, il faut pouvoir rechercher ces mutations. C'est d'une extrême complexité, et je voudrais quand même dire que si la France a été tout à fait à la pointe de la recherche des gènes de maladie - et en grande partie grâce aux efforts de l'AFM et à ce qui a été fait à Généthon - je crois que nous sommes en train de passer à la traîne, de risquer d'être à la traîne en ce qui concerne l'utilisation de ces connaissances parce que ce qui a été fait pour la prise en charge de ces tests diagnostiques est loin d'être satisfaisant et, par rapport à ce qui se fait en Angleterre, en Hollande ou en Belgique, je dois dire que nous sommes vraiment très en retard sur l'organisation de ces tests. Donc cela je crois que c'est quelque chose. Si on veut répondre aux questions des familles, il faut pouvoir faire ces tests.

Alors, maintenant, ces 650 maladies et bientôt 1 000 maladies, effectivement, représentent chacune un cas particulier du point de vue biologique, physiologique et contrairement à, je dirai, la recherche de gènes où il y avait une stratégie, vraiment, qui était la même pour chaque maladie, là, il y a quand même un grand travail à faire pour chacune d'entre elles et, effectivement, il s'agit de comprendre les mécanismes physiopathologiques parce que, que ce soit pour la thérapie génique ou pour d'autres formes d'approches thérapeutiques (je crois que la thérapie génique de toute façon ne pourra pas répondre à tous les problèmes), il faut comprendre la maladie, comment, à partir de cette erreur initiale, on a des manifestations cliniques, souvent, très diverses et c'est souvent qu'on ne comprend pas bien par rapport à cette erreur initiale.

Ceci implique, par exemple, de pouvoir faire des modèles animaux de ces maladies et, à l'heure actuelle, on a là une stratégie. On peut, en principe, inactiver un gène chez la souris et créer un modèle qui, en tout cas, a la même lésion que les patients atteints de la maladie même si quelquefois l'expression clinique va être assez différente. Mais ces modèles peuvent nous apprendre beaucoup sur la compréhension des mécanismes. Et là, il faut dire que pour beaucoup de laboratoires de génétique en France à l'heure actuelle, ils ne disposent pas des moyens d'accès ou de moyens d'accès suffisamment larges à ce type d'approche, tout simplement parce que cela implique d'avoir des laboratoires spécialisés, des animaleries et, là aussi, par rapport notamment aux Etats-Unis, certainement, les laboratoires français ont beaucoup de difficultés à pouvoir créer - je dirai à quelques exceptions près (heureusement, je dirai notre Institut à Strasbourg est l'une de ces exceptions) - mais je crois qu'il y aurait beaucoup à faire pour essayer de développer ces modèles et cette analyse biologique très large.

D'ailleurs, on parle de souris mais je voudrais quand même donner un exemple pour montrer que la génétique, la biologie, quelquefois peut prendre des chemins tout à fait insoupçonnés. Pour une maladie neurologique très grave, sur laquelle nous travaillons, qui s'appelle l'ataxie de Friedreich, ce qui a vraiment illuminé le mécanisme physiopathologique de la maladie, une fois que le gène a été trouvé, c'est d'examiner la fonction du gène qui lui ressemble dans la levure de bière. Je crois que là c'est très important de montrer que cette recherche génétique peut prendre des aspects très divers et donc il faut rester extrêmement ouvert et donner la possibilité, effectivement, aux généticiens d'avoir accès à tout cet ensemble de technologies, parce que je crois que c'est la seule manière que nous puissions avoir de mieux comprendre et donc d'essayer de réfléchir cas par cas, pour chaque maladie, aux possibilités d'approches thérapeutiques.

 

Claudine JUNIEN

Merci. Puisque nous avons maintenant des modèles animaux, nous allons voir comment nous pouvons passer à la thérapie génétique chez l'homme, éventuellement. Alain FISHER est Professeur de Pédiatrie Immunologique à la Faculté de Médecine de Necker et Directeur de l'Unité de Recherche INSERM 429, et va nous parler un peu plus de thérapie génique.

 

Alain FISHER

Si on doit parler de révolution aujourd'hui, j'aurais envie de dire que la situation c'est un tout petit peu "Thermidor" actuellement, c'est-à-dire qu'après une phase qui a été évoquée de grands espoirs légitimement suscités par un concept en soi révolutionnaire et simple à comprendre pour tout le monde, l'ensemble de la communauté scientifique d'une part et l'ensemble du public, je crois, a aujourd'hui largement déchanté sur le fait qu'à ce jour les succès cliniques réels de la thérapie génique sont limités. Donc, à la limite, le mot thérapie génique ne peut peut-être pas encore été utilisé.

Cela dit, le concept reste. Les espoirs demeurent, mais la complexité est présente. C'est-à-dire que les chercheurs ou les cliniciens qui s'intéressent à développer ce type de thérapeutique face à des maladies héréditaires dont on a identifié le gène ou à des maladies acquises, cancer, etc., qui cherchent à faire cela, sont face aujourd'hui à de grandes difficultés, des difficultés qui sont avant tout scientifiques. Je pense qu'Olivier DANOS qui parlera tout à l'heure est mieux placé que moi pour évoquer le problème essentiel qui est le système de vectorisation, le véhicule pour transporter le gène dans les cellules que l'on cherche à traiter. Donc, je lui laisse la possibilité de développer cela, mais c'est une recherche appliquée mais technologiquement lourde et complexe qui est absolument essentielle à envisager, que ces thérapeutiques un jour soient utiles.

Ce que je voudrais peut-être essayer de dire c'est que, à travers mon expérience et dans mon domaine (c'est-à-dire les maladies immunologiques héréditaires de l'enfant) où il y a eu quelques tentatives cliniques, il n'est peut-être pas inintéressant de faire le point de la situation. Tout d'abord en disant qu'il n'y a pas toujours besoin de connaître, d'avoir identifié un gène pour traiter une maladie. Après tout, il y a certaines maladies héréditaires qui, heureusement (malheureusement il n'y en a pas beaucoup) heureusement pour elles, bénéficient de traitements parfois tout à fait curateurs depuis un grand nombre d'années.

Encore une fois, je reste dans mon domaine, et ce qu'on appelle les déficits immunitaires héréditaires les plus graves, c'est-à-dire des enfants qui naissent avec des moyens de défense contre les infections qui sont très limités meurent en l'absence de traitement, on sait depuis 1968 - donc ça fait 29 ans maintenant - que l'on peut traiter au moins certains de ces enfants en leur greffant la moelle osseuse d'un individu de la famille, qui est sain. Et il y a donc aujourd'hui des jeunes adultes ou même peut-être plus tout à fait jeunes, une trentaine d'années, qui vivent de par le monde et qui ont été guéris de ce type de maladie par une greffe de moelle osseuse, alors qu'à l'époque, en 68, on n'avait absolument aucune idée de quels étaient les gènes et les mécanismes physiopathologiques de ces maladies. Ce qui est le cas aujourd'hui. Donc, dans quelques cas, malheureusement exceptionnels, les thérapeutiques ont précédé l'identification des gènes.

La situation aujourd'hui s'inverse où progressivement les gènes sont identifiés, mais il n'y a pas pour autant de traitement qui se dessinent en termes de transfert de gènes parce que, encore une fois, les difficultés sont grandes.

Un mot sur l'expérience dans mon domaine. Il se trouve que - vous le savez sans doute - la première tentative de thérapie génique a été effectuée dans une forme extrêmement rare de déficit immunitaire, qui s'appelle de déficit en adénosine désaminase qui est une enzyme dont la fonction est nécessaire à fabriquer des lymphocytes, des globules blancs essentiels pour se défendre contre les infections, et une équipe américaine a osé, de façon assez téméraire - et à l'époque j'avais un jugement assez critique sur ce qu'ils ont fait - a osé faire une thérapie génique, autrement dit introduire le gène dans des globules blancs d'enfants atteints de cette maladie et de voir si cela apportait un bénéfice aux enfants, en tous les cas ce qui se passait etc.

J'avais un jugement critique parce que, à mon sens, la recherche qui avait été faite au préalable pour évaluer les chances de succès, évaluer les éventuels risques associés à cette thérapeutique, était très limitée, vraiment limitée. Néanmoins, il faut reconnaître que cette recherche qui a été faite par Monsieur Mike BLAESE à Washington au NIH a apporté quelques informations qui nous sont aujourd'hui utiles, même si ces informations sont loin d'être suffisantes pour proposer une thérapeutique complète à cette maladie, et a fortiori à d'autres maladies. Il a démontré, il a réappris aux immunologistes par exemple, que des lymphocytes T (donc la catégorie la plus importante des globules blancs) pouvaient vivre pendant très longtemps dans le sang et dans un organisme parce qu'il montre aujourd'hui que des lymphocytes dans lequel il a introduit ce fameux gène de l'adénosine désaminase, chez ces patients, sont encore présents 4-5 ans plus tard, et sont fonctionnels, ce qui n'est pas mal pour les enfants, même si ce n'est pas suffisant pour qu'ils soient guéris de leur maladie. Mais c'est quand même un certain résultat.

Si je mentionne ces resultats, sans entrer dans plus de détails, c'est pour dire que les choses sont finalement complexes. Elles sont objectivement complexes parce qu'il y a de grandes difficultés à mettre au point ces thérapeutiques - encore une fois je pense qu'Olivier DANOS y reviendra - mais aussi, parfois, des expériences un tout petit peu audacieuses et pas totalement fondées sur le plan scientifique, apportent en clinique quelque chose. Cela me gêne de dire ça, parce que cela heurte un tout petit peu le sens que je peux avoir de l'idée : à quel moment on peut passer à la phase clinique d'une recherche dans ce domaine ? mais en même temps c'est une réalité et une réalité qui n'est pas spécifique à la thérapie génique.

Elle a été observée dans le domaine - si on regarde dans les 30-40 dernières années - dans le domaine de la transplantation de moelle osseuse ou d'organes où des premiers resultats ont été acquis sans grand substratum expérimental et puis, secondairement, les choses ont progressé.

Donc, la situation est, sur ce plan, complexe et je vous livre ma perplexité dans ce domaine.

 

Claudine JUNIEN

Merci. Nous allons maintenant passer à Jacques MALLET qui est Directeur de Recherche au CNRS, qui dirige un groupe à la Pitié-Salpétrière, qui travaille dans le domaine des neurosciences, et je pense qu'il va nous parler aussi de son expérience dans ce domaine et peut-être des perspectives de prévention, en particulier, de certaines pathologies en utilisant le gène-médicament.

 

Jacques MALLET

Merci. Oui, en effet, on s'intéresse, indépendamment des mécanismes très fondamentaux, aux maladies, certaines maladies neurologiques. Ces maladies sont nombreuses. Dans le système nerveux, qu'on prenne en particulier les maladies neurodégénératives, le chef de file, Parkinson qui est peut-être le mieux connu, l'Alzheimer, la sclérose latérale, la chorée amyotrophique et la chorée d'Huntington, l'épilepsie, certains déficits enzymatiques et également des maladies aiguës telles que les traumatismes de la moelle épinière.

Ces maladies sont relativement aisées à diagnostiquer. Cela dit, le traitement est souvent peu fiable, très limité dans le temps, et la plupart du temps inexistant. Certaines de ces maladies ont une composante génétique.L'Alzheimer, par exemple, la chorée d'Huntington qui elle est, on peut dire, entièrement définie ou déterminée génétiquement. Cette approche génétique permet, bien entendu, de comprendre les mécanismes physiopathologiques. Cela ne veut pas dire que rapidement on peut trouver des moyens de traiter. On pourra. Mieux on comprendra, plus on aura de possibilités d'envisager des traitements, mais cela prendra du temps.

Mais là encore, je répéterai, qu'il faut bien distinguer maladies génétiques et thérapie génique. Certaines formes de ces maladies neurologiques n'ont pas de composant génétique et pourtant on peut envisager un traitement par thérapie génique en utilisant, comme cela a été bien dit, l'ADN en tant que médicament.

En fait, dans certains cas, même si la maladie génétique on ne connaît pas encore les mécanismes physiopathologiques, ou bien si elle n'est pas génétique, on connaît quand même, grâce au développement spectaculaire des recherches, en particulier qui permettent de comprendre les mécanismes de mort neuronale, car ces maladies neurodégénératives consistent en une dégénérescence neuronale - de nombreuses cellules vont mourir au cours du temps plus rapidement que dans un processus normal - ces mécanismes, ces recherches ont permis d'identifier des facteurs qui permettent de protéger ces neurones. Ces facteurs, pour la plupart, sont des facteurs protéiques.

Là, on se heurte à une barrière, la barrière hémato-encéphalique. Ces protéines, on peut imaginer les injecter dans la circulation, mais elles ne vont pas atteindre le cerveau. Il faut aussi bien imaginer que le cerveau est un ensemble de structures très complexes, en interaction, mais un facteur qui va être bénéfique pour une région particulière du cerveau peut être délétère pour une autre. Donc il y a cette notion de ciblage de l'action thérapeutique. C'est là où la thérapie génique offre des espoirs dans la mesure où on peut grâce à des vecteurs, viraux ou non viraux, faire produire localement une protéine qui peut avoir un intérêt thérapeutique.

Alors différentes approches ont déjà permis d'établir une preuve de principe. Par exemple, en ce qui concerne la maladie de Parkinson, qui consiste en une dégénérescence de neurones dopaminergiques qui sont quelques millions par rapports à plusieurs dizaines de milliards de cellules, mais ces cellules dégénèrent et conduisent aux symptômes que l'on connaît. Certains facteurs permettent de prévenir cette dégénérescence neuronale et grâce à des modèles animaux, qui sont imparfaits mais quand même très utiles, on a pu, par exemple, grâce à différents vecteurs particuliers basés sur l'adénovirus mais d'autres peuvent être aussi bénéfiques, faire produire localement cette substance et prévenir cette dégénérescence neuronale.

Cela est un espoir mais cela ne veut pas dire que des thérapeutiques pourront intervenir très prochainement. Il faut encore, même si la preuve des principes est acquise, travailler ces vecteurs, faire en sorte qu'ils n'entraînent pas de réactions immunitaires qui peuvent être très délétères, faire en sorte que le gène d'intérêt thérapeutique puisse s'exprimer pendant u thérapeutique, on puisse contrôler son expression, comme un rhéostat, faire en sorte qu'on puisse augmenter ou diminuer en fonction donc de l'état d'amélioration du patient et des effets secondaires.

Mais quand même, je voudrais terminer avec une note d'espoir, c'est que le cerveau qui, pendant longtemps dans l'image de la thérapie génique est apparu comme un organe très complexe et peut-être on pensait que les thérapeutiques interviendraient très rapidement, est en fait présente...

certaines propriétés qui peuvent faciliter dans la mesure où on a besoin d'intervenir sur, je le dis, quelques... même pas millions, puisqu'il suffit, si on à faire à des facteurs dits fusibles, de toucher quelques milliers ou dizaines de milliers de cellules, dans une région très, très localisée. Le cerveau c'est une boîte. Donc, on peut imaginer... enfin c'est même bien établi, que les vecteurs ne vont pas diffuser et avoir des effets néfastes dans d'autres tissus.

Donc, je dirai, pour l'instant, des preuves de principe ont été établies pour des maladies comme donc Parkinson, sclérose latérale et amyotrophique. Je pense que des maladies comme l'acorée d'Huntington et l'Alzheimer pourraient bénéficier... Alzheimer peut-être plus difficilement parce que, ici, il faut toucher un nombre important de cellules. La chorée de Huntington, c'est déjà plus limité. Les maladies des moto-neurones, c'est également plus limité. L'épilepsie pourrait aussi bénéficier et, sans oublier les maladies de la sphère oculaire (il y a tout un espoir très important)... et pour terminer, les moto-neurones, la lésion, lésion axonale, donc dans les traumatismes de la moelle épinière où on peut aussi imaginer pouvoir faciliter la repousse axonale. Donc, il y a tout un ensemble de pathologies qui devraient bénéficier d'une approche thérapie génique. Quel sera le vecteur de l'avenir ? Je crois qu'on ne peut pas le dire. Sûrement un mélange d'un ensemble de propriétés caractéristiques à l'heure actuelle de plusieurs vecteurs, mais il n'y a pas de principe qui s'oppose à cette thérapie, à cette thérapeutique dans l'avenir.

 

Claudine JUNIEN

En d'autres termes, dans le cas de maladie de Parkinson, bien qu'on ne connaisse pas très précisément le mécanisme qui est à l'origine de cette dégénérescence neuronale, on peut, en connaissant les mécanismes généraux qui aboutissent à la dégénérescence neuronale essayer d'intervenir dans l'une de ces étapes pour essayer de palier le défaut. Donc, c'est je crois un excellent exemple pour montrer que, même si on n'aboutit pas à la connaissance ultime, à la connaissance parfaite dans les maladies génétiques, il y a quand même un espoir pour que, en cours de route, il y ait un des processus qui soit mieux éclairé et qui permette d'intervenir à l'une de ces étapes.

 

Jacques MALLET

Même si l'on connaissait précisément ces mécanismes, peut-être que les facteurs qui protègent les neurones resteront toujours les meilleurs facteurs thérapeutiques.

 

Claudine JUNIEN

Bien entendu. Donc je crois que, effectivement, connaissant ce type de mécanisme, connaissant un petit mieux la physiopathologie, un des aspects aussi les plus importants c'est comment cibler les cellules qui nous intéressent et comment éviter que le gène-médicament aille faire des dégâts là où il ne doit pas en faire, et pour cela il faut faire beaucoup de progrès dans les vecteurs et avoir le ou les chevaux de Troie qui permettront d'apporter le gène-médicament à l'endroit très précisément où il doit être apporté, et puis surtout ne pas créer sur place des réactions contre le gène-médicament, et puis surtout que ce gène-médicament perdure et puisse continuer à avoir une action durable.

Donc, Olivier DANOS qui est revenu d'un long séjour aux Etats-Unis va maintenant s'installer à Evry et diriger un laboratoire de vectorologie et il va donc nous parler des recherches dans ce domaine.

 

Olivier DANOS

Je commencerai par dire que, effectivement, de façon un petit peu paradoxale, on envisage des thérapies basées sur la connaissance des gènes, thérapie génique et on s'aperçoit... enfin, on le sait depuis un certain temps, le discours que l'on tient aujourd'hui c'est qu'on n'a pas véritablement des outils suffisamment performants pour ce type d'approche.

Avant de commencer, je voudrais revenir sur la pertinence qui demeure tout à fait des approches pharmacologiques dites classiques et même des non classiques. C'est quelque chose qui a été soulevé plusieurs fois au cours de cette table ronde et de la précédente. Je crois que personne aujourd'hui n'est un tenant à tous crins de la thérapie génique contre la pharmacologie classique. De plus, dans l'incertitude dans laquelle on est véritablement du champ d'implication de la thérapie génique, il est clair qu'il faut continuer à avoir une approche par laquelle on essaiera d'identifier des médicaments, je dirais, plus classiques.

Ce qu'il faut dire également, c'est que ces médicaments... je m'avance un peu quand je dis classiques parce qu'on donne l'impression que le reste de la recherche en pharmacologie c'est le fait de gens qui utilisent des technologies très retardataires ou passéistes, de chimistes un petit peu desséchés. Or, ce n'est pas du tout le cas. Il s'agit véritablement de choses qui sont de la très haute technologie. Il y a quelque chose qui s'appelle, par exemple, la chimie combinatoire qui est extrêmement puissante et qui devrait apporter des solutions thérapeutiques pour beaucoup de pathologies éventuellement.

Donc, cette parenthèse étant close, ce que je voudrais expliquer rapidement ici c'est ce que nous souhaitons mettre en place à Généthon autour du problème de ces véhicules de transfert de gènes et en quoi nous pensons que cette opération... enfin quelle est la nature un petit peu originale de cette opération ?

Alain FISHER l'a bien expliqué. L'information intéressante et importante qu'ont apportée les différents essais cliniques qui ont eu lieu et qui sont en cours, qui mettent en oeuvre des études du transfert de gène, l'information importante c'est que le vecteur ne donne pas satisfaction. Qu'est-ce que c'est que le vecteur ? Le vecteur c'est une entité qui permet à la séquence d'ADN, des thérapeutiques, à l'information génétique de franchir un certain nombre de barrières. Ces barrières sont constituées, tout d'abord, par des barrières naturelles de l'organisme, par exemple, dans un certain nombre de cas il faudra pouvoir franchir des endothéliums qui sont des tissus extrêmement imperméables. Ces barrières sont ensuite constituées de membranes de la cellule, la membrane plasmique, puis la membrane du noyau. Enfin, il y a un parcours du combattant qui est extrêmement ardu pour un gène que l'on voudrait présenter à un patient et que l'on voudrait voir aller dans la cellule à guérir, pour aller vite.

Ces essais cliniques ont permis de d'abord constater que les outils marchaient mal et ensuite, et c'est très positif, ils ont permis de définir un véritable cahier des charges. Donc, aujourd'hui on a une liste de choses à faire et on peut aborder les problèmes un à un. On peut définir ce que devrait être un vecteur idéal. Il y a des propriétés qu'on voudrait voir de façon générale pour un vecteur, quelle que soit la pathologie, et puis il y a bien entendu des propriétés qu'on voudrait avoir dans des cas particuliers. En fait, on est véritablement en position de construire de manière un petit peu rationnelle ce que serait un médicament génétique. On voudrait, bien

sûr, que cette entité soit résistante, qu'elle puisse trouver sa cible, qu'elle ne soit pas toxique et que son action soit éventuellement longue, durable dans le temps, mais bien entendu qu'on puisse contrôler cette action et qu'on puisse doser. Tout cela c'est ce que l'on veut en général pour un médicament.

Bien entendu, dès le début, on a pensé que pour faire ce type de transfert de gène, il faudrait s'adresser à des entités biologiques qui, naturellement, sont douées de ce type d'activité, et en l'occurrence ce sont les virus. Les virus ont évolué. Des stratégies extrêmement variées et extrêmement efficaces pour justement trouver leurs cellules-cibles, y déposer des gènes (en l'occurrence des gènes viraux qui servent à faire plus de virus) et les connaissance qu'on a acquises sur les virus grâce à tout le travail de biologie moléculaire et de biologie cellulaire qui a été fait depuis maintenant 30 ans, nous conduit à imaginer des façons de modifier ces virus pour les vider de leur substance nocive, des gènes qui servent à répliquer le virus, et introduire à l'intérieur de ces virus le gène à véhiculer.

Donc, encore une fois l'idée est simple. Cette histoire de thérapie génique est pleine d'idées très simples mais qui, mises bout à bout, deviennent compliquées et ne marchent par forcément. Donc une idée simple, modifier les virus, c'est des choses qu'on sait faire parce qu'on sait faire du génie génétique, on sait manipuler l'ADN, on sait couper l'ADN. On sait faire à peu près tout ce qu'on veut. Donc, ce sont des choses qu'on arrive à réaliser facilement en laboratoire, mais on se trouve en face des limites que j'ai énoncées.

Donc, il y a un véritable besoin de recherche. Il s'agit de comprendre mieux la façon dont fonctionnent ces virus, de façon à savoir comment les contrôler. Quand je dis comment ils fonctionnent, il s'agit essentiellement de comprendre leur interaction avec les cellules, donc il y a un aspect de virologie à développer, il y a un aspect de biologie cellulaire. Ce sont des aspects extrêmement fondamentaux. Il faut se donner les moyens de mener ce type d'étude pour, éventuellement, déboucher sur des solutions aux problèmes du vecteur.

Mais il n'y a pas que les virus. On peut, justement, recourir à la chimie, par exemple et à des méthodes de synthèse pour essayer de copier les stratégies virales et, plutôt que d'employer des virus, ce qui est toujours un petit peu ennuyeux, coûteux parce qu'il faut faire de la culture cellulaire, c'est des choses qui ne sont pas très propres et en tout cas pas très attrayantes dans un contexte industriel, on peut imaginer qu'il sera possible de copier ces stratégies, mais avec des molécules de synthèse, fabriquer des vecteurs.

Ce sont des approches qui sont aussi en cours, qui pour l'instant sont, je dirais, un petit peu moins performantes surtout à partir du moment où on passe dans un contexte in vivo, c'est-à-dire chez l'animal ou chez le patient, mais c'est une voie extrêmement riche en tout cas dans l'imaginaire des chercheurs qui s'occupent de transfert de gènes. Donc, il y a ces deux voies à suivre, la voie virale et la voie non virale. C'est ce qu'on se propose de faire à Généthon à un niveau de recherche parce que, comme je viens de le dire, il y a un besoin véritablement de comprendre les mécanismes pour éventuellement les exploiter pour la mise au point d'outils.

L'originalité... Ces activités de recherche, elles ont lieu bien sûr à Généthon, mais dans de nombreux laboratoires en France et à l'étranger. Il n'y a rien de très original là-dedans. On espère que certaines approches que l'on développera seront originales, mais l'originalité, je dirais, c'est de vouloir essayer de mettre cela en prise directe avec une activité de développement, c'est-à-dire de passage à l'échelle supérieure et de production. La recherche sur les vecteurs, en fait, ne s'arrête pas au moment où on a fait une preuve de concept dans une petite boîte dans laquelle poussent des cellules, ou même chez une souris. Il faut ensuite se poser la question de savoir s'il va être possible de... pour aller vite, fabriquer un médicament avec ce procédé. Est-ce que c'est viable ? Est-ce que c'est simplement quelque chose d'extrêmement élégant et séduisant pour l'esprit, ou est-ce que véritablement on va pouvoir un jour utiliser cela en clinique ?

Ce sont les questions que se posent les industriels qui souvent interviennent juste à la fin des étapes de recherche fondamentale et qui ensuite développent et produisent éventuellement, mais les industriels doivent faire des choix extrêmement rigoureux sur les produits qu'ils veulent développer. Entre autres, ces choix, les raisons de ces choix sont essentiellement économiques et les industriels ne s'intéresseront pas au développement de certains vecteurs pour certaines pathologies. C'est un problème qui a été abordé tout à l'heure. Il y a, effectivement, ce problème de maladie orpheline, de marché.

D'autre part, les industriels n'auront pas d'activité véritablement de service par laquelle ils pourront mettre à la disposition de la communauté scientifique des vecteurs de transfert de gène pour susciter une activité autour de la thérapie génique. Et c'est justement ce que s'est proposé de faire l'AFM en proposant de monter ce centre de vectorologie à Evry. Donc, un centre qui développera les capacités de produire des vecteurs dans les meilleures conditions possibles, dans des conditions qui seraient éventuellement applicables en clinique, et avec une activité de service qui pourrait donc fournir aux chercheurs qui en feraient la demande, aux chercheurs fondamentalistes mais également cliniciens, les vecteurs de transfert de gène dont ils pourraient avoir besoin.

Donc c'est cela l'originalité. C'est ce côté service et également intérêt pour des pathologies qui, peut-être, n'attireraient pas d'emblée les industriels.

Alors, bien sûr, beaucoup de questions se posent par rapport à ces produits que nous ferions parce que, ce qui a été mis en place maintenant depuis un an, c'est essentiellement une activité de recherche et un début d'activité de développement, quand on commence à parler de production, on se lance dans des choses extrêmement difficiles, qui ne sont d'ailleurs pas de la compétence des chercheurs en biologie moléculaire. Ce sont des choses difficiles, coûteuses, pour lesquelles il nous faut le soutien technique de l'industrie, en tout cas l'expertise.

On peut se demander si. .. la question qui se pose à nous c'est : dans quelle mesure des produits de transfert de gène qui auront été fabriqués dans un endroit comme Généthon, qui n'est donc pas une industrie pharmaceutique, pourront être utilisés dans des essais de toute première phase sur des patients atteints d'une maladie extrêmement rare. C'est un problème qui nous préoccupe et pour lequel nous n'avons pas, pour l'instant, de réponse, sur lequel il faudra sans doute avoir des discussions avec les autorités réglementaires, bien entendu.

 

Claudine JUNIEN

Merci beaucoup, Olivier DANOS. Je crois qu'on a déjà peut-être un petit peu grignoté sur le temps de la discussion. Donc, je vais passer la parole à Hélène CARDIN.

 

Hélène CARDIN

On va commencer tout de suite. Si j'ai bien compris, il n'est donc pas du tout question d'écarter la pharmacologie classique. Il n'est pas question de considérer les chimistes comme quoi, vous avez dit ? des desséchés...

Mais on sent néanmoins un désenchantement... Vous, vous venez de nous parler des vecteurs, de la mise au point de vecteur avec de nouvelles stratégies. On sent quand même, en effet, un désenchantement et Alain FISHER nous l'a dit, Arnold MUNNICH nous l'a dit aussi, mais est-ce que ce n'est pas un désenchantement normal dans toutes les recherches ?

On a vu cela à une période... On a vu cela avant la mise au point, par exemple, des trithérapies dans le traitement du SIDA. On a vu cela aussi lorsque toutes les greffes d'organes échouaient... aujourd'hui, cela fait 30 ans qu'a eu lieu la première greffe de coeur en Afrique du Sud. On a vu cela pendant longtemps. Les greffes échouaient toutes parce qu'on n'avait pas mis au point les médicaments anti-rejet. Alors, est-ce que ce n'est pas le lot de toutes les recherches ? En fait, cela avance lentement et c'est difficile, en effet, de garder un enthousiasme. Est-ce que c'est cela ?

 

Jacques MALLET

Je ne dirai pas exactement que c'est un désenchantement. Je dirai simplement que c'est un remise en perspective réelle de ce qui se passe. Alors c'est un désenchantement pour ceux qui chantaient très fort. Sinon, c'est simplement, effectivement, le constat de la réalité des difficultés de la mise au point d'une thérapeutique, et vous avez cité des exemples des années passées qui montrent effectivement que des situations qu'on pouvait considérer comme bloquées se sont débloquées. Parfois, c'est un peu moins compliqué que pour d'autres.

Pour la greffe d'organe, l'avènement de la ciclosporine a été une vraie révolution, pas totale, mais un progrès important. Pour la thérapie génique, on risque, malheureusement de nécessiter plusieurs ciclosporines en fonction du type de vecteur de maladie et de problème posé. Mais, enfin, je crois que c'est simplement cela. Remettre un peu la réalité... une recherche qui a encore beaucoup de progrès à faire sur tous les éléments qui ont été discutés par les uns et les autres, les vecteurs, la régulation des gènes, le ciblage, avoir des modèles animaux qui sont pertinents, etc. etc.

 

Hélène CARDIN

Est-ce que vous, les chercheurs, vous pensiez que cela irait plus vite ? Vous n'avez pas l'air d'accord, Olivier DANOS ?

 

Olivier DANOS

Si, si, à mon avis on peut même dater ce désenchantement. Il y a une date officielle à ce désenchantement. Cela a été la publication d'un rapport qui avait été commandité par le NIH sur la thérapie génique, l'état de la thérapie génique. VARMUS qui est au NIH sentait bien qu'il y avait quelque chose qui n'allait pas. Il y avait tous ces essais cliniques qui se passaient dans le plus grand désordre. Il a donc commandé un rapport technique et, ce rapport technique, quand il a été publié, il a été perçu dans les médias comme quelque chose d'extrêmement négatif. Pourquoi ? Parce qu'on disait : attention, vous faites des essais cliniques dans tous les sens avec des instruments dont on sait qu'ils ne marchent pas et qu'ils ne marcheront pas. Il faut peut-être, maintenant, songer à retourner au laboratoire.

 

Hélène CARDIN

On a vu, même, des sociétés américaines se désengager.

 

Olivier DANOS

Je ne sais pas si elles se sont vraiment désengagées... Ce que je voudrais dire, c'est que ce discours c'est le discours que les gens qui, justement travaillaient sur les outils depuis toujours, tenaient, et ont toujours tenu. Je crois qu'il y a eu véritablement, peut-être en partie dans les médias, mais pas seulement dans les médias, il y a eu un engouement qui était peut-être un petit peu trop fort, ou alors on n'a pas assez expliqué qu'on mettait des choses en route, mais que ce n'était quand même pas pour demain.

 

Hélène CARDIN

Est-ce qu'il y a des questions dans la salle ? Monsieur ?

 

Jean-Pierre ROGEL

Je suis journaliste à Radio-Canada à Montréal. Je voudrais simplement témoigner, un petit peu, de ma perplexité, de mon désarroi. J'ai fait partie de ceux qui ont vécu, je pense avec les chercheurs, la grande aventure de la génétique il y a déjà presque un dizaine d'années et puis, dans les médias, je pense qu'on a fait un bon parcours où il a fallu expliquer les bases. Il a fallu expliquer aussi les découvertes, les choses excitantes qui se passaient au point de vue intellectuel, et c'est merveilleux ce qui se passe dans cette séance.

Mais, au bout, il y a des déconvenues. Il y a des déconvenues, entre autres, du point de vue de la thérapie génique mais on pourrait parler d'autres questions aussi. Ce que je ressens en tant que journaliste, c'est : est-ce qu'on peut faire un bilan critique et se dire... peut-être qu'une des parts de l'engouement qui a été amené sur des traitements, c'est le fait des médias. Les médias ont exagéré, ont fait de la survente, ont dit : c'est pour bientôt. Mais je me demande si, de la part de la communauté scientifique, il n'y a pas eu pour des raisons qui sont peut-être internes à la communauté scientifique, publications de resultats, obtention de subventions et des choses comme cela, une survente de certains resultats scientifiques ou disons des annonces où le chercheur s'empressait de dire : ce n'est que le premier pas qui permettra la mise au point d'un certain nombre d'applications thérapeutiques. Ce n'est pas pour demain. Ce que nous nous empressions, en tant que journalistes, de dire, je pense, enfin dans la plupart des cas, mais nous arrivons maintenant à un point où l'opinion publique, à mon avis, a très bien suivi le message de la génétique.

J'espère que vous ne vous plaignez pas, d'une certaine façon, de ne pas être compris ou de ne pas être dans les médias... enfin de ne pas être compris, peut-être... de ne pas être dans les médias. C'est extrêmement intéressant la génétique. Cela intéresse tous les médias, sauf que maintenant on a un état de la science qui est complexe, où on rentre dans la subtilité, mais l'opinion publique et particulièrement les malades - et on les comprend très bien - les familles de malades, sont rendues très loin dans leur niveau d'attente. Où sont donc les traitements annoncés ?

Alors, qu'est-ce qu'on fait à partir de cela ? Je ne tiens pas nécessairement à faire la critique rétrospective. C'est facile d'avoir raison maintenant, mais comment vous envisagez d'aborder cette question-là de l'attente du grand public.

 

Claudine JUNIEN

Je laisserai la parole à ceux qui sont directement concernés, mais je crois qu'on peut répondre par un point très particulier. Le problème que vous soulevez, c'est le problème de la compréhension du message délivré par un scientifique à un public qui n'a pas forcément toutes les clefs en main pour comprendre la portée de ce message.

Très souvent - c'est quelque chose qu'on observe - il y a des restrictions de la part des chercheurs qui sont souvent gommées dans les messages et on s'aperçoit qu'il y a des raccourcis qui sont faits et qui finalement aboutissent à des messages dont les hésitations, les doutes sont gommés. Mais je suis aussi tout à fait d'accord avec vous. On ne peut pas nier l'enthousiasme du chercheur qui, dès qu'il a un petit résultat qui va dans le bon sens, qui va dans le sens qu'il espère, va peut-être l'amplifier, l'amplifier d'une telle façon que, bien entendu, le message va être compris comme : ça y est, on a découvert et on va pouvoir traiter. Je suis tout à fait d'accord, mais je vais quand même donner la parole à Axel KAHN.

 

Axel KAHN

Je ne vais rien résoudre du tout. Je voudrais témoigner un tout petit peu. En préparant cette journée, je disais à d'autres personnes qu'il ne fallait pas donner dans l'angélisme et cela a été rappelé ce matin, également, par François GROS. Donc, ne donnons pas dans l'angélisme sur les raisons pour lesquelles il peut y avoir, objectivement, effectivement, des conditions d'une certaine déception liée à la qualité, à la nature d'un message autour de la thérapie génique. Il y a au moins deux éléments à propos desquels il vaut balayer devant notre porte. Quand je dis "notre porte", c'est les scientifiques, l'industrie et les médias.

J'ai vu maintes fois, maintes fois, une chose inouïe, tout à fait extraordinaire, c'est-à-dire de longues émissions, de longs articles consacrés à un scientifique parce qu'il envisageait de commencer à faire une thérapie génique. Cela c'est inouï ! C'est absolument extraordinaire ! Dans aucune discipline thérapeutique, on s'est mis à consacrer des émissions et des articles à quelqu'un parce qu'il commençait à se demander s'il n'allait pas, dans le futur, faire une thérapie génique. Pour quelle raison cela ? On le sait bien. C'est qu'il y a quelque chose qui est magique et que, d'une certaine manière, le gène qui transforme la vie, par le génie génétique, qui transforme éventuellement la cellule malade en cellule saine, c'est le dernier avatar du magicien ou de la fée. De la fée, s'il s'agit naturellement de la thérapie génique. Donc, là, il y a eu quelque chose qui était une mauvaise gestion d'un élément irrationnel qui fondait un discours qui ne correspondait pas du tout à la réalité de ce dont on parlait.

L'autre élément qui est important c'est que...

 

Hélène CARDIN

Je vous rappelle quand même, Axel, que le médecin qui était interrogé, il était bien content qu'on fasse le papier en question...

 

Axel KAHN

C'est pour cela que j'ai dit les deux, c'est pour cela que j'ai dit : les scientifiques et les médias. C'est le couple diabolique entre les médias et les scientifiques et ils sont co-responsables, absolument !

L'autre élément, c'est que l'une des conditions dans lesquelles cette activité industrielle s'est développée, c'est ce dont on a parlé ce matin par l'intermédiaire de la création des start-up, ces petites industries de biotechnologie. Il ne s'agit pas d'ailleurs que de la thérapie génique. Ce qui est difficile dans le message qui est passé par les petites sociétés de biotechnologie, parfois par les grosses, c'est que le même message a normalement un double but : donner une information scientifique et convaincre l'investisseur pour que l'action monte en bourse. Et vous voyez qu'il y a un biais, dès lors. Et beaucoup des messages avaient pour but, en réalité, de financer la recherche et, pour financer la recherche, il faut donner confiance. Et quand bien même la véracité de ce qui était annoncé n'avait qu'un rapport extrêmement lointain avec celle de ce qui était fait, il fallait bien effectivement que le système de financement de la recherche par ce capital risque dont on a parlé ce matin fonctionnât. Voilà deux des éléments, si vous voulez, qu'il faut rappeler pour ne point donner dans l'angélisme.

 

Danielle MESSAGER

Est-ce qu'on doit croire, à vous entendre là qu'il n'y a plus, pour l'instant, aucun espoir dans la thérapie génique, et qu'est-ce qu'on doit croire des essais qui sont actuellement en cours quand même, par exemple dans le cancer du poumon à Houston, et incessamment sous peu à l'Institut Gustave Roussy à Villejuif ? Les essais dits de faisabilité ont déjà été réalisés. On passe maintenant à des essais d'efficacité. Il y a quand même des choses en cours, parce qu'à vous entendre là, on a l'impression que tout est stoppé et qu'il va falloir encore attendre 10 ans. Alors j'aimerais bien que vous nous disiez un peu quand même des choses sur ce qui se passe, quand même, actuellement.

 

Olivier DANOS

Je vais maintenant être un peu angélique. Je ne crois pas... Il ne faut pas du tout sortir de là avec un message négatif. On voudrait simplement ici remettre les pendules à l'heure, expliquer pourquoi il y a eu ce retour dans l'opinion, dans les médias, entre enthousiasme et puis déception. Donc, c'est ce qu'on a essayé d'expliquer ici. Je crois que les possibilités qui s'offrent à nous sont immenses à partir des connaissances sur le génome, sur la biologie en général dont on dispose aujourd'hui. Les possibilités sont immenses. Il est très difficile de mettre cela sur une échelle de temps.

Ce que nous indiquent les essais cliniques, ceux qui ont été bien faits, et il y en a, c'est que nous allons effectivement dans la bonne direction, qu'on peut sans doute faire des choses en transférant des gènes chez les patients. Il se trouve que dans le cas de certains cancers, cela peut être particulièrement efficace et, dans ce domaine-là, le processus peut sans doute aller un petit peu plus vite, de façon un petit peu paradoxale parce qu'il faut dire que ce ne sont pas les pathologies auxquelles on pensait au départ quand on a commencé à envisager la thérapie génique, et, d'une certaine façon, on utilise un petit peu les inconvénients, les avatars des vecteurs existant aujourd'hui au profit d'une intervention thérapeutique parce qu'il s'agit de mobiliser le système immunitaire, alors que dans le cas de traitement de maladie génétique, par exemple, on voudrait absolument éviter ce genre de réponse immunitaire.

Donc, on tourne à notre profit quelque chose qui est éventuellement l'inconvénient des vecteurs, mais pourquoi pas ? Il y a des choses positives qui se passent, qui doivent continuer. Ceci étant dit, ce sera de toute façon long et difficile, comme le développement de n'importe quel médicament, je dirais même plus parce que ce sont des réactifs d'une nature nouvelle pour lesquels il faut de réglementations nouvelles, enfin qui se mettent en place, bien entendu, pour lesquels il faut sans doute tester plus longtemps. Donc, ce sera long, difficile et extrêmement coûteux. C'est pour cela le message que l'on voudrait avoir... enfin que j'aimerais faire passer c'est que ce n'est pas un message de découragement. C'est un message qui dit qu'on a entre les mains des possibilités immenses mais que, ayant dit cela, on se retrouve au même niveau que le développement de médicaments comme on les développe d'habitude, à savoir que c'est un parcours du combattant qui est très difficile et il faut bien voir que parmi les médicaments testés, très, très peu arrivent au niveau de la commercialisation.

 

Axel KAHN

Pour aller dans ce sens, même s'il y a eu des déceptions, les médias, les scientifiques ont pu être responsables, il y a eu des moments d'espoir. Mais si on regarde un côté purement scientifique, ce n'est pas forcément toutes les applications, on a assisté à des développements remarquables. Des choses qui sont courantes à l'heure actuelle étaient impensables il y a 10-15 ans. Donc, du côté scientifique, il y a eu une progression régulière et on n'a pas encore abouti, ou on ne peut pas encore imaginer tout ce qui pourra être fait. Donc, je pense qu'il faut garder un espoir et les possibilités seront tout à fait considérables.

 

Hélène CARDIN

Donc, on assiste bien à une véritable révolution.

 

Axel KAHN

On assiste à une révolution, mais comme toute révolution, il y a des petits moments difficiles, mais je crois que la révolution est en cours.

 

Marie-Louise BRIARD

Moi je pense que cette révolution qui est en cours, les familles ont du mal à attendre cette révolution...

Parce que la maladie évolue. Les quelques appels que j'ai à Allo-Gènes, c'est : "Où on en est ? On me refuse telle chose et pendant ce temps-là mon enfant se dégrade". Alors c'est vrai que cela c'est quelque chose de très difficile quand on est médecin traitant, j'allais dire, à remettre les pendules à l'heure pour aller leur expliquer que malheureusement ce qui, peut-être, était possible, n'est pas possible. Donc je crois qu'il faut aussi qu'on fasse très attention dans les messages que l'on fait passer, à cause de familles.

Et je crois qu'il y a quelque chose qui est important dont on n'a pas du tout parler aujourd'hui, c'est le problème de l'accompagnement des familles et notamment sur le plan psychologique. Parce que je crois que c'est très difficile d'avoir des enfants dont la maladie évolue, et probablement que les généticiens et tous les médecins n'ont pas donné une place assez grande à cet accompagnement qui peut être de soutien et qui peut exister. On le voit bien à travers même la réalisation des tests génétiques. Ce n'est pas non plus très simple de faire un test génétique et, brusquement de se trouver devant un statut qu'on a du mal à accepter, etc. Donc, je crois que là aussi c'est un énorme effort, pendant qu'on fait de la thérapie génique, on pense à la thérapie génique, au gène-médicament, de penser aux personnes qui sont là à attendre et de voir comment on peut faire pour les aider. Je crois que c'est vraiment quelque chose, un message qui me semble très, très important à défendre.

 

Hélène CARDIN

Et d'ailleurs vous avez une psychologue, vous, à Allo-Gènes.

 

Marie-Louise BRIARD

Oui, il y en a deux qui sont là, et qui ont suivi le début de l'accompagnement... C'est vrai que j'ai une psychologue à Allo-Gènes et j'ai souvent des coups de téléphone de détresse. Alors je ne suis pas là, on n'est pas là pour faire de la psychologie, mais parce qu'au téléphone... parce qu'on vient d'apprendre un diagnostic. Les gens sont complètement désemparés. Je crois qu'il faut qu'on les aide à un moment donné. C'est vraiment quelque chose de très important pour donner cet espoir que la thérapie ne peut pas encore complètement apporter.

 

Hélène CARDIN

 

Est-ce qu'il y a encore une question dans la salle ? On va pouvoir donner tout de suite la parole au Professeur GROS pour les premières conclusions. Il sera suivi d'Axel KAHN, puis de Bernard BARATAUD.

 

François GROS

Si je ne suis pas intervenu dans ce débat qui me paraît tout à fait central à ces rencontres, c'est précisément parce que j'avais quelque chose à dire dans les conclusions.

Il me semble, en effet, que ce qui a caractérisé ces rencontres, c'est, précisément, qu'elles ont été à la fois très informatives, elles nous ont apporté beaucoup d'informations, mais dans un esprit de sagesse et d'objectivité dont il faut à nouveau remercier Radio France et les organisateurs parce que, justement, on vient d'évoquer à l'instant les difficultés qu'il peut y avoir dans la transmission d'un message qui est issu du résultat d'une recherche ou d'un ensemble de recherches, surtout lorsqu'il s'agit d'application à l'homme. Il y a là, évidemment, une certaine modification dans le transfert de ce message strictement scientifique que l'on peut tout à fait comprendre puisqu'il s'agit de la vie des gens et de l'attente des malades et de leurs familles.

Cela dit, ou cela étant, je crois que l'on a respecté un état d'esprit qu'Axel KAHN et moi avons rappelé d'ailleurs, je crois, ce matin, à savoir que ce débat se veut objectif, dépourvu d'angélisme et de triomphalisme. Pour autant, je crois qu'il serait absurde de nous séparer avec l'idée que la génétique n'a pas progressé et qu'il ne faut pas continuer. En effet, je voudrais tout de même vous rappeler une chose.

Prenons le cas des biotechnologies. Voilà un domaine de l'application des sciences de la vie qui est né pratiquement peu après le génie génétique et sur lequel on a dit énormément de choses. Je ne sais pas si vous vous souvenez des perspectives chronologiques qui avaient été dessinées et qui voulaient que, par exemple, les biotechnologies débouchent dans les années à venir sur des marchés considérables, avec des médicaments immédiatement disponibles, etc.

Qu'est-ce qu'il s'est passé en fait ? Il y a eu, évidemment, des effets d'annonce. Je veux dire que moi même j'y ai participé parce que j'y ai cru. Mais, au fond, ce qui s'est passé a été l'atteinte d'un état d'équilibre. On s'est aperçu au bout de, par exemple 6-7 ans, qu'on avait été un petit peu vite dans les annonces, qu'il y avait encore des freins dans le développement des produits, mais, cependant, ces produits sont arrivés. On dispose aujourd'hui d'une vingtaine de produits qui sont fabriqués par génie génétique, et non des moindres ! Des facteurs, par exemple, comme l'érythropoïétine ont un rôle considérable dans le traitement des maladies du sang et dans les anémies. On a aujourd'hui la possibilité d'avoir accès à des facteurs qu'on n'aurait jamais pu produire autrement.

Peu à peu l'équilibre est revenu. Les choses se sont réinstallées. Vous-mêmes, je crois, avez évoqué le problème de la dynamique thérapeutique du SIDA. Il y a eu un premier produit qui a suscité beaucoup d'espoirs, puis les études d'essais thérapeutiques ont montré, que mon Dieu, c'était d'une stabilité comme effet relative, et puis, peu à peu, on est passé à une bithérapie, puis à une trithérapie et aujourd'hui, tout de même, le tableau est assez profondément modifié.

Qu'est-ce que cela veut dire ? Cela veut dire que, malgré tout, nous avançons. Nous avançons parce que - quelqu'un l'a rappelé tout à l'heure, je crois que c'est Jean-Louis MANDEL - il faut voir d'où nous partons. Il y a encore pas si longtemps, on connaissait très, très peu - je ne parle pas évidemment des travaux du début du siècle - on connaissait très peu de maladies génétiques dont le gène avait été identifié. Il y a eu évidemment la découverte qui a été, en quelque sorte, l'élément détonateur, dans le bon sens du terme, de la myopathie de Duchenne, les Travaux de Kunkel et Monaco, aujourd'hui on connaît les gènes de 650 maladies génétiques dont à peu près 400, entre parenthèses, ont été établies grâce à l'apport du Généthon.

On n'est pas loin, peut-être à quelques années, très peu, peut-être, elles se comptent sur les doigts d'une main, je dirais de la compréhension malgré tout fondamentale de l'organisation du génome humain. On a d'ailleurs, entre parenthèses, gagné beaucoup de temps par un biais qui a été la comparaison entre l'étude des gènes humains et l'étude des gènes de levure. On s'est aperçu, d'une façon d'ailleurs qui a beaucoup étonné le public, mais qui au fond pouvait être plus ou moins prévisible, c'est que la moitié des gènes de levure sont des gènes qui ont exactement leurs composantes au niveau du chromosome humain. Donc, on a là, la possibilité, évidemment, de gagner du temps sur l'étude de la fonctionnalité du génome.

Je ne veux pas trop insister, mais, à l'heure actuelle, la génomique est en pleine marche. Jacques CHIRAC l'a rappelé encore une fois hier. Il a souligné toute l'importance qu'il attachait à cette dynamique sans pour autant - et lui non plus n'a pas fait de triomphalisme - sans pour autant dire qu'elle allait résoudre tous les problèmes. Il a insisté aussi, d'ailleurs, sur la nécessité de redonner un relief particulier à la microbiologie, à l'étude des maladies parasitaires. Tout ceci ne peut pas se faire d'un seul coup, mais, également, là encore, la génétique - et c'est une rencontre sur la génétique - la génétique va apporter des choses tout à fait essentielles.

Elle a apporté, elle est en train d'apporter quelque chose sur quoi d'ailleurs mon attention a été davantage attirée qu'au préalable, à savoir... Il y a deux choses, d'ailleurs, une dont on a peu parlé (ou alors on l'a fait, mais je n'étais pas là) et l'autre dont on a parlé ce matin. La première, c'est que la possibilité grâce à la génétique de mieux déterminer le répertoire des défenses immunitaires de l'individu et, en particulier, le répertoire des systèmes de présentation des antigènes, quelque chose qui va devenir fondamental demain pour les greffes et pour la compréhension des maladies auto-immunes. C'est la génétique qui l'a fait, en même temps que l'étude de l'immunologie fondamentale.

La deuxième chose qui me paraît tout à fait capitale, c'est également ce qui a été dit ce matin sur le fait qu'on va pouvoir commencer à prévoir, établir une sorte de spectre de réponse de l'individu à toute une série de médicaments types, ce qui va avoir des conséquences absolument colossales, parce qu'on a jusqu'ici évidemment, fait appel aux phases traditionnelles I, II et III définies par la FDA pour tester les médicaments. Bien entendu, on vérifie qu'ils sont efficaces au niveau de la thérapeutique, mais ce que l'on ne vérifie pas c'est le degré de réponse des individus à ces médicaments, éventuellement leur facteur d'intolérance. Là, la génétique est en train d'ouvrir également des pistes très importantes, comme cela a été rappelé ce matin par Marc VASSEUR.

Thérapie génique. Thérapie génique, là encore il faut savoir d'où l'on est parti. On est parti en fait... Il faudrait peut-être quelquefois que nous adoptions - je m'excuse de dire cela parce que c'est très difficile face aux malades et aux gens qui attendent les réponses et les resultats - mais il faudrait peut-être, un tout petit peu, avoir le sens de la chronologie. Au fond, cela ne fait guère que, à peine, une dizaine d'années que les choses ont commencé pour une thérapeutique qui est extraordinairement sophistiquée. On a acquis beaucoup de choses. On a tout de même - comme je crois Alain FISHER l'a rappelé tout à l'heure, Olivier DANOS aussi - on sait maintenant beaucoup de choses sur les vecteurs. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle, justement, l'AFM met tout son poids dans cette affaire.

On sait qu'il y a, évidemment, à la fois, une insuffisance, peut-être, dans le degré, le taux d'expression des gènes que l'on introduit - et là cela interpelle bien entendu les systèmes de régulation - et il y a aussi le rejet contre des éléments qui sont introduits par le vecteur viral proprement dit, d'où les constructions qui sont de plus en plus fines et qui vont, finalement, aboutir. N'oublions pas, à nouveau, l'exemple de la trithérapie. Il y a là quelque chose qui devrait, finalement, porter ses fruits.

Alors, ce n'est peut-être pas demain. Ce ne sera peut-être pas tout à fait après-demain, mais ça va venir, parce qu'il n'est pas pensable que la convergence d'efforts de tant de laboratoires avec une vision désormais beaucoup plus sage, beaucoup plus objective, qui s'est en quelque sorte forgée à l'expérience même de l'échec, dans quelques cas, il faut bien le dire, ne débouche pas, elle, bientôt sur quelque chose de tout à fait nouveau.

Il me semble donc qu'il y a eu dans ce colloque - mais je n'ai pas le dernier mot et je vais tout de suite céder la parole à Axel et à Bernard BARATAUD qui doit être dans la salle, je pense - il me semble qu'il y a un message de sagesse et qu'on pense désormais davantage à une démarche intégrée de la génomique.

On a toujours un peu tendance en sciences à partir à fond de train. Je vous disais, ce matin, que les chimistes qui ont maintenant mis au point la chimie combinatoire, pensent qu'ils vont tout résoudre, et je crois qu'ils ont tort. Ils ne vont pas tout résoudre. Ils vont très vite se heurter - on en a discuté avant-hier - à des problèmes de cibles, évidemment aussi bien génétiques que cellulaires.

Cela a été un petit peu la même chose, peut-être, pour la génomique, à cette différence près qu'on a tout de même acquis, fait un chemin considérable, comme je le rappelais tout à l'heure. On va assister, donc, à une démarche plus intégrée, je crois, de la génomique, en particulier, par exemple, avec la physiopathologie parce que l'environnement même, disons physiologique de la maladie dans son ensemble est quelque chose de tout à fait important.

Prenons à nouveau les maladies neuromusculaires. L'aspect, justement, comment dirais-je, angiogénique de l'irrigation des muscles, c'est quelque chose de tout à fait fondamental, la pénétration, le mouvement même des vecteurs à l'intérieur des fibres, c'est quelque chose qu'on ne connaît pas encore tout à fait, mais quand on aura pu tout de même surmonter ce genre de physiologie-là et de connaissance physiologique, on aura fait beaucoup de progrès.

Même remarque avec la biologique cellulaire.

On a dit aussi que la génétique... on en a peut-être peu parlé pour des raisons qui peuvent s'expliquer du phénomène d'abolition de l'activité des gènes, le phénomène de knock-out, mais qui peut permettre d'obtenir aujourd'hui, celui-là et la transgénèse, des modèles animaux de maladies qui vont permettre eux aussi d'aller un petit peu plus vite dans l'épreuve des molécules.

Je crois qu'on a bien souligné que la recherche génétique peut prendre, donc, des aspects très divers. Cela a été dit tout à l'heure, et surtout, je l'ai rappelé un peu moi même dans une intervention ce matin, c'est qu'il n'est pas question, et je crois qu'il n'a jamais été question, même chez les plus enthousiastes parmi les généticiens, d'opposer la génétique à la pharmacochimie. Ce sont deux démarches qui doivent absolument se rencontrer. Il est tout à fait clair que la génétique va peut-être être le seul moyen pendant longtemps, par exemple, de guérir des cancers grâce aux, disons, dispositifs, scénarios qui ont été évoqués tout à l'heure. Mais il viendra également un moment où des molécules peut-être moins toxiques et plus adaptées pourront être également des molécules de synthèses, des molécules chimiques seront utilisables. Il est même possible que la combinaison de ces deux thérapeutiques intervienne.

Ce que je voudrais dire en conclusion c'est que, d'abord, tout le monde a salué, et j'en suis heureux, le rôle que l'AFM a joué, justement, parce qu'il fallait surmonter une barrière d'énergie qui était très forte. Je dois dire que moi-même, en tant que Président du Conseil Scientifique de l'AFM, je dois le reconnaître, au début, j'avais le sentiment que mon ami, Bernard BARATAUD, allait peut-être un peu vite. Et puis, en fait, l'histoire lui a donné entièrement raison. Il faut parfois surmonter, justement, ces barrières d'énergie. Je crois que donc tout le monde a salué ce rôle. Maintenant, évidemment, l'AFM n'est plus toute seule. Les pouvoirs publics misent aussi beaucoup sur la génopôle.

On a parlé des relations recherche-industrie. Là encore, je crois qu'il y a quelque chose qui est important - Axel le dira mieux que moi, certainement, tout à l'heure - c'est qu'il y a une mobilisation beaucoup plus sereine, beaucoup plus précise, beaucoup plus sage même, du milieu industriel vis-à-vis des biotechnologies et de la génétique.

Donc, je pense que nous allons vers un Téléthon peut-être moins redondant, beaucoup plus sage, mais tout autant, à mon avis, porteur d'espoir. Merci.

 

Axel KAHN

Si certains d'entre vous aurez pu croire qu'il y avait, comme qui dirait, une nouvelle catégorie de généticiens dépités, honteux et n'osant pas regarder en face le présent et l'avenir, vous vous êtes trompés ! Et si jamais vous avez cru que l'objectif de cette journée était de faire naître cette impression, pire ! si jamais ces journées avaient fait naître cette impression, ce serait qu'elles seraient un échec, et elles ne le sont pas parce qu'elles ont été précises, importantes et conquérantes.

Tout à fait au contraire, ce qu'il faut retenir de ces journées, c'est que, aujourd'hui, très clairement, la génétique, telle que ses capacités ont été démultipliées de manière fantastique par le génie génétique à partir des années 73, n'est plus du tout une discipline qui va s'appliquer à quelques maladies nombreuses, mais un peu ésotériques aussi douloureuses fussent-elles, les maladies génétiques, il s'agit de la voie la plus importante dont on ne peut pas se passer pour avoir accès à la connaissance du matériel vivant normal et pathologique, c'est-à-dire le principal des espoirs d'améliorer la thérapeutique de celles des maladies que l'on ne prend pas bien en charge thérapeutiquement aujourd'hui, y compris, à terme, les maladies génétiques.

C'est vraiment cela le message principal de cette journée.

Aujourd'hui, c'est tellement vrai que pour hâter le mouvement, on s'est décidé - et le rôle de novation de l'AFM, de Daniel COHEN, de Jean WEISSENBACH, du CEPH en ce domaine sont tout à fait éminents - l'on s'est décidé à réfléchir sur la structuration et la systématisation des efforts qu'il fallait consentir pour aller plus vite dans la connaissance de la réalité génétique et dans l'utilisation des resultats de la génétique.

C'est ce que l'on appelle de noms barbares que l'on a inventés pour la circonstance. Tout d'abord, la génomique. La génomique, c'est l'étude en gros du génome. Tout d'abord l'étude des gènes, les identifier, les connaître, les positionner. La génomique structurale. On vous a dit qu'aujourd'hui on a des petits bouts d'environ 60 % de tous les gènes qui existent et que l'on devrait avoir une connaissance d'à peu près tous les gènes qui existent dans 2-3 ans, et que dans un délai de - on ne sait pas trop : 7 ans-8 ans-10 ans - on devrait avoir une séquence d'un génome type avec la masse de connaissances que l'on pourra tirer de tout cela.

C'est très bien. Encore faut-il savoir ce qu'il signifie, comment il fonctionne, isolément, en combinaison et en interaction avec l'environnement.

L'étude systématique de cette fonction des gènes a permis d'inventer un nouveau nom qui est la génomique fonctionnelle.

La génomique structurale : accès aux gènes. La génomique fonctionnelle : accès à la signification biologique de l'expression du programme génétique.

Cette génomique fonctionnelle devrait permettre d'avoir accès à la compréhension des mécanismes et de la physiopathologie des maladies. Là aussi, on en parlé. Une des manières d'y avoir accès, pour certaines maladies, est de s'intéresser à la particularité génétique, naturellement des familles, mais aussi des familles qui très longtemps ont cru de manière un peu isolée, dans lesquelles il y a parfois un taux d'endogamie important, ou alors dans lesquelles le nombre de gènes responsables de telle ou telle maladie sont peu nombreux et où le nombre des autres gènes qui peuvent interférer dans leur action avec ces gènes sont également peu nombreux parce que l'élément fondateur est relativement petit.

Cela a été discuté dans le cas du Québec. C'est vrai également de la Finlande et c'est vrai de certaines îles. Le Québec gère parfaitement, naturellement, l'accès à la prospection génétique sur son territoire. Il l'a pris en main complètement. Il n'a vraiment besoin de personne et il fait ce que font tous les bons scientifiques du monde, en partenariat il coopère.

Il y a plus un problème éthique, tout à fait fondamental, dans le mouvement qui conduit certains - et l'AFM de ce point de vue-là s'est toujours comportée de manière absolument impeccable et idéale au point de vue éthique - dont certains, dans le monde de l'industrie notamment, essaient de s'aménager des droits exclusifs de prospection de la diversité et de la particularité génétique de certaines populations sans qu'il soit déterminé d'aucune manière quel sera le retour sur bienfait pour ces populations. Les pays émergents et leurs représentants ont souligné ce point qui est un très grave point, sur lequel il faut s'expliquer par rapport à la population en général.

La découverte des gènes de maladies, la découverte des molécules qui sont impliquées dans la physiopathologie des maladies permettra, dans un premier temps, de parvenir au diagnostic. Et quand bien même le diagnostic n'entraîne pas immédiatement la possibilité de guérir, et il est normal qu'il en soit ainsi, le diagnostic est d'ores et déjà un bienfait considérable pour la médecine. Cela a été dit de nombreuses fois. Entre la famille qui ne voulait plus avoir d'enfant, de peur d'avoir à nouveau un enfant programmé pour souffrir et pour mourir, et la famille qui peut mettre en route une grossesse dans la joie, la certitude de mettre un enfant qui sera disponible pour être aimé, il y a naturellement simplement une révolution qu'il ne faut pas sous-estimer.

Demain, la technique qui doit encore se développer permettra d'avoir un accès de plus en plus rapide, de plus en plus automatisé, au diagnostic génétique, notamment par la mise au point de ces outils tout à fait merveilleux qui permettent de faire un grand nombre de diagnostics génétiques de manière tout à fait automatisée, ce que l'on appelle les micro-puces d'ADN, les micro-chips d'ADN, qui se développent malheureusement insuffisamment en France, mais certains laboratoires, ici, ont demandé qu'on les aide pour développer cette technique, et je suis tout à fait persuadé qu'une réponse positive leur sera apportée en ce domaine.

Cela dit, le diagnostic nous met devant une nécessité et face à un problème difficile. Monsieur le Président, bonjour... devant une difficulté difficile. Comme nous l'avons dit tout à l'heure, il est normal qu'il y ait un délai important entre la connaissance et la capacité d'utiliser la connaissance pour pouvoir faire quelque chose. Entre le savoir et le pouvoir, il y a forcément un délai puisque le pouvoir, à quelques exceptions près, doit être précédé par le savoir. Et naturellement, il faut gérer ce délai car ce délai comporte de nombreux enjeux éthiques. L'un est l'impatience des malades à qui parfois, un peu imprudemment, on a laissé croire que le gène serait immédiatement la possibilité de guérir la maladie dont on connaissait les mécanismes et également d'autres problèmes éthiques concernant - il ne s'agit plus tellement des maladies génétiques à proprement parler - concernant la gestion sociale de la connaissance de certaines particularités biologiques, du destin biologique des individus.

Et puis la connaissance des gènes - et cela c'est aussi un moment fort, extraordinaire - c'est l'accès à la physiopathologie. Et il faut tout de même - on le dit maintes fois - il faut rappeler que là encore il y a une révolution entre une maladie que l'on sait décrire mais dont on ne connaît pas les mécanismes et une maladie dont on connaît les mécanismes, il y a un nouveau saut considérable qui est celui de l'apparition de l'espoir.

A partir du moment où on connaît les mécanismes d'une maladie, cela veut dire que l'on peut, pour la première fois, se mettre à engager des programmes de recherche thérapeutiques qui ont - l'histoire le démontre maintes fois - qui ont des chances, dans un délai qui peut être d'un an, de 10 ans, de 20 ans, de 30 ans, de parvenir à la mise au point d'un traitement.

Quelques exemples pour des maladies génétiques fréquentes survenant tard. La maladie d'Alzheimer, on ne sait pas encore la guérir. On a trouvé récemment trois gènes responsables de formes particulières de maladie de Alzheimer. Le nombre de pistes pour la mise au point de traitements adaptés à une physiopathologie que l'on connaît de mieux en mieux est tout à fait considérable et, entre l'approche thérapeutique de la maladie d'Alzheimer, désespérance absolue il y a 10 ans, et ce qui se fait de manière intense dans tous les laboratoires pharmaceutiques du monde aujourd'hui, il y a véritablement, plus que l'épaisseur d'une feuille de papier, il y a, au contraire, l'immensité d'une révolution.

La physiopathologie des maladies génétiques, c'est également la possibilité d'améliorer les possibilités thérapeutiques, et ces possibilités thérapeutiques des maladies génétiques sont nombreuses, et aujourd'hui on soigne déjà des maladies génétiques. Certaines d'entre elles, on les soignait avant de connaître le mécanisme. Cela a été rappelé par Alain

FISHER tout à l'heure. Les greffes d'organes. La greffe d'organe qui est une thérapie génique avant l'heure, d'une certaine manière - puisqu'on remplace un tissu qui a le mauvais gène par un tissu qui a le bon gène et la bonne fonction - les greffes d'organes sont un traitement des maladies génétiques qui fonctionnent dans pas mal de cas.

On sait également, en approchant la physiopathologie des maladies, proposer des traitements. Dans les thalassémies qui sont liées à une anomalie du fonctionnement de gènes de globine, de l'hémoglobine, il y a des possibilités de stimuler la fabrication de certaines formes de l'hémoglobine qui vont permettre d'éviter l'anémie, notamment un produit dont a parlé François GROS tout à l'heure qui est obtenu par génie génétique, qui est l'érythropoïétine.

Un autre exemple extraordinaire. Il y a une maladie dont on a parlé à propos de Marie GAGNET qui est la fondatrice au Québec de cette affection qui est la thyrosinémie de type I. La thyrosinémie de type I est une effroyable maladie, déficit enzymatique qui provoque une disparition

 

progressive, une lyse du foie, une régénérescence du foie et qui se complique toujours et de cirrhose et d'hépatome; Parce que l'on a compris quelle était la voie métabolique, on a trouvé un corps chimique, qui est en l'occurrence le NTBC, qui permet de modifier le bloc métabolique et qui permet de changer la symptomatologie, de transformer une maladie toujours mortelle grave en une affection dont les symptômes permettent au moins d'attendre de proposer d'autres méthodes thérapeutiques, notamment par exemple la greffe de foie.

 

Autre exemple. Ici, on se trouve avec le découvreur d'une forme d'ataxie qui ressemble à la maladie de Friedreich, qui est liée à une anomalie de la synthèse de la vitamine E. Parce que l'on a trouvé ce gène, parce qu'on a compris comment la maladie survenait et grâce à ce travail, des dizaines et dizaines de familles sont traitées avec des resultats extrêmement positifs par la vitamine E.

Tout à l'heure, Arnold MUNNICH vous a dit que la découverte de certaines formes de myopathies mitochondriales avec une anomalie du métabolisme et de la synthèse du co-enzyme Q permettait, a permis dans certains cas, une amélioration extraordinaire en prescrivant des flavoquinones qui permettent de rétablir, par conséquent, cette substance.

Et puis, les hémophilies, on saura les traiter sans danger, j'espère, en apportant du facteur VIII obtenu par génie génétique et qui ne risquera pas d'entraîner ces drames épouvantables de contamination par le SIDA.

Vous voyez que, avant même d'aborder - je vais le faire maintenant - aussi le problème de la thérapie génique, il n'y aurait aucune raison de n'être pas extraordinairement fier de ce à quoi l'on est parvenu grâce à la génétique et, de ce fait, d'être extraordinairement fier de la part que la France - et les gens dont j'ai parlé tout à l'heure, les organisations, l'AFM principalement puisqu'elle a joué un rôle tout à fait déterminant - la part qu'a joué la France dans l'avènement de ces progrès dans le domaine de la génétique.

Parmi ces différents traitements pour les maladies et les maladies non génétiques, parfois, pas toujours, parfois, le médicament ce sera le gène. C'est ce que l'on appelle la thérapie génique. Le thérapie génique ne sera pas la révolution absolue, changeant complètement la manière d'aborder le traitement des maladies. Personne n'a vraiment jamais pensé cela et personne, probablement, ne l'a jamais dit. En revanche, il n'y a pas de

doute que dans des cas que l'on ne sait pas soigner autrement, la thérapie génique apportera des solutions extrêmement importantes.

Par conséquent, grâce à la connaissance génétique, il faut parallèlement poursuivre les recherches sur l'amélioration de tous les traitements issus de la connaissance génétique et, parmi ces traitements, la thérapie génique.

Pour terminer et pour laisser la parole à Bernard BARATAUD, je dirai que, plus encore qu'auparavant, avant que cette journée ne se déroule, les généticiens qui y ont participé et les gens qui les ont écoutés, doivent être persuadés que ce courant, ce mouvement impétueux de recherche en ce domaine exige de la part de ces partenaires des qualités particulières aujourd'hui, d'être bons, d'être excellents, d'aller vite, d'être mobilisés, d'être lucides, de tenir un langage de vérité et d'être ouverts aux conséquences sociales et éthiques de ce qu'ils font.

La plupart de ceux qui ont parlé - me semble-t-il - correspondent à tous ces critères, ont ces qualités et moi, personnellement, je suis heureux, optimiste, même si je suis persuadé que l'on fera encore mieux. Merci beaucoup.

 

Hélène CARDIN

Merci beaucoup Axel KAHN.

Bernard BARATAUD, vous êtes Président de l'AFM. Quelques jours avant le Téléthon, vous êtes l'homme qui surmonte les barrières d'énergie. C'est François GROS qui l'a dit.

 

Bernard BARATAUD

Moi j'ai envie d'essayer de vous faire comprendre quel a été notre cheminement et comment nous avons fonctionné.

La génétique pour moi, cela a commencé, de façon visible, en 1986, un mardi matin d'octobre, du début octobre, le jour de la rentrée scolaire. J'étais à Tours, dans un congrès d'association, pour la troisième année, je crois, nous réunissions les scientifiques qui travaillent avec l'association, et on m'a demandé de me rendre, de toute urgence, à 9 heures du matin, dans l'amphithéâtre, parce qu'un jeune Américain de 26 ans; Anthony MONACO présentait un travail sur un écran. Et dans cet amphithéâtre noir, avec son écran bleu, cette diapositive rayée de blanc, j'ai vu, pour la première fois, le gène de la myopathie de Duchenne, ce gène qu'on cherchait depuis si longtemps et que j'aurais tant voulu que mon fils voit.

J'ai compris ce jour-là que quelque chose d'important s'était produit. Une femme à côté de moi pleurait. Elle avait un gamin atteint d' amyotrophie spinale (c'est Isabelle HUREAU et elle sera dans le Téléthon, cette année, par hasard, comme cela). Elle pleurait en disant : "Pour vous c'est réglé, mais pour nous, on ne va pas y arriver". Alors je l'ai emmenée voir Anthony MONACO.

J'ai d'abord qu'Anthony MONACO avait déjà fait cette déclaration aux Etats-Unis, dans un hôtel, où on l'avait à peine écouté, qu'il avait été en Allemagne dans un congrès, il revenait d'Allemagne où on avait parlé de sa découverte et où personne ne l'avait écouté. Il avait fait un bide. Et il a dit à cette femme, pour l'amyotrophie spinale, ce sera la même chose. C'est le même travail. Dès qu'on a fini la Duchenne, on fait la myotrophie spinale. Il n'a pas fait l' amyotrophie spinale, MONACO, mais ce qu'il a fait comprendre à une association comme la nôtre c'est qu'il s'était produit ce jour-là un phénomène énorme qui allait déferler sur une science, une médecine et un pouvoir qui ne l'avaient pas prévu, qui ne s'étaient pas organisés, qui n'avaient pas les outils nécessaires pour faire face et qui allait demander des années pour s'organiser.

Alors, on a mis, entre le moment où on a compris qu'il y avait un phénomène et le moment où on a pu mesurer les moyens à mettre en oeuvre et traduire cela dans les faits en termes d'action, il s'est bien écoulé trois bonnes années, trois bonnes années jusqu'au jour où François GROS m'a dit : "Il faut que je vous présente des gens qui sont importants, le Professeur DAUSSET et Daniel COHEN". Il m'a invité à déjeuner un midi et j'ai fait la connaissance de Monsieur DAUSSET. Monsieur DAUSSET m'a fait visiter son laboratoire et là j'ai vu faire de la génétique, d'une autre façon que celle que je connaissais. Je connaissais la plupart des laboratoires français, pour les avoir visités, mais les techniques employées au CEPH, c'était autre chose. C'était à côté du Panthéon. C'étaient des machines, des cadrans, beaucoup d'ordinateurs, très peu d'éprouvettes et je me suis dit qu'il y avait quelque chose que je n'avais pas compris.

Et puis j'ai rencontré COHEN et là j'ai vu un type qui disait : "Vous avez mis 6 ans pour la myopathie de Duchenne, 6 ans pour la mucoviscidose. Il a 6 000 maladies (à l'époque, il n'y en avait que 6 000), 6 fois 6 = 36, cela fait 36 000 ans de recherche pour faire les gènes des maladies. Ce n'est pas possible. La situation doit changer. Il faut trouver autre chose et moi j'ai une idée".

Et là j'ai rencontré un bonhomme qui avait dans sa tête une folie, quelque chose d'exceptionnel. Il voulait dresser des cartes du génome. J'ai compris plus tard que Daniel COHEN avait lui aussi dans sa famille des gens atteints de maladie génétique. Ce qu'il voulait, c'était contribuer - le temps de son passage et d'une façon tout à fait désintéressée - à faire progresser la connaissance. Il voulait que de son savoir à lui puisse sortir quelque chose qui puisse aider les gens et j'ai retrouvé cette volonté-là chez beaucoup d'entre vous, beaucoup de vous que je connais bien, je l'ai retrouvée cette volonté.

Mais moi, moi qui étais agent d'Electricité de France, qu'est-ce que je peux faire ? Mon gosse venait de mourir. Il était mort 15 jours avant la découverte du gène. Je n'avais plus rien à sauver. Alors, on a écouté ce qu'a dit ce COHEN et j'ai mis 2 ans à arriver à mieux dormir la nuit et à prendre la décision. Il fallait mettre au départ 150 millions de francs, d'argent qui ne m'appartenait pas, qui m'était donné par une population sur un sujet sur lequel la communauté scientifique marquait les plus réticences, pour lequel on me disait que c'était une science " biomérdicale " (le mot est joli, n'est-ce pas ? aujourd'hui il prend une drôle de signification). Et puis je suis allé voir François GROS, Jean-Louis MANDEL et quelques autres et je leur ai demandé qu'on forme une commission de quelques experts, Jean-Claude KAPLAN, Jean ROSA, quelques experts, quatre pas plus. Je leur ai demande de venir et d'examiner le discours que tenaient Daniel COHEN et Jean WEISSENBACH. Et, en sortant, ils m'ont dit : "Vas y".

On a donc monté l'opération. Un Ministre m'a appelé (Hubert CURIEN). Il m'a dit : "Faites le, surtout faites le, mais faites le en silence car vous allez vous faire casser la gueule". Je crois qu'il n'avait pas tort...

On a donc fait ces cartes du génome en se disant qu'on allait offrir une sorte de guide Michelin à tous ceux qui auraient envie de fouiller dans le génome pour trouver l'origine des maladies. Parce que l'autre conscience qui nous était venue, c'est qu'on était, la muco et nous, pratiquement les seuls à disposer de ce gène, avec tout ce que cela apportait derrière. Savez-vous quelle est la première réaction d'un scientifique, d'un médecin ? Quand je suis rentré à Paris, après le congrès de Tours, je lui ai dit : "Nous avons trouvé le gène... Nous avons trouvé, nous, les hommes ! nous avons trouvé le gène de la myopathie de Duchenne". La réponse ? Une paire de gifles, j'ai pris. " Alors, le problème est réglé ".

Comment voulez-vous que des gens comme nous ne réagissions pas et ne disions pas : "Mais les thérapeutiques alors ? Que va-t-on faire des gènes ? Certainement pas mettre en place un eugénisme réglé." Or, c'était bien la première réponse qui était venue.

Alors, à partir de là, on a été très attentif, jusqu'au jour où dans les programmes de recherche j'ai vu passer un programme qui était signé Michel PERICAUDET et qui demandait 300 000 francs pour réintroduire un gène dans une cellule. Je suis allé voir Michel PERICAUDET, j'ai écouté son discours, et je suis filé chez Axel KAHN. Je ne sais pas si Axel s'en souvient, je lui ai demandé ce que cela valait comme travail et quels étaient les espoirs. Il m'a dit : "C'est très, très loin..." Je me souviens, c'était à Cochin. "C'est très, très loin, néanmoins il faut l'aider". Donc, on a fait remonter sa subvention et soutenu ce programme jusqu'à lui trouver les 2 millions de francs nécessaires pour lui construire son premier P3. Et puis l'affaire est partie comme cela. Elle s'est installée petit à petit mais, nous, nous les malades - parce que je représente les malades quand même - nous, les malades, on a, je crois, bien géré, et j'étais un peu étonné tout à l'heure d'entendre des choses sur la communication. Je voudrais vous donner mon opinion.

Si on parle tant de thérapie génique, c'est parce que c'est le moment. Ce n'est pas la peine que ça nous vienne sous la forme d'un mot américain, gene therapy. Nous avons, nous, une histoire européenne, française, à vivre sur cette affaire et nous avons le devoir d'organiser ce qui est de notre rôle, de notre génération, de notre pays et de notre culture. C'est notre problème, à nous ici, en France. C'est le moment. Cela ne veut pas dire qu'on est des fanatiques. Cela ne veut pas dire qu'on ne sait pas qu'il y a eu une pharmacologie, qu'il y en a encore une et qu'il y aura demain d'autres thérapeutiques qui viennent de la connaissance des gènes. On ne le sait que trop. En finançant 400 programmes de recherche par an et en voyant passer 800 dossiers, comment voulez-vous qu'on ne le sache pas ?

Mais la population a besoin de comprendre et si on lui balance tout sur la tête... On a vu le temps qu'a mis la population... et quand je parle de la population, je vais parler plus particulièrement des dirigeants et c'est une partie de la population, apparemment. Le temps qu'ils ont mis pour comprendre ce que ça voulait dire tout ça et le temps qu'il a fallu pour s'organiser. Nous, les malades, on est dans un espèce de monde... Je compare notre situation à ces pays où règne la dictature, dans ces pays où les gens sont écrasés. On a entendu aujourd'hui beaucoup de choses sur l'Argentine et je me dis "Il y a un moment dans ces pays-là, il y a des gens qui se lèvent en disant : liberté". Pour les malades, c'est un peu pareil, c'est la même chose. Il y a la mort chez eux. Moi j'ai vécu avec la mort d'un enfant pendant 16 ans. Et puis, un moment, quelqu'un a dit : "Liberté". Quelqu'un a dit : "Cela peut peut-être changer".

Comment voulez-vous qu'on ne fasse pas le travail ? Quand on fréquente des scientifiques comme ceux que vous connaissez, que vous avez entendus, quand on les voit travailler, quand on connaît leur force et quand on connaît leur faiblesse, quand on sait à quel point ils sont vulnérables, quand on sait que ce n'est pas l'argent qui les guide que c'est la joie de découvrir, l'honneur de faire avancer la société, quand on sait que, dans les hôpitaux, les médecins se désespèrent en échecs répétés depuis des décennies sur des maladies épouvantables, et qu'il n'y a pas d'autres solutions, comment voulez-vous qu'on ne se soit pas engagé là-dedans ?

Ce que je voulais vous dire sur ce que j'ai entendu tout à l'heure, vous avez parlé des médias. Pour moi, j'ai failli rigoler parce que cette crainte... ces médias qui ont dit tout un tas de bêtises, je ne pense pas que ce soit en France. J'ai beau chercher... je ne vois pas. Il y a peut-être eu un ou deux articles dans Minute, mais... je ne sais pas. Moi, je n'ai pas le sentiment que les médias aient beaucoup déconné. En tout cas, j'ai le sentiment qu'ils ont dit beaucoup moins de bêtises que pour les médicaments traditionnels. Vous n'avez pas ce sentiment ?

Vous parliez d'effet d'annonce pour la famille en disant : "Oui, la famille ne maîtrise pas leur... ". Ah oui ? Peut-être. Cela vient de moins en moins.

Elles sont structurées, les familles. Elles s'organisent en associations. Elles apprennent. Elles suivent des cours. En particulier, à l'AFM, on fait souvent des cours pour leur apprendre ce que c'est que la génétique, comment ça fonctionne. Et elles arrivent à être responsables. Si vous ne l'aviez pas remarqué, les malades ont changé. Ils sont capables de gérer les affaires au-delà de leur propre souffrance et ils sont capables de gérer la collectivité dans le sens de l'intérêt général, de participer à la gestion collective, pardon, dans le sens de l'intérêt général. Observez, regardez.

Mais l'effet d'annonce, il joue aussi pour le chercheur et parfois lorsque... vous avez parlé de ces médias qui déraillaient, est-ce que les chercheurs... Les chercheurs, ceux-là, est-ce qu'ils n'ont pas confondu, fait une confusion, entre le fait d'en parler, de parler de ce sujet tabou qui était leur seul discours jusqu'à présent et puis soudain de voir ce discours sur la recherche, ou sur les découvertes, dans la bouche d'autres, dans des vecteurs qui ne sont pas leurs vecteurs habituels et de là en parler pour eux devient se vanter. Le fait même de s'adresser à une journal pour lui dire : "J'ai une recherche et j'émets telle hypothèse", c'est se vanter pour eux. Non, non, je ne crois pas. Je n'ai pas vu cela souvent. J'ai bien vu des fois 2-3 excès, mais pas dans la génétique. Une fois de temps en temps, mais rarement. Et à faible niveau.

Nous, on essaie de contrôler cela. J'ai le souvenir d'un congrès de Montpellier où j'ai été le premier à intervenir sur le sujet de l'intervention d'un certain Peter LAW qui était en train de nous raconter qu'il faisait des miracles avec les myoblastes et faisait remarcher les gens. J'ai demandé à la communauté scientifique - ce qui ne se fait jamais, ce que je n'aurais jamais osé faire - de mettre de l'ordre dans son milieu et de régler ce problème car ça devenait scandaleux. Nous avons la conscience de ne pas aller trop loin, mais pourtant... Avons-nous le droit de nous taire ? Avons-nous le droit de dire à des gens qu'il ne se passe rien, qu'il n'y a pas un espoir fantastique, que des gens comme Olivier DANOS, comme Jean-Louis MANDEL ont engagé toute leur vie, Claudine JUNIEN, ont engagé tout... Axel KAHN, François GROS... toute leur vie là-dessus, sur ce pari fantastique que ça va réussir et que ça va marcher. Pourquoi on ne le dirait pas ?

VSD, il a fait un article qui n'a pas plu. Moi, je l'ai envoyé à ma mère, elle a le cancer, et ça lui a fait du bien, ça lui a fait du bien, ça ne lui fait pas de mal de lui dire qu'il y a de l'espoir, qu'il y a des gens qui travaillent, qui existent. Elle ne le savait pas. Elle ne savait pas, elle vivait avec la mort aux trousses et elle ne le savait pas.

Dans un autre domaine et pour rassurer un certain nombre de gens, je dirai que cette génétique on l'a vécue d'une façon... on a essayé d'être honnête le plus possible. Nous n'avons pas cherché, avec l'opération Téléthon et les moyens qui nous étaient donnés, à nous faire un pouvoir, à acquérir une structure dominatrice, impérialiste. On a créé un réseau de banques. On a construit 10 banques en France d'ADN. On n'a pas été les premiers. D'autres étaient passés avant nous, mais le réseau de banques important qui a été structuré, nous l'avons lourdement financé, mais nous l'avons remis à l'Etat qui le fait fonctionner.

Le séquençage du génome, la cartographie, nous avons été le centre le plus important de séquençage. Nous avions jusqu'à 17 séquenceurs en ligne. Nous en avons fait cadeau à l'Etat qui vient d'ouvrir le Centre National de Séquençage confié à Jean WEISSENBACH qui va partir vers d'autres objectifs. On aurait pu chercher à le garder. Nous avions les moyens de le garder. On ne l'a pas fait.

Le génotypage qui était une des puissances les plus importantes au monde, qui permettait de faire plusieurs millions de génotypages dans des temps extrêmement cours, nous ne l'avons pas gardé pour nous. Nous l'avons remis à la puissance publique à partir du moment où ça s'est révélé stratégique. Et aujourd'hui, on va reprendre un nouveau départ en direction des thérapies géniques et on va reprendre les mêmes risques pour d'autres sujets, et pas de la même façon, et pas sur les mêmes stratégies. On va reprendre un pari qui est celui de l'espoir. On va essayer de construire une nouvelle fois quelque chose pour que ça marche. Parce qu'aujourd'hui, c'est vrai, on le sait bien, on le sait mieux que vous, la thérapie génique cela ne marche pas, mais ce que l'on dit à la population et aux médias, c'est que cela va probablement marcher, à condition qu'on fasse le nécessaire.

Or, pour faire le nécessaire, où sont les politiques ? Où sont les politiques ? Qui est-ce qui organise et structure la recherche, l'industrie, la banque pour que la France se mette au niveau de ses concurrents, ou l'Europe, même, se mette au niveau de ses concurrents ? On a dû vous le dire : 1 000 entreprises de biotechnologie aux Etats-Unis, à peine 100 en Europe. Plus d'entreprises de biotechnologie dans le seul Massachusetts une dans toute l'Europe continentale, 10 en France... Où sont les stratégies des politiques ? Ne nous reprochez jamais d'essayer de faire déclencher des réactions structurantes.

Vous vous apercevrez, si vous regardez sur plusieurs années, sur une dizaine d'années, qu'à chaque fois qu'on a essayé de forcer les passages, de provoquer, on a réussi à déclencher les mouvements qui nous dépassent, qui durent et qui restent.

Un exemple : le plan génome-santé. Quand on a demandé à financer un plan génome-santé avec Monsieur DOUSTE-BLAZY, Monsieur FILLON, qui était à l'époque Ministre de la Santé et de la Recherche, cela a provoqué une série de discussions et de commentaires qui étaient : "Mais ils sont complètement mégalos... la thérapie génique ça ne marche pas..." Mais ce qu'on voulait nous, c'était faire de la provocation, c'était pouvoir faire en sorte qu'avec des moyens le problème rentre sur les lieux sacrés où se passent les choses et que les gens puissent travailler autour de véritables sujets, avec des vrais problèmes à régler et rentrer dans une pratique pour voir si on pouvait faire un pas de plus, mais il fallait bien commencer quand même.

Il fallait bien commencer, si on ne commençait pas, comment croyez-vous que la communauté française allait commencer à s'occuper d'avoir une politique en génétique ou en thérapie génique ? Regardez les dates. Comparez les Etats-Unis. Comparez de l'autre côté de l'Atlantique et puis comparez ce qu'il se passe chez nous. Vous allez voir, on a un décalage entre 5 et 10 ans sur les décisions. Cela va durer combien de temps ?

Alors, cette année on va faire de la provocation. On va mettre encore "gène-médicament, un espoir pour la vie", et puis on va parler, expliquer, rabâcher pour que les gens, tous ces parlementaires, tous ces décideurs qui ont aujourd'hui plus de 60 ans et qui n'ont pas fait la génétique dans leurs écoles, sentent qu'un courant est en train de naître et que quelque chose se passe dans lequel ils doivent impérativement intervenir, se renseigner, se rendre compétents, s'entourer d'experts et faire en sorte notre pays ne passe pas une fois de plus, comme pour l'informatique, comme un tas d'autres choses, à côté de son histoire.

Moi je crois au génie de ce pays. Je crois à la puissance et à la sagesse de ses chercheurs, sinon je ne ferais pas le métier que je fais. Je suis bénévole, je ne suis pas payé pour faire cela. C'est donc un acte de foi. Ils m'ont donné des raisons de croire au fur et à mesure de toutes ces années.

Je souhaite simplement que ce colloque international qu'a fait Radio France, à son initiative, qui m'a surpris dans les premiers temps, je souhaite qu'il aille jusqu'au bout de sa mission qui était, à un moment où on se prépare à faire la fête, à un moment où on se prépare à oublier le drame, à collecter des fonds, à faire de la télé, du show business, je souhaite que dans les milieux intellectuels, notamment, on cesse de dire des bêtises sur l'opération Téléthon, qu'on cesse de raconter des stupidités, de gens qui n'ont même pas regardé l'émission, qui taxent cette émission de misérabiliste. Mais non ! c'est pas misérabiliste. On montre des gosses qui sont atteints de maladies génétiques et on essaye de construire les outils pour les guérir. On n'a pas d'autres solutions que de faire cela.

On achève les chevaux. On n'achève pas les hommes, alors puisqu'on est là pour faire un passage sur cette époque, dans cette planète, essayons d'être utile et de faire en sorte qu'on ne livre pas à ceux qui nous suivent ce qu'on a, nous, rencontré, c'est-à-dire pour les maladies génétiques et, plus particulièrement, en ce qui me concerne, mon cas particulier, les myopathies, une médecine qui n'avait pratiquement pas de recherche, très peu de médecine, pas d'enseignement. Essayons de faire en sorte qu'on puisse apporter un plus aux gens qui nous suivent et qu'ils ne retrouvent pas la situation comme nous, nous l'avons trouvée. Un petit pas chacun, selon sa génération.

Pour terminer, on n'a pas le choix. La thérapie génique, la génétique, que cela marche ou que cela ne marche pas, il y a derrière cela trop de souffrance humaine, il y a trop d'intérêts, d'intérêts au sens noble du terme, et au sens financier aussi, pour que notre génération n'essaye pas de vérifier. On a l'obligation de le faire. On ne peut pas faire autrement. Si on ne le fait pas, d'autres le feront et nous serons absents de ce discours. Nous nous interdirons de parler.

Pour que la France puisse prendre la parole en Europe ou dans le monde sur les problèmes d'éthique, il faut qu'elle ait des troupes instruites. Il faut que ses scientifiques aient la pratiques. Il faut qu'ils aient des opinions et des propositions, et pour cela, il faut qu'ils aient les moyens de le faire.

Il n'y a pas d'autres motivations dans cette opération que de vous dire d'abord "Merci à vous qui nous avez aidés scientifiquement. Merci à la presse qui nous a soutenus et qui continue à nous soutenir" et puis vous assurer et vous donner simplement notre parole qu'une organisation comme la nôtre ne déviera pas de la route qui lui a été fixée par son conseil d'administration, garantie d'honnêteté, d'intégrité parce que le soir, quand les militants de chez nous rentrent chez eux, il y a le gamin qui a attendu toute la journée que le père ou la mère rentre et que cela vaut largement, dans l'esprit des gens, un contrôle de la Cour des Comptes ou l'analyse d'un Commissaire aux comptes. C'est simplement l'étalonnage de ce qu'on a fait dans la journée, est-ce que cela été possible ? est-ce que c'est possible avec cela d'aider cet enfant ? est-ce que c'est utile ? et est-ce que j'ai fait le maximum ?

C'est tout. Merci.

 

Hélène CARDIN

Merci Bernard BARATAUD et bon Téléthon.

Le Président BOYON, le Président de Radio France va vous dire un petit mot.

 

Michel BOYON

Il y a une chose qui faut dire, Hélène CARDIN, qui est aussi importante que ce qui a été dit, et naturellement nous ne pouvons que souscrire à tous les propos scientifiques, politiques, médiatiques ou les propos du coeur qui ont été tenus à ce micro, c'est que tout montre que cette journée a été une réussite, y compris dans les débats ou dans les contestations auxquelles elle a donné lieu.

Pour nous, c'est un encouragement et un encouragement très simple, un encouragement à vous donner rendez-vous, l'année prochaine pour les "Deuxièmes Rencontres Internationales de la Génétique", si l'AFM le veut bien.

 

Hélène CARDIN

C'est une très bonne idée et une très bonne nouvelle. Merci. Bonne soirée.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

4. Analyse & Conclusion

 

 

Nous avons lu tous les documents ci-dessus, afin d'en faire une synthèse. Après cela, nous nous sommes efforcés de répondre aux différentes questions que nous nous étions posées au début de ce modeste rapport

Certaines maladies sont causées par le mauvais fonctionnement de certains gènes (I), provoquées parce que ces derniers produisent en insuffisance des protéines (substances nécessaires au bon fonctionnement de l'organisme (I)).

La thérapie génique consiste en la correction des défauts des gènes fonctionnant mal (I), en plaçant dans la cellule un gène sain qui remplacera celui qui est défectueux (I). Pour cela, on utilise des vecteurs (II) (définition : ce qui véhicule quelque chose (vient du verbe latin vehere, je transporte)

Il existe deux formes de thérapie génique : somatique et germinale.

 

- Somatique : modifie le code génétique des cellules non sexuelles. La transformation n'est donc pas transmise de génération en génération. Aujourd'hui, seule cette forme de thérapie génique est autorisée (I).

 

- Germinale : modifie le code génétique des cellules sexuelles. La modification est donc transmise à la descendance (I)

C'est dès 1978, date de l'isolement des premiers gènes humains, que l'on a procédé à l'identification de plusieurs d'entre eux, nous permettant de mieux les connaître et les comprendre (I).

Dans un futur lointain, les chercheurs espèrent pouvoir traiter l'organisme tout entier à l'aide de la thérapie génique. Il faudra alors injecter les gènes des vecteurs correcteurs directement dans le sang des patients. Resteront ensuite à ces vecteurs à trouver leurs cellules cibles afin d'introduire le gène thérapeutique.

La thérapie génique ne peut s'appliquer juste après la conception, et non pas l'organisme développé (IV) parce qu'après il serait trop tard (les défauts dus aux erreurs de certains gènes se seraient déjà répercutées sur le corps (cf. cours)).

La première étape consiste en l'identification de la cellule malade et de son ADN (III). Il faut ensuite introduite le gène correcteur :

 

- ex vivo (III) ou in vitro (IV). Technique s'appelant plus précisément thérapie cellulaire, principe : prélever la cellule porteuse d'un gène défectueux, y introduire un gène correcteur et réinsérer la cellule modifiée dans l'organisme

 

- in vivo (III) Technique s'appelant plus précisément thérapie génique, principe : est appliquée directement dans l'organisme (III) soit injectée soit inhalée par aérosol (II). Le gène correcteur est ainsi directement placé dans le tissu musculaire atteint.

 

Différentes méthodes pour introduire le gène dans la cellule atteinte :

 

Effets au cúur de la cellule (II) :

  • Son défaut : elle suscite une grande action immunitaire (II), qui pourrait éventuellement détruire le virus (IV).
  • Son défaut : - le gène correcteur s'exprime souvent trop faiblement (II)
    •  
    • le vecteur ne dépose pas toujours le correcteur dans la cellule désirée, ce qui peut provoquer des effets physiologiques dangereux (I)
  • La thérapie génique permet :

    •  
    • d'immuniser contre des maladies génétiques dues à ce que la cellule ne parvenait pas à produire certaines protéines (IV)

       

    • de corriger des anomalies génétiques (IV)

       

    • de soigner et de traiter des maladies graves telles la muscoviscidose, la dystrophie, (pour soigner cela, on remplace les gènes) (II) voire même le cancer, (II) le diabète (III) ou même le S.I.D.A (I) (pour soigner ceci, on augmente le nombre de gènes (VI)).

    Arrivés à un ce point culminant de notre modeste rapport, nous pensons qu'il est nécessaire d'en accorder une petite partie aux problèmes éthiques que soulève la thérapie génique :

    - A-t-on le droit de donner des espoirs et de promettre un avenir aux malades souffrant d'une maladie génétique actuellement incurable pour laquelle la recherche dans le domaine de la thérapie génique n'a encore trouvé aucun remède ?

    - A-t-on le droit d'intervenir sur un embryon et de gommer ainsi la nature qui est extrêmement bien faite, nous n'avons pas besoin de la prouver ? Si certaines choses sont telles qu'elles sont, est-ce à l'homme d'intervenir en les modifiant sous prétexte qu'il ne les apprécie pas ? D'un autre point de vue, peut-on laisser naître un enfant alors qu'on sait qu'il est atteint d'une maladie génétique et qu'il souffrira peut-être atrocement

    - La thérapie génique compte beaucoup d'aspects positifs seulement si l'homme est capable se s'imposer lui-même des limites, ce dont nous pouvons douter, vu l'aspect actuel du monde. Si l'on s'en tient purement et simplement à l'usage de cette technologie pour soigner des gens, la thérapie génique serait tout à fait acceptable et même la bienvenue mais si l'on franchissait un jour cette limite, on en arriverait peut être à l'abus de la médecine génétique et au Brave New World de Aldous Huxley

    Pour conclure, nous allons tenter d'exposer notre avis, tout en gardons en tête que nous ne pouvons encore avoir une opinion concrète de tous les aspects positifs et négatifs, (par-là, nous évoquons les deux opinions que peuvent avoir des adultes tels les professeurs de biologie qui sont évidemment les mieux renseignés à ce sujet) engendrés par la thérapie génique, vu notre jeune âge. Nous sommes donc pour la thérapie génique mais sous certaines conditions : il y a des limites qu'il ne faudrait pas franchir pour éviter une société de fourmis ! (Cf. Les fourmis de Bernard Weber

    5. Bibliographie
    1. www.geocities.com/CapeCanaveral/Lab/8807/index.html
    2. www.afm-telethon.asso.fr/guerir.htm
    3. www.evariste.anvar.fr/100tc/1996/f021.html
    4. www.ens.lyon.fr/~amoreau/jde/genetique.html
    5. La Recherche, mai 1996
    6. A. Peyrefitte, C'était de Gaulle, p. 58, Editions de Fallois/Fayard, 1994.
    7. T. Friedmann, Nature Medicine, 2, 144, 1996.
    8. Alper, J. Brit. Med. J., 312, 196, 1996.
    9. B.C. Grubb et al. , Nature, 371, 802, 1994.
    10. M.R. Knowles et al. , New Eng. J. Med. , 333, 823, 1995.
    11. J.R. Mendell et al. , New Eng. J. Med. , 333, 832, 1995.
    12. " Gene Therapy's Growing Pain ",. Special news Report, Science, 269, 1050, 1995.
    13. Médecines/Sciences, janvier 1996.

      La Recherche a publié :

      -(I) " Les médicaments de l'esprit ", octobre 1995.

      -(II) " Thérapie génique et infarctus ", avril 1995 ;
      " Les espoirs de la thérapie génique ", novembre 1994;

      " Des virus pour greffer les gènes ", novembre 1994 ;

    14. " Peut-on guérir la mucoviscidose ? ", novembre 1994 ;

      " La greffe de gène n'est pas sans risque ", nov. 1994.
      -(III) " Le cancer résiste à la science ", février 1996.

    15. www.smis.ch/Ims/080797b.htm
    16. Radio-France
    6. Remerciements

     

    Nous tenons à remercier tout particulièrement Michel Strubin, que nous n'avons malheureusement pas pu rencontrer, mais qui nous a quand même aidés.